tag:blogger.com,1999:blog-33884489509600196582024-03-13T20:10:35.664+01:00Les nuits et les jours de France CultureLes nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.comBlogger30125tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-81326299789001980592020-03-14T16:12:00.000+01:002020-03-14T16:37:44.793+01:00René Peter à propos de Marcel Proust : Un homme, une oeuvre (1947) <div style="text-align: justify;">
<a href="https://drive.google.com/file/d/1uPFtK8eMh7p5lc-BFyRQll9TSIDs-Luw/view?usp=sharing" target="_blank"><b>>>> Télécharger le PDF</b> </a>de ce post (3 pages texte)<br />
<br />
Des recherches m’ont récemment permis d’accéder à quelques émissions radiophoniques sur et autour de l’oeuvre de Marcel Proust. L’une d’entre elles intitulée <i>Un homme, une œuvre, Marcel Proust</i> datée du 01 décembre 1948, et diffusée sur la chaîne nationale, est dépourvue de notice documentaire sur le site de l’Ina. Sans générique de début ni de fin, elle fait se succéder les témoignages de trois hommes contemporains de Marcel Proust qui racontent, texte à l’appui, leurs souvenirs avec l’écrivain. Mais aucun d’entre eux n’est annoncé au micro.<br />
<br />
Grâce à google livres, deux des trois témoins sont aisément identifiables. Il s’agit de Fernand Gregh (1873-1960), et de Georges de Lauris (1876-1963). Si Fernand Gregh est coutumier des interviews radiophoniques vers la fin de sa vie, <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/la-nuit-revee-de/la-nuit-revee-de-marie-etienne" target="_blank">notamment pour parler de Marcel Proust</a>, l’intervention de Georges de Lauris semble en revanche unique dans les archives de la radiodiffusion.<br />
<br />
Le dernier témoin de cette émission (mais le premier à s’exprimer) est René Peter (1872-1947). Son texte, <i>a priori</i> inédit, est le seul que j’ai choisi de retranscrire ci-dessous dans la mesure où ceux de Fernand Gregh et de Georges de Lauris ont été publiés respectivement dans <i>Mon amitié avec Marcel Proust </i>(1958) et <i>Souvenirs d’une belle époque</i> (1948). <br />
<br />
Enfin, et vous l’avez peut-être déjà remarqué, un doute demeure quant à la date d’enregistrement de l’émission (01 décembre 1948), incompatible avec la date de mort de René Peter (1947). </div>
<a name='more'></a><div style="text-align: justify;">
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***</div>
</div>
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<br /></div>
<div style="text-align: center;">
<i>Transcription du texte de René Peter</i></div>
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<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Parler de Marcel Proust, de cet homme prodigieux, et parler peu, cela paraît une gageure. Enfin, nous allons essayer. Malgré une différence d’âge sensible surtout dans les années de la jeunesse, je puis dire que j’ai connu Marcel depuis toujours. Son père était comme le mien professeur à la faculté de médecine, d’où des rapports forcés entre parents qui amenèrent notre connaissance. Je le perdis pendant quelque vingt ans de vue et le retrouvai souffrant déjà de son asthme. Longtemps je crus qu’il y avait dans ce martyr une dose légère d’affectation, le soin précoce de s’affirmer par une vie rare et recluse, n’apparaissant aux yeux du monde qu’à l’heure où les fêtards se vont coucher. </div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Il ne s’aventurait au dehors que garni d’une triple armature d’ouate hydrophile, d’habits épais, de lourds manteaux parfois superposés, cols relevés jusqu’à lui cacher le visage. Et je croirais assez volontiers que cet excès de précaution fut pour beaucoup dans l’aggravation constante et progressive de son mal. Il vivait cloîtré dans la pharmacie, dans les inhalations, les fumigations, les pilules et autres meurtriers remèdes qu’on s’efforçait à lui déconseiller. Mais son doux entêtement, ses quintes infinies savaient avoir hélas raison de tout. Reynaldo Hahn disait : « Marcel a de l’asthme comme personne. Et Marcel mit près de trente ans à nous le prouver. » Il savait – il n’en prenait d’ailleurs nul souci – que certains le blaguaient sur ce style si particulier qui fut le sien, fait enchevêtrements, de digressions et d’incidentes. « Marcel, risquais-je un soir, j’ai commis hier un quatrain sur vous. _ Voyons-le mon ami, et de tendre l’oreille. » Et moi de réciter cette petite épigramme, qui eut depuis, je le dis sans modestie, le prix au concours du dîner au quatrain :</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i>Proust écrivain frileux, de crainte des malaises, </i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i>porte été comme hiver, pelisse d’astrakan, </i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i>depuis que torturé d’un qui, d’un quoi, d’un quand, </i></div>
<div style="text-align: justify;">
<i>il prit un courant d’air entre deux parenthèses</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Pauvre Marcel, il aimait qu’on lui dise ses folies. Il me sourit avec complaisance, de son beau sourire large et pensif où il y avait toute la poésie d’un soir d’automne. Il était accueillant à tous et d’une bienveillance égale aux nuances près. En général, il ne retenait les visiteurs que quelques minutes en raison toujours de son asthme qui l’épuisait. « Vous m’excusez cher ami, mais je souffre atrocement ce soir. Je vais appeler Félicie pour vous reconduire. Félicie ! » Pas de réponse. Il tire alors de son alcôve une longue badine dont il frappe la porte en face de lui, à petits coups secs et nerveux. Comme le visiteur s’étonne : « c’est ma manière de sonner, figurez-vous. La vraie sonnette est un tintamarre effroyable. On l’entend d’ici. Cela vous prend jusque dans le fond de la gorge. Félicie ! Il faut qu’elle soit sourde. Pauvre fille. Elle m’est si dévouée. Mais elle vieillit, hélas. Ah ! que deviendrais-je quand Félicie ne sera plus là ! Manière de parler du reste, car vous voyez que Félicie n’est jamais là.. Félicie ! »</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
J’ai de lui des lettres à l’infini. Mais le temps manque, et nous avons dit : pas de longueur. J’en prends une au hasard, une seule, pour aujourd’hui. Elle n’est pas une des plus profondes, mais elle contient toute l’inquiétude qu’il ressentait, même pour des futilités. </div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
« René, <br />
<br />
Promettez-moi de me répondre en amitié, c’est-à-dire sans mensonges et sans réticences, car je n’ai pu dormir de toute la matinée, tant j’avais l’esprit tourmenté. Vous souvient-il, que l’autre soir, chez Weber, au moment de nous retirer, comme le café faisait sa fermeture et que l’on était bousculé, j’ai tendu, voulant malgré vous régler les consommations, une pièce de 10 francs au garçon. Il y en avait, si ma mémoire ne me trahit point, pour 2 francs ou 2 francs 50, et j’ai laissé le complément pour le pourboire. Il me semble que c’est raisonnable, et le garçon parut content sur le moment. Mais, c’est ici que j’appelle toute votre attention, je l’ai vu dans l’instant que nous nous retirions, causer à voix basse avec un de ses collègues et nous regarder d’une drôle de façon. Je me suis demandé pourquoi sans vous rien dire tant la chose pouvait paraître insignifiante, lorsque rentré chez moi, je me souvins que quelques jours auparavant j’avais laissé pour une somme à peu près identique, justement à l’autre garçon le même appoint mais sur une pièce de 20 francs et non de 10, ce qui constituait un pourboire infiniment plus appréciable en proportion. J’avoue n’avoir dans la seconde circonstance pas établi le rapprochement sinon, assurément, je me fusse gardé du geste involontairement parcimonieux dont je n’aurais d’ailleurs, je l’avoue, conçu nul remords si l’incident que je vous signale ne s’était pas produit. J’ai l’intention de réparer un prochain soir, si toutefois vous me le conseillez, car peut-être mieux vaut-il ne pas accuser le coup. Encore une chose sur laquelle je vous prierai de réfléchir, ce qui me tourmente, c’est, ne pouvant douter que les deux garçons ont fait des commentaires ensemble, l’idée que le second, sur les informations du premier a pu se croire l’objet de quelque malveillance à laquelle je vous le jure, j’étais bien loin de songer. Je me figure, et je suis même convaincu qu’il a interprété comme un blâme implicite ce qui n’était de ma part que pure distraction, cela je ne le voudrais pour rien au monde car faire de la peine à plus humble que soi constitue la pire muflerie, la plus dégoutante lâcheté. Pensez-vous qu’il en a été jugé ainsi Ô mon ami ? Dites le moi sans ménagement et sans détour que je puisse primo rassurer ce brave homme et secundo le compenser. J’attends fiévreusement votre réponse. »<br />
<br />
Marcel était là tout entier. Le remords d’une action qu’il n’avait point commise mais dont on avait pu le croire capable et s’affliger, lui était plus intolérable que l’idée de la maladie et de la mort.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: center;">
***</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
La lettre lue ci-dessus a été publiée dans <i>Une saison avec Marcel Proust </i>(2005)</div>
Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-53732500364692721962019-05-06T23:40:00.003+02:002019-10-03T19:48:38.367+02:00Re-vivre sa vie : La montre magique (1949), Les mardis du cinéma (1997), Mauvais genres (2014), Cinéma vérité (1968)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b><a href="https://drive.google.com/open?id=1i-2MhHWvBeQhdm_zu083iougxJULgGMK" target="_blank">>> Télécharger le PDF</a></b> de ce post (11 pages, texte et images)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdbecrSlgO7SxCxQyTMPIXS4ERSqbxkc2K9YlWD9nKIsntqvlgh49zCWQ05uxLvD8p68ea2dv4i1IJqMosmWKOIZb3qeQtys4tFdyFiOn7j-FIe7RUeKgh0l7iTS72JFzVnbSvO18oFggL/s1600/image+1.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="513" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdbecrSlgO7SxCxQyTMPIXS4ERSqbxkc2K9YlWD9nKIsntqvlgh49zCWQ05uxLvD8p68ea2dv4i1IJqMosmWKOIZb3qeQtys4tFdyFiOn7j-FIe7RUeKgh0l7iTS72JFzVnbSvO18oFggL/s1600/image+1.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogramme de <i>Je t'aime je t'aime</i>, d'Alain Resnais (1968). Claude Ridder (Claude Rich) devant trois montres : « Une course de temps : le temps du bureau contre le temps du dehors. _ Et qui gagne ? _ Je ne sais pas encore. » (32'21'')</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: right;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Faire pause. Revenir en arrière.
Et vivre à nouveau, en connaissance de cause, une minute ou vingt années de passé. Rien de plus merveilleux... Mais « se réveiller dans un autre temps, c’[est] naître une seconde fois adulte. Le choc [est] trop fort. » (8'08'') dit la voix off du film <i>La jetée</i> réalisé par Chris Marker. Cette citation pourrait résumer tout ce qui va suivre. À partir de la fiction radiophonique<a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/la-montre-magique-1ere-diffusion-27061949-chaine-nationale-0" target="_blank"> <i>La montre magique</i></a><span style="font-style: normal;"> (première diffusion le 27 juin 1949) qui expose les
pérégrinations d’un homme condamné à revivre sa vie depuis l’enfance, j’ai
entrepris de comparer plusieurs types de voyages dans le temps, au cinéma. Dans
la mesure du possible, les films abordés sont corrélés à des archives
radiophoniques les concernant.</span></div>
<a name='more'></a><br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
L’histoire de <i>La montre
magique</i><span style="font-style: normal;"> (scénario de Pierre Scize et
Jean-Paul Le Chanois) prend place au milieu de la forêt alsacienne, un soir
d’orage, dans </span><i>une maison qui a connu le malheur</i><span style="font-style: normal;">. Sa tenancière Lisebeth y vit seule avec le souvenir
d’un mystérieux Frantz, </span><i>un enfant qui a grandi ici mais qui n’était
pas le mien</i><span style="font-style: normal;">. Un tel cadre pourrait rebuter n’importe quel visiteur de passage. Mais
pas notre narrateur qui se laisse accueillir nonobstant les mises en garde successives.
<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Alors qu’il s’enquiert du passé
de la demeure, son attention est soudainement attirée par une montre <i>de ces
vieux modèles qu’on appelait oignon</i><span style="font-style: normal;">. Le
cadran brisé, posée </span><i>sur un petit socle de velours rouge</i><span style="font-style: normal;">, </span><i>ses deux aiguilles</i><span style="font-style: normal;"> [sont] </span><i>semblables à deux serpents ou à
deux éclairs de foudre, et en place des signes habituels de l’heure</i><span style="font-style: normal;"> [sont représentés]</span><i> les douze symboles du
zodiaque</i><span style="font-style: normal;"> (11’59’’). Il n’en faut pas plus
au narrateur pour la prendre dans ses mains et faire basculer le récit dans une
dimension surnaturelle. Soudainement, le tic-tac déréglé de la montre renaît et
une mystérieuse voix féminine en émerge : </span><i>« Pitié, je
n’avais rien fait de mal. Pourquoi ne m’as-tu pas laissée vivre ? » </i><span style="font-style: normal;">L’intervention de Lisebeth rompt le charme mais la
brèche est ouverte. Une deuxième histoire commence à l’intérieur de la
première. Elle plonge de plain-pied l’auditeur quinze ans auparavant dans la
vie de Frantz Christel à la veille de son mariage avec Émilie Satler. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Le récit commence sous de sombres
auspices. Frantz, qui vient de perdre son chien Mobsel fauché par un camion,
découvre au milieu de ses cadeaux de mariage un voile offert par Mathias, <i>l’amoureux
évincé</i><span style="font-style: normal;">. Ce riche présent lui met la puce à
l’oreille. Le soir-même il rend visite à son camarade d'enfance qui l’assure de sa
loyauté et pousse la politesse jusqu’à lui offrir une montre de famille... Elle </span><i>appartenait
au Comte de Lichtenberg</i><span style="font-style: normal;"> lui apprend-il. </span><i>_ Celui
qu’on a brûlé autrefois comme sorcier ? </i><span style="font-style: normal;">demande
Frantz mi-stupéfait mi-inquiet. Devant le rire de son ancien rival, le futur
marié reprend la route d’un pas léger non sans avoir remonté la montre. Pauvre
de lui ! En appuyant sur le poussoir, Frantz a enclenché sans le savoir la
marche arrière du temps. Désormais, les heures avancent à rebours de sa vie. Il
est 23h. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Puis 22h30...<br />
<br />
21h…<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Arrivé chez lui à 20h pour gagner
le lit, Frantz constate que <i>les aiguilles se sont mis à tourner à l’envers,
de plus en plus vite jusqu’à n’être plus qu’un halo bleuâtre. Par la fenêtre
ouverte, le ciel s’est éclairci, le jour est venu, puis la nuit.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Un crépuscule, une aube, une nuit se
sont succédé sans cesse plus rapide.</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>
Et le soleil devenu fou s’est mis à sillonner les airs sautant au plus haut des
nues, se levant à l’ouest et se couchant à l’orient. </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>Les jours et les saisons se succédaient
de plus en plus vite et la lune dans le ciel parcourait rapidement ses phases.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Frantz veut se débattre, se lever. Il
tire la couverture. La table de nuit bascule et la montre du Comte de
Lichtenberg roule et se brise. Tout s’arrête.</i><span style="font-style: normal;">
(28’50’’) Le héros émerge de ce cauchemar dans le corps d’un enfant de sept
ans. Vingt années se sont rembobinées. </span><i>Oui, Frantz n’était plus qu’un
tout petit garçon qui tremblait devant son père. Un petit garçon avec une
mémoire d’homme. Une voix de petit garçon et une voix intérieure qui résonnait
dans sa tête</i><span style="font-style: normal;">. (31’20’’) <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Revenu dans sa chambre familiale
plus vraie que nature, Frantz croit à un rêve. Bientôt, l’hallucination tourne
à l’émerveillement. Les objets sont intacts, les parents sont à nouveau
vivants, les figures sont rajeunies. Toute la difficulté consiste maintenant à
dompter ce « nouvel ancien présent » qui s’impose et à se couler le
plus naturellement possible dans la vie quotidienne d’alors. Mais la visite
soudaine de Mathias éclate la bulle enchantée. Enchaîné à Frantz par la montre
magique, il a voyagé dans le temps avec lui dans l’espoir maintenant avoué de
ravir à son ami d’enfance les faveurs escomptées d’Émilie. Comme si partir de
plus loin permettait d’infléchir la trajectoire du destin… <i>Si tu veux te
retrouver au jour d’hier, où tu étais si heureux à la veille de tes noces avec
elle,</i><span style="font-style: normal;"> dit Mathias,</span><i> il faudra pour
ça, mon cher Frantz, que tu remettes exactement tes pas dans ceux d’autrefois</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Il te faut revivre ta vie de la même
façon, sans en rien changer, mais en sachant à l’avance tout ce qui va
t’arriver</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>sans profiter de
ton expérience, ni de tes souvenirs. </i><span style="font-style: normal;">(…)</span><i>
À ce prix-là, tu te retrouveras tel que tu étais hier.</i><span style="font-style: normal;"> (38’07’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
L’expérience du voyage de Frantz
dans le temps confine peu à peu à la torture. Revivre sa vie le frustre.
L’avenir ne l’angoisse pas, il le désespère. Rien n’arrive car tout est déjà
arrivé. Par dépit, Frantz cède parfois à la tentation : il raconte le
futur ! Quand son père le moleste, l’enfant qu’il est alors redevenu n’hésite pas à se faire justice sous les oreilles affolées de Lisebeth. <i>Il
m’a battu ! Battu ! Battu avec sa canne.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Il mourra ! Il mourra demain !</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Il ira à la chasse au canard sauvage.
Son bateau se retournera sur l’étang. Il se noiera au milieu des nénuphars et
des roseaux !</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Je le
sais, oui je le sais !</i><span style="font-style: normal;"> (41’07’’)
Frantz sait aussi qu’il regrettera d’avoir « permis » la mort de son
père en ne l’empêchant pas. Même si le désoeuvrement le conduit à prononcer d’autres
mauvaises nouvelles, il tente une fois de conjurer le sort. À son médecin, ne
glisse t-il pas avec insistance : </span><i>Docteur, je vous aime bien.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Soignez bien</i><span style="font-style: normal;"> [votre fils]</span><i>. Rentrez vite chez vous, il
vous attend. </i><span style="font-style: normal;">(1h05’48’’) ?
Naturellement, en vain. Isolé, en proie au chagrin, seul le creux d’un arbre
recueille ses confidences quand le poids du secret devient trop lourd. </span><i>Ma
mère va mourir.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Je connaîtrai
le coupable d’un crime qui va se commettre et je ne pourrai le dénoncer à la
justice qui ne l’arrêtera que dix ans plus tard. Je ne pourrai prévenir le père
Coffel que sa grange va brûler. Ni Ludwig que la vendange d’une année tournera
au vinaigre. Je ne puis rien faire. Je ne puis rien dire.</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>Émilie est au bout de ce long silence.</i><span style="font-style: normal;"> (48’25’’) <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Année après année, Frantz perd le
goût de vivre. À plusieurs reprises dans l’histoire, son suicide est
sous-entendu quand il n’est pas directement évoqué. <i>Il y a des jours où j’ai
bien envie de me supprimer, de devenir un de ces morts qui sont là</i><span style="font-style: normal;"> [dans le cimetière]</span><i>, tranquilles. Dix ans
encore… Dix ans de bagne à tirer. </i><span style="font-style: normal;">(50’34’’)
Pour venir à bout de ce </span><i>long tunnel</i><span style="font-style: normal;">
qui l’accable, il cherche à savoir auprès de son médecin si une </span><i>drogue</i><span style="font-style: normal;"> existe pour tout oublier. Ici commencent les
rapports que je voudrais tenter entre la fiction radiophonique et quelques
films. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal">
<br /></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhhapwht7k2GKWEpQpvUn0Q2LRORI9Ue94XZy9pJ1soyP1R0qe4cYEf-FjLLLvU_UOm3mjnq2hSLJDVe-AHw7dNMZSoF5PbylDugeFMagxGmukztdsfZl77TOcuul_Xo3bMVfDIXyTym59i/s1600/image+2.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="226" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhhapwht7k2GKWEpQpvUn0Q2LRORI9Ue94XZy9pJ1soyP1R0qe4cYEf-FjLLLvU_UOm3mjnq2hSLJDVe-AHw7dNMZSoF5PbylDugeFMagxGmukztdsfZl77TOcuul_Xo3bMVfDIXyTym59i/s1600/image+2.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes d'<i>Eternal Sunshine of the spotless mind</i>, de Michel Gondry (2004). Joel Barish ensommeillé subit l'effacement de sa mémoire par un clinicien peu scrupuleux.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Partons de ce point : Frantz
veut faire table rase de l’avenir comme d’autres du passé. Dans le film de
Michel Gondry <i>Eternal sunshine of the spotless mind</i><span style="font-style: normal;"> (2004), une entreprise est justement dédiée à l’effacement
des souvenirs, la bien nommée </span><i>Lacuna</i><span style="font-style: normal;">.
À sa tête, des scientifiques purgent méthodiquement les résidus mentaux et
matériels des patients qui le demandent. Parmi eux, Joel Barish (Jim Carey) met
tout en œuvre pour oublier Clementine Kruczynski (Kate Winslet), son ancienne
petite amie. Le protocole qu’il suit est simple : relié par un casque à un
« neurologue » qui traite sa mémoire, Joel revisite en esprit tous
les moments qu’il a partagés avec Clémentine puis assiste à leur désagrégation
pour n’en garder finalement plus aucune trace. L’un d’eux remonte à l’enfance.
Tel que Gondry l’a mis en scène, Joel y apparaît sous les traits d’un petit
garçon adulte réfugié sous la table de la cuisine familiale. Dans l’espace du
décor, les échelles rendues contredisent le sens attendu des proportions. À
voir le personnage incarné par Jim Carrey tout à fait réduit, le spectateur a
l’impression que le mobilier qui l’entoure a triplé d’envergure mais aussi que
les adultes font figure de géants !</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhPXHGEvgBRGOgEMG8JOwc1bVev-YnTzhvoLbemD9XGxA7TRy7XbsvvoxT3v2v9THyb5AfezH1rizRM6iQsO6bI-eLEW3Jd0pOpySGeQ9Qq3WyxZGmn_jvGux5G46xHM4-CfHLQJyT8fqP0/s1600/image+3.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="228" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhPXHGEvgBRGOgEMG8JOwc1bVev-YnTzhvoLbemD9XGxA7TRy7XbsvvoxT3v2v9THyb5AfezH1rizRM6iQsO6bI-eLEW3Jd0pOpySGeQ9Qq3WyxZGmn_jvGux5G46xHM4-CfHLQJyT8fqP0/s1600/image+3.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes d'<i>Eternal Sunshine of the spotless mind</i>, de Michel Gondry (2004). Les deux âges de Joel (Jim Carey), ici avec Clementine (Kate Winslet). Le trucage élaboré dans cette scène est expliqué dans <a href="https://www.youtube.com/watch?v=r3ok1W-8Ds8" target="_blank">ce making-of à la septième minute</a>.<span class="Apple-style-span" style="font-size: 15px;"> </span></td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
À l’écran, Joel, un homme
d’environ 35 ans, navigue entre deux âges. Celui qui le désigne supposément
comme un enfant de 5 ans en proie aux caprices et soumis à l’autorité dans un
environnement hors de portée ; et celui qu’il a réellement quand il est rejoint
sous la table par Clementine qui fait jeu égal avec lui. Toutefois, dans cette
séquence assez brève, jamais le personnage qui se souvient ne concorde avec le
territoire de son souvenir (sauf une fois où Jim Carrey est vraiment remplacé
par un enfant sous la table). Un décalage visuel spectaculaire subsiste. Il
rappelle celui de Frantz dans <i>La montre magique</i><span style="font-style: normal;"> capable à la fois de respecter l’âge de la voix qu’il est supposé
avoir aux yeux des autres enfants que de reprendre sa voix d’homme quand il
s’adresse à son compagnon de route Mathias. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEilR4VjFaIjkiP1NKkElvuoF_EJZlyclbG0iMlm78TnQ9gMU5mJqkQXphQIqpvId9e9DAJ-4tFYAVOJRrqPJ9hrCNj2JBvRYuWwIRF8r5_mQZ6T-IGB59x8MTY2xmH4SxWo-0u3utMyYNLH/s1600/image+4.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="230" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEilR4VjFaIjkiP1NKkElvuoF_EJZlyclbG0iMlm78TnQ9gMU5mJqkQXphQIqpvId9e9DAJ-4tFYAVOJRrqPJ9hrCNj2JBvRYuWwIRF8r5_mQZ6T-IGB59x8MTY2xmH4SxWo-0u3utMyYNLH/s1600/image+4.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes de <i>Peggy Sue s'est mariée</i> de Francis Coppola (1986). À gauche, Peggy Sue (Kathleen Turner) assiste au gala des anciens étudiants. À droite, son arrivée dans le passé paraît tout aussi invraisemblable que sa tenue de soirée dans les couloirs du College. Mais personne ne semble y prêter attention.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Cette même cohabitation des temps
se retrouve encore dans le film de Francis Coppola <i>Peggy Sue s’est mariée</i><span style="font-style: normal;"> (1986) où l’héroïne réussit l’exploit de remonter
vingt années de sa vie sans abriter le moindre rajeunissement (ni doublure, ni
maquillage). Ici comme dans les autres histoires, le spectateur est invité à
épouser le point de vue intérieur de la protagoniste qui reste exactement la
même en dépit des renversements extérieurs. Grâce à cet anti-trucage, Coppola
fixe une ligne de partage entre les époques et traduit le surplomb avec lequel
Peggy Sue revit son passé. Deux effets consécutifs s’en dégagent. D’un côté, le
temps de l’adolescence retrouve un lustre proprement inédit (les voitures
brillent, la jeunesse frappe) qui émeut l’héroïne. De l’autre, le passé sous
ses aspects rétrogrades surgit avec plus d’évidence dans les propos
contemporains de la voyageuse qui ne craint pas de dépareiller (voir sa tenue
de soirée au sortir du voyage dans le temps). Le constat dressé par Peggy Sue
est de ce point de vue souvent mordant. Elle se moque par exemple de son père
qui achète une nouvelle voiture, demande à sa mère de cesser les tâches
ménagères, tourne en ridicule les déclarations de son petit ami, saisit
l’occasion d’un adultère, bref juge selon des critères inhabituels. Ce faisant,
elle tente de déconstruire les stéréotypes américains des années 1960.</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjeDaPg2T9f7EguwHSW1Ah50Cjkh43nNZXiIMWNXbsBSfjbag0y4mG4uwZ9xDq2Qv_qDkngZ08PqYd_QDOiTILURwuuVF-nKUV-ZOH0DcNbTQEOA5YMG2zJJU5Bo9N16sGrXyPTIlqG2o89/s1600/image+5.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="229" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjeDaPg2T9f7EguwHSW1Ah50Cjkh43nNZXiIMWNXbsBSfjbag0y4mG4uwZ9xDq2Qv_qDkngZ08PqYd_QDOiTILURwuuVF-nKUV-ZOH0DcNbTQEOA5YMG2zJJU5Bo9N16sGrXyPTIlqG2o89/s1600/image+5.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes de <i>Peggy Sue s'est mariée</i> de Francis Coppola (1986). À gauche, pour représenter la fascination de Peggy Sue devant ce passé flambant neuf, Coppola s'arrête sur quelques détails (voitures, bâtiments). À droite, la protagoniste est proprement stupéfaite de revoir sa petite soeur en vie (jouée par Sofia Coppola)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans une émission des <i>Mardis
du cinéma</i><span style="font-style: normal;"> consacrée aux films moins exposés
de Francis Coppola produite par Arnaud Laporte (première diffusion le 13 mai
1997), le critique de cinéma Thierry Jousse revient pendant quelques minutes
sur la charge souterraine que le cinéaste adresse à son époque dès les
premières minutes de son film. </span><i>Il y a un paradoxe avec lequel Coppola joue très
bien, c’est qu’on voit que</i><span style="font-style: normal;"> [Peggy Sue]</span><i>
n’est pas jeune pendant tout le film. Elle est censée avoir 18 ans et c’est
Kathleen Turner</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>qui a évidemment
au moins 15 ans de plus</i><span style="font-style: normal;"> [qui l’interprète]</span><i>.
Ce corps étranger à l’intérieur de son propre milieu </i><span style="font-style: normal;">[renvoie au thème] </span><i>de l’inadaptation</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>. </i><span style="font-style: normal;">[Celui-ci
s’éprouve dans]</span><i> une forme que Coppola a expérimentée à quelques
reprises, </i><span style="font-style: normal;">[à savoir celle] </span><i>du
conte de fées. Non pas la féerie pour la féerie, mais la féerie dans l’Amérique
la plus minable d’une certaine façon. D’emblée, on est dans un pessimisme noir,
contrairement</i><span style="font-style: normal;"> [aux apparences] </span><i>puisqu’on
a plutôt l’impression que c’est un film</i><span style="font-style: normal;"> (…)
</span><i>assez gai</i><span style="font-style: normal;"> [presque une] </span><i>comédie</i><span style="font-style: normal;">. </span><i>Mais toute la description de cette fête,
avant que le temps s’inverse</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>,
qui dure une bonne vingtaine de minutes</i><span style="font-style: normal;">
[où]</span><i> d’anciens élèves vieillissant sont confrontés aux photos de leur
jeunesse</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>- avec le
coté : qui a réussi, qui n’a pas réussi - c’est absolument terrifiant. Il
y a vraiment une vision quasiment cauchemardesque de cette Amérique-là.</i><span style="font-style: normal;"> (…). (1h15’15’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhTV_epzLCusJcKWhJ1kqbY-bEwOe99RlBdSzME8HLib69SA8NcOgeHFhUGK4mx1NShKXowP1GnVdEpcqUgUMCWfoEioyC8kzRLn92RzgkTTcQDulyHAACYaa-Gp26dNgFhvMPm_upsuKSR/s1600/image+6.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="229" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhTV_epzLCusJcKWhJ1kqbY-bEwOe99RlBdSzME8HLib69SA8NcOgeHFhUGK4mx1NShKXowP1GnVdEpcqUgUMCWfoEioyC8kzRLn92RzgkTTcQDulyHAACYaa-Gp26dNgFhvMPm_upsuKSR/s1600/image+6.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes de <i>Peggy Sue s'est mariée</i> de Francis Coppola (1986). À gauche, Peggy Sue (Kathleen Turner) est sous le choc de son voyage. Son dédoublement dans le temps est représenté par les reflets infinis du miroir. À droite, l'héroïne dans la salle de biologie raconte le futur à son camarade Richard Norvik (Barry Miller)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Raccordons les propos de Thierry
Jousse à un exemple amusant du film. À l’instar de Frantz dans <i>La montre
magique</i><span style="font-style: normal;"> qui distille des prophéties sans
jamais être pris au sérieux, Peggy Sue prend plaisir à raconter quelques faits
du futur (bébés-éprouvette, greffe cardiaque, marche sur la lune). Parmi ses
camarades de classe, Richard Norvik se laisse exceptionnellement convaincre par
ces probantes prédictions (il étudie les sciences). Mais son petit ami Charlie
est plus circonspect, représentant en cela la méfiance du plus grand nombre.
Quand Peggy Sue lui tend les paroles de la chanson </span><i>She loves you</i><span style="font-style: normal;"> des Beatles (</span><i>It will be a hit I
promess !</i><span style="font-style: normal;"> dit-elle), le musicien
déforme le refrain faute de comprendre comment sonne une bonne chanson. Il en
va de ce tube comme de l’époque. Les grands-parents mis à part, personne ne
reçoit avec évidence la lutte de Peggy Sue contre le conservatisme et la
pudibonderie de son temps. Preuve que la connaissance de l’avenir ne facilite
en rien sa réalisation.</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div align="center" class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Poursuivons la comparaison de <i>La
montre magique</i><span style="font-style: normal;"> avec le cinéma et descendons
les quelques marches qui séparent Joel Barish (</span><i>Eternal sunshine of
the spotless mind</i><span style="font-style: normal;">) de Claude Ridder, le
personnage principal du film </span><i>Je t’aime je t’aime</i><span style="font-style: normal;"> mis en scène par Alain Resnais (1968). Alors que le
premier rejoue au bord de la conscience les épisodes de sa vie amoureuse dans
l’espoir de les éradiquer, le deuxième accepte de renouer avec une minute de sa
vie passée pour revivre les fragments d’une passion malheureuse. Mais dans les
deux cas, les processus déraillent en cours d’expérience. Si les deux
personnages consentent à livrer leurs corps à la médecine, leurs activités
cérébrales déjouent tous les calculs. Joel, depuis son état comateux, lutte par
exemple régulièrement contre son double immergé dans les profondeurs de sa
mémoire qui veut sauver de l’oubli quelques souvenirs passés avec Clementine.
Quant à Claude, sa téléportation dans le temps est déréglée par l’intensité
psychique avec laquelle il réinvestit sa vie en saccades. Si bien qu’au lieu
d’accéder à une minute de passé, il multiplie les effractions dans son ancienne
vie. <o:p></o:p></span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhARhdFMgNUPjlWtN61TMgsUGCJ2UTcoGtKfC-eusGUy9pEH3gfEXLeMbAfYCaajL8VR_TFKzfh0RF3k9UJZc962bEBNr5XVMMlenFsV7vUQjfzNWB4LR1Hfz-AZ1uVLCdu2XIVOwncRxdf/s1600/image+13.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="256" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhARhdFMgNUPjlWtN61TMgsUGCJ2UTcoGtKfC-eusGUy9pEH3gfEXLeMbAfYCaajL8VR_TFKzfh0RF3k9UJZc962bEBNr5XVMMlenFsV7vUQjfzNWB4LR1Hfz-AZ1uVLCdu2XIVOwncRxdf/s1600/image+13.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes de <i>Je t'aime je t'aime</i>, d'Alain Resnais (1986). Claude Ridder (Claude Rich) entouré de savants découvre la capsule (aux formes toutes maternelles) qui va permettre son voyage dans le temps. </td></tr>
</tbody></table>
<br /></div>
<div style="text-align: left;">
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Sans doute, ces entorses aux
programmes scientifiques décrivent le degré d’affectivité inhérent au voyage
qui empêche le sujet (cobaye, victime ou candidat) de parcourir sa vie comme un
visiteur de musée. L’homme qui traverse les âges n’a rien d’un touriste. Tout
au contraire, c’est un acteur malgré lui, « plongé » sans ménagement
dans un passé à la fois connu et nouveau qui actualise ses souvenirs révolus, et
bouleverse par suite sa mémoire du temps présent (Cf. les courts-circuits
machiniques). C’est précisément ce qu’explique Pierre Montebello à Raphaël
Enthoven, dans une émission intitulée « Deleuze va au cinéma » (<i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/mille-deleuze-15-deleuze-va-au-cinema" target="_blank">Les nouveaux chemins de la connaissance</a></i><span style="font-style: normal;">,
première diffusion le 13 juin 2011) où le film </span><i>Je t’aime je
t’aime est </i><span style="font-style: normal;">évoqué : </span><i>Toute la
conception du film consiste à montrer comment le rapport au passé<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>perturbe absolument la subjectivité</i><span style="font-style: normal;"> [de Claude Ridder]. (…) </span><i>Quand on tente de
remonter dans le passé, on est soudainement englué dans des nappes de passé,
dans une sorte de nébuleuse</i><span style="font-style: normal;"> [qui produit] </span><i>des
distancions, des manques de raccord, des difficultés à cohérer l’ensemble. </i><span style="font-style: normal;">(…) (15’30’’) Pierre Montebello fait ici directement
allusion avec le mot </span><i>nappe</i><span style="font-style: normal;"> à la
terminologie deleuzienne qui réfère au séminaire sur le cinéma intitulé
« Vérité et temps, La puissance du faux » (1983-1984). Reprenons à
notre tour le passage du philosophe pour tenter de préciser le développement
avorté de Pierre Montebello.</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZs-1twS-1CUea_7iROD1ZwNRUDtZY0elN8EvaGXN5h4H_J_HFyvCqXDx8EGJKo3T5XHagHrrkxX50gTEeUOaA5kIKx0ElxyM879vsAmYa-DOySu04Oe57nxlps73wC7iOAUcEA0YiXMDy/s1600/image+8.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="256" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZs-1twS-1CUea_7iROD1ZwNRUDtZY0elN8EvaGXN5h4H_J_HFyvCqXDx8EGJKo3T5XHagHrrkxX50gTEeUOaA5kIKx0ElxyM879vsAmYa-DOySu04Oe57nxlps73wC7iOAUcEA0YiXMDy/s1600/image+8.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes de <i>Je t'aime je t'aime</i>, d'Alain Resnais (1986). « Naître une seconde fois adulte » disait la voix off de <i>La jetée</i>. C'est exactement ce qui arrive à Claude Ridder (Claude Rich) quand il est censé revivre une minute de sa vie. Son arrivée dans le passé coïncide avec cette plongée sous-marine (liquide amniotique) qui dure vraiment une minute pile dans le film. </td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans son cours du <a href="http://www2.univ-paris8.fr/deleuze/article.php3?id_article=359" target="_blank">05 juin 1984 (2/3)</a>, Gilles Deleuze distingue le souvenir du passé en rappelant que le
souvenir se conserve en l’homme et le passé dans le temps. S’il veut revenir en
conscience sur un moment de sa vie, l’homme doit suivre deux mouvements. 1/ <i>Nous « sortons »
de nous-mêmes pour sauter dans une région du passé. Nous nous installons sur
une nappe</i><span style="font-style: normal;"> (i.e. une portion de temps). (…) </span><i>Nous
n’en avons encore aucun souvenir. Nous explorons cette région. </i><span style="font-style: normal;">(i.e. l’impression est confuse). 2/ </span><i>Si nous
trouvons ce que nous cherchons mais sous une autre forme - tout est question de
pressentiment</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>ou de
post-sentiment, alors tel point de la nappe de passé va s’actualiser dans une
« image-souvenir ».</i><span style="font-style: normal;"> (i.e.
coïncider avec la recherche lancée). (44’43’’) Le chemin qui mène l’homme à la
récupération du souvenir est à la fois direct et sinueux. Direct car </span><i>tout
mon passé coexiste avec soi et avec l’actuel présent</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i> à des degrés divers</i><span style="font-style: normal;">
(…). </span><i>Mon enfance, mon adolescence, mon état adulte et ma vieillesse
coexistent.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Il est vrai que
ces différents segments de passé se succèdent du point de vue de l’ancien
présent que</i><span style="font-style: normal;"> [ces sections] </span><i>ont
été.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Mais</i><span style="font-style: normal;"> [depuis] </span><i>le passé qu’elles sont</i><span style="font-style: normal;"> [devenues vis-à-vis de l’actuel présent],</span><i>
elles coexistent. </i><span style="font-style: normal;">(29’43’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Sinueux car <i>les nappes de passé
coexistantes </i><span style="font-style: normal;">[ne sont pas des]</span><i>
« images-souvenirs » </i><span style="font-style: normal;">[i.e. des </span><i>souvenirs
en voie d’actualisation</i><span style="font-style: normal;">]. Mais elles </span><i>les</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>rendent possible.</i><span style="font-style: normal;"> (35’50’’). Ce qui veut dire que les souvenirs ne
sont pas livrés « formés » par la mémoire de l’homme. Ils sont le
fruit d’une recherche dans le passé, d’un </span><i>tâtonnement</i><span style="font-style: normal;">, d’un aller-retour entre le présent qui </span><i>lance
une sonde</i><span style="font-style: normal;"> et le passé qui est fouillé. </span><i>Je
peux trouver ou ne pas trouver, peu importe</i><span style="font-style: normal;">,
dit Deleuze.</span><i> </i><span style="font-style: normal;">Tous ces éléments
adossés à la philosophie de Bergson introduisent précisément le développement
sur </span><i>Je t’aime je t’aime</i><span style="font-style: normal;">, </span><i>un
des films les plus profonds sur le temps</i><span style="font-style: normal;">,
dit-il. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhoYVYvjtmKlIgJ3IsK8j2E316HDcISYHGTcr3yf6MZO3uvoS7ks8TTwLg3DYM03hXQG43mBbXhIsCSvAal8_02_lkYzUb8hTwTpTY1b_s3WjDvYvapPnZ_ZDO-E__9zXmz30pHM-Df0q8K/s1600/image+9.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="256" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhoYVYvjtmKlIgJ3IsK8j2E316HDcISYHGTcr3yf6MZO3uvoS7ks8TTwLg3DYM03hXQG43mBbXhIsCSvAal8_02_lkYzUb8hTwTpTY1b_s3WjDvYvapPnZ_ZDO-E__9zXmz30pHM-Df0q8K/s1600/image+9.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes de <i>Je t'aime je t'aime</i>, d'Alain Resnais (1986). Au cours de son voyage dans le temps, Claude Ridder (Claude Rich) subit des allers-retours (apparitions-disparitions) réguliers vers le temps présent pour tenter d'échapper à son passé qui l'engloutit.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Deleuze concentre son attention
sur l’impossibilité de Claude Ridder de revivre une minute de son passé dans le
cadre scientifique imposé. <i>Je m’intéresse à la question : pourquoi la
souris</i><span style="font-style: normal;"> [qui est censée voyager à ses côtés]</span><i>
s’en sort-elle et pas l’homme ? </i><span style="font-style: normal;">(…)</span><i>
C’est-à-dire, pourquoi l’expérience des savants diaboliques ne pouvait-elle
valoir que pour la souris</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>?
S’ils avaient lu Bergson, ils auraient su que l’homme ne pouvait que détraquer
la machine.</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i> Ils auraient su
qu’un homme ne peut pas revivre un instant passé. Pas parce qu’il ne peut pas
revivre le passé. Mais parce qu’il ne peut pas revivre l’instant.</i><span style="font-style: normal;"> (55’49’’) Pour expliquer l’engrenage qui entraîne
Claude Ridder dans une mosaïque de moments épars, Deleuze pose que </span><i>tout
un instant</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>appartient à un
continuum</i><span style="font-style: normal;">, c’est-à-dire à </span><i>une
nappe de passé </i><span style="font-style: normal;">(<a href="http://www2.univ-paris8.fr/deleuze/article.php3?id_article=360" target="_blank">5 juin 1984 3/3</a>, 0’36’’)</span><i>.</i><span style="font-style: normal;"> Les étendues de passé véhiculant leur lot
d’instants, </span><i>l’homme ne peut pas</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>abstraire
un</i><span style="font-style: normal;"> [seul et unique] </span><i>instant</i><span style="font-style: normal;"> : il doit composer avec tous les événements
limitrophes qui le précèdent et qui lui succèdent. </span><i>Donc, c’est forcé que
les nappes de passé enrayent la machine et que le héros de</i><span style="font-style: normal;"> Je t’aime je t’aime</span><i> soit baladé de nappes
en nappes, qu’il ne puisse pas sortir de la machine</i><span style="font-style: normal;"> (0’59’’)</span><i>.</i><span style="font-style: normal;"> Autrement dit
une nappe de passé « appelle » toujours une autre nappe de passé, un
instant, un autre instant, suivant la logique du ricochet.</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiS1RTd4zykoGTVsQUb2fkfYeNcjzTPDRuG0Z1f_na6sENrkBuhpm-0a03k5ARJt68gbSC8nGasQ_w6vhPk68mNXPzw09dxXNaAFzT8r8PoHgGQJrjuNMDcnpaRAGGFVAr_LpVSZMna1zxh/s1600/image+10.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="257" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiS1RTd4zykoGTVsQUb2fkfYeNcjzTPDRuG0Z1f_na6sENrkBuhpm-0a03k5ARJt68gbSC8nGasQ_w6vhPk68mNXPzw09dxXNaAFzT8r8PoHgGQJrjuNMDcnpaRAGGFVAr_LpVSZMna1zxh/s1600/image+10.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes de <i>Je t'aime je t'aime</i>, d'Alain Resnais (1986). Dans la capsule de temps, Claude Ridder (Claude Rich) voyage avec une souris. Sous sa cloche, elle constitue la dernière image du film.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Concrètement, dans le film, les
transports successifs de Claude Ridder sont inséparables du montage qui
concasse, répète et désordonne le passé du protagoniste. Le spectateur est au
départ dérouté par les pièces du puzzle distribuées. Mais ce chaos correspond
au désir d’Alain Resnais de tisser des <i>relations d’ordre affectif</i><span style="font-style: normal;">, autrement dit des connexions dictées par
d’irrépressibles élans intérieurs. Voici comment le metteur en scène parlait de
son film au micro de Roger Régent dans l’émission </span><i>Cinéma vérité</i><span style="font-style: normal;"> (première diffusion le 04 mai 1968) : </span><i>J’ai
toujours envie de faire rentrer dans mes films ce que j’appelle l’imaginaire,
parce que je pense que ça appartient en effet au réalisme et que si on essaye
de décrire la réalité, il n’y a pas de raison de penser que ce qu’il y a dans
la tête de quelqu’un est moins important que ce qu’il fait. Parce que je pense
que les deux sont évidemment en relation.</i><span style="font-style: normal;">
En utilisant la science-fiction, </span><i>je crois que là je trouvais un
prétexte qui m’amusait pour raconter une histoire que je souhaitais légère, </i><span style="font-style: normal;">[et pour] </span><i>composer une espèce de
dramaturgie qui serait uniquement à base d’émotions,</i><span style="font-style: normal;"> [c’est-à-dire] </span><i>non pas en mettant bout à bout des éléments
chronologiques, mais en essayant de créer des relations qui seraient d’ordre
affectif. J’ai presque envie de parler d’écriture automatique. </i><span style="font-style: normal;">(6’45’’) Bien sûr, il est criminel de faire l’impasse
sur le film </span><i>La jetée</i><span style="font-style: normal;"> de Chris
Marker (1962) auquel le propos d’Alain Resnais semble faire référence. Nous
nous contenterons de renvoyer le lecteur-auditeur à l’archive exhumée dans
l’émission hommage consacrée au cinéaste dans </span><i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/mauvais-genres/alain-resnais-ce-reveur-definitif" target="_blank">Mauvais genres</a></i><span style="font-style: normal;"> (première diffusion le 08 mars 2014) :
« Alain Resnais, ce rêveur définitif ».</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjA2zEzqbaUfIeb0xzFuONI3t0DlZU-_N0lUjg3-iJNplCeFa2YaYWLn5OUu0jzzeqEOU2H_RLqVuqI64ROnB02sFHZsbUD4FFtRak4pWNcRklL9TXqLI_jx5dmzvXeXzpCjczxn7vw-RQP/s1600/image+11.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="259" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjA2zEzqbaUfIeb0xzFuONI3t0DlZU-_N0lUjg3-iJNplCeFa2YaYWLn5OUu0jzzeqEOU2H_RLqVuqI64ROnB02sFHZsbUD4FFtRak4pWNcRklL9TXqLI_jx5dmzvXeXzpCjczxn7vw-RQP/s1600/image+11.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes de <i>La jetée</i>, de Chris Marker (1962)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
L'extrait, malheureusement non daté par
François Angelier, donne à écouter une interview d’Alain Resnais,
juré du prix Vigo décerné en 1963 au court-métrage de Marker. <i>J’ai
l’impression que</i><span style="font-style: normal;"> [La jetée] </span><i>est
le premier film français de science-fiction qui donne une vision crédible de la
chose et qui laisse à l’imagination, grâce à la technique des plans fixes qu’il
a utilisée, une grande liberté. C’est pour ça peut-être que le film est aussi
émouvant.</i><span style="font-style: normal;"> (39’15’’) Ces quelques mots
signifient toute l’importance que prend l’intervalle dans la pensée de Resnais
qui comparait encore en 1968 au micro de Roger Régent </span><i>Je t’aime
je t’aime</i><span style="font-style: normal;"> à la technique
néo-impressionniste. </span><i>Quand on a le nez sur le tableau, toutes ces
touches de couleurs </i>[i.e. les retours abrégés dans le passé] <i>ne paraissent former qu’une mosaïque, mais dès qu’on
s’éloigne un peu, tout à coup, tout apparaît </i><span style="font-style: normal;">(10’28’’).</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div align="center" class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Il ressort de ces
« vacances » expérimentales que les personnages ne peuvent pas
retourner dans le temps sans occuper la place qui leur revient. Celle-ci induit
leur engagement (incorporation pour Frantz, infiltration pour Joel, immersion
pour Claude) et crée de la métamorphose. Impossible pour eux de subir à
l’identique leur retour dans le temps sans aménager de variations (<i>Un jour
sans fin</i><span style="font-style: normal;">, de Harold Ramis, 1993), ni
ajouter des sorties de route (</span><i>Eternal sunshine of the spotless mind</i><span style="font-style: normal;">) ou déconstruire la chronologie du quotidien (</span><i>Je
t’aime je t’aime</i><span style="font-style: normal;">). Que ce soit pour Frantz
(qui doit, sur l’injonction de Mathias,</span><i> revivre </i><span style="font-style: normal;">[s]</span><i>a vie de la même façon, </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>sans profiter de </i><span style="font-style: normal;">[s]</span><i>on expérience</i><span style="font-style: normal;">), pour Joel (qui souhaite tirer un trait sur Clementine) et pour
Claude (qui connaît la durée de son voyage limitée à une minute), le contrat
signé avec le temps revécu n’est jamais respecté. Frantz ne peut s’empêcher de
dévoiler le futur, Joel de cacher ses souvenirs, Claude de prendre le large au
gré de ses allers-retours spatio-temporels. En agissant ainsi, chacun espère
échapper (au moins provisoirement) à l’ordonnance qui a mis en œuvre leur
départ, qu’on l’appelle circuit informatique ou coup du sort. Et profiter
peut-être de l’occasion de réécrire sa vie.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Il est frappant de constater que
le voyage dans le temps suit toujours une déception amoureuse. Revenir sur ses
pas donne ainsi l’occasion de s’offrir une deuxième chance, qui n’a cependant
rien de commun avec la première expérience. D’une part, parce que le caractère
invraisemblable du voyage rend déraisonnable tout ce qu’il charrie. D’autre
part, parce que le déséquilibre affectif des personnages accentue leur
sentiment désenchanté de l’existence. Dans ces conditions, ils se sentent
presque invulnérables, comme délestés du cours des choses. En somme, déjà
ailleurs.<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Le début du film d’Alain Resnais <i>Je
t’aime je t’aime</i><span style="font-style: normal;"> est à cet égard
symptomatique.</span><i> </i><span style="font-style: normal;">Claude Ridder, le
personnage joué par Claude Rich, est convalescent et soigné dans une clinique
belge pour un suicide raté. À sa sortie, il est mystérieusement pris en charge
par une deuxième équipe médicale qui annonce le conduire au </span><i>Centre de
recherche de Crespel</i><span style="font-style: normal;">. </span><i>Un patelin
qui n’existe pas<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>encore</i><span style="font-style: normal;">, dit l’un des hommes. </span><i>Pas sur les cartes
du moins</i><span style="font-style: normal;"> (6’25’’). Rien d’effrayant pour
Claude, relativement apathique et sans volonté. </span><i>Je n’ai pas de
famille</i><span style="font-style: normal;">, prévient-il, avant
d’ajouter : </span><i>Maintenant que je suis sauvé</i><span style="font-style: normal;"> (de son suicide raté)</span><i>, à part le cancer,
je ne risque plus rien</i><span style="font-style: normal;"> (6‘58’’). Des
analyses s’ensuivront dans le Centre pour savoir si Claude est apte à subir,
après un test sur des souris, le premier voyage humain dans le temps.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Ce prologue qui ouvre la voie à
la deuxième histoire (à l’instar de <i>La montre magique</i><span style="font-style: normal;">) pose d’emblée une question essentielle formulée
plus tard dans les autres fictions : est-ce que revivre sa vie permet d’en
changer la destinée ? Chaque fois, la réponse est non. Dans le récit
radiophonique, Mathias ne dit-il pas malignement à Frantz : </span><i>Renonce
donc à poursuivre un rêve et profite de ta vie. Bien des hommes voudraient
avoir la chance que tu as. Refaire sa vie ! </i><span style="font-style: normal;">(51’03’’) ? Mais l’obstination du protagoniste est impossible à
freiner en dépit des relents dépressifs qu’elle couve. Résultat : le
mariage si proche d’arriver au début de l’histoire se voit encore ajourné à la
fin. Aucun fruit n’est venu récompenser la patience de Frantz. Le temps a
accompli son œuvre et le destin sa fatalité. De même, dans </span><i>Eternal
sunshine of the spotless mind</i><span style="font-style: normal;">, Joel et
Clementine effacés de la mémoire l’un de l’autre retombent sans le savoir
amoureux une deuxième fois… même en finissant par découvrir à la fin du film
quel funeste épilogue risque de connaître leur idylle. Enfin, dans </span><i>Je
t’aime je t’aime</i><span style="font-style: normal;">, l’histoire se termine
comme elle a commencé, par une balle de plomb qui a manqué de justesse le cœur.</span><span style="font-family: "open sans"; font-size: 11.0pt;"><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;">* </span></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><b>Bonus</b> : Pour tout savoir des histoires convoquant le voyage dans le temps en littérature et au cinéma, ne manquez cette synthèse de Marc Cerisuelo : </span><i><a href="https://www.erudit.org/fr/revues/cine/2015-v25-n2-3-cine02427/1035775ar/" target="_blank">Remakes secrets et univers multiples</a></i><span style="font-style: normal;">. (2015) Également, cette émission </span><i>Mauvais genres</i><span style="font-style: normal;"> du 07 septembre 2013 : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/mauvais-genres/un-futur-sans-lendemain-ou-de-quelques-visions-noires-cagliostroc-coulon" target="_blank">« Un futur sans lendemain ou de quelques visions noires. »</a></span></div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-67463882337499134622019-02-07T04:36:00.000+01:002019-02-16T20:09:55.504+01:00Suzy Mante-Proust à propos de son oncle Marcel : La boite de pandore (25 juin 1971) + À la recherche d'un film proustien (26 octobre 1983)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<!--StartFragment-->
<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1sYTafRc-JFGgCUsnU9yeYb05pGJTn4Yq" target="_blank">Télécharger le PDF</a> </b>de ce post (8 pages texte et images) <br />
<br />
Parmi les archives radiophoniques que détient le site
Internet de France Culture sur et autour de Marcel Proust et d’<i>À la
recherche du temps perdu</i><span style="font-style: normal;">, il en est une, </span><i>a
priori</i><span style="font-style: normal;"> inédite depuis sa première diffusion le 23 janvier 1997, que la station
vient de mettre en ligne. Il s’agit de l’émission </span><i><a href="https://www.franceculture.fr/litterature/top-10-des-livres-que-vous-navez-jamais-reussi-finir" target="_blank">Lieux de mémoire</a></i> avec Jean-Yves Tadié, Antoine
Compagnon, Thierry Laget, Jean-Marc Leri et le chef Alain Senderens, produite
par Philippe Garbit (descendre jusqu'au point n° « 3/ »). Nous nous en réjouissons et en même temps nous en étonnons. Pourquoi Philippe Garbit qui a récemment consacré deux nuits spéciales à Marcel Proust <span style="font-style: normal;">(<a href="https://www.franceculture.fr/creation-sonore/nuit-speciale-proust-avec-nathalie-mauriac-et-stephane-heuet-par-philippe-garbit-du" target="_blank">L’agenda retrouvé de Marcel Proust</a></span><span style="font-style: normal;">, 21 novembre 2015</span> et <a href="https://www.franceculture.fr/dossiers/une-nuit-au-cafe-concert-avec-marcel-proust-par-philippe-garbit" target="_blank">Une nuit au café concert avec Marcel Proust</a>, 11 juin 2017) n'a t-il pas soumis plus tôt cette archive au choix des invités censés composer le menu des programmes ? L'éventualité de la modestie se pose pour le producteur des <i>Nuits de France Culture</i> qui semble être un connaisseur de longue date de l'oeuvre de Marcel Proust. Mais rien n'est moins sûr. Déroulons le fil.<br />
<a name='more'></a><br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans l'émission <a href="https://www.franceculture.fr/litterature/top-10-des-livres-que-vous-navez-jamais-reussi-finir" target="_blank"><i>Lieux de mémoire</i></a> de 1997, Philippe Garbit fait part à la minute 40 de sa rencontre 14 ans plus tôt avec une descendante de la famille Proust qui a été contemporaine de Marcel, Suzy Mante-Proust (1903-1986). De son vrai prénom Adrienne, Suzy Mante-Proust est la fille de Robert
Proust, frère unique de l'écrivain, qu'elle a sans doute au moins côtoyé jusqu'à ses 19 ans. Philippe Garbit introduit l'enregistrement de son entretien avec la parente alors âgée de 80 ans par ces mots : <i>Un après-midi de 1983, pour France Culture, sans souci ni prétention bien entendu d'éclairer en quoi que ce soit l'oeuvre par une rencontre, j'ai rendu visite tout ému à la nièce de Marcel Proust. On ne pouvait pas faire plus proche par les liens du sang, imaginer mémoire familiale plus fondée, plus légitime. Et dans le salon de l'appartement aux abords du parc Monceau, au-dessus de Suzy Mante-Proust, on apercevait tout de suite en entrant le portrait de Marcel Proust, peint par Jacques-Emile Blanche, ce portrait si souvent reproduit et que l'on trouve aujourd'hui au musée d'Orsay </i>(40'30'')<i>. </i>Seulement 5 minutes sont écoutables de cet entretien extrait d'un documentaire produit par Philippe Garbit pour le compte des <i>Nuits magnétiques</i><span style="font-style: normal;"> et intitulé : </span><i>À la recherche d’un
film proustien</i><span style="font-style: normal;"> (26 octobre 1983, durée d'1h25, jamais rediffusé). </span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdYFcQrO1zibv3joc6I06q839aqPGQgrPwZiRM78aPyJ7HHnAk3Yp014UJLc56-kk7Zo0d2UuKLA4YVZyCkb3yeYHOyRApgLU7y7xHucYxY5Rs0jxUTEaINRpxysPJ9qhfyJA0r1vcjdXy/s1600/proust+j-e+blanche.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="689" data-original-width="566" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdYFcQrO1zibv3joc6I06q839aqPGQgrPwZiRM78aPyJ7HHnAk3Yp014UJLc56-kk7Zo0d2UuKLA4YVZyCkb3yeYHOyRApgLU7y7xHucYxY5Rs0jxUTEaINRpxysPJ9qhfyJA0r1vcjdXy/s640/proust+j-e+blanche.jpg" width="524" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Jacques-Emile Blanche, <i>Portrait de Marcel Proust</i>, huile sur toile, 1892, <a href="http://www.musee-orsay.fr/fr/collections/catalogue-des-oeuvres/notice.html?no_cache=1&nnumid=25604&cHash=e5c4e465f1" target="_blank">Musée d'Orsay</a>, Paris<span class="Apple-style-span" style="font-size: small;"> </span></td></tr>
</tbody></table>
<span style="font-style: normal;">Au regret d'en entendre davantage, consolons-nous en écoutant une autre interview de Suzy Mante-Proust, antérieure d'une dizaine d'années à celle de Philippe Garbit, dans ce mémorable numéro de </span><i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/la-boite-de-pandore-suzy-mante-proust-1ere-diffusion-25061971" target="_blank">La boîte de pandore</a></i><i> </i>(première diffusion le 25 juin 1971).</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Encore que. En cherchant bien, l’on peut quand même
grappiller quelques minutes supplémentaires de l’émission <i>Nuits magnétiques</i><span style="font-style: normal;"> évoquée ci-dessus en allant jeter
une oreille du côté de chez Thomas Baumgartner dans son émission </span><i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-passagers-de-la-nuit-seine-saint-denis-1/mythologie-de-poche-de-la-radio-21-philippe" target="_blank">Les passagers de la nuit</a></i><span style="font-style: normal;"> (série : </span><i>Les
mythologies de poche de la radio</i><span style="font-style: normal;">). Le 19
février 2010, Philippe Garbit y était invité à commenter deux archives
radiophoniques de son choix, dont l’une offre d’écouter les dix premières
minutes de sa première production radiophonique pour France Culture :
celles </span>précisément d’<i>À la recherche d’un film proustien. </i>Écoutons ce qu'il en dit à Thomas Baumgartner :<br />
<i></i><br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>C’était simplement pour un lecteur, un admirateur de Proust, rencontrer
quelqu’un qui l’avait rencontré, qui l’avait connu, c’était déjà tout à fait…
peut-être émouvant - en tout cas, c'était intéressant. Et puis, quand
c’est la nièce de Marcel Proust, ça, évidemment, c’a un petit côté nunuche
peut-être de vouloir rencontrer le cousin, la cousine, la concierge de je ne
sais qui de connu,</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>donc là,
c’était Suzy Mante-Proust et c’est vrai que j’ai proposé cette émission aux</i><span style="font-style: normal;"> Nuits magnétiques </span><i>à Laure Adler, parce que
j’avais envie de rencontrer Suzy Mante-Proust.</i><span style="font-style: normal;">
(…) </span><i>Ça se passait chez elle, bien entendu. On était avec la
réalisatrice Marie-France Thivot, et on est allés la rencontrer un après-midi. C’était avenue Van-Dyck</i><span style="font-style: normal;"> [Paris 8<sup>e</sup>]</span><i>,
c’est-à-dire à l’entrée du parc Monceau. Un rez-de-chaussée. On arrive, je suis venu avec
un bouquet de fleurs, pas des catleyas, et donc la dame nous fait entrer et
nous présente Suzy Mante-Proust, très sympathique, c’est une femme âgée bien
entendu</i><span style="font-style: normal;">. </span><i>Et
là, elle était assise, je ne me souviens absolument pas du décor, à part
évidemment, le tableau qui était au-dessus d’elle qui était le tableau de
Marcel Proust, jeune, par Jacques-Emile Blanche, qu’on connaît, qu’on voit
partout.</i><span style="font-style: normal;"> (6’07’’) </span><br />
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHNythDkcHP3UHGCcMkqnhqwX3qseYen3Q9LfIba-h9BsPj2kWARR3FGzQ7QfncmqSVSz4Ail_NlpeCBltSQQkg2Cegx4muWx2Kx3Rv9p7yYLtvOqCl1p1J6jqpYk6KS6G0Xg0ogeGJl4n/s1600/j-e+blanche+inte%25CC%2581rieur.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="1064" data-original-width="850" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHNythDkcHP3UHGCcMkqnhqwX3qseYen3Q9LfIba-h9BsPj2kWARR3FGzQ7QfncmqSVSz4Ail_NlpeCBltSQQkg2Cegx4muWx2Kx3Rv9p7yYLtvOqCl1p1J6jqpYk6KS6G0Xg0ogeGJl4n/s640/j-e+blanche+inte%25CC%2581rieur.jpg" width="510" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Patrice
Mante-Proust et son épouse Carole en 1972, sous le portrait de Marcel
Proust par Jacques-Emile Blanche accroché dans le salon de sa mère Suzy
(photographie prélevée sur le site Internet du <a href="http://www.lefigaro.fr/livres/2016/05/01/03005-20160501ARTFIG00110-patricia-mante-proust-c-est-un-heritage-un-peu-lourd-a-porter.php" target="_blank">Figaro</a>)</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div class="MsoNormal">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
L’extrait daté de 1983, diffusé en 2010 dans <i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-passagers-de-la-nuit-seine-saint-denis-1/mythologie-de-poche-de-la-radio-21-philippe" target="_blank">Les mythologies de poche de la radio</a></i> est situé au début de l'émission <i>À la recherche d'un film proustien</i>. Il comprend d'abord l’achat des droits de la <i>Recherche</i><span style="font-style: normal;"> par Nicole Stéphane (1923-2007) qui ambitionnait de les confier à quelques metteurs en scène en vue d'une ou plusieurs adaptations cinématographiques de l'oeuvre somme. Mais les rares contactés <i>ont tous déclarés forfait</i> <i>sauf Visconti.</i> (...) Malheureusement, <i>ils ne se sont pas entendus avec Nicole</i>, dit Suzy Mante-Proust (12'30'') <i>mais Visconti avait tenu à venir avec moi voir les manuscrits de mon oncle et m'a accompagnée à la Bibliothèque Nationale où il les a vus avec un respect et un amour - je peux dire - qui m'avait beaucoup touchée. Mais d'un autre côté, faire toute la </i>Recherche<i> en film, c'était impossible, parce que c'était trop long. Il fallait</i> <i>le faire pour la télévision en suites, comme on a fait pour autre chose</i>. </span><br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjFEGxbOYWBO9ij1jjk8GI-wxCAP2t6jG12Jt4aBX46nPXX0PE-m0LJ0uS6hNwXoKiQfihkE4fSwMMw9o4XYalQkqkrxGL-Qovr58lSo-4mQIZMToJVbjdDZihnnfdQNrZhvq-97_4cJlLr/s1600/Celeste+Adlon.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="478" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjFEGxbOYWBO9ij1jjk8GI-wxCAP2t6jG12Jt4aBX46nPXX0PE-m0LJ0uS6hNwXoKiQfihkE4fSwMMw9o4XYalQkqkrxGL-Qovr58lSo-4mQIZMToJVbjdDZihnnfdQNrZhvq-97_4cJlLr/s1600/Celeste+Adlon.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogramme de <i>Céleste</i> de Percy Adlon, 1981. <br />
Le plan joue la mise en abîme de Marcel Proust (incarné par Jürgen Arndt) avec sa représentation peinte par Jacques-Emile Blanche.</td></tr>
</tbody></table>
<span style="font-style: normal;">Philippe Garbit interroge ensuite la nièce de Marcel Proust sur ses premières lectures d'<i>À la recherche du temps perdu</i> (ce segment recoupe en partie la portion qui a été diffusée dans l'émission <a href="https://www.franceculture.fr/litterature/top-10-des-livres-que-vous-navez-jamais-reussi-finir" target="_blank"><i>Lieux de mémoire</i></a> de 1997 dans un montage </span><span style="font-style: normal;">semble t-il </span><span style="font-style: normal;">différent de l'original). <i>C'a été assez difficile</i>, lui répond-elle, <i>parce qu'il ne voulait pas que je le lise. Pour lui, c'était pas un livre pour une jeune fille. Je l'ai lu quand il était mort, quand j'étais mariée. Alors je n'ai pas pu lui en parler </i>(...). <i>Ce n'était pas pour les jeunes filles. Il était très pudique, très... Il ne voulait pas. Alors mon père</i> [Robert Proust, frère de Marcel] <i>naturellement ne me l'a pas laissée lire puisque Marcel ne le voulait pas. Tout ce que Marcel disait, c'était parole d'évangile</i>. (14'22'') À l'évocation d'Albertine, Suzy Mante-Proust déclare tout de go : <i>Oh Albertine, je ne la vois pas. Et je n'ai pas d'amitié pour elle.</i> (...) <i>Elle m'agace. Je trouve qu'elle est d'une incompréhension... enfin je ne l'aime pas beaucoup. Remarquez, je reconnais qu'elle constitue la fatalité pour le héros. Je pensais à ça ces jours-ci parce que j'ai une petite fille qui a fêté son anniversaire par un goûter dans les chalets de l'Ile du Bois de Boulogne. Chalet où le narrateur invite Melle de Stermaria parce qu'il avait appris par Saint-Loup qu'elle était facile. Il l'invitait à diner, il se faisait une grande joie de la voir. Et puis, est arrivé un pneumatique : « Désolé impossible pour ce soir. » </i>[Cf. <i>Le côté de Guermantes</i>] <i>Alors il est extrêmement déçu. Et à ce moment-là, on sonne. Qui est-ce ? C'est Albertine, qui vient sans être priée, comme ça, une idée. Et c'est la fatalité qui est entrée avec elle. </i>Poursuivant : Albertine, <i>ce n'est pas un portrait. C'est plusieurs déceptions. C'est plusieurs chagrins. Ce n'est pas une personne quelconque comme une femme qui a agi comme ça. C'est une somme de déceptions. Et</i> Albertine disparue,<i> c'est une étude clinique de la jalousie post-mortem. C'est incroyable. Après la mort d'Albertine, ce besoin de rechercher, de savoir, c'est effrayant. C'est la jalousie du passé. C'est la pire, je crois. </i>(...) <i>Je trouve que ce que l'oubli peut devenir, c'est merveilleux. </i> (17'10'')</span><br />
<br />
<span style="font-style: normal;">À la reprise de
l’antenne, Philippe Garbit précise encore : </span><i>Mon grand regret
quand je réentends cette émission évidemment, c’est </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>de ne pas avoir interviewé Suzy Mante-Proust sur autre
chose que ce pour quoi je venais la rencontrer</i><span style="font-style: normal;">
(…) </span><i>J’aurais du faire </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>quelque
chose de beaucoup plus long, un</i><span style="font-style: normal;"> À voix nue </span><i>par
exemple</i><span style="font-style: normal;">. (…) <i>J'aurais pu faire vraiment autre chose, </i></span><i>laisser cet
enregistrement de côté et le ressortir comme ça des décennies plus tard</i><span style="font-style: normal;">. (…)</span><br />
<br />
<div style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;">* </span><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span></div>
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Remontons encore un peu dans le temps pour venir à l'émission <i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/la-boite-de-pandore-suzy-mante-proust-1ere-diffusion-25061971" target="_blank">La boîte de pandore</a></i><span style="font-style: normal;">
(première diffusion le 25 juin 1971) produite par Jean-François Noël, au moment de laquelle Suzy Mante-Proust a 68 ans. La conversation commence par rouler sur la <i>présence continuelle</i> que représente le portrait de Proust par Jacques-Emile Blanche dans la vie de la nièce, tableau qu'elle a d'abord vu accroché chez son oncle, puis chez ses parents avant de le recueillir dans son appartement. Au producteur qui fait remarquer sur la peinture un catleya à la boutonnière du jeune Marcel, Suzy Mante-Proust corrige : <i>c'est une petite orchidée blanche qu'on trouvait encore autrefois, on n'en voit plus maintenant à Paris</i>. (2'55)<o:p></o:p></span></div>
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Les circonstances de la mort de Proust sont ensuite l'occasion de confesser le <i>culte</i> dans lequel a grandi la petite nièce pour l'oncle Marcel <i>bien avant de savoir qui il était</i>. <i>Quand mon père a vu que son frère était perdu, il a voulu que je le vois encore vivant. Je l'ai vu râlant hélas, ce qui m'a beaucoup impressionnée (j'étais encore très jeune). Je ne l'ai pas vu sur son lit de mort parce que mes parents ont craint que ça m'impressionne beaucoup, mais j'étais là dans l'appartement de la rue Hamelin</i> [Paris 16e]<i>. J'ai vu arriver tous ses amis. </i>(...) <i>Moi, j'avais une passion pour lui. Il a toujours été pour moi quelqu'un d'extraordinaire quand j'étais enfant. C'était un espèce de magicien qui arrivait, d'ailleurs aux heures les plus inattendues. </i>(...) <i>Dès que j'ai pu le lire, j'ai toujours eu cette impression, et même avant, parce qu'il me paraissait un être tellement exceptionnel, alors on peut peut-être dire qu'il y a un sentiment familial là-dedans, mais moi il m'a toujours éblouie. L'homme était extraordinaire, fascinant et quand j'ai pu le lire, j'ai trouvé qu'il n'y avait pas d'oeuvre qui était supérieure à la sienne. </i>(...)<i> </i>(4'09'')<br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhjRGuTbHWWd428MFlNGSrmIr2keH2eFSQIxabs5wj0vb_3MfH7xsGLy05OI3iIlXnYW7vBJhS4cGUQRyZILMI6z2Jrjw4sYUVO2ZDFh6E_lJlhdz4iTG58Y0GSGHg93z5ctlsh3GiFSXs6/s1600/00-018575.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="502" data-original-width="758" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhjRGuTbHWWd428MFlNGSrmIr2keH2eFSQIxabs5wj0vb_3MfH7xsGLy05OI3iIlXnYW7vBJhS4cGUQRyZILMI6z2Jrjw4sYUVO2ZDFh6E_lJlhdz4iTG58Y0GSGHg93z5ctlsh3GiFSXs6/s1600/00-018575.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le site Internet <a href="https://lefoudeproust.fr/2014/11/bonne-heure-suis-couche-longtemps/" target="_blank">Le fou de Proust</a> nous permet de déchiffrer la dédicace écrite ci-dessus : <i>Pour
madame Claude Roger-Marx. Croquis que j'ai fait d'après Marcel Proust
sur son lit de mort. En hommage et en souvenir de l'affection que vous
aviez pour lui. A Dunoyer de Segonzac.</i></td></tr>
</tbody></table>
<br />
<br /></div>
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Plus loin, un épisode de la fin de vie de Marcel Proust est conté, soit sa visite à l'exposition <span style="font-style: normal;">des maîtres hollandais au musée du Jeu de paume en 1921. <i>Il y avait le tableau de Vermeer que mon oncle préférait à tout qui était </i>La vue de Delft. <i>Il est allé le revoir </i></span><i>avec Jean-Louis Vaudoyer</i><span style="font-style: normal;"><i>. Il m'a raconté lui-même que comme Jean-Louis Vaudoyer voulait l'emmener le matin afin que la lumière fut bonne, il ne s'était pas couché. Il s'était habillé et il était parti pour le musée du Jeu de Paume vers 09h30 du matin ce qui pour lui était une heure extrêmement matinale. (...) Il a eu certainement ce jour-là un pressentiment de sa mort car il a eu un malaise. Et au fond, il fait mourir Bergotte devant ce même tableau. </i>(12'09'') Vérifions sans plus attendre le contrepoint de cette visite par Jean-Louis Vaudoyer lui-même au micro de Jacques Perry, dix ans avant l'interview de Suzy Mante-Proust. Dans l'émission </span><span style="font-style: normal;"><i>La jeunesse de Marcel Proust</i></span><span style="font-style: normal;"> (2e partie) diffusée le 04 mai 1961, il déclare : </span><span style="font-style: normal;"><i>C</i></span><span style="font-style: normal;"><i style="font-style: normal;">e que </i>[Marcel Proust]<i style="font-style: normal;"> aimait faire avec moi, c'était des visites dans des expositions. J'étais à ce moment-là critique d'art dans</i></span><span style="font-style: normal;"> L'opinion (...) </span><span style="font-style: normal;"><i>et j'avais fait des articles qu'il lisait toujours avec cette indulgence excessive qu'il avait pour tous ses amis. </i>(...)</span><span style="font-style: normal;"><i> J'avais fait une étude assez longue sur Vermeer qui l'avait frappé au point qu'il s'était rappelé certains passages qu'il attribue à Bergotte</i></span><span style="font-style: normal;"> [dont celui]</span><span style="font-style: normal;"><i> sur le fameux petit mur qui avait l'air d'être un émail chinois. </i>(...) <i>En 1921, il y a eu une exposition de la peinture hollandaise où on avait fait venir un de ses tableaux préférés</i> (...) <i>qui est</i> La vue de Delft <i>de Vermeer qu'il considérait comme le plus tableau du monde. Et ce tableau était là et nous avons été le voir. Nous l'avons regardé longuement et puis à un moment, il a fallu qu'il s'assoie parce qu'il se trouvait un peu mal et sur le point de s'évanouir sur cette banquette qui était en face de</i> La vue de Delft. (...) [Là],<i> j'ai vu le mécanisme dont l'écrivain se servait </i>[pour raconter]<i> des événements et des sentiments qu'il avait eus lui-même puisque la mort de Bergotte se passe dans cette salle où nous étions ensemble. Et j'ai donc assisté à la naissance de la mort de Bergotte si on peut dire. C'était à l'Orangerie. Il est tout de suite rentré chez lui. Et nous devions aller voir une exposition Ingres qui avait lieu au même moment dans une autre galerie </i>[mais] <i>il a renoncé à y aller.</i></span><span style="font-style: normal;"> </span><span style="font-style: normal;">(1h12'41'')</span><br />
<br />
<span style="font-style: normal;">Retour à </span><span style="font-style: normal;"><i>La boîte de pandore</i></span><span style="font-style: normal;">. S'opposant au producteur Jean-François Noël qui rapporte la réception <i>un peu ésotérique</i> de l'oeuvre dans les premières années suivant sa publication, Suzy Mante-Proust tempère : <i>Moi, je n'ai jamais trouvé cette oeuvre difficile.</i> (...) <i>J'étais née dedans ? Oui et non, parce que mon oncle ne parlait pas de ses livres. Il trouvait d'ailleurs que j'étais trop jeune pour les lire, que ce n'était pas convenable car il était très formaliste. Je les ai lus après sa mort, naturellement.</i> (...) Aux tentations répandues de lire <i>À la recherche du temps perdu</i> comme un roman à clés, elle écarte également d'un revers de main l'association des personnages du livre à l'entourage contemporain de l'auteur. Céleste<i> n'est pas du tout Françoise comme trop de gens l'ont cru. Céleste est entrée beaucoup plus tard dans la vie de mon oncle. Elle était la femme d'Odilon Albaret qui était chauffeur de taxi et qui à ce titre était chauffeur de mon oncle avec un taxi au drapeau toujours baissé </i>(...) <i>Odilon s'était marié très peu de temps avant la guerre de 1914. Et quand la guerre a éclaté, il est venu trouver mon oncle </i>(...) <i>et il lui a dit : « Que va devenir ma jeune femme ? »</i> (...)<i> Et mon oncle lui a dit : « Qu'elle vienne habiter ici, chez moi ». (...) Pour elle, c'a été vraiment un moment merveilleux dans son existence. </i>(17'48'') </span><br />
<br />
<span style="font-style: normal;">L'émission <i style="font-style: normal;"><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/la-boite-de-pandore-suzy-mante-proust-1ere-diffusion-25061971" target="_blank">La boîte de pandore</a></i> se conclut par une allusion au village d'Illiers, rebaptisé en 1971, année du centenaire de la naissance de Marcel Proust, Illiers-Combray. <i style="font-style: normal;">Les Proust étaient originaires d'Illiers,</i> dit Suzy Mante-Proust. <i>On retrouve des Proust au XVe siècle à Illiers, dans des emplois souvent modestes mais c'est une vieille famille beauceronne. Et mon grand-père, le premier, a quitté Illiers pour faire sa médecine à Paris.</i> (...) <i>Marcel y allait tous les ans parce qu'il y avait une soeur de mon grand-père</i><i style="font-style: normal;"> </i>[Adrien Proust]<i style="font-style: normal;"> </i><i>qui s'était mariée avec un grand marchand de drap d'Illiers</i> [Jules Amiot]<i style="font-style: normal;"> </i><i>(parce que Illiers a souvent fait commerce de draps autrefois). Je crois même qu'il avait un magasin de nouveautés plus qu'un</i>[e boutique]<i style="font-style: normal;"> </i><i>de drap. Mais enfin peu importe. Dans cette petite maison qui est devenue la maison de tante Léonie dont</i><i style="font-style: normal;"> La société des amis </i>[de Marcel Proust]<i style="font-style: normal;"> </i><i>a recréé l'atmosphère, c'est là où mon oncle allait passer ses vacances de Pâques. Et c'est très important parce que leur tante Elizabeth Proust est morte quand mon oncle devait avoir 14 ou 15 ans. Ça, ce sont des choses que mon père m'a dites, parce que moi, je n'ai pas connu tout ça. Alors mon père m'a raconté qu'ils allaient là tous les ans pendant les vacances de Pâques et que par conséquent tous les souvenirs que Marcel avait de Combray-Illiers (puisque maintenant vous savez que Illiers s'appelle Illiers-Combray, une demande du conseil municipal) étaient antérieurs à</i><i style="font-style: normal;"> </i>[l'âge de]<i style="font-style: normal;"> </i><i>15 ans. Il est retourné à Illiers deux ou trois fois mais jamais comme il y allait avant régulièrement pour Pâques en arrivant avec les premiers soleils, les premières fleurs qui s'ouvraient.</i> (21'11) <o:p></o:p></span></div>
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Sept ans plus tard, dans une émission diffusée sur France Culture le 27 octobre 1978 <i><a href="https://www.youtube.com/watch?v=StHqohxEyPc" target="_blank">Un homme, une ville</a></i> produite par Jean Montalbetti, Roland Barthes, sur les traces de Marcel Proust à Illiers-Combray, corrobore et précise les dires de Suzy Mante-Proust. <i>Combray, c'est l'enfance de Proust. Il y est venu étant enfant pour des vacances principalement à Pâques</i> (...) <i>mais aussi probablement l'été puisqu'il y a des souvenirs de fortes chaleurs à Combray. Et en réalité, il n'y est plus venu beaucoup après l'enfance et l'adolescence </i>[parce qu'] <i>à partir du moment où sa première crise d'asthme s'est déclenchée, il ne lui était plus possible d'aller très facilement dans des lieux où la nature était présente, où les fleurs étaient présentes. Et au fond toute cette admirable page qu'il y a dans l'oeuvre sur les aubépines ou même sur les lilas, ce n'était plus possible à partir du moment où il a éprouvé les effets de cette redoutable allergie qui lui interdisait de respirer des odeurs de fleurs.</i> (...) <i>La mémoire de l'enfance n'est pas la mémoire de l'adulte. </i>(...) <i>Tout ce qui est plus ancien est l'objet d'un souvenir beaucoup plus précis que ce qui est plus récent. C'est une loi psychologique du fonctionnement de la mémoire et de l'amnésie.</i> (6'59'')<br />
<br />
En attendant de pouvoir écouter un jour la première émission de Philippe Garbit datant de 1983, finissons de dérouler le fil des interventions radiophoniques de Suzy Mante-Proust avec cette émission citée brièvement plus haut : <span style="font-style: normal;"><i>La jeunesse de Marcel Proust</i></span><span style="font-style: normal;"> (2e partie), produite par Jacques Perry (première diffusion le 04 mai 1961). À l'époque, la nièce de l'écrivain âgée de 58 ans narre le temps de quatre petites minutes une anecdote d'enfance autour d'un flamand rose avant de conclure son interview </span><span style="font-style: normal;"><i>par un autre souvenir, d'un autre ordre (...). C'était il y a quelques années, on a baptisé une place Marcel Proust à Cabourg </i>(...) <i>et j'étais chez Jacques de Lacretelle. </i>(...) <i>Après </i>[son discours]<i> il m'a présenté un homme d'une soixantaine d'années qui avait été plombier </i>(...)<i>. Ce plombier avait connu mon oncle parce qu'il faisait des travaux au Grand hôtel de Cabourg où mon oncle habitait. Il m'a fait visiter l'hôtel qui était encore très abîmé depuis la guerre et il m'a montré la chambre où était mon oncle qui était en effet tout à fait en haut entre deux chambres qu'il louait également et de l'autre côté du couloir habitait le directeur de l'hôtel. Il m'a ensuite emmené sur le toit pour me montrer une vue merveilleuse et il m'a dit : « Voyez, Madame, là il y a des caisses d'eau qui fuyaient quelquefois, alors on me faisait demander de la part de M. Proust parce que ça faisait du bruit. Alors là, quand je passais au-dessus de sa chambre, m'a t-il dit, je mettais un tapis ». Il avait compris. </i>(1h 07'54'')</span><br />
<br />
<span style="font-style: normal;">Un mot relie toutes ces archives, entre 1961, 1971 et 1983 : celui de <i>magicien </i>chaque fois prononcé par Suzy Mante-Proust pour convoquer la mémoire de son oncle Marcel Proust.</span></div>
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<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-71539277666179854542018-12-17T15:06:00.000+01:002019-02-06T12:12:06.177+01:00À l'origine du langage : Surpris par la nuit (04 décembre 2007) + La Série Documentaire (28 juin 2018)<div style="text-align: justify;">
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1pp04a7uGxeISJ_Vy9UdlDUMBYMFtd-ao" target="_blank">Télécharger le PDF</a> </b>de ce post (5 pages texte)</div>
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<i>J’étais vraiment comme un ange qui, déchu des ivresses du Paradis, tombe dans la plus insignifiante réalité. Et de même que certains êtres sont les derniers témoins d’une forme de vie que la nature a abandonnée, je me demandais si la musique n’était pas l’exemple unique de ce qu’aurait pu être – s’il n’y avait pas eu l’invention du langage, la formation des mots, l’analyse des idées – la communication des âmes. Elle est comme une possibilité qui n’a pas eu de suites, l’humanité s’est engagée dans d’autres voies, celle du langage parlé et écrit</i>.<br />
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Marcel Proust,<i> La Prisonnière</i>, p. 246.</div>
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Du 04 au 06 décembre 2007, <i>Surpris par la nuit</i> diffusait une série de trois émissions intitulée « Aux sources de la parole ». Dans la première d’entre elles consacrée aux chants des oiseaux, le producteur Nicolas Fontaine initie les oreilles de l’auditeur aux sons puissants mais farouches des oiseaux. Pour les susciter, il commence d’abord par les imiter en compagnie de Michel Boccara, ethnologue, qui lui confie : <i>Il faut devenir animal, un peu comme le chaman. Il faut que l’oiseau nous prenne pour un oiseau. Donc ça demande un art de la métamorphose que savaient très bien pratiquer nos ancêtres. À ce moment, on peut arriver à parler ensemble.</i> (5’00’’) Dans son sillage, Pierre Palengat, preneur de son animalier, dévoile sa méthode d’approche : <i>Je m’habille en vert</i> (…)<i>, je marche comme un indien, je ne fais pas craquer une seule brindille en me déplaçant. Quand j’entends un oiseau dans un arbre à trente mètres, </i>(…) <i>ça peut prendre dix minutes. Par exemple, l’oiseau, quand il chante, ne peut pas entendre les bruits environnants tellement il chante fort. </i> (…) <i>Donc dès qu’il chante, je fais trois pas. Il s’arrête, je m’arrête. </i>(…) <i>Et petit à petit, j’arrive à deux, trois mètres de l’oiseau.</i> (10’30’’)<br />
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La variété des émissions sonores livrées par les oiseaux dépend des saisons et de l’excédent hormonal dont ils sont périodiquement tributaires. Fernand Deroussen, audio-naturaliste : <i>Certains oiseaux qui arrivent de migration sont très enjoués et, au fur et à mesure que le besoin de limiter le territoire diminue, que </i>[celui] <i>de défendre l’accouplement</i> [décroît]<i>, les chants aussi évoluent. Le meilleur exemple est la fauvette à tête noire qui arrivant de ses quartiers d’hiver est très mélomane</i> (…) [mais] <i>qui fin juin n’a plus qu’une petite ritournelle montante caractéristique qui sert simplement à déterminer sa présence.</i> (…) <i>C’est très lié aussi d’un point de vue biologique. C’est-à-dire qu’il y a un problème d’hormones. Ça monte au printemps, un peu comme chez nous.</i> (…) <i>À tel point qu’il est prouvé que chez les merles, ils en ont tellement qu’ils sont obligés de chanter</i>. (20’52’’) Selon les espèces, la qualité et la force des ondes qui traversent l’air fluctuent également. Cela tient d’abord à l’anatomie des oiseaux. Fernand Deroussen : [Les niveaux sonores sont régis] <i>par un organe</i> (…) <i>qui s’appelle le syrinx parce que ça se sépare en deux </i>[en permettant] <i>à l’oiseau de respirer et de chanter à la fois. Nous, si on chante, à un moment il faut respirer. Donc, on arrête ou on passe à une autre strophe. L’oiseau peut se permettre déjà de chanter en respirant et en plus, d’envoyer deux chants à la fois dans cet organe qui est situé au même endroit que le nôtre. </i>(…) <i>Le cas le plus connu du public, c’est l’étourneau-sansonnet. Bien souvent, sous un étourneau, quand il chante, on a l’impression qu’il y a un synthétiseur au-dessus de la tête.</i> (16’45’’)</div>
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Qu’ils soient imitateurs de leurs congénères, pourvoyeurs de phrases rythmées ou seulement capables de quelques notes, les oiseaux libèrent des sons que l’homme associe spontanément à une succession de tons plus ou moins cadencée sinon à une mélodie improvisée. Mais, demande le producteur Nicolas Fontaine, <i>comment est-ce qu’on distingue le chant des cris ? </i>(26’10’’) L’ornithologue Guilhem Lesaffre répond : <i>Là, ça dépasse le simple examen de sonagramme ou d’oscillogramme</i> [qui permet de] <i>voir la composition du chant. C’est en réalité les éthologues – les gens qui étudient le comportement – qui vont pouvoir dire qu’</i> (…) <i>étant donné que cet oiseau se pose sur un perchoir dominant et qu’il « s’exprime » pour défendre son territoire, on peut estimer que c’est un chant. Si jamais il émet un cri pour signaler par exemple la présence d’un prédateur, ou pour signaler sa présence à ses jeunes, ou pour signaler à sa femelle qu’il a trouvé de la nourriture, ça n’est plus la fonction du chant. C’est-à-dire que ce n’est ni la fonction territoriale, ni la fonction de séduction. C’est en fonction du comportement qu’on peut rattacher ou assigner à telles ou telles émissions vocales le nom « chant » ou le nom « cri ».</i></div>
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De la même manière que l’homme ménage un temps particulier à la musique en dehors de ses besoins vitaux, l’oiseau entonne ou répète son chant sans autre but que de <i>remplir une niche sonore inoccupée</i> (19’54’’), dit Fernand Deroussen. Certaines impulsions sonores présentent toutefois des tours inattendus que seuls les spécialistes peuvent aider à distinguer des cris à l'instant différenciés. Guilhem Lesaffre : <i>Je disais que pour nous, un chant c’est mélodieux,</i> [mais] <i>pour certains oiseaux comme l’engoulevent, c’est simplement une espèce de bruit mécanique qui a été comparé à un vélomoteur. On a du mal à imaginer que ce soit un chant parce que ce n’est pas mélodieux, mais c’est exactement la même fonction que le très joli chant du rossignol par exemple. </i>(30’14’’) En s'initiant durablement à l'écoute des oiseaux, les oreilles de l'auditeur parviennent peu à peu à isoler les réponses que s’adressent entre eux les différentes espèces. Ces correspondances tissées de branche en branche découvrent un réseau de relations secrètes qui ressemble aux parties instrumentales d’un « concert » (le mot est employé à dessein). Pierre Palenga : <i>Il y a des enregistrements d’oiseaux qui m’ont fasciné avant que je fasse ce métier de preneur de son animalier, et</i> [notamment celui d’]<i> un corbeau flûteur–pie. </i>(…) <i>On dit qu’il chante juste. </i>(…) <i>Je prends ma guitare en écoutant cet enregistrement et je m’aperçois qu’il chante en sol pile. Que les notes sont toutes justes, </i>[car] <i>je peux le doubler à la guitare. Que je peux improviser autour et que lui aussi improvise autour de son mode de sol. Je suis allé enregistrer des oiseaux en Afrique aussi. Et là j’ai entendu la musique africaine dans la forêt </i>(…) <i>avec les tourterelles qui sont extrêmement rythmiques</i> (…) [Elles entrecroisent différents rythmes en s’écoutant]. (…) <i>On retrouve ça aussi dans le Sahara avec un oiseau qui s’appelle le Sirli du désert qui chante des quarts de ton à la perfection, c’est magnifique. C’est très calme, j’allais dire très zen. </i>(…) <i>On s’aperçoit que ce chant-là a influencé tous les musiciens de là-bas. </i>(…) <i>Je pense que ça doit fonctionner comme ça sur tous les continents. Que ce sont les oiseaux, entre autres, qui ont enseigné la musique aux hommes. </i>(35’30’’) C'est ce que confirme la définition du mot <i>chant </i>écrite dans le <i>Vocabulaire esthétique</i> d'Étienne Souriau (1990) où l'on peut lire : <i>Bien des musiciens ont utilisé des chants d'oiseaux, en musique imitative (Clément Janequin, </i>Le chant des oiseaux,<i> Daquin, </i>Le coucou.<i>..), ou bien en y puisant des idées et principes particuliers au chant de tel oiseau mais sans en faire une imitation rigoureuse (beaucoup d'oeuvres de Messiaen partent ainsi d'une observation des oiseaux), ou bien en empruntant un motif à un chant d'oiseau (Beethoven l'a fait assez souvent, il ne s'est pas borné aux passages imitatifs de </i>La symphonie pastorale<i>) ; mais il ne faut pas négliger le rapport inverse, celui où l'oiseau reprend, souvent de lui-même, un air fourni par l'homme, et même dialogue en musique avec lui. </i></div>
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Est-il possible d'entendre dans le chant des oiseaux composé de modulations vocales répétées le socle vibratile où s'origine le langage des hommes qui mêle indissociablement articulation des mots et prosodie ? La convention <i>a priori </i>anodine qui consiste à interpréter les signaux vocaux des oiseaux comme des <i>phrases</i>, des <i>mots</i> ou des <i>syllabes</i> offre une piste de réponse que synthétise cette question du producteur Nicolas Fontaine à Michel Boccara : <i>Est-ce qu’un jour, tu crois qu’on a compris la langue des oiseaux et qu’on l’aurait peut-être oubliée ?</i> (1h05’58’’) L’ethnologue lui répond qu’<i>effectivement, il y a un langage des oiseaux, et que les anciens hommes les comprenaient mieux que nous parce qu’ils étaient plus proches des animaux et qu’ils les observaient davantage. Si tu es toute la journée avec les oiseaux </i>(…)<i>, tu comprends que quand l’un fait tel son, l’autre lui répond telle chose. </i>Michel Boccara va plus loin en affirmant que <i>l’homme apprend à parler avec l’oiseau.</i> (…) <i>L’homme n’est pas un spécialiste, c’est un généraliste. Il ne sait rien faire et c’est parce qu’il ne sait rien faire qu’il sait tout faire. Il va apprendre le langage vocal d’un autre ordre zoologique. </i>[Et] <i>les ordres les plus forts en vocalité sont les oiseaux et les cétacés. Donc il est vraisemblable que les oiseaux ont appris non seulement à parler à l’homme mais peut-être même à chanter.</i> (…) <i>Dans toutes les sociétés, l’oiseau peut être mis à l’origine de la parole et aussi de l’écriture. Prévert l’a dit : l’écriture c’est la plume.</i> (53’51’’)</div>
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L'hypothèse selon laquelle chant et paroles étaient au départ confondus tendrait à supposer qu'en se détachant du flot mélodique, les mots ont progressivement recouvert la musique qui les portait sans la faire disparaître pour autant. <i>On sait bien qu’un très grand nombre de langues sont encore des langues à ton, c’est-à-dire des langues où il y a des notes, </i>(…) [où] <i>les tons sont résiduels.</i> (…) <i>Dans une hypothèse génétique qui est la mienne, la parole apparaît à un moment donné. Il y a bien quelque part une origine de la parole, c’est-à-dire un moment où se produit ce miracle : je parle. Miracle rétrospectif </i>[d’ailleurs]<i>, parce qu’il n’est pas forcément évident que l’homme au moment où il a parlé s’est aperçu qu’il avait parlé. Il pouvait toujours croire qu’il chantait et que c’était une nouvelle forme de chant. Et tout d’un coup, cette nouvelle forme de chant a pris une telle importance qu’il a fallu lui donner un nouveau mot. Et c’est comme ça que la parole est née. </i> (…) (39’15’’) </div>
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Poursuivons l’hypothèse de Michel Boccara. Si le langage humain découle du chant des oiseaux qui l'environnaient, comment apparaît-il dans la voix des enfants ? À partir de quand la répétition d'un son devient-elle un mot ? La quatrième émission de <i>La série documentaire</i> consacrée au « Génie des bébés » produite par Nedjma Bouakra, invite l’auditeur à distinguer les étapes de <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/lsd-la-serie-documentaire/le-genie-des-bebes-44-savant-sans-le-savoir" target="_blank">l’émergence du langage</a> (première diffusion : 28 juin 2018) en plongeant au coeur des laboratoires de recherche qui les scrutent.<br />
<br />
Tout commence avec la nature des sons produits par les nouveaux-nés. Quand certains proviennent de la digestion (<i>des sons gutturaux au fond de la gorge qui sont d’ailleurs tout de suite reconnus pas les adultes qui les ignorent en général</i>) d’autres semblent relever d’un « contrôle ». Maya Gratier, professeur de psychologie du développement :<i> Sur le plan acoustique,</i> (…) [les sons contrôlés] <i>sont résonnants, avec des harmoniques et ont vers six, huit semaines un vrai contour intonatif qu’on peut identifier.</i> [C’est] <i>ce qu’on appelle les « areuh », en réalité des sons qui n’ont pas une structure phonétique, donc qu’on ne peut pas transcrire </i>(…) [mais qui] <i>ont souvent un contour en cloche, c’est-à-dire que la voix monte et puis redescend. Ces sons-là ont une certaine durée et les parents les apprécient</i> [car ils] <i>vont y répondre beaucoup plus souvent : « tu racontes quelque chose là ? », et ils</i> [leur] <i>attribuent d’ailleurs</i> [une valeur]. <i>Mais à quel point sont-ils intentionnellement prévus, c’est plus compliqué </i>[de le dire]. (…) <i>On ne va pas directement du « areuh » vers des sons plus proches du langage qu’on trouve dans le babillage</i> (à partir de six mois). (…) <i>Avant</i>, (…) <i>il y a une phase qui s’appelle le stade vocal exploratoire, où les bébés vont faire des sonorités de plus en plus bizarres. Ils poussent des cris, font des bruitages avec leur bouche et c’est un peu comme si ils découvraient leurs voix. Et ils le font beaucoup tout seul. Alors que les « areuh » sont produits avec d’autres personnes.</i> (7’40’’)</div>
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Pour permettre au bébé de recevoir l’information de l’adulte et d’instaurer avec lui un échange, une émotion doit être partagée. Celle-ci peut prendre la forme d’une expression du visage (une mimique) qui continue le sens du message initial. À sa suite, le bébé peut manifester un retour pré-verbal à l’adulte qui lui garantit par la même occasion l’excellence de son éveil. C’est notamment le rôle des comptines que d’encourager différentes intonations vocales et variations faciales pour susciter l’attention du bébé et l’inclure dans le jeu musical. Cet aller-retour entre l’adulte et le bébé dessine une <i>boucle</i>. Maya Gratier : [Dans le chant]<i>, les adultes vont ralentir plus, marquer plus les arrêts, accélérer à certains moments et c’est toute cette vivacité que les bébés apprécient beaucoup. Ils n’aiment pas quand on chante de manière monotone. Ils aiment bien d’ailleurs un peu d’inattendu dans la chanson. Ce qui est très étonnant, c’est qu’à deux mois, un bébé n’écoute pas passivement le chant de la mère mais devient un co-acteur du chant. Rapidement, ils </i>[le]<i> connaissent très bien et la différence entre le chant et la parole, c’est que le chant est prévisible</i> [ce qui fait]<i> que </i>[les bébés]<i> peuvent reconnaître une mélodie dès la naissance. </i>(…) <i>On peut se dire que ce n’est pas juste pour le plaisir qu’on chante au bébé. Si c’est si répandu</i> [dans toutes les civilisations]<i>, c’est que cela doit avoir une fonction </i>[comme de]<i> contribuer de manière très importante aux grandes acquisitions du langage.</i> (26’25’’) </div>
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Michel Boccara dans l’émission <i>Surpris par la nuit </i>: « Le chant des oiseaux, l’origine » supposait qu’<i>il n’est pas forcément évident que l’homme au moment où il a parlé s’est aperçu qu’il avait parlé</i>. Evelyne Lenoble, praticien hospitalier, détaille le stade où le bébé discerne des mots dans le flux verbal de sa mère. <i>Quand celle-ci s’adresse à lui, les mots qu’elle utilise sont</i> [souvent] <i>très chargés corporellement parce qu’elle parle des « éprouvés » </i>(i.e. la faim, soif, douleur) <i>qu’elle suppose à son bébé.</i> Comme le bébé n’est pas encore en mesure de les comprendre, ces mots prononcés et répétés vont sortir de la mélodie de la langue maternelle pour devenir des éléments à part. Les <i>coupures</i> qu’ils introduisent dans la prosodie leur donnent un relief qui hausse l’attention de l’enfant. <i>Ce qui plait au bébé, c’est la voix de la mère avec la berceuse</i> (…)<i>. Mais à un moment, il va falloir qu’il lâche ça, et puis qu’il « découpe ». C’est la mère qui va bien sûr l’aider à « découper » en disant des mots, toujours les mêmes, qui reviennent, et qui sont séparés les uns des autres, qui vont faire scansion. </i>(…) <i>C’est une opération difficile, quasi chirurgicale puisqu’effectivement, il y a un écart entre les mots</i> [les uns par rapport aux autres]<i>, et puis aussi un écart entre les mots et l’ « éprouvé », parce qu’un mot même très précis ne rendra jamais compte d’un « éprouvé » corporel. Il y a forcément un écart entre ce qu’éprouve le bébé et le mot qu’on va lui proposer. Et c’est le coup de force du langage </i>[que] <i>de se dégager de la sensation immédiate pour se la représenter et en faire quelque chose de communicable au prochain.</i> (29’08) </div>
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<br /></div>
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Si l’une des fonctions premières du langage est liée au désir (<i>le bébé veut quelque chose, appelle</i>), sa manifestation a donc lieu dès qu’une <i>défaillance</i> empêche le petit d’homme de subvenir à ses besoins. En se rendant actif, le bébé cherche à améliorer sa condition. Il en va de même pour le sens des mots qu’il apprend. Anne Christophe, directrice du Laboratoire de sciences cognitives à l’Ecole Normale Supérieure : <i>Quand on se pose la question de savoir comment les enfants font pour deviner le sens des mots, on suppose qu’ils utilisent tout un tas de stratégies conjointes qui vont ensemble lui permettre d’inférer le meilleur sens possible pour le mot qu’il vient d’entendre. C’est un processus d’inférence et pas juste de la simple association comme on pensait au début</i> [du type] <i>: l’enfant entend « chien » - il y a un chien dans l’environnement - il associe le son « chien » avec l’objet chien. En vérité, il fait de l’inférence. Par exemple, dès qu’il est capable de suivre le regard de quelqu’un, on va voir qu’il va essayer d’utiliser cette information pour savoir de quoi cette personne pourrait bien parler</i> (…) (33’32’’). Anne Christophe ajoute plus loin : <i>Par quels mécanismes les bébés ont-ils réussi à apprendre que « elle » + un mot = action et que « une » + un mot = objet ? Ce qu’on pense, c’est que les bébés se basent sur un petit nombre de mots dont ils ont déjà réussi à apprendre le sens, par exemple « manger » et « boire »</i> [d’un côté] <i>et « livre » et « doudou »</i> [de l’autre]<i>. L’hypothèse est qu’à partir des mots qu’ils connaissent, les enfants peuvent apprendre dans quels contextes ils se produisent. L’inférence est un travail de détective qu’ils font pour essayer de trouver ce mot-là, entendu à cet instant-là, dans ce contexte-là.</i> (45’48’’)</div>
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Les hypothèses développées dans <i>Surpris par la nuit</i> et <i>La série documentaire</i> peuvent laisser rêveur ou dubitatif. Pour sûr, elles continuent leur chemin dans la tête de l'auditeur qui les réévalue à l'écoute soudaine d'un oiseau ou des « vocalisations » d'un bébé. À suivre dans un post prochain qui sait ?</div>
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<i>Comment demeurer silencieux quand l’océan me roule d’écueil en écume ? Mais comment donc puis-je parler, moi qui n’ai pas atteint la paix ? Que sont-ils, mes pauvres récits quand l’œuvre de l’homme accompli devrait être une symphonie de silence dans le non-être ? Que pourrais-je encore chanter qui ne soit pas futile, vain ? Où trouver des mots inusables ? Il faut abandonner la vie, demander sans cesse pardon pour le bruit confus de nos voix. Combien de temps, Seigneur aimé, ces houles sombres, ces tempêtes ? Mourir, enfin, entrer en silence absolu !</i></div>
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<br /></div>
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<i>La conférence des oiseaux</i>, de Farid-ud-Din’ Attar, adapté par Henri Gougaud, 1177 (lu par Éléonore Costes dans <i>Surpris par la nuit</i>, 45’47’’).</div>
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Pour aller plus loin, voir : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/entre-berceuses-et-doudous-voyage-dans-les-rituels-des-couchers-de-lenfant" target="_blank">La matinée des autres : entre berceuses et doudous, voyage dans les rituels des couchers de l'enfant</a> (première diffusion : le 02 juillet 1996)</div>
Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-22835521488102719542018-10-15T16:37:00.000+02:002019-11-26T22:43:22.706+01:00Jean Oury à La Borde : Le point du 7e jour, Profils perdus, À voix nue, Sur les docks<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1EIV4ZDNErHp4ldcJ-LCmjBJg2h8RcEf_" target="_blank">Télécharger le PDF</a></b><a href="https://drive.google.com/file/d/1uwKdQLoUrIzVHW8lkGeRgmOVLJYxt7iW/view?usp=sharing" target="_blank"> </a>de ce post (8 pages, texte et images)<br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3jJszufHM99_XQvxGiOPfkoGTl3SIWHziSF_uAJC8JGdO86WUaAbPOSo2Zx7Vaqj42wF3Aqt0zlgR5IaMQzuB7S7bu62bf0UxGDm5avVFdV6l7Za-DLFxxmaqDg2c9ohHu3HatLHdM1_2/s1600/image+1.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="256" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3jJszufHM99_XQvxGiOPfkoGTl3SIWHziSF_uAJC8JGdO86WUaAbPOSo2Zx7Vaqj42wF3Aqt0zlgR5IaMQzuB7S7bu62bf0UxGDm5avVFdV6l7Za-DLFxxmaqDg2c9ohHu3HatLHdM1_2/s1600/image+1.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Jacques : <i>D'abord, c'est vous qui m'avez rendu malade. La société en général. Et maintenant, je vais mieux, grâce à la société aussi et je voulais vous donner un conseil, si vous permettez. Ne parlez jamais de votre santé à un médecin. Parce qu'il pourrait vous asservir. Je ne suis pas asservi ici, mais je suis offert aux médecins</i>. Photogrammes de <i>La moindre des choses</i>, de Nicolas Philibert (1996).</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
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<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Curieux destin que celui de ce patronyme :
« Oury ». Vaguement entendu il y a des années, puis revenu de proche
en proche avec le temps, je n’imaginais pas le nombre d’heures répertoriées à
son sujet sur l’Inathèque. Reçu jusqu’alors comme un simple nom de médecin de
famille en valant bien un autre, Jean Oury (1924-2014) est non seulement
psychiatre, mais également théoricien et professeur, héritier de la psychothérapie
institutionnelle imaginée par François Tosquelles et fondateur de la clinique de
La Borde. Toutes ces facettes
multiplient d’autant les approches de sa vie par la radio.</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Pour ne pas disperser le propos et ne pas rendre les
transcriptions interminables, j’ai choisi de retenir dans ces lignes les seules archives qui
ont trait à la clinique de La Borde. Bien sûr, des dé-borde-ments seront
nécessaires pour embrasser la considérable entreprise mise en œuvre par Jean Oury. Comme la
voix du psychiatre a été sollicitée à de nombreuses reprises entre 1974 et 2014
(dans le corpus consulté), des sauts dans le temps permettront de coller des
réflexions qui se rejoignent. Écoutons sans plus tarder comment
Jean Oury décrit La Borde 21 ans après son arrivée dans l'émission <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/le-point-du-7eme-jour-une-maison-sans-cloture-la-clinique-de" target="_blank"><i>Le point du 7e jour :</i> Une maison sans clôture, la clinique de La Borde</a><i> </i> (première diffusion le 21 avril 1974) :<br />
<a name='more'></a></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Le principe à La Borde est l’application de toute une
doctrine qui est née ailleurs, en particulier à l’hôpital de Saint-Alban,
pendant l’occupation et à la libération. Le principe, comme on disait à cette
époque-là, c’est d’humaniser au maximum la vie à l’intérieur de l’hôpital d’une
part, pour mettre les gens dans une situation bien plus personnelle – pour les
personnaliser. Et pour essayer de voir </i>[d'autre part] <i>avec eux quels étaient leurs problèmes
aussi bien pour l’avenir que pour la vie quotidienne</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>On pourrait dire que ce qu’on veut mettre en place,
c’est lutter contre une ségrégation</i><span style="font-style: normal;"> (…).</span><i>
Mais surtout lutter contre la ségrégation intérieure, c’est-à-dire </i><span style="font-style: normal;">[contre]</span><i> tous les systèmes qui se développent,
qui cloisonnent l’espace hospitalier dans le sens traditionnel du terme. Par
exemple,</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>on a toujours lutté
pour supprimer dans les faits les quartiers d’agités, les quartiers de gâteux
qui sont vraiment le fléau de la vie asilaire.</i><span style="font-style: normal;">
(…) (4’10’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>La psychothérapie institutionnelle a essayé de montrer
dans les faits que l’agitation, le gâtisme et la fureur sont des tableaux
morbides qui sont souvent provoqués inconsciemment par les dispositions aussi
bien architecturales</i><span style="font-style: normal;"> [de l’établissement
d’accueil] </span><i>que</i><span style="font-style: normal;"> [par]</span><i>
les préjugés du personnel, et la façon d’aborder ce genre de personnes que sont
les malades mentaux.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span>[Or il s'agit]<i> d'essayer d’enlever</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>la
pathologie asilaire qui résulte d’un mode de vie particulier, de contentions</i><span style="font-style: normal;"> [i.e. l’immobilisation de patients au moyen de camisoles de force]</span><i>, de non-liberté.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Que chaque personne à son niveau soit mise dans un
réseau de responsabilités, aussi bien matériel que de possibilités de
rencontres pour sortir un peu de son isolement. Et</i><span style="font-style: normal;"> [pour] </span><i>ça, il faut créer des rencontres au maximum. C’est
dans la création de ces occasions qu’il y a la nécessité d’organiser chaque
jour un nombre de réunions très important et que les gens soient répartis dans
des petits groupes</i><span style="font-style: normal;"> [de dix ou quinze
personnes] </span><i>qui soient vivables, dans lesquels les gens puissent
parler parce qu’ils se connaissent. </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>Il
y en a de quantités de sortes. Il y</i><span style="font-style: normal;"> [en] </span><i>a
où on y fait rien, ce qu’on appelle des petits groupes de parole qui ont une
qualité particulière, qui </i><span style="font-style: normal;">[relève] </span><i>de
l’expression, de pouvoir parler à d’autres. Mais ça ne marcherait pas s’il n’y
avait pas des groupes basés sur des activités et des responsabilités.</i><span style="font-style: normal;"> (…) (6’26’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>C’est pour ça qu’on a repris l’idée fondamentale qui
existait à Saint-Alban. C’est de créer à l’intérieur même de l’établissement un
réseau social à partir de ce qu’on a appelé « un club thérapeutique ». <o:p></o:p></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>C’est quelque chose qui a pris une ampleur énorme ici,
qui est un organisme autonome du point de vue juridique, organisé par le
personnel et les malades. C’est une association 1901 qui passe contrat avec
l’établissement pour développer à l’intérieur toute la vie sociale. Ça permet
de pouvoir lutter contre une oppression qui existe toujours dès qu’il y a mise
en place d’un établissement avec hiérarchie et un but de rendement, commercial
ou autre.</i><span style="font-style: normal;"> (…) [À La Borde],</span><i> on ne
peut pas dire que la hiérarchie est inexistante. Elle est transformée en ce
sens qu’</i><span style="font-style: normal;">[elle] </span><i>est bien plus fine
et bien plus multiple, basée sur des strates plus collectives. Par
exemple, il est certain qu’il n’y a pas de surveillant chef. Par contre, il y a
des instances collectives qui sont renouvelées tous les deux, trois mois,
constituées de plusieurs personnes qui sont des moniteurs</i><span style="font-style: normal;"> [i.e. des infirmiers] </span><i>et des médecins de
l’établissement mais qui ont comme fonction collective d’assurer une sorte non
pas de surveillance mais de coordination de toutes les tâches.</i><span style="font-style: normal;"> (…) [Ces instances] </span><i>se répètent à
différents échelons, en rapport avec les différents domaines qui sont en
question. Il y a par exemple aussi bien la gestion économique que la gestion
médicale, que la gestion animation proprement dite.</i><span style="font-style: normal;"> (…) (11’46’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>On prend en charge les malades pour une durée illimitée.
Ça ne veut pas dire qu’ils vont rester hospitalisés pendant une durée illimitée.
On peut dire que mon rôle est surtout en fin de compte de faire des
consultations externes, c’est-à-dire d’empêcher les gens d’être hospitalisés.
Mais les gens que je vois en consultation externe (on peut faire des
traitements de toutes sortes, biologiques, psychothérapiques etc.) s’améliorent
la plupart du temps. Je ne suis pas surpris si dix plus tard, je revois le même
malade. Autrement dit, cette prise en charge fait qu’il y a une continuité non
pas des soins, mais d’une relation qui fait que depuis qu’on fonctionne, on a à
peu près dix ou douze mille relations continues depuis vingt ans. Il suffit de
tirer une fiche</i><span style="font-style: normal;"> [d’un patient] </span><i>pour
savoir où ça en est. Si bien qu’on n’a pas une observation qu’on pourrait dire
policière vis-à-vis de ces gens-là. Mais ils savent que si ça s’est bien passé,
aussi bien leur séjour que la relation de consultation, ils sauront qu’il y a
un lieu, des personnes, qui peuvent les accueillir quand ça ne va pas. C’est la
chose il me semble la plus importante, de savoir qu’on peut revenir quelque
part quand ça ne va pas, qui évite souvent de revenir. Parce que ça donne une
certaine assurance pour le restant de l’existence.</i><span style="font-style: normal;"> (24’58’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Remontons dans le temps. Jean Oury a 23 ans en février 1947. Encouragé par son professeur d'internat Julian de Ajuriaguerra (1911-1993) et son assistant René Angelergues
(1922-2007) à écouter une série de conférences données à Paris, il découvre un <i>type bizarre qui s’appelait Tosquelles</i><span style="font-style: normal;"> (prononcé Tosquaillesse dans la langue espagnole). </span><i>Je
n’avais rien compris</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>mais ça
m’avait semblé étonnant.</i><span style="font-style: normal;"> (2’59’’). <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Remontons plus loin. Sept ans auparavant, le 06 janvier 1940, le psychiatre
catalan François<i> </i>Tosquelles<i> </i><span style="font-style: normal;">(1912-1994) arrive à Saint-Alban-sur-Limagnole (48120) par </span><i>une série
d’enchaînements de hasards</i><span style="font-style: normal;"> comme il
l’explique à Cécile Hamsy dans la première partie de l’émission </span><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/profils-perdus-saint-alban-sur-limagnole-en-lozere-l-esprit-d" target="_blank"><i>Profils perdus </i>: Saint-Alban-sur-Limagnole en Lozère : L'esprit d'un lieu</a><span style="font-style: normal;"> (première diffusion le 21 septembre
1989). Extrait du camp de concentration de Septfonds situé dans le Tarn-et-Garonne sur invitation du préfet de la Lozère, il est engagé dans l'hôpital psychiatrique du village aux côtés du directeur Paul Balvet. Mais avant de prendre ses quartiers dans l'ancien château fort, Tosquelles décide de voir </span><i>l’entourage
humain et animal des indigènes du pays</i><span style="font-style: normal;"> pendant vingt jours. Rien de tel pour s’imprégner du monde attenant à l’asile et corroborer la libre circulation promue par l’établissement qui employait une
partie de la population locale.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Chaque famille avait quelqu’un qui travaillait à
l’hôpital,</i><span style="font-style: normal;"> dit Jean Oury qui arrive en
septembre 1947 à Saint-Alban. </span><i>Le fait que les gens </i><span style="font-style: normal;">[y] </span><i>travaillent facilitait l’accueil des
malades qui pouvaient sortir. Ils allaient chez les gens ou alors chez les
commerçants, sans préjugés au fond. <o:p></o:p></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans la deuxième partie de l'émission <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/profils-perdus-saint-alban-sur-limagnole-en-lozere-l-esprit-1" target="_blank"><i>Profils perdus</i> : Saint-Alban-sur-Limagnole en Lozère, l'esprit d'un lieu</a> diffusée le 28 septembre 1989, Oury poursuit : <i>On était enfermés
24h/24 pendant deux ans. Donc je vivais avec les malades. On a continué ce qui
était en train de se faire depuis l’équipe qu’il y avait à Saint-Alban pendant
la Résistance. Il y avait Tosquelles, Balvet, Bonnafé, Chaurand</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Il y a eu une restructuration
complète de l’hôpital pour transformer les vieux asiles en autre chose,</i><span style="font-style: normal;"> [comme] </span><i>la suppression des cellules par
une activation et une responsabilisation. D’où la création d’un club. Le
« club psychothérapique » comme on appelle ça, c’est à
Saint-Alban que c’est né, c’est-à-dire en 1942 </i><span style="font-style: normal;">(…)</span><i>. C’est à l’intérieur du club qu’avec Tosquelles entre
autres, on faisait beaucoup d’activités, en particulier organiser des
représentations théâtrales, des psychodrames, des mimes, des choses comme ça. </i><span style="font-style: normal;">(…) (26’46’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgcy3Bn-An4e4INF3hM5l16zFoQm2zSOH30LCH6qXOvYm6fLTMnOGgrHOAlfaf7XX9UEGAdxei245HirHs9i0kAM15hGBB1Qxy5KklkXwn9VBSleesX3caqcBdZE9u8urJqg_FYlfPMPPJl/s1600/image+3.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="269" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgcy3Bn-An4e4INF3hM5l16zFoQm2zSOH30LCH6qXOvYm6fLTMnOGgrHOAlfaf7XX9UEGAdxei245HirHs9i0kAM15hGBB1Qxy5KklkXwn9VBSleesX3caqcBdZE9u8urJqg_FYlfPMPPJl/s1600/image+3.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche : photogramme du film de Nicolas Philibert, <i>La moindre des choses</i> (1996), montrant le cadre dans lequel prennent place les répétitions de la pièce de théâtre montée chaque année à La Borde. À droite, cette même place prise en septembre 2018 (photo : ma pomme).</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Le club, c’était vraiment une innovation parce que
c’était un lieu de rencontres de tous les quartiers</i><span style="font-style: normal;"> [i.e. homme et femme]</span><i>. Ça a été très bien analysé plus tard
par</i><span style="font-style: normal;"> [Roger] </span><i>Gentis</i><span style="font-style: normal;"> (1928-) </span><i>qui a parlé du club dans une
structure – comme</i><span style="font-style: normal;"> [celle de Saint-Alban] </span><i>qui
était encore un peu carcérale (il faut bien le dire).</i><span style="font-style: normal;"> (...)</span><i> Une fois que
cela a été bien lancé cette histoire du club, en même temps, on lançait des
techniques habituelles d’atelier comme les techniques Freinet. Le premier
journal interne de Saint-Alban, c’est moi qui l’avais fait avec une petite
presse Freinet que l’instituteur du coin m’avait prêtée. Donc on imprimait avec
des composteurs un petit journal avec les malades. Ça essayait d’établir le
plus de liaisons possibles dans cet intérieur complètement cloisonné.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Et puis, il y avait eu le retour des
infirmiers</i><span style="font-style: normal;"> [dont certains] </span><i>avaient
été prisonniers. Quand ils rentraient, ils ne voulaient pas se trouver dans
la même ambiance que là où ils avaient été</i> [i.e. les camps de concentration]<i>. Or les hôpitaux, c’était un peu ça.
Donc ils étaient tout à fait prenants de ce qui se passait. Ça a été très
important les infirmiers.</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
En 2002, Jean Oury s’entretient avec Pierre Babin pour la
série <i>À voix nue</i><span style="font-style: normal;">. Dans la deuxième
émission il fait part des idées mises en pratique par Tosquelles à Saint-Alban
au nombre desquelles compte l’organisation de la vie quotidienne des malades.</span><i>
Il y avait toujours une possibilité, une possibilisation plutôt, d’un certain
degré de liberté et de responsabilité.</i><span style="font-style: normal;"> Même
pour les pensionnaires les plus démunis intellectuellement. </span><i>S’il n’y
a pas une liberté de circulation, tout se ferme. Or la liberté de circulation</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>, c’est-à-dire de pouvoir aller ici ou
là sans que ce soit vraiment programmé pour qu’il puisse justement y avoir des
rencontres,</i><span style="font-style: normal;"> [tout cela crée] </span><i>la vie
quotidienne. Mais ça exige qu’il y ait une hétérogénéité</i><span style="font-style: normal;"> [i.e. une collectivité] et un balisage du réel
(14’41’’). Comme la réception du monde est un frayage permanent, </span><i>c’est
souvent des détails qu’on ne voit même pas qui servent d’appuis pour vivre. Si
on met le type dans une cellule, tous ces détails disparaissent. </i><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Envoyé en éclaireur par François Tosquelles, Jean Oury
arrive au château de Saumery (Loir-et-cher) en août ou septembre 1949 pour
remplacer son directeur José Solanes (1909-1991) nommé à Caracas.<i> </i>Il est alors âgé de 25 ans.<i> </i><span style="font-style: normal;">Dans le quatrième numéro d’</span><i>À voix nue</i> (première diffusion le 31 janvier 2002)<span style="font-style: normal;">, Oury raconte : </span><i>J’y allais pour un mois, pour voir un peu</i><span style="font-style: normal;">, dit-il. </span><i>Et puis, je suis resté. À
Saumery, il y avait douze malades. J’ai fait grimper ça à quarante malades, et
puis après, on ne pouvait plus, il fallait faire des travaux. Ils ont refusé.
Alors je suis parti en </i><span style="font-style: normal;">[mars] </span><i>1953
avec tous les malades et tout le personnel – enfin presque tous, il n’en
restait plus que sept</i><span style="font-style: normal;"> [qui ne pouvaient pas
marcher]</span><i>. </i><span style="font-style: normal;">(</span><i>Et j’ai
prévenu l’ordre des médecins en disant que mon remplaçant n’était pas fiable</i><span style="font-style: normal;">, ajoute t-il dans l’émission </span><i>Sur les docks</i><span style="font-style: normal;"> dans laquelle il raconte également cette même
histoire) </span><i>Mais je n’avais rien pour les mettre</i><span style="font-style: normal;"> [les héberger] </span><i>sauf des hôtels, des trucs
comme ça. Et en trois semaines, on a trouvé La Borde. Personne ne voulait
acheter un truc pareil. Il y avait une vingtaine d’hectares et un château – si
on veut, de 1850, par là. J’ai apitoyé les propriétaires</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>. J’avais tout le personnel, j’étais
tout seul pour le département. Il n’y avait pas de psychiatrie publique, rien
du tout ! Donc, j’étais sûr de mon coup surtout que la première année, on
a vendu pour six millions</i><span style="font-style: normal;"> [de francs] </span><i>de
bois. Donc on a gagné. Voilà c’est ça La Borde. Je suis arrivé en avril 1953. </i><span style="font-style: normal;">(3’02’’).<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Il poursuit : <i>J’imaginais à cette époque que je
voulais prouver à l’État qu’on pouvait faire de la psychiatrie dans le
département sans faire d’hôpital public</i><span style="font-style: normal;">
[mais] </span><i>avec des structures</i><span style="font-style: normal;">
[comme] </span><i>des vieux châteaux qu’on pouvait retaper. Ça coûterait
beaucoup moins cher. Et pourquoi je voulais sept châteaux ? Sept, c’est un
nombre magique. Il y a eu La Borde</i><span style="font-style: normal;"> [à
Saint-Denis-sur-Loire, 41000]. </span><i>Trois ans après, il y a eu La Chesnaie</i><span style="font-style: normal;"> [à Chailles, 41120]</span><i>. La reprise, bien
longtemps après, de Saumery</i><span style="font-style: normal;"> [à
Huisseau-sur-Cosson, 41350]. (…) [Le château de] </span><i>Freschines</i><span style="font-style: normal;"> [à Villefrancoeur, 41330]. </span><i>Et puis après,
il y a eu autres choses, des complications de toutes sortes, si on peut dire. </i><span style="font-style: normal;">(…) (6’20’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhpPGyvCHhB7vMPPWDdJtBgh5fkbFrVaRvdkWdllMemNjSA7ddq76FI8SxfHhcxNca_QiX7YOeE5A5Jyt0DzUnzMIXkXRfN-2MAKDejMabAiQ52obB_OD6pg8HRWxzAxLZVhBms8rS6a0-D/s1600/image+6.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="283" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhpPGyvCHhB7vMPPWDdJtBgh5fkbFrVaRvdkWdllMemNjSA7ddq76FI8SxfHhcxNca_QiX7YOeE5A5Jyt0DzUnzMIXkXRfN-2MAKDejMabAiQ52obB_OD6pg8HRWxzAxLZVhBms8rS6a0-D/s1600/image+6.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Château de la clinique de La Borde, septembre 2018. (photos : ma pomme)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Jean Oury compare ces différents châteaux à des terres que
chaque personnel soignant ou pensionnaire doit cultiver en <i>jardinier</i><span style="font-style: normal;"> pour espérer y voir fleurir ses plus belles fleurs.
Il pousse l’image à plusieurs niveaux en parlant d’abord de </span><i>fumier</i><span style="font-style: normal;">, puis de </span><i>terreau</i><span style="font-style: normal;"> et enfin de « </span><i>sous-jacence </i><span style="font-style: normal;">». En 2002, année d’enregistrement de ces entretiens avec Pierre Babin,
la clinique de La Borde s’apprête à fêter ses 50 ans d’existence. </span><i>Il
y a eu des milliers de stagiaires qui sont venus. On est responsable d’une
quantité de gens qui sont devenus psychiatres. Moi j’étais un peu en huis clos
à un moment donné. Et puis, Il y a eu l’arrivée de Félix</i><span style="font-style: normal;"> [Guattari] </span><i>officiellement en 1955. Ça a
ouvert quelque chose, ce que j’appelle « l’invasion ». L’invasion de
types remarquables, de toutes sortes : des philosophes, des ethnologues,
des mathématiciens, des architectes, tout un tissu de rencontres, de mouvements
de toutes sortes.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Avec toutes
les dérives que ça peut </i><span style="font-style: normal;">[également] </span><i>supposer.</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>Je me souviens par exemple qu’après 1968, </i><span style="font-style: normal;">[il y avait] </span><i>ce que j’appelais les
soixante-huitards (pour moi, 68, ça a duré quinze jours, après ça a été
récupéré,</i><span style="font-style: normal;"> [mais il ne] </span><i>faut pas
dire ça) </i><span style="font-style: normal;">[c’est-à-dire] </span><i>des types
qui venaient de Paris pendant leur week-end, en disant : « On vient
là pour animer les malades. » Je les ai foutus dehors rapidement.</i><span style="font-style: normal;"> (11’12’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Pour conclure ce quatrième numéro et à l’invitation du producteur,
Jean Oury choisit de ramasser toute l’entreprise La Borde avec le mot
« connivence ». <i>Ce n’est pas de la sympathie. La connivence, du
fait même qu’il y a la liberté de circulation, d’expression à tous les niveaux,
que ce soient des schizophrènes ou des gens qui travaillent là, c’est tenir
compte sans trop le savoir des autres.</i><span style="font-style: normal;">
(23’37’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
À peine quittée, la connivence est de nouveau convoquée pour
introduire le dernier numéro d’<i>À voix nue</i><span style="font-style: normal;">.
Déclinée en « style » au sens employé par Peter Brown et Paul Veyne
dans </span><i>Genèse de l’Antiquité tardive</i><span style="font-style: normal;">,
puis en « attitude collective » d’après un terme lu dans </span><i>La
vocation actuelle de la sociologie </i><span style="font-style: normal;">de
Georges Gurvitch, la connivence assure une </span><i>possibilité de
tranquillité</i><span style="font-style: normal;">.
Elle est précédée d’une </span><i>ambiance</i><span style="font-style: normal;">
qui </span><i>entoure</i><span style="font-style: normal;"> les parties en
relation. De ce point de vue, la connivence ne se provoque pas. Elle
s’installe. </span><i>Il n’y a rien de pire</i><span style="font-style: normal;">
[que ce]</span><i> qui est frontal</i><span style="font-style: normal;">, dit
Jean Oury</span><i> </i><span style="font-style: normal;">(5’27’’). Le courant
qu'elle diffuse inspire le contact. Quand celui-ci est établi, les mots peuvent
se passer d’être dits. Pour la raison qu’ils </span><i>enferment</i><span style="font-style: normal;">. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
La connivence relève plus de (…) <i>quelque chose qui est du
niveau non pas du « dit », mais du « dire ». Non pas de la
parole et de la langue, du langage mais du « dire » même. Tout n’est
pas dit, mais c’est ça qui compte. Au sens de la distinction que fait Lévinas
entre le dire et le dit. Et le travail qu’on fait, c’est au niveau du dire.
Donc ça ne se dit pas forcément.</i><span style="font-style: normal;"> Le
producteur Pierre Babin appelle </span><i>le son Laborde</i><span style="font-style: normal;"> cette entente souterraine entre le personnel
soignant et les malades, qui est également valable pour les malades entre eux.
Cette vibration bienfaitrice pourrait gagner l’ensemble de la société si la
majorité des malades étaient moins confinée entre les murs des asiles. Ce à
quoi Jean Oury croit, au travers de la formule qu’il reconnaît </span><i>un peu
grandiose</i><span style="font-style: normal;"> de Lucien Bonnafé (1912-2003) qui
parlait de </span><i>potentiel soignant du peuple</i><span style="font-style: normal;"> (dans le deuxième numéro d’</span><i>À voix nue</i><span style="font-style: normal;">, 7’50’’). Soit l’espoir de frontières plus poreuses
entre la bulle asilaire et le monde extérieur. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwM5CHG_tVScanotmIhiPkEurs_XeSAIR1j1gLcVKOdJ8dF61rb0PZqRAdwpFp-aM1Cn_DCvJZnHgZXkUT3_e9ir1twyf0RNr3-QqjTLBAu2-w3RqCC7QMhRLL5hj6X4WL3OwTXxg04VHO/s1600/image+4.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="256" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwM5CHG_tVScanotmIhiPkEurs_XeSAIR1j1gLcVKOdJ8dF61rb0PZqRAdwpFp-aM1Cn_DCvJZnHgZXkUT3_e9ir1twyf0RNr3-QqjTLBAu2-w3RqCC7QMhRLL5hj6X4WL3OwTXxg04VHO/s1600/image+4.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes du film <i>La moindre des choses</i> de Nicolas Philibert (1996). À gauche, un pensionnaire est chargé du standard et à droite, un autre participe à la préparation des repas.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="text-align: justify;">
J’ouvre ici une parenthèse pour revenir sur la fin du
troisième numéro d’<i>À voix nue</i><span style="font-style: normal;"> dans
lequel Jean Oury est invité à parler de ses années de jeunesse. Le psychiatre
commençait d’y aborder la distinction entre le « dire » et le
« dit ». </span><i>Le langage, c’est une structure. À la limite, le
langage, ça ne se parle pas.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Ce
qui permet de parler, c’est la langue. On peut dire que la parole manifeste la
langue qui elle-même n’est possible que par le langage. Mais entre le langage
et la langue, il y a un abîme. Et alors, on retrouve très bien ce que dit
Lacan : « Tout ce qui est articulé n’est pas articulable », que
je double en disant la distinction au niveau du « dire » et du
« dit ». Ce qui compte dans l’existence, c’est le dire. Mais tout ce
qui est du dire ne peut pas être dit. Il y a là un abîme encore.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Si on ne parlait pas, il n’y aurait ni
dire, ni dit, ni langage, ni rien du tout. Il faut renverser la chose. C’est
par la parole que ça « peut ». Il y a une dialectique comme ça.</i><span style="font-style: normal;"> (22’45’’)</span></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Retour au dernier numéro d’<i>À voix nue</i><span style="font-style: normal;">. Jean Oury prolonge la réflexion sur la connivence en insistant sur
l’importance de l’accueil de la part des infirmiers notamment, accueil qu’il
appelle aussi la </span><i>disponibilité d’être là.</i><span style="font-style: normal;"> Cette qualité requiert de régler son pas sur celui des patients pour accéder aux</span><i> choses les plus
insolites, ce qui ne se voit pas.<span style="mso-spacerun: yes;">
</span>C’est souvent ce qui ne se voit pas qui compte, à condition d’être
en « veillance ».</i><span style="font-style: normal;"> (10’04’’)
Préférée à la « surveillance » ou à la « vigilance » aux connotations carcérales ou
policières plus marquées, la </span><span style="font-style: normal;"><i>veillance</i></span><span style="font-style: normal;"> dénote au contraire une horizontalité de l’attention saine entre les différents membres d’un établissement. Emmanuelle Guattari, fille de Félix Guattari (1930-1992), ne dit pas autre chose quand elle évoque ses souvenirs d’enfance. Au
micro de Jean Lebrun dans </span><i><a href="https://www.franceinter.fr/emissions/la-marche-de-l-histoire/la-marche-de-l-histoire-09-octobre-2014" target="_blank">La marche de l’histoire</a></i><span style="font-style: normal;"> (première diffusion le 09 octobre 2014 sur France
Inter), elle raconte qu’</span><i>il y avait un immense respect à La Borde, de
chaque singularité, de chaque personne. Il y avait un vouvoiement qui était
extrêmement respectueux.</i><span style="font-style: normal;"> (…) (17’00) <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgyiNJXtAoDVH68oV-k9jWZy0nGQr_RtFckvm5S0EctiYqRo_0NvtUnbEdWuPv9cq4c6IBWywXiRbR2PxjDgZIKO5JBdtT-4VohF3CojC3n8cDE2v1vj_OPzxpbixYJdgyam1xgEBITSTRL/s1600/image+7.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="257" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgyiNJXtAoDVH68oV-k9jWZy0nGQr_RtFckvm5S0EctiYqRo_0NvtUnbEdWuPv9cq4c6IBWywXiRbR2PxjDgZIKO5JBdtT-4VohF3CojC3n8cDE2v1vj_OPzxpbixYJdgyam1xgEBITSTRL/s1600/image+7.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Comme des airs d'Emmanuelle Guattari dans le visage de cette jeune femme captée au premier plan par Nicolas Philibert (à gauche) lors de la représentation donnée pour la kermesse annuelle organisée le 15 août à La Borde (à droite). Photogrammes de <i>La moindre des choses</i> (1996)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Si la connivence, <i>c’est tenir compte sans trop le savoir
des autres</i><span style="font-style: normal;">, une autre distinction qui lui
est subséquente est formulée treize ans auparavant par Jean Oury entre la sympathie
et l’empathie. En 1989, dans l’émission déjà citée </span><i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/profils-perdus-saint-alban-sur-limagnole-en-lozere-l-esprit-1" target="_blank">Profils perdus</a></i><span style="font-style: normal;"><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/profils-perdus-saint-alban-sur-limagnole-en-lozere-l-esprit-1" target="_blank"> : Saint-Alban-sur-Limagnole en Lozère, l’esprit d’un lieu 2/2</a>, le psychiatre explique au sujet des infirmiers à qui il donnait des cours </span><i>ce
que Max Scheler</i><span style="font-style: normal;"> (1874-1928)</span><i>
appelle dans</i><span style="font-style: normal;"> Nature et formes de la
sympathie (1913/1923) </span><i>la distinction qu’on fait dans les traductions
en français entre sympathie (verstehung) et empathie (einfühlung). </i><br />
<i><br /></i>
<i>L’empathie,
c’est d’être avec l’autre dans une espèce de confusion affective. On croit que
c’est de la sensibilité, mais c’est de la sensiblerie en fin de compte. Quand
l’autre se met à chialer, on chiale avec, alors ça n’en finit pas. Tandis que
la sympathie, c’est pour pouvoir respecter l’autre au maximum, d’être au plus
proche de lui (sans le toucher), garder une distance. Une distance affective.
Pour pouvoir se représenter ou sentir ce qu’il éprouve mais sans que ça fasse
un écho direct. À ce moment-là, l’autre est bien plus rassuré.</i><span style="font-style: normal;"> (43’34’’) Ces recommandations d’écoute valent aussi
bien pour les malades que pour le personnel soignant. Les groupes de paroles
jouent cette fonction. Jean Oury le dit nettement dans la dernière émission
diffusée un mois avant sa mort : </span><i>un infirmier qui n’est pas
soigné par un malade, ce n’est pas un infirmier. Si on se croit supérieur,
c’est qu’on est encore plus fou que les gens dont on s’occupe. Il n’y a pas de
distinction.</i><span style="font-style: normal;"> (</span><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/sur-les-docks-14-15/la-borde-une-clinique-psychiatrique-toujours-hors-norme" target="_blank"><i>Sur les docks </i>: La Borde, une clinique psychiatrique toujours hors-norme</a><span style="font-style: normal;"> (30’08’’),
première diffusion le 10 avril 2014) </span><br />
<br />
À la fin de sa vie, Jean Oury dresse un constat relativement
désabusé de la pratique de la psychothérapie institutionnelle. Dès 2002, à
l’âge de 78 ans, il s’en ouvre à Pierre Babin quelques minutes après le début
du premier numéro d’<i>À voix nue</i> : <i>Si on veut parler de psychothérapie
institutionnelle bien que ce soit un mot un peu bidon maintenant – on a presque
honte d’en parler parce que tout le monde en fait, mais ce n’est pas vrai – et
je reprends toujours ce que disait Tosquelles : « Ça n’existe
pas ! » La psychothérapie institutionnelle, si on veut prendre ce
terme, ça n’a lieu que si on y est, si on est dans le coup. Sinon, dès qu’on
tourne la tête, il n’y en a plus. Donc ça demande un travail permanent, 24h/24.</i><span style="font-style: normal;"> (5’45’’) Ce travail inclut la lutte contre les </span><i>arpenteurs</i><span style="font-style: normal;">, terme que Jean Oury emprunte à Kafka dans </span><i>Le
Château</i><span style="font-style: normal;"> (le bien nommé), c’est-à-dire des
fonctionnaires chargés de la mise aux normes des établissements et qui </span><i>ne
connaissent rien</i><span style="font-style: normal;"> à la psychiatrie. De
manière générale, c’est l’absence de formation qui est déplorée par Oury,
fustigeant pêle-mêle le cursus suivi par les infirmiers, la </span><i>suppression
massive des lits d’hospitalisation</i><span style="font-style: normal;">, et le </span><i>climat
administrativo-concentrationnaire.</i><br />
<div class="MsoNormal">
<span style="font-style: normal;"><i><br /></i></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;">*</span></div>
<span style="font-style: normal;">
<!--EndFragment--></span>
<span style="font-style: normal;"><b style="font-style: normal;"><span style="font-style: normal;"><b style="font-style: normal;"><br /></b></span>
Bonus</b> : pour aller plus loin, vous pouvez jeter une oreille à l'émission <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/creation-air/sister-la-borde" target="_blank"><i>Creation on air :</i> Sister à La Borde</a> (première diffusion le 15 septembre 2016) </span><span style="font-style: normal;"><span style="font-style: normal;"> à l'émission <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/une-histoire-particuliere-un-recit-documentaire-en-deux-parties/saint-alban-lieu-dhospitalite-12-un-asile-a-labri-de-la-folie-du-monde" target="_blank"><i>Une histoire particulière, un récit documentaire en deux parties</i> : Saint-Alban, lieu d'hospitalité - partie 1</a> (</span></span><span style="font-style: normal;"><span style="font-style: normal;"><span style="font-style: normal;"><span style="font-style: normal;">première diffusion le 23 novembre 2019</span></span> ; la <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/une-histoire-particuliere-un-recit-documentaire-en-deux-parties/saint-alban-lieu-dhospitalite-22-une-revolution-psychiatrique" target="_blank">partie 2</a> a été diffusée le 24 novembre 2019)</span> ou un oeil au film de Nicolas Philibert </span><span style="font-style: normal;"><i>La moindre des choses</i></span><span style="font-style: normal;"> <a href="https://www.youtube.com/watch?v=CKJp9JLqTkY" target="_blank">en accès libre sur You Tube</a>. à l'émission <i>Une histoire particulière, un récit documentaire en deux parties</i> a consacré deux émissions à l'hôpital de Saint-Alban : Saint-Alban, lieu d'hospitalité (<a href="https://www.franceculture.fr/emissions/une-histoire-particuliere-un-recit-documentaire-en-deux-parties/saint-alban-lieu-dhospitalite-12-un-asile-a-labri-de-la-folie-du-monde" target="_blank">partie 1</a> et <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/une-histoire-particuliere-un-recit-documentaire-en-deux-parties/saint-alban-lieu-dhospitalite-22-une-revolution-psychiatrique" target="_blank">partie 2</a>) (première diffusion le 23 et 24 novembre 2019)</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<br />
<div style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;">*</span></div>
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<span style="font-style: normal;"><b>>> <a href="https://drive.google.com/file/d/1uwKdQLoUrIzVHW8lkGeRgmOVLJYxt7iW/view?usp=sharing" target="_blank">Télécharger le PDF</a> </b>de ce post (8 pages, texte et images)</span></div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com4tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-78054845327429700882018-10-08T13:11:00.002+02:002018-10-08T15:17:48.821+02:00Appendice : Jeanne Moreau dans Les mardis du cinéma (04 décembre 1984)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<!--StartFragment-->
<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Le 27 avril 1983, France Culture diffusait une émission en
trois parties exclusivement consacrée à Jeanne Moreau intitulée <i>Comme ça</i><span style="font-style: normal;">. D’une durée totale de 3h45, cette archive <a href="https://www.franceculture.fr/cinema/la-mort-de-jeanne-moreau-comedienne-fleuve" target="_blank">déposée sur le site de France Culture</a> le jour de la mort de l’actrice le 31 juillet
2017 a été l’objet d’une brève recension dans un post sur ce blog à lire et écouter ici :
<a href="https://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.com/2017/08/jeanne-moreau-comme-ca-premiere.html" target="_blank">Jeanne Moreau : Comme ça (27 avril 1983) </a><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Un an plus tard, le 04 décembre 1984, la finesse d’analyse
et les souvenirs de Jeanne Moreau étaient de nouveau sollicités à l’occasion de
l’émission <i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/les-mardis-du-cinema-joseph-losey-parmi-les-siens-1ere-diffusion-04121984" target="_blank">Les mardis du cinéma : Joseph Losey parmi les siens</a></i><span style="font-style: normal;">, qui rendait hommage au cinéaste mort six mois plus
tôt, le 22 juin 1984. Interviewée par Dominique Rousset, l'héroïne du
film </span><i>Eva</i><span style="font-style: normal;"> (1962) revenait sur sa
collaboration étroite avec Joseph Losey, leur rencontre en Bretagne et leur
complicité sur les plateaux de cinéma. Ensemble, ils ont tourné trois
films : </span><i>Eva</i><span style="font-style: normal;"> (1962), </span><i>Monsieur Klein</i><span style="font-style: normal;"> (1976) et </span><i>La truite</i><span style="font-style: normal;"> (1982).</span></div>
<a name='more'></a><br />
<o:p></o:p>
<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Jeanne Moreau (28’00’’) : <i>J’ai connu Jo Losey à travers</i> The Criminal
[1960]<i>, le film qu’il avait fait avec Stanley Baker. Et à cette époque-là,
j’étais en discussion avec des producteurs français qui avaient acheté les
droits de</i> Eva <i>de James Hadley Chase. Par contrat, j’avais droit au choix du
metteur en scène. J’avais demandé Jean-Luc Godard. J’étais sous l’éblouissement
d’</i>À bout de souffle [1960]. <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>À la suite de tractations très compliquées, d’abandon, de
trahisons entre guillemets de Jean-Luc Godard, on s’est trouvé sans metteur en
scène. Entre temps, j’avais vu une projection des</i> Criminels<i>, et j’ai dit sans
avoir jamais vu en personne Joseph Losey : « Je pense que cet homme
pourrait faire</i> Eva. <i>» À cette époque-là, je louais pour les vacances un
château désaffecté dans un piteux état en Bretagne le château du Bilo </i>[<a href="https://www.letelegramme.fr/ar/viewarticle1024.php?aaaammjj=20010401&article=2525935&type=ar" target="_blank">détruit en 2001</a>]. </div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg7BTWRroDaLw1Tku0k_UeFelz4y0ByGacQUmTRR0uaIJv81llyLXvfz3Zrk4PJrYmQQzAadY2gehsxmzi3r5LJ-x-qsNYvrhPilI8wvdLzfnRcsSG9Sv8rGs0Yqgj8Bg36SThRN1KUWBdf/s1600/Bilo.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="231" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg7BTWRroDaLw1Tku0k_UeFelz4y0ByGacQUmTRR0uaIJv81llyLXvfz3Zrk4PJrYmQQzAadY2gehsxmzi3r5LJ-x-qsNYvrhPilI8wvdLzfnRcsSG9Sv8rGs0Yqgj8Bg36SThRN1KUWBdf/s1600/Bilo.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche, une carte postale du château du Bilo (non datée) et à droite, une photographie de sa destruction extraite d'un article du Télégramme (01 avril 2001).</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Joseph Losey a été contacté et un soir, il est arrivé dans ce château
en Bretagne. Il arrive qu’il pleuve et il pleuvait. J’écoutais beaucoup Billy
Holiday à l’époque et nous avons passé trois jours ensemble </i>[dans l’émission
<i>Comme ça</i>, elle évoquait huit jours]<i>. J’avais l’impression de quelqu’un qui
était un exilé.</i> (…) <i>Nous avons parlé de beaucoup de choses, mais il m’a surtout
parlé de lui. Après il a posé des questions sur moi. Notre accord s’est fait
immédiatement. Je trouve que Jo a la quintessence de ce qu’ont tous les artistes,
c’est-à-dire d’une façon complètement avouée cette bisexualité que nous avons
tous. Alors bien sûr quand on dit « bisexualité », les gens croient
que ça veut dire qu’on est capable de faire l’amour avec un homme ou une femme
avec autant d’aisance. Peut-être qu’il faut employer un autre mot, </i>[il vaudrait
mieux] <i>dire le côté androgyne. Cette exacerbation qu’ont tous les créateurs qui
fait qu’ils peuvent ressentir des émotions féminines ou des émotions
masculines, cette dualité, cette ambiguïté et si vous pensez aux images des
films de Jo, moi chaque fois que je passe devant un miroir, je pense aux films
de Losey. On voit beaucoup de plans de miroirs dans les films de Losey, mais
</i>[il] <i>les montre de façon tout à fait particulière et ça me rappelle un truc
qui m’est arrivé quand j’étais enfant et là, le miroir est important.</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhwo8YLb78nagm4d7qJg5r5kUx2qesMPrVqzjOxoH_fXfJjF3iZEFu6sWXsGuPyfnWSWqEXJ0g2HXDfuvoFWpqhbhf4OfmMAZH8ogTfyzRvfPvTUYOid_HoI6ENKuDtS7coSkGZtenBuQgG/s1600/the+servant+1+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="258" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhwo8YLb78nagm4d7qJg5r5kUx2qesMPrVqzjOxoH_fXfJjF3iZEFu6sWXsGuPyfnWSWqEXJ0g2HXDfuvoFWpqhbhf4OfmMAZH8ogTfyzRvfPvTUYOid_HoI6ENKuDtS7coSkGZtenBuQgG/s1600/the+servant+1+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes du film <i>The servant</i> de Joseph Losey (1963) dans lesquels les miroirs prolongent l'information initialement donnée dans le plan. À gauche, Tony (James Fox) ajuste son col de cravate. Devant et derrière lui, une succession de cadres dénote ses manières corsetées et le tournis qu'elles peuvent causer. À droite, le miroir renvoie l'image de deux nus féminins dessinés. Ils font écho à la position du personnage allongé au premier plan et laissent imaginer l'origine de ses fantasmes.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Un jour, mon père qui était très autoritaire comme tous les
pères – ça se faisait – me dit quelque chose de très désagréable et me menace
d’une punition corporelle et me tourne le dos. Et je lui tire la langue. Mais
il y avait un miroir et il l’a vu. Donc je l’ai eue, la fessée. Et les miroirs
servent à montrer ce qu’on ne verrait pas sans ça. Ce n’est pas simplement pour
montrer une image double mais ça montre quelque chose qu’on ne saurait pas
autrement.</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dominique Rousset : <i>Quels étaient vos rapports avec
lui, et comment il dirigeait les acteurs ?</i><o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Jeanne Moreau : <i>Oh, c’était très doux. On savait tout
l’un de l’autre. C’était formidable. C’était très tendre et très exalté. Très
enthousiaste. On était du même monde. On parlait sans se parler. Mais c’est ça
qu’on a avec tous les grands metteurs en scène. Et avec tous les metteurs avec
lesquels on s’entend. Il y avait une vraie jubilation.</i> (…) <i>Je l’ai revu
quelques semaines après son hospitalisation</i> [à Londres]<i>. Il est mort très déçu.
Très désenchanté. C’est ce que je regrette. </i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i><br /></i></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhLetGhyrlQ_hxKcOqFnriEHCnx9OeJ5pUZj4-nPzUR4qhaN5xw5ARiGXkMNvPRax-hqcWPWbAWoI8os1XnvXofOcHl6ddd9KyYT4kMwt5dLuKC46L_BOTJtsqIbJAQhFNj2bRRNbtSHYQB/s1600/the+servant+2+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="257" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhLetGhyrlQ_hxKcOqFnriEHCnx9OeJ5pUZj4-nPzUR4qhaN5xw5ARiGXkMNvPRax-hqcWPWbAWoI8os1XnvXofOcHl6ddd9KyYT4kMwt5dLuKC46L_BOTJtsqIbJAQhFNj2bRRNbtSHYQB/s1600/the+servant+2+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes de<i> The servant </i>de Joseph Losey (1963). À gauche, le miroir suspendu au fond de la pièce laisse voir entrer Barrett (Dirk Bogard) dans la scène qui s'immisce entre les deux personnages couchés du premier plan (James Fox et Wendy Craig). À droite, le miroir convexe déformant joue le même rôle.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i><br /></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-54701309260937701152018-09-15T23:51:00.000+02:002018-12-12T00:15:37.926+01:00Les speakers de la Radiodiffusion : Tribune de Paris (05 août 1947 + 08 octobre 1948)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<!--StartFragment-->
<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1PfSc8ygDBWlJ-pY4IE6qTpnsOtJBKESd" target="_blank">Télécharger le PDF</a></b> de ce post (9 pages, texte et images) <br />
<br />
Rien n’a changé depuis les années 1950. Il est toujours
aussi difficile pour un professionnel de la radio de s’exprimer correctement,
sinon convenablement au micro. Savonnages, fautes de langue, défaut d'articulation, hésitations sont courants à l'antenne, <i>a fortiori</i> quand les voix sont nouvelles et un peu tétanisées par l'enjeu du direct. Ceux qu’on appelle aujourd’hui les « producteurs » racontent souvent ce rêve qu’ils ont en commun de se retrouver face
à un invité au sujet duquel ils ont tout oublié. Une scène onirique qui
traduit l’angoisse du savoir friable mais aussi la pression des responsabilités,
et peut-être en creux la fragilité de l'expérience. Si cette dernière n’émerge
pas à leurs consciences, au moins les auditeurs sont-ils en droit de se la
poser, quand en allumant par exemple leur poste à l’écoute des programmes
actuels de France Culture, ils subissent un niveau de langue familier et des
phrases dénuées de construction syntaxique. C’était une parenthèse. <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Il faut croire, dans ce qui va suivre, que les performances
mises en oeuvre par les producteurs diffèrent peu de celles réalisées autrefois
par les « speakers ». <i>A priori</i> guère différents de leurs homologues télévisuels, les speakers radiophoniques étaient des lecteurs agiles de textes dont ils n’étaient
pas les auteurs, mais qu’au besoin ils amendaient ou corrigeaient grâce à leur
culture générale. Pour cette raison, ils entraient sur concours à la radiodiffusion à l'issue d'épreuves multiples et difficiles.<br />
<br />
Guidés par le même souci d’être compris, les producteurs
comme les speakers n’ont (et n'avaient) pas d’autres choix que de convertir un texte écrit en
langue « vivante » pour gagner l'attention des auditeurs. Cette anticipation orale du papier est appelée le <i>style radiophonique </i>par <span style="font-style: normal;">André Delacour qui l'emploie en 1947 dans l’émission la
</span><i>Tribune de Paris </i><span style="font-style: normal;">intitulée : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/tribune-de-paris-proces-du-speaker-de-radio-1ere-diffusion" target="_blank">Procès du speaker de radio</a> (première diffusion le 05 août 1947
sur le programme national) :</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
10’57’’ : <i>Il faudrait arriver tout de même à prendre
une habitude d’esprit qui deviendrait une habitude de langage. Et alors, petit
à petit, à éliminer de sa pensée tout ce qui est accessoire</i> (...)<i>.
Mais enfin, il faudrait faire pour un style radiophonique ce que faisait le
fameux dessinateur</i> [Jean-Louis] <i>Forain</i> (1852-1931) <i>pour ses caricatures. Il
faisait un dessin complet, puis il effaçait trait par trait tous ceux qui
n’étaient pas essentiels. Il en gardait trois ou quatre caractéristiques et qui
donnaient à ses dessins un relief extraordinaire. Il faudrait faire exactement
la même chose pour les textes radiophoniques. </i><o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
C’est grâce à l’émission <i>Radio archives, </i><span style="font-style: normal;">produite par Claire Chancel, intitulée : Les speakers à
la radio (première diffusion le 02 novembre 1990) réunissant des extraits de
deux numéros de la </span><i>Tribune de Paris</i><span style="font-style: normal;"> que nous avons pris connaissance des débats soulevés par la légitimité des speakers à la radio. Entre 1947 et 1948, leur rôle et leur place sont âprement disputés sur la place publique et même franchement contestés. </span><span style="font-style: normal;">À l’écoute des éléments mis en jeu, chacun
constatera le haut niveau d’exigence demandé de part et d’autre du poste à ces passeurs, et
reconnaîtra la contemporanéité des thèmes débattus : la langue et sa prononciation, la course à l’information, la compétence des
professionnels, les récriminations des auditeurs.</span><br />
<a name='more'></a></div>
<div style="text-align: center;">
<br />
*</div>
<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Commençons par définir le speaker. André Delacour (1882-1958), <i>ancien
rédacteur en chef du journal parlé de la tour Eiffel</i><span style="font-style: normal;">, que nous venons à l’instant de citer, développe une série de qualités
qui dévoilent les multiples facettes du métier. Dans l’émission déjà mentionnée
ci-dessus, il base d’abord sa réflexion sur la confusion possible entre les
journalistes d’un côté et les lecteurs radiophoniques de l’autre:</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans la<a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/tribune-de-paris-proces-du-speaker-de-radio-1ere-diffusion" target="_blank"> <i>Tribune de Paris</i></a>, le 05 août 1947 : (…) <i>Très souvent, le procès des speakers n’est
autre que le procès des auteurs. En effet, depuis que nous avons commencé de parler
à la radio, surtout depuis que nous avons fait des journaux parlés, nous avons
cherché ce que l’on appelle le style proprement radiophonique. Un style parlé,
qui soit différent du style écrit et qui cependant ait toutes les qualités de
correction, d’élégance et d’harmonie, du style que nous pouvons lire dans les
plus beaux livres de la littérature. Pour moi, je crois que ce style parlé doit
d’abord être très simple, très clair, d’une concision parfaite et en plus de
ça, qu’il soit harmonieux. Il faut pour se bien faire comprendre que l’on
écrive en phrases courtes. D’ailleurs, quand les phrases sont courtes, elles
ont plus de chance d’être correctes et on ne peut pas demander à tous les
auteurs d’avoir la virtuosité de Théophile Gautier qui disait : « De
quelque manière que je lance ma phrase, je suis sûr qu’elle est comme les
chats, qu’elle retombera toujours sur ses pieds ». Il faut aussi je crois
avoir des formules saisissantes. C’est par ces formules-là qu’on accroche
l’esprit du lecteur. Il faut aussi avoir des images qui frappent, images qui
permettent à l’auditeur, lorsqu’il ne comprend pas bien, de voir au moins, ou
d’imaginer ce que son esprit ne conçoit d’une façon tout à fait claire. Et
enfin, j’ai l’impression qu’il faut qu’on parle en même temps avec harmonie. Et
quand je parle de parler harmonieusement, ce n’est pas simplement qu’une phrase
soit bien faite, que tous les mots s’y accordent très bien, mais je veux parler
d’un ton général, d’une sorte de mouvement de style que la plupart du temps les
auteurs qui écrivent ou qui parlent à la radio n’observent pas, et que même
lorsqu’ils les observent, les speakers eux, ne retrouvent pas toujours. Et
c’est là, alors, qu’après avoir fait le procès des auteurs, je reviens au
procès qu’on peut faire aux speakers, c’est que très souvent les speakers qui
ont été choisis pour leurs belles voix, pour leurs qualités d’artistes
dramatiques usent et abusent de cette voix. </i>(…) (3'05'')<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Quelle leçon pour les producteurs d'aujourd'hui adeptes des questions à rallonge (<i>Il faut pour se bien faire comprendre que l’on écrive en phrases courtes)</i> qui n'en sont parfois même plus, mais que l'auditeur doit comprendre comme telles !<br />
<br />
Retour aux préceptes d'André Delacour. Évacué le style littéraire plus ou moins radiophonique des
auteurs indépendant de la volonté du speaker, le journaliste pointe ensuite les
travers directement imputables au métier du lecteur. <i>Si le
speaker est en même temps un improvisateur, et qu’il devienne</i> (…) <i>une sorte de
meneur de jeu, alors là véritablement, il doit avoir ces facultés-là, et
c’est très difficile à trouver. Mais la plupart du temps, on lui demande de
lire un texte. Et ce qui m’a choqué souvent, </i>[c’est qu’] <i>il n’a pas pris le
temps d’étudier ce texte, soit qu’on lui ait donné trop tard, soit qu’il ait été
mal transcrit parce que là aussi, il faudrait faire le<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>procès des dactylo, alors bien entendu,
il lui arrive de faire des lapsus, </i>(…) <i>et là, c’est très dangereux, et très
regrettable.</i> (7’35’)<br />
<br />
Une fois de plus, les torts sont partagés entre les différents intermédiaires
contribuant à la circulation du papier, la faute au temps qui presse chacun
d’eux de délivrer un message parfois inachevé. <i>Il est très
certain qu’en effet la radio est esclave de la rapidité de l’information et la
plupart du temps, quand je m’occupais du journal parlé de la tour Eiffel, on
nous apportait des textes même quand j’étais au micro et qui quelquefois
m’obligeaient à changer tout à fait le sens de ma chronique.</i> (10’06’’) Ainsi, comme le dit plus
loin le producteur de l’émission Paul Guimard, <i>si les fautes commises ne
sont peut-être pas excusables, elles sont tout au moins très explicables</i><span style="font-style: normal;">.</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Autour de la table de cette émission ingénieusement conçue
comme un procès, Pierre Mazars (1921-1985) qui <i>dépose ici au titre de</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>secrétaire de la rédaction du Figaro
littéraire</i><span style="font-style: normal;">, complète l'intervention d'André Delacour. En premier lieu, il dégage le </span><i>rôle
affectif et sentimental</i><span style="font-style: normal;"> dévolu presque indirectement au speaker,
qui reçoit parfois </span><i>des déclarations d’amour</i><span style="font-style: normal;"> de la part des auditeurs (-trices). En second lieu, il formule
</span><i>son principal grief.</i><span style="font-style: normal;"><i style="font-style: normal;"> </i><i>Il faudrait donc lorsqu’il s’agit d’improvisation que le speaker
possède une maîtrise de lui-même et de sa langue assez solide pour lui éviter
des impairs, de façon que les auditeurs de l’étranger ne puissent pas prendre
exemple des speakers et de leurs fautes, pour modifier la connaissance
rudimentaire qu’ils ont de la langue française.</i> (</span>14’18’’) <i> </i>Cet argument reviendra un peu plus loin sous la plume du linguiste Albert Dauzat.</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
S’il peut donner l’impression de ne pas comprendre tous les
sujets qui lui sont donnés à lire, le speaker n’en est pas moins un
professionnel dont la culture a été testée lors d’un concours d’admission dont
les épreuves successives sont détaillées par Patrick Saint-Maurice (on
n’imagine pas les résultats de ce concours avec les producteurs officiant
actuellement sur la chaîne…). <i>Il y a d’abord un essai de voix,
qu’il faut passer victorieusement évidemment. Ensuite, une épreuve écrite
éliminatoire sur un sujet varié et d’ordre général qui dure 4 heures. Ensuite,
pour les candidats ayant passé avec succès ces deux épreuves, six épreuves qui
comportent : 1. la lecture d’un texte littéraire et d’un texte comportant
des difficultés de prononciation. 2. La lecture d’un texte littéraire
descriptif. 3. La lecture de textes littéraires comportant des mots en anglais,
en allemand, en espagnol, en italien et en latin. 4. La lecture d’informations
diverses et présentations de programmes artistiques comportant des noms
d’œuvres de compositeurs et d’auteurs présentant de particulières difficultés
de prononciation, des erreurs d’attribution et des coquilles intentionnelles.
5. La lecture d’une poésie. 6. Une épreuve de présence d’esprit, improvisation,
annonces d’excuses, etc.</i> (23'52'')</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Permettons-nous d’anticiper sur l’émission commentée ensuite ci-dessous pour confirmer ce point. Joe Lefeubvre (orthographe incertaine),
dans la <i>Tribune de Paris</i> du 08 octobre 1948 nous apprend en effet que <i>les conditions de
recrutement des speakers sont extrêmement dures, puisque le pourcentage de
réception est de 2% pour plusieurs centaines de candidats. Les examens portent
sur des questions de voix, de couleurs de timbres, mais on leur tend tous les
pièges qu’ils risquent de trouver. Ils ont des textes comportant des mots
étrangers : anglais, allemand, italien, etc. On leur donne des
improvisations à faire, des histoires d’annonces au dernier moment qu’ils</i>
[doivent] <i>trouve</i>[r]<i>, des textes avec des erreurs d’attribution. Par exemple, on
leur demandera d’annoncer</i> La danse macabre <i>de Debussy et</i> La boîte à joujoux <i>de
Saint-Saëns. Il faut donc que le speaker rectifie à mesure. </i>(…)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Compte tenu des qualités indéniables qui certifient son
entrée à la radiodiffusion française, Yves Grosrichard (1907-1992) conclut avec sagesse que
les reproches adressés au speaker concernent finalement moins les aptitudes de
l’homme de radio que les turbulences inhérentes à la fonction. Il
poursuit : <i>Je sais par les lettres que je reçois qu’il est impossible de satisfaire
tout le monde. On peut en effet classer ces lettres en trois catégories
importantes : deux extrêmes que sont d’une part les puristes et d’autre
part les ignorants. Et puis, dans le milieu, la grosse majorité qui demande
essentiellement à comprendre tout ce que dit le speaker. Si on cherche à
satisfaire les puristes qui sont une minorité, d’abord on y arrivera
difficilement, parce que qui dit puriste dit bien souvent maniaque et en tout
cas, on mécontentera la plus grosse partie des auditeurs.</i> (…) <i>Il est bon en
conséquence je crois, de se tenir dans une juste moyenne qui tout en conservant
à la langue sa correction, tient compte cependant de l’usage quitte à s’exposer
aux récriminations des puristes et des pédants, qu’il s’agisse de la
prononciation de mots étrangers d’ailleurs comme de celle si controversée de
bien des mots français. </i><o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
*<o:p></o:p></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg0kEOMt8C76smngz-YQ4_0UawjIYgnKqAwz-aCB1RdOPSEjy6ncCaprmCWkbG9_9B5JjN8jAoMLRHMuABjc4xdVwo0f6KDk8PfFKFmvDHgAql5_9ojhhv-UI35c9NZHyoepXD6JpdpraFN/s1600/lecture+microfilm.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="450" data-original-width="300" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg0kEOMt8C76smngz-YQ4_0UawjIYgnKqAwz-aCB1RdOPSEjy6ncCaprmCWkbG9_9B5JjN8jAoMLRHMuABjc4xdVwo0f6KDk8PfFKFmvDHgAql5_9ojhhv-UI35c9NZHyoepXD6JpdpraFN/s1600/lecture+microfilm.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photographie du microfilm du journal <i>Le Monde</i> à partir duquel les chroniques d'Albert Dauzat ont pu être lues à la Bibliothèque Publique d'Information (Paris). Celles-ci peuvent également être consultées sur le site du journal moyennant un abonnement.</td></tr>
</tbody></table>
Le débat sur le métier se poursuit l’année suivante, dans
une émission de la <i>Tribune de Paris</i> intitulée : Les speakers et la langue
française : les speakers parlent-ils mal ? (première diffusion le 08 octobre 1948 sur le programme national). Celle-ci prend appui sur
une chronique publiée dans <i>Le Monde</i> la semaine précédente par Albert Dauzat (1877-1955) intitulée <i>Phonétique, liaisons et élision</i>. Invité à débattre dans l’émission,
le linguiste a défendu ses prises de position avant de donner une suite
médiatique à la controverse lancée <i>via</i> deux autres chroniques publiées les 13
et 27 octobre 1948. En attendant d’en rendre compte dans le détail, revenons
d’abord sur <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1948/09/29/phonetique-liaisons-et-elision_1908395_1819218.html?xtmc=elision&xtcr=3" target="_blank">la première d’entre elles parue le 29 septembre 1948</a>. Albert Dauzat
y écrit sans détours : <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Voilà longtemps que de nombreux lecteurs me demandent de
critiquer la prononciation des speakers de la radio, j’espère qu’ils n’auront
pas perdu à attendre. </i><br />
<i> Il est navrant en effet de constater qu’un service
officiel massacre à ce point la langue française. </i>(…)<br />
<i> Sans doute serait-il
injuste de trop généraliser. Je reconnais même que la radio a vulgarisé la
prononciation correcte de certains noms propres, en particulier de noms étrangers.
Mais en revanche, que d’erreurs, que de fautes qui tendent à accréditer les
façons de parler les plus vicieuses, alors que la radiodiffusion devrait et
pourrait avoir un si beau rôle : celui de répandre en France la bonne
prononciation du français. </i>(…)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Il suffirait d’envoyer les speakers à l’école, à la bonne
école. La direction de la radiodiffusion ignore-t-elle</i> (…) <i>que la Sorbonne a un
institut de phonétique où il est donné un enseignement rationnel de
prononciation française et qu’un enseignement analogue existe dans les
universités de province</i> [?]<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>(…)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Que reproche-t-on aux speakers ? Le maître de la
phonétique, l’auteur du meilleur traité de prononciation française Maurice
Grammont (décédé voilà quelques années), a groupé et analysé les critiques
auxquelles prête la prononciation des speakers dans un article du </i>Français
moderne<i> d’avril 1940.</i> [<a href="https://fr.calameo.com/read/0009039472379a2419b25" target="_blank">accessible en ligne, pages 105-108</a>] <i>Malheureusement il
n’a été tenu aucun compte de ce travail et les critiques formulées voilà plus de huit
ans restent toujours valables.</i> (…)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Sans entrer dans le détail, disons simplement que les
défauts de diction se classent sous plusieurs chefs, d’importance
inégale : prononciation vicieuse de mots isolés </i>(dompter, gageure,
<i>prononcés</i> dompeter, gajeure)<i> ; prononciations provinciales, méridionnales
surtout (par exemple</i> brin <i>pour</i> brun ; <i>« le</i> di <i>mai », le dix
mai), prononciation emphatique de la consonne double dans les mots où celle-ci
est purement graphique (la chanson et le vaudeville ont justement tourné en ridicule
– mais sans résultat – les</i> al-ler <i>et les</i> mol-lets <i>des speakers), enfin liaisons
effectuées ou plus souvent encore omises à contresens et fausses liaisons (ou
« cuirs ») qui ne sont pas toujours, hélas, </i>des lapsus linguae. (…)<br />
<br />
<i>Faire trop de liaisons est pédant, ne pas en faire assez est vulgaire. </i>(…)
<i>C’est d’abord une question de milieu, de circonstances : telle liaison qui
paraitrait prétentieuse dans une conversation familière sera à sa place dans
une conférence. </i>(…)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Le français est une langue liée, tant au point de vue de la
prononciation que de la syntaxe. Mais cette tendance a ses dangers – et ses
limites. Le danger, ce sont les homonymies de groupe et les amphibologies</i>
[double sens présenté par une proposition] <i>qui en résultent.</i> (…)<br />
<i>C’est pour
cette raison qu’on tend, à l’heure actuelle, à éviter la liaison devant les
noms propres, afin de mieux les détacher : ainsi on ne fait pas entendre
le</i> z <i>en disant </i>chez Alfred. (…)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Retour à l’émission la <i>Tribune de Paris</i> où ont été conviés
avec Albert Dauzat, Pierre Descaves, André Delacour, Joe Lefeubvre et Charles
Bassompierre (speaker). Aux arguments techniques répétés au micro par le
linguiste Albert Dauzat, Pierre Descaves (1896-1966) oppose la valeur affective des voix qui lui
parlent : (…) <i>Quand j’écoute la radio, d’abord j’ai le sentiment d’écouter
l’univers. Et puis ensuite, j’ai le sentiment d’écouter la France. Il ne m’est
pas désagréable d’écouter les accents, et même d’écouter des hiatus à moins
qu’ils ne se prolongent et tout ça comme on dit, il faut de tout pour faire un
monde. La radio n’est pas obligatoirement et unilatéralement une question
d’art. Il faut pour faire la radio vivante que toutes les expressions s’y
manifestent. Je sais bien le souci d’Albert Dauzat et je lui rends hommage. Il
voudrait que tout fût parfait, mais on ne peut pas, à la radio surtout, étant
donné le débit qu’il y a, étant donné les conditions malaisées dans lesquelles
travaillent nos amis les speakers</i> (…)<i> : au dernier moment on leur passe
une note, au troisième moment on leur demande d’arranger un texte. Vous savez
tout de même que la sélection est faite d’une façon extrêmement sérieuse.</i>
(…)<span style="mso-spacerun: yes;"> </span><o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Quant à André Delacour, il réfute également les arguments
posés dans la chronique du <i>Monde.</i> <i>Je ne crois pas comme le dit
Descaves, </i>[qu’]<i> il soit si nécessaire que cela d’aller comme monsieur Dauzat le
suggère prendre des leçons de phonétique. Je crois qu’il faut avoir simplement
de la culture et qu’il faut en tout, comme pour la prosodie, avoir de
l’oreille. Parce qu’il y a des liaisons qu’il faut appuyer, et d’autres au
contraire sur lesquelles il faut glisser. </i>(…) (<o:p></o:p>31’03’’)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
En dernier lieu, la parole revient à Charles Bassompierre (1911-1984),
speaker. <i>Comme monsieur Delacour l’a indiqué, on prend
trop souvent les speakers pour des orateurs qui sont des journalistes, des chroniqueurs,
voire des présentateurs d’émissions de variétés par exemple, qui parlent à la
radio mais qui n’en seront pas des speakers pour autant. </i>(…) <i>Je voudrais
ajouter simplement ceci : on vous a parlé du concours d’entrée qui est en
effet très difficile. Il y a également des connaissances musicales assez
approfondies à avoir. D’autre part, les speakers qui sont en activité depuis
20, 15, 5 ans sont des gens qui professent, qui par conséquent font des progrès
en professant d’une part, mais qui également se livrent continuellement à un
travail personnel. Et je vous assure que les speakers en activité lisent tous
les livres de phonétique, connaissent le</i> [Philippe] <i>Martinon</i> [<a href="https://archive.org/stream/commentonprononc00martuoft#page/n5" target="_blank">Comment on prononce le Français, Traité complet de prononciation pratique avec les noms propres et les mots étrangers</a>, 1913]<i>, les dictionnaires de Furetière, Maurice
Grammont, Littré aussi naturellement, et même s’occupent de phoniatrie, et je
citerai les ouvrages publiés par le docteur Garde, qui nous intéressent
énormément sur le placement de la voix, sur le timbre, sur même la disparition
des zézaiements, etc. </i>(<o:p></o:p>34’40’’)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
À l'écoute de ses interlocuteurs, Albert Dauzat conclut sans dévier de sa ligne : <i>L’art de parler en public,
c’est une technique qui doit être apprise.</i> (…) <i>Par conséquent, il ne serait pas
mauvais d’aider la bonne volonté des speakers, qui est certainement évidente en
les envoyant prendre des leçons à l’institut de phonétique où on leur
apprendrait des choses assez délicates qu’ils ne sont pas obligés de savoir car
j’estime, contrairement à ce que dit mon excellent confrère Pierre Descaves que
le rôle de la radio, c’est de propager la bonne prononciation française, car la
mauvaise prononciation sera imitée. Nous avons tout de même une norme qui est
la prononciation de la société cultivée de Paris. </i>Ce dernier argument qui prête aujourd'hui à sourire est néanmoins toujours vif (quoique tu) dans le traitement de l'information à France Culture.<o:p></o:p><br />
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgGmFRlvg8AXZdaNqfOgY52K9Gmf6WRwlEP9rSullZwZp-d9tiOGorViIhq0DCUMRIkuXPHxNDmtjHfB7ZqGSQF2501LbeG6c_dW7DErYNgB2fi6xj4dTFPkc_uP5yCLlfE0qTzfZ90b9Vl/s1600/prononciation.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="657" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgGmFRlvg8AXZdaNqfOgY52K9Gmf6WRwlEP9rSullZwZp-d9tiOGorViIhq0DCUMRIkuXPHxNDmtjHfB7ZqGSQF2501LbeG6c_dW7DErYNgB2fi6xj4dTFPkc_uP5yCLlfE0qTzfZ90b9Vl/s1600/prononciation.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Exemples des ouvrages consultés par les speakers, cités par Charles Bassompierre en 1948.</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
*<o:p></o:p></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Voici pour finir les conclusions tirées par Albert Dauzat
à la suite de cette émission. Dans sa chronique bimensuelle <i>La défense de la langue
française</i> publiée par le journal <i>Le Monde</i>, il écrit le 13 octobre 1948, sous le titre <i><a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1948/10/13/le-plaidoyer-de-la-radiodiffusion_1899982_1819218.html?xtmc=plaidoyer&xtcr=2" target="_blank">Le plaidoyer de la Radiodiffusion</a></i> :<br />
<br />
<i>Dans
ma dernière chronique je me suis fait l’écho des nombreuses protestations d’auditeurs
de la Radiodiffusion qui se plaignaient de la prononciation trop souvent
défectueuse des speakers.</i> (…)<br />
<i> Belle joueuse, la radio m’a convoqué chez elle
où, dans un entretien courtois pour une émission de la Tribune de Paris, j’ai
pu rappeler les principaux griefs, sous les feux convergents de quatre
contradicteurs, avocats de la maison : contre-offensive menée avec fougue
et brio par mon excellent confrère Pierre Descaves. J’ai tenu mes positions.
</i>(…)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Seul Pierre Descaves a soutenu que la prononciation n’a pas
d’importance ; mais peut-il ne pas souffrir en entendant dire « le
maréchal</i> Fok <i>», et n’aura-t-il pas l’oreille écorchée le jour où on
l’appellera – cela viendra ! – </i>Desscaves <i>?</i><o:p></o:p><br />
<br />
<i> Il</i> <i>me reproche de vouloir l’uniformité et la perfection, et il défend les
prononciations régionales et populaires, qui apportent à la radio la variété de
la vie.</i> (…)<br />
<i>Mais la radiodiffusion ne saurait être un échantillonnage pour
curieux. Avant tout elle a, elle doit avoir un rôle très haut, quoique d’ordre
pratique : chez nous instruire les Français ; à l’extérieur propager
la langue française. Sa prononciation, ses tournures, son style sont, seront
copiés par des milliers d’auditeurs. Il importe donc – pour ne s’en tenir qu’au
dernier point – qu’elle propage la bonne prononciation française, car il n’y en
a qu’une, celle de la société cultivée de Paris, qui gagne peu à peu toute la
France. </i>(…)<br />
<br />
<i>La
prononciation en public est une technique, comme le chant, qui ne s’improvise
pas et qui demande des leçons. En particulier pour les noms propres. Comment
les speakers sauraient-ils par exemple s’ils ne l’ont pas appris que</i> ch <i>en fin
de mot se prononce</i> k <i>dans les noms alsaciens ou allemands comme</i> Bach, <i>mais</i> ch
<i>dans</i> Foch, <i>parce qu’il s’agit d’un nom gascon (ancienne prononciation
dialectale de la ville de Foix) ? Que la prononciation traditionnelle</i>
Monté-Carle <i>(</i>Monte-Carlo<i>) est la prononciation italienne assimilée par
l’oreille ? </i>(...) <i>Que </i>Gestapo <i>doit se
lire </i>Guestapo <i>et non</i> Jestapo<i>, comme on l’entend couramment ?</i> (…)<br />
<br />
<div style="text-align: center;">
*</div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Le 27 octobre
1948, dans une ultime chronique intitulée <i><a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1948/10/27/conclusion-du-debat-sur-la-radiodiffusion_1900858_1819218.html?xtmc=radiodiffusion&xtcr=7" target="_blank">Conclusion du débat sur la Radiodiffusion</a></i>, Albert Dauzat ne se lasse pas d’enfoncer le clou :<br />
<br />
(…) <i>Pour en revenir à la prononciation des émissions il est temps de clore le
débat. Après la défense des porte-parole de la radio, le dernier mot doit
rester aux usagers.</i><br />
<i><o:p></o:p></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i> Ceux-ci
répliquent que les lapsus sont vraiment trop nombreux : on entend trop
souvent </i>allocation <i>pour</i> allocution<i>, sans compter quelques perles récentes,
comme</i> commandant <i>de la Légion d’honneur, ou le</i> poittail <i>du maréchal Montgomery
constellé de décorations. Quant aux fautes de prononciation on m’en cite encore
de nombreuses parmi lesquelles je relève « Marie-Antoinette dans sa</i>
gé-ôle <i>», le dieu grec</i> Zeus <i>lu zéüs (comme le latin</i> Deus<i>, bien
sûr !),</i> arque <i>de triomphe, le dix</i> jouin <i>(non, ce n’est pas joint !)
et une virtuose de la harpe annoncée </i>unn’ n’arpiste <i>avec redoublement et
élision (un complet !). </i>(…)<br />
<i>Il est temps que cela cesse. Le
public, qui paie, a le droit de l’exiger. Je répète mes désiderata, appuyés par
mes lecteurs, et que j’adresse à M. Porché.</i><br />
<i> D’abord lever l’anonymat des
auxiliaires, afin qu’on n’attribue pas aux speakers ce qui ne leur appartient
point : que chacun prenne nommément ses responsabilités.</i><br />
<i> Ensuite que la Radiodiffusion
n’engage pas ou n’engage plus les personnes qui écorchent le français.</i><br />
<i> Enfin et surtout que le directeur
se mette en rapport avec l’institut de phonétique de la Sorbonne pour faire
donner des cours de prononciation aux speakers, cours qui seraient ouverts à
tous ceux qui parlent ou qui désirent parler à la radio.</i><br />
(…) <i>Les speakers sont recrutés au
concours : un examen difficile, soit, mais comment l’ont-ils préparé ? Au
petit bonheur, sans directions précises, sans enseignement. Il n’y a pas
d’école préparatoire, et c’est fâcheux. Il faut donc combler cette lacune. </i>(…)<br />
<i>Au théâtre, mais plus encore
à la radio, la prononciation des noms propres étrangers est une des questions
les plus difficiles. D’une façon générale on doit se rapprocher de la
prononciation de la langue étrangère, mais en se servant uniquement de sons
français.</i><br />
<i>Voici
par exemple, la question du</i> ch <i>allemand de </i>Bach. <i>Ceux qui veulent dire </i>Bar <i>ne
connaissent guère la prononciation allemande. Le</i> ch <i>« dur » allemand
ne se prononce ni</i> k <i>ni</i> r <i>: c’est une vélaire fricative, que nous ne
possédons pas en français. Force est donc – puisque nous parlons français et
non allemand – de le remplacer par le son le plus voisin, qui est</i> k <i>et non</i>
r <i>: solution appuyée par l’usage et l’étymologie, car le </i>ch <i>allemand est
un ancien</i> k <i>qui s’est aspiré, à preuve l’anglais</i> Book <i>et le hollandais </i>Boek <i>qui
correspondent à l’allemand</i> Buch<i>, livre.</i> (…)<br />
<br />
Arrivé au bout de ces écoutes et lectures, on mesure combien tous les exemples patiemment collectés par les différents intervenants pour nourrir le débat, ce durant plus de deux années, visent la production d'une radio de qualité, depuis son contenu écrit jusqu'à sa forme parlée. Personne ne serait capable de mener une telle réflexion aujourd'hui à France Culture, malheureusement plus travaillée par sa communication que par son offre radiophonique. Et pourtant, il reste une annonceuse, traduction française du speaker qui ne regroupe pas les mêmes activités, qui chaque jour informe d'une douce voix les auditeurs des programmes à venir.<br />
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
*</div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>Bonus</b> : les Nuits de France Culture nous ont offert
d’écouter le professeur Pierre Fouché (1891-1967) passer au crible de la
« bonne » prononciation plusieurs mots de la langue française :
fils, fiancé, pied, meurtrier, nier, août, asthme. Entre les héritages
silencieusement véhiculés par les racines latines, l’usage local, la
métamorphose des syllabes et la prononciation progressive des dernières lettres
muettes (mœurs devient mœurS, exact devient exaCT), Pierre Fouché rend compte
des fluctuations de la langue française dans ce <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/centre-d-etudes-radiophoniques-pierre-fouche-cours-de" target="_blank">cours de prononciation</a> <o:p></o:p>(première diffusion le 10 mars 1954).<br />
<br />
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1PfSc8ygDBWlJ-pY4IE6qTpnsOtJBKESd" target="_blank">Télécharger le PDF</a></b> (9 pages, texte et images) </div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-20302368485774815632018-06-17T18:42:00.000+02:002018-12-12T00:15:51.443+01:00Guimard et l'art nouveau : Métropolitains (19 novembre 2003) : le Castel Béranger (1-3)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1g2WUigwwPTL54maXRePam2p6lxuVDf10" target="_blank">Télécharger le PDF</a> </b>de ce post (9 pages, texte et images) <br />
<i><br /></i>
<i>Il existe un monde Guimard, et d’une certaine manière, ce
monde est totalitaire, visuellement s’entend</i><span style="font-style: normal;">,
dit Alain Blondel dans son introduction à la journée d’études organisée le 13
octobre 2017 au musée des arts décoratifs, intitulée : </span><i><a href="http://madparis.fr/francais/nous/presentation/ressources-et-recherche/seminaires-colloques-et-journees-d-etudes/journee-d-etudes-autour-d-hector-guimard-pour-le-150e-anniversaire-de-sa" target="_blank">Autour d’Hector Guimard pour le 150e anniversaire de sa naissance</a></i><span style="font-style: normal;">. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Un monde Guimard, sans doute, mais d’émissions d’envergure
qui s'ingénient à le présenter, une seule en 60 ans selon l’Inathèque, toutes
radios confondues. On peine à le croire. En attendant de voir un jour ou
l’autre le programme des <i>Nuits</i> de France Culture exhumer quelques trésors des
archives (les lacunes régulièrement observées dans les référencements nous le
laissent raisonnablement espérer), réjouissons-nous d’écouter l’émission <i>Métropolitains</i><span style="font-style: normal;"> diffusée le 19 novembre 2003 : Hector Guimard
et l’art nouveau. François Chaslin y recevait Roger-Henri Guerrand (1923-2006),
Jean-Pierre Lyonnet, Frédéric Descouturelle, André Mignard (ingénieur à la
R.A.T.P.), David Poullard et Michel Rodriguez (conducteur de métro). <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Soyons francs, l’émission est brouillonne et la parole mal
distribuée. Les invités spécialistes de Guimard n’ont pas le loisir de
s’exprimer en longueur et l’un d’entre eux, David Poullard, typographe, est
même oublié dans le débat. Dans l’espoir de
fortifier ces malheureuses 35 minutes cumulées d’émission consacrées à Guimard,
j’ai choisi de suivre comme fil rouge les éléments de la discussion en les
adossant à d’autres sources de connaissance : web, textuelles et
visuelles.</div>
<a name='more'></a><div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<br />
*<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Né en 1867 à Lyon et mort à New-York en 1942, Hector Guimard
ne devrait sa <i>disparition des mémoires</i><span style="font-style: normal;">
qu’au succès inversement proportionnel mais éclair de l’art nouveau </span><i>qui
n’a pas duré plus de 6 ou 7 ans, entre 1898 et 1903-1904</i>, dit l'un des intervenants.<span style="font-style: normal;"> Modérons quelque peu cette assertion. S’il
est admis qu’Hector Guimard découvre l’art nouveau à Bruxelles, berceau du
mouvement, à l’été 1895 (en copiant notamment la façade de la maison de Paul
Hankar au n°71 rue Defacqz), il veille également à s’en démarquer. À
l’esthétique naturaliste de l’art nouveau, Guimard oppose dès sa première
construction (le Castel Béranger) un style symptomatique qu’il ne convient pas
de définir en un mot ou deux comme le font, pressés par la fuite du direct, les
invités de l’émission </span><i>Métropolitains</i>. Mais avant d’en venir à la littérature exclusivement réservée au
Castel Béranger, écoutons Frédéric Descouturelle distinguer dans le temps long de
l’œuvre les périodes successives qui le composent.<br />
<br />
<a href="https://www.youtube.com/watch?v=QHxzlnCjP04" target="_blank">Au cours d’une conférence</a> qu’il a donnée le 13 octobre 2017 dans le cadre de la
journée d’études citée en introduction, l’auteur (également invité de <i>Métropolitains</i><span style="font-style: normal;"> 14 ans plus tôt) découpe l'évolution du style
Guimard en 5 points (en gras, ce qui sera développé dans ce post et le suivant) : 1/ </span><i>Une très brève période proto-art
nouveau dans laquelle on retrouve des motifs issus de la nature</i><span style="font-style: normal;"> (cf. l’école de Nancy) <b>2/ </b></span><b><i>La
conversion vers l’art nouveau avec un style organique, presque abstrait</i></b><span style="font-style: normal;"><b> (…) [au] </b></span><b><i>caractère</i></b><span style="font-style: normal;"><b> (…) </b></span><b><i>presque sauvage</i></b><span style="font-style: normal;"><b> (le Castel Béranger) 3/ </b></span><b><i>Une
période plus maîtrisée, où les lignes sont plus tendues, presque arborescentes</i></b><span style="font-style: normal;"><b> (1898-1900) (le Castel Henriette) </b></span>4/
La recherche d’une <i>élégance</i><span style="font-style: normal;"> et d’une
filiation au style français du XVIIIe 5/ La période art déco où les matériaux
de construction ont pris le relais des formes décoratives (qui existent
toujours dans le style art nouveau mais localement) pour </span><i>rythmer</i><span style="font-style: normal;"> les plans (immeuble du 36-38 rue Greuze, Paris 16<sup>e</sup>).</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
De manière générale, les conférences données au Musée des
Arts Décoratifs ont l’avantage, en plus d’être scientifiquement accessibles, de
partager un grand nombre de références littéraires historiques. Nous savons
gré tout particulièrement à <a href="https://www.youtube.com/watch?v=MePjH6yuvK0" target="_blank">Agathe Bigand-Marion</a> et <a href="https://www.youtube.com/watch?v=77d_k4naG1c" target="_blank">Jérémie Cerman</a> de la rigueur avec laquelle ils les ont données. Grâce à ces
documents retrouvables facilement en ligne sur le site de la B.N.F. (Gallica),
nous allons retracer la réception du premier édifice construit et pensé sous
tous ses angles par Guimard : le Castel Béranger.</div>
<div class="MsoNormal">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoBodyText" style="text-align: justify;">
<i>L’histoire du Castel Béranger débute en 1894 quand Hector
Guimard, 27 ans à l’époque, reçoit la commande de Madame Veuve Fournier d’un
immeuble de rapport à construire au 12 rue La Fontaine à Paris (le numéro
oscillera ensuite entre le 12 et le 16, la plaque en fonte fixée sur la façade
se fixant sur le 14). Sa construction s‘étale de 1895 à 1897, et connaît des
modifications radicales du second œuvre à la suite du séjour de Guimard à
Bruxelles, où il fait la rencontre de Victor Horta et d’architectures
revendiquées comme modernes.</i><span style="font-style: normal;"> On ne saurait
mieux résumer la généalogie du Castel Béranger telle qu’elle a été écrite par
Agathe Bigand-Marion, Laurent Bouttaz, Frédéric Descouturelle dans <a href="http://www.lecercleguimard.fr/fr/nos-recherches/dossiers/lalbum-du-castel-beranger/" target="_blank">l’article du site Internet du cercle Guimard</a>. Ajoutons seulement que l’immeuble comprend
trois corps de bâtiments de six étages et 38 appartements aménagés, et qu’il a
été lauréat le 28 mars 1899, avec 5 autres demeures, du premier concours de
façades organisé par la Ville de Paris.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoBodyText">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiS3yZXqP0lQxFBuApKeC5MbS10ZF8Fe6LCIY2YyqhglDFAhFx9A7BpPoRMg6vXWjWsplMqG2HlHxAtCyG81DfJ0JH8-CE1txKgvwOR3Sn9mwNEuLCqpHaolKif5W9DrYUKKTCeu5MdIWPT/s1600/Le+Castel+Be%25CC%2581ranger+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="505" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiS3yZXqP0lQxFBuApKeC5MbS10ZF8Fe6LCIY2YyqhglDFAhFx9A7BpPoRMg6vXWjWsplMqG2HlHxAtCyG81DfJ0JH8-CE1txKgvwOR3Sn9mwNEuLCqpHaolKif5W9DrYUKKTCeu5MdIWPT/s1600/Le+Castel+Be%25CC%2581ranger+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Exceptions faites de la porte d'entrée et des pièces intérieures, il est difficile de recueillir de bonnes photographies de l'architecture. Les planches aquarellées de<a href="http://www.e-rara.ch/doi/10.3931/e-rara-27774" target="_blank"> l'album du Castel Béranger </a>(édité par Guimard pour le promouvoir) d'après clichés sont à ce titre fort utiles. Ici, suivant la table des matières, la vue générale du Castel Béranger (à gauche) et sa façade sur la rue Fontaine (à droite) (planches 1 et 2)<span class="Apple-style-span" style="font-size: small;">.</span></td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Les critiques contemporains de Guimard s’accordent sur un
point. Loué ou vilipendé, le Castel Béranger dépareille si vivement dans
l’environnement répétitif des immeubles parisiens qu’il interpelle
immanquablement l’œil des passants. Remontons le temps. Dans le n°33 du
périodique <i>Le mois littéraire et pittoresque</i><span style="font-style: normal;"> de septembre 1901, Abel Fabre écrit (<a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5800059j/f298.item.r=Vaudremer" target="_blank">page 294</a>) : <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoBodyText" style="text-align: justify;">
<i>Les rues de la capitale de nos grandes villes, où
s’alignent, froides et prétentieuses, de solennelles maisons toujours les
mêmes, dotées des mêmes balcons que supportent les mêmes corniches, ornées des
mêmes piliers classiques que surmontent les mêmes frontons, où l’appareil de
construction disparaît sous des formes illogiques sans rapport avec lui, où la
décoration sculpturale, habituellement hors d’échelle, s’accroche partout en
parasite sauf aux parties vitales qu’elle devrait seules orner, sont de nature
à faire apprécier une construction </i><span style="font-style: normal;">[le Castel
Béranger]</span> <i>de ce genre</i>.<span style="font-style: normal;"> Emile Molinier,
dans le mensuel </span><i>Art et décoration</i><span style="font-style: normal;"> de
mars 1899, pourtant réservé quant à cette soudaine construction, partage le
même constat (<a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5401498c/f96.item" target="_blank">page 77</a>) : (…) </span><i>Exaspéré sans doute – il y a de quoi –
par la banalité et, disons le mot, la bêtise de la plupart des maisons à loyers
de Paris,</i><span style="font-style: normal;"> [Guimard] </span><i>a cherché à
donner à sa construction un aspect séduisant. </i> Il est rejoint par Henry Eon dans un
article dont la date (octobre 1897) prouve le retentissement immédiat causé par
le Castel dès son achèvement, à la fin du XIXe siècle : <i>Je suis allé
pour cela au « Castel Béranger » à Passy, et me suis trouvé en
présence d’une façade architecturale un peu compliquée peut-être, mais qui, de
prime abord, avec ses balcons forgés, ses gargouilles, ses masques, ses
ouvertures cintrées, m’a paru rompre heureusement avec les traditions
classiques et monotones de nos architectes actuels. À l’examen, cette façade
surprend plus qu’elle ne plaît. </i><span style="font-style: normal;">(dans le
bi-mensuel </span><i>La plume</i><span style="font-style: normal;">, <a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k15601c/f650.item.r=guimard" target="_blank">page 647</a>)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans cet immeuble de rapport : 1. le premier art d’ordinaire essentiellement fonctionnel,
l’architecture, fusionne avec un deuxième, l'art décoratif, qui lui est d'égale importance. 2. L’introduction du fer et de la céramique dans les constructions conduit Guimard à articuler au sein des façades plusieurs matériaux dotés de
qualités et de couleurs différentes. 3. Mû par une vision sans doute au départ
utopique, il fait correspondre dans les moindres détails édification extérieure
et aménagements intérieurs (parties communes et appartements) grâce à une unité
de style. 4. La sensation d’immersion qui en résulte ne peut qu’entrer en
opposition avec les immeubles de facture dite classique affublés d’un <i>minable
parallélisme</i><span style="font-style: normal;"> (Paul Signac dans </span><i><a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k15539s/f318.item" target="_blank">La revue blanche</a></i><span style="font-style: normal;">, 15 février 1899).</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiV6S1bodzLgJVK3aYCHCfxI-ZBQZKM-BqXWx8j3IpkkFEf7lxil59m6LHPkLjXND6myerOyRqcCdEpEdwEnxgOMV3LUEXW2ED9DKKkjYo8wjGqL_OI_gYsyM3OafhEvsfvOLWz_wlGcvTD/s1600/vestibule+castel+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="314" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiV6S1bodzLgJVK3aYCHCfxI-ZBQZKM-BqXWx8j3IpkkFEf7lxil59m6LHPkLjXND6myerOyRqcCdEpEdwEnxgOMV3LUEXW2ED9DKKkjYo8wjGqL_OI_gYsyM3OafhEvsfvOLWz_wlGcvTD/s1600/vestibule+castel+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche, entrée principale du Castel Béranger (photo de <a href="https://www.flickr.com/photos/thompsonphotography1/9620627063/in/photolist-Ti9hFS-RWVWPP-ZmE7UA-em6ZaZ-21ZLcdm-TQmA2r-26M1x2R-fE9efp-YeCHKb-q1CmJf-9akK5Z-b36Lsc-919Gtj-WxdWFN-hSNWLt-oBgYnA-b8ndTF-fcWcPz-2245ra1-c2qhc-WxdWEq-SxQaaW-8kYj29-aEKu6-9dFm5X-mEB5Yx-aGFgbi-hRRkRQ-pp4zkc-DBhWBr-W1epWE-24k4bwz-bxXAQB-8GVJZ3-dMP8eH-hJewvu-9auhWS-ebyd3W-YZq71S-Z1s5uW-aGFfDp-8kNUk5-hjG3Te-nXMEEb-8C8XBv-i9jrtR-dYKz5F-gUFpao-fDaUgC-bpciDF/" target="_blank">A. Thompson</a>) ; à droite, le vestibule (photo de <a href="https://www.flickr.com/photos/dalbera/5479376792/in/photolist-9mkJtz-9m993T-9mc8kd-9mc65d-9m92tx-9mc88q-9m9ck6-9m9ddF-9m9548-9mcg3w-9m9a6P-9mcePE-9m9bnD-9qmrRf-9kgVtp-9kjQGE-9kjBQq-9kk6oC-9kkbWL-8jGwim-8kYj29-8kYGy9-9mgPkd-8kQros-8kNUk5-8VVENX-8PcMSb-8PPZmh-8kLwBm-8kMgce-8kQqu3-8kMfdR-8kQqDQ-8kQrjb-8kMfPP-8kNTNs-8kKGqV-8kNU4y-57wqYw-4YMPqE-4WXVnU-4WTeZa-4WTeRV-4UVHmP-4UVHrk-4gPmZ4-4gPmVV-4gTrey-4gTr43-4gTqXd" target="_blank">Jean-Pierre Dalbéra</a>)<a href="https://www.blogger.com/"></a></td></tr>
</tbody></table>
Pour ces raisons, envisager le Castel Béranger comme une oeuvre d'art total est permis sur le plan historique et concevable sur le plan artistique. Ménageons une petite
pause radiophonique pour l’expliquer. Dans une série des <i>Chemins de la
connaissance</i><span style="font-style: normal;"> (du 09 au 13 juin 2003),
Marcella Lista, historienne d’art, revient sur l’origine de la notion d’œuvre
d’art total telle qu’elle a été écrite par Richard Wagner. (…) </span><i>Dans
la première version que Wagner donne de l’art total dans son livre </i><span style="font-style: normal;">L’œuvre d’art de l’avenir</span><i> de 1849, il place
la poésie au sommet de tous les arts. C’est-à-dire que l’œuvre d’art total
serait composée d’une alliance entre la danse, la musique en deuxième position,
puis la poésie qui serait l’art le plus pur, le plus immatériel. C’est
seulement après avoir lu les écrits de Schopenhauer qui place la musique au
sommet de tous les arts</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>que
Wagner va réorienter complètement sa hiérarchie des arts et placer la musique
au somment de cette hiérarchie.</i><span style="font-style: normal;"> (8’42’’)
Mis en pratique, (…) </span><i>il est clair que la scène et les moyens
spectaculaires mis en œuvre notamment dans la construction du théâtre de
Bayreuth favorisaient cette idée d’une image à laquelle le public devait
adhérer sans détour, c’est-à-dire dans laquelle il devait s’absorber
complètement. Je rappelle les innovations apportées par Wagner. Déjà il plonge
la salle dans l’obscurité, ce qui est une nouveauté au XIXe siècle et il crée
cette fameuse fosse mystique qui permet à l’orchestre de devenir invisible,
d’être plongé sous le niveau des spectateurs.</i><span style="font-style: normal;">
(…) </span><i>Donc tout contribue à la création d’une image onirique.</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Pas d'oeuvre d'art total sans la participation active d'un public, et dans le cas du Castel Béranger, de ses habitants, qui font un
avec l’oeuvre. Comme vu plus haut, les critiques jouent aussi leur part dans la réception de l'immeuble en publiant des articles en nombre - à l'origine, aussi, de la renommée de Guimard. Parmi eux, on compte le désormais fameux Jean
Rameau, dont les mots visent juste, en maintenant la réalisation à son premier degré de lecture <span style="font-style: normal;">:</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgI1eJ5vvRouJfB8fJ-c9I-CafAnqFZnFzeZnv_hHaQZGmGRP9C3ji3Eq1mSMxrSHsnl3cO6bOTrQuLJhlI60v2Hv7-lEY4lRhIVOofEDM9YVBjcELVzFiOFR_nOsOO-arCb4r46PTr3cUl/s1600/Gaulois+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="742" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgI1eJ5vvRouJfB8fJ-c9I-CafAnqFZnFzeZnv_hHaQZGmGRP9C3ji3Eq1mSMxrSHsnl3cO6bOTrQuLJhlI60v2Hv7-lEY4lRhIVOofEDM9YVBjcELVzFiOFR_nOsOO-arCb4r46PTr3cUl/s1600/Gaulois+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Critique de Jean Rameau, paru dans <a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k530596n.item" target="_blank"><i>Le Gaulois</i> </a>à l'occasion du premier concours de façades organisé par la ville de Paris (lundi 03 avril 1899)<span class="Apple-style-span" style="font-size: small;"> </span></td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Je me suis empressé d’aller porter mes hommages à la
première lauréate, que les journaux signalaient à Auteuil, dans la rue du bon
La Fontaine ; et ce petit voyage m’a enchanté.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>On l’appelle</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>la
maison des diables. Ce nom est assez justifié. Il y a, du rez-de-chaussée à la
toiture, une folle ascension de figures grimaçantes, de croupes fantastiques,
où l’artiste voulut peut-être représenter des chimères, mais où le populaire
voit surtout des démons, et qui font se signer à vingt pas toutes les vieilles
femmes de l’arrondissement. Il y a des diables aux portes, des diables aux
fenêtres, des diables aux soupiraux des caves, des diables aux balcons et aux
vitraux, et l’on m’assure qu’à l’intérieur, les rampes d’escalier, les boutons
de fourneaux, les clés des placards, tout, depuis le grand salon jusqu’à
l’office, est de la même diablerie. Si Dieu ne protège plus la France, le
diable du moins semble protéger Auteuil. Parisiens, dormez en paix.<o:p></o:p></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEilRgyRrdCFnGdvb9mgUCPQQptUtOIkHtnp90UHcfL4ZiHEm0k7l-eMQxuJ_uUDv3KEsUxnNUhsbeXzIvYyMU-sfQbw2TGrIilntVEGLjt-9o89cP0uqLYmPhzPnnZYF5dBhJ39gVV1Qm43/s1600/diablerie+pti+def+2.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="393" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEilRgyRrdCFnGdvb9mgUCPQQptUtOIkHtnp90UHcfL4ZiHEm0k7l-eMQxuJ_uUDv3KEsUxnNUhsbeXzIvYyMU-sfQbw2TGrIilntVEGLjt-9o89cP0uqLYmPhzPnnZYF5dBhJ39gVV1Qm43/s1600/diablerie+pti+def+2.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche : planche 22 de l'album du Castel Béranger (détail) incluant notamment une ancre de chaînage (hippocampe, haut) et un motif décoratif des balcons. Au centre, un fragment de la planche 23 représentant un détail du support de grille du hameau Béranger. (une figure anthropomorphe cornue est facilement projetable...). À droite, photographie de la grille du hameau par <a href="https://www.flickr.com/photos/51366740@N07/35796602086/in/photolist-bSteGc-ecuucw-eciTgr-pPWQin-8upkX1-e91qke-3T5yEf-8AU1kF-fCT3h8-dLSoam-WxdWEA-Hv5pVo-dug5Fm-Gj7PTV-eGM9HF-dJPyo4-vVM1Y3-qF58CS-rCW8VM-h6Ldg-PtJvh-WxdWDy-gT512V-e8R6tD-qGeLmp-8GSgWe-vVLYVd-F9XJVg-ij8bM7-h5MmHV-fCT94p-FZto7V-or1MPN-pp4zpa-ZHxNBp-fCT8mg-pw8VvF-ebQj4Q-ecuu8s-fCTmKF-eEr5mJ-bd8738-5mfZPN-aaV1ts-nrdq-Z1s5uA-c9z7QW-fCSXXZ-cFpNsj-8jGwim" target="_blank">Yvette G.</a><span class="Apple-style-span" style="font-size: small;"> </span></td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Imprimer sa marque de fabrique du sol au plafond peut
occasionner des réactions viscérales (l’architecture de Guimard parle au corps
et indéniablement du corps) comme susciter des élans enthousiastes, à
l’exemple du peintre Paul Signac qui a publié dans <i><a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k15539s/f319.item" target="_blank">La revue blanche</a></i><span style="font-style: normal;"> citée plus haut un texte élogieux relatif au Castel
Béranger. Selon lui, </span><i>rien d’inutile</i><span style="font-style: normal;">
(…)</span><i>, rien d’inexplicable dans cette décoration. Les motifs
d’ornementation ne seront pas des objets quelconques de flore ou de faune, mais
des lignes imposées par la destination, l’usage, la nécessité.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Car l’architectonique de M. Guimard,
sous une apparence fantaisiste est de pure logique. Telle courbe d’aspect
capricieux s’explique par des raisons d’hygiène, tel ornement de physionomie
paradoxale est par l’isorrhopastique, tels matériaux hétéroclites par
l’économique utilisation de ressources nouvelles</i><span style="font-style: normal;"> (15 février 1899, page 318).<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
En dernier lieu, on l’entrevoit depuis le début, reste
l’épineuse question du style qui contamine tout. N'est-il qu'un parasite qui tourmente l'esprit et déforme l'espace architectural ? (position de Jean Rameau) Ou bien un ingénieux décor qui dissimule une lecture souterraine accessible grâce à une observation fine ? (position de Paul Signac) Définir un style qui vit à des lieues de formes préhensibles est un exercice délicat qui requiert des trouvailles de vocabulaire ou de langue originale pour être caractérisé.<br />
<br />
Dans l’émission <i>Métropolitains</i><span style="font-style: normal;"> du 19 novembre 2003, non à proprement parler du
Castel Béranger, les invités passent sans s’arrêter sur le caractère </span><i>abstrait</i><span style="font-style: normal;"> des lignes de Guimard, </span><i>avec une propension à la
turgescence</i><span style="font-style: normal;"> (Jean-Pierre Lyonnet). Au début
du XXe siècle, le journaliste Abel Fabre (convoqué plus haut) avoue aussi manquer
de prises lexicales pour décrire les appartements du Castel (<a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5800059j/f299.item.r=Vaudremer" target="_blank">page 295</a>) : (…) </span><i>il
me faudrait une plume d’une richesse byzantine pour éveiller à l’imagination du
lecteur l’éblouissant spectacle de ces salles si colorées où une imagination exubérante,
trop peut-être, créa pour le plaisir des yeux des formes non déjà vues.</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> Mais à la fin de son papier, il produit une comparaison qui éveille tout à coup l'imagination.</span> (<a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5800059j/f300.item.r=Vaudremer" target="_blank">page 296</a>) : (…) </span><i>Le système décoratif de M. Guimard
est basé sur l’emploi exclusif d’un seul élément, la ligne. Avec lui, plus de
feuilles, ni de fleurs stylisées comme avec Grasset, ni de tiges rubanées comme
chez les Belges, mais une simple inflexion sinueuse qui se déroule et s’étend,
capricieuse et rythmique.</i><span style="font-style: normal;"> (…) [Mais] </span><i>Je
ne lui</i><span style="font-style: normal;"> [Guimard] </span><i>apprendrai rien
en lui disant par exemple, que tel motif de ses papiers peints ressemble à un
microbe grossi au microscope. (</i><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span><i>Le mois littéraire et pittoresque,</i><span style="font-style: normal;"> septembre 1901)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh_2iRrB0FvZRCjd8MxqE_cObs0lVlJEys_3uXeWa11_IMRhLym_CC1733EYT0dSQYF3JTLLf975d8X3vsQQF-I6fSDDuYGvOxVuwmNYs0VSh8JSpn2YdvPDjqMrd1KL6RAqlzdH0hXxwwV/s1600/papier+peint+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="463" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh_2iRrB0FvZRCjd8MxqE_cObs0lVlJEys_3uXeWa11_IMRhLym_CC1733EYT0dSQYF3JTLLf975d8X3vsQQF-I6fSDDuYGvOxVuwmNYs0VSh8JSpn2YdvPDjqMrd1KL6RAqlzdH0hXxwwV/s1600/papier+peint+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche et à droite : les planches 46 et 47 du papier peint discuté par le critique Abel Fabre dans son article publié dans <i>Le mois littéraire et pittoresque</i> au centre (septembre 1901, page 302). Destiné à la salle à manger, ce papier peint est composé d'une frise en haut (les <i>microbes</i>...) et d'une bordure en bas (voir<a href="https://www.youtube.com/watch?v=77d_k4naG1c" target="_blank"> la conférence de Jérémie Cerman</a> pour plus d'informations).</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Avant Abel Fabre, Émile Molinier, dans son article « Le Castel Béranger » publié
dans <i>Art et décoration</i><span style="font-style: normal;"> de mars 1899, accusait déjà Guimard de contrevenir au bon ordre du goût architectural au point de postuler, sur le registre de la métaphore, une cause d'origine biologique à ce trouble</span><span style="font-style: normal;"> (<a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5401498c/f96.item" target="_blank">page 77</a>) : </span><i>On est en présence d’un
individu qui ne procède historiquement de rien, qui peut avoir ses qualités,
mais qui juxtaposé avec ses congénères prend tout de suite l’apparence d’un cas
de tératologie</i><span style="font-style: normal;"> (la tératologie est la
science qui étudie la malformation des êtres vivants, d’après <i>Le Petit Robert</i></span><span style="font-style: normal;">). De là à faire du style Guimard le point de départ d'une maladie virale, il n'y a qu'un pas.</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZC5g81MsQ9Y2CizN-kbdX6OLvL0sPZ99rtgH-oulPRwefDTfpCDLLlQ6FWBxAIiFUh6lbSQptxjhB5YJxIsG4HpTfZ7YXVzQVv-WdlxidfxnpfSHtTjTRIUmW9GNlQ3sLVpt0NkSUccve/s1600/amolissement+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="406" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZC5g81MsQ9Y2CizN-kbdX6OLvL0sPZ99rtgH-oulPRwefDTfpCDLLlQ6FWBxAIiFUh6lbSQptxjhB5YJxIsG4HpTfZ7YXVzQVv-WdlxidfxnpfSHtTjTRIUmW9GNlQ3sLVpt0NkSUccve/s1600/amolissement+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche, planche 9 de l'album du Castel Béranger : encorbellement d'angle sur le hameau. À droite, la planche 35, avec dans sa moitié supérieure les poignées en cuivre des portes sur palier.</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
Mais déterminé à comprendre la nature de son ressentiment, Molinier a le mérite d'approfondir sa description des motifs qui ornent l’architecture
de Guimard. La faune reconnaissable en un coup d’œil (chat, chauve-souris,
hippocampe) et la sinuosité des lignes à connotation végétale l’intéressent
moins que la précision du vocabulaire dédié à son objet de recherche : (…) <i>Pour
accommoder cette sculpture</i><span style="font-style: normal;"> (…), </span><i>on
s’est cru obligé d’en arrondir tous les angles, de l’amollir, de lui retirer la
fermeté qui doit être un des caractères de la sculpture ; tout est
enveloppé dans une sorte de gangue qui noie les profils et l’expression.</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>De quoi
rappeler les mots de Frédéric Descouturelle qui, dans ses pas, évoque à la vue
des </span><i>potelets des entourages de métro</i><span style="font-style: normal;">
parisien une impression </span><i>d’écoulement</i><span style="font-style: normal;">,
</span><i>un petit peu comme si une matière visqueuse se faisait attirer vers
le bas par la pesanteur</i><span style="font-style: normal;">. (<a href="https://www.youtube.com/watch?v=QHxzlnCjP04" target="_blank">conférence donnée au musée des arts décoratifs</a>). Cette viscosité une fois pétrifiée peut encore suggérer des excroissances squelettiques à lire Molinier qui décrit, au moment d’entrer dans le Castel Béranger, la </span><i>maigreur</i><span style="font-style: normal;"> du
mobilier, où </span><i>les angles, les bases s’engraissent quelque peu, de
façon à former de véritables apophyses</i><span style="font-style: normal;">
[éminence à la surface d’un os, <i>Le petit Robert</i>], </span><i>qui font dire à
quelques-uns que ces meubles ont l’air d’être construits avec des os.</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgH1Dpe8EZBrgW-tCAR_43urcw1Xx3r2TR07YxCR50lNhy4DptK8cJ00ZM_cNvjXge_axzok-dZg_5Z6i6Dlbo9vd1AEdwxHAiEYcwcFXoXzjpOzwYe9ik1_RE9U6HOBpTlveeAMYQCBcdM/s1600/os+cheval+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="429" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgH1Dpe8EZBrgW-tCAR_43urcw1Xx3r2TR07YxCR50lNhy4DptK8cJ00ZM_cNvjXge_axzok-dZg_5Z6i6Dlbo9vd1AEdwxHAiEYcwcFXoXzjpOzwYe9ik1_RE9U6HOBpTlveeAMYQCBcdM/s1600/os+cheval+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche : planche 58 : trépied (et son armature osseuse...) et cache-pot en grès (ensemble et détails) . À droite, la porte d'entrée du Castel Béranger (crédits photo : <a href="http://lartnouveau.com/artistes/guimard/lafontaine_14/accueil/cast_port2.htm" target="_blank">lartnouveau.com</a>)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Écouter ou lire les spécialistes de Guimard détailler les traits saillants de son style est passionnant au sens où le regard multiplie les projections de tous ordres. Prenons par exemple, la ferronnerie de la porte du Castel Béranger. Ses lignes sont communément associées au dessin formé par la lanière d'un fouet. Mais rien n'empêche d'y voir les profils allusifs d'instruments de musique ou les lettres d'un alphabet délirant. Si le regard s'attarde, il peut même arriver à croire que la porte est montée à l'envers, c'est-à-dire vue depuis la rue comme si elle l'était depuis l'intérieur du Castel, en raison peut-être de la structure asymétrique des volutes. Ces brèves tentatives de définitions travaillées de l'intérieur ont l'avantage de garder en alerte l'esprit et de vivifier l'imagination en faisant usage d'autres mots que ceux couramment admis en architecture.<br />
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b><br /></b></div>
<b>Lire la suite >></b> <a href="https://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.com/2018/06/guimard-et-lart-nouveau-metropolitains_17.html" target="_blank">Guimard et l'art nouveau : Métropolitains (19 novembre 2003) : l'ouverture du métro (2-3)</a><br />
<b>Appendice >></b> <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.com/2018/06/guimard-et-lart-nouveau-le-castel_7.html" target="_blank">Guimard et l'art nouveau : Le Castel Henriette au cinéma (3-3)</a><br />
<br />Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-27785270481365358972018-06-17T18:00:00.000+02:002018-12-12T00:16:05.186+01:00Guimard et l'art nouveau : Métropolitains (19 novembre 2003) : l'ouverture du métro (2-3)<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1v2yny3HzNY1ZPRnVm7gKQkTAMr7Y1b3w" target="_blank">Télécharger le PDF</a></b> de ce post (8 pages, texte et images) <br />
<br />
Après avoir détaillé la réception du castel Béranger par ses critiques à la fin du XIXe siècle, revenons à l'écoute de l'émission <i>Métropolitains</i> diffusée sur France Culture le 19 novembre 2003. Dans cette deuxième partie, nous évoquerons précisément les ensembles conçus par Guimard pour le métropolitain.<br />
<br />
<div style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;">*</span></div>
<br />
<span style="font-style: normal;">Dans son livre </span><i>Guimard perdu :
histoire d’une méprise</i><span style="font-style: normal;">, Jean-Pierre Lyonnet
documente, depuis les plans architecturaux qu’il redessine jusqu’aux vestiges
des édifices détruits, les traces du </span><i>désastre</i><span style="font-style: normal;"> Guimard. À 23’55’’ : François Chaslin, producteur
de l’émission : </span><i>En peu d’années, </i>[Guimard]<i> mène à leur terme 53
projets, 3 étaient provisoires, donc c’est normal qu’ils aient été détruits, deux
</i><span style="font-style: normal;">[ont été]</span><i> victimes de la guerre -
dont la villa La Surprise à Cabourg, et 21 détruites. Cela fait 26 sur 53,
presque la moitié</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Le premier
</i><span style="font-style: normal;">[projet]</span><i> est détruit presque
instantanément : La salle Humbert de Romans, au bout de 4, 5 ans</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Et puis, il y a ces villas
extraordinaires, le Castel Henriette par exemple, qui perd son campanile dès la
première année, qui était mal construit.</i><span style="font-style: normal;"> – </span><i>Il
devait être creux à mon avis,</i><span style="font-style: normal;"> lui</span><i>
</i><span style="font-style: normal;">répond un invité</span><i>.</i><span style="font-style: normal;"> Le Castel Henriette est détruit en 1969, au moment
où le nom Guimard commence d’entrer dans les livres d’histoire et en dépit de </span><i>l’appel
lancé auprès du ministre de la culture de l’époque André Malraux, qui dira je
pense : « Guimard ? Connais pas » alors qu’il venait de sauver la
Villa Savoye 3 ou 4 ans avant </i><span style="font-style: normal;">[de Le Corbusier,
à Poissy, 78300] </span><i>et qu’on venait aussi de classer pour la première
fois un immeuble de Guimard,</i><span style="font-style: normal;"> [son hôtel
particulier] </span><i>en 1964</i><span style="font-style: normal;"> (122, avenue
Mozart, Paris 16<sup>e</sup>).</span><br />
<a name='more'></a></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
La conférence donnée par <a href="http://madparis.fr/francais/nous/presentation/ressources-et-recherche/seminaires-colloques-et-journees-d-etudes/journee-d-etudes-autour-d-hector-guimard-pour-le-150e-anniversaire-de-sa" target="_blank">Alain Blondel</a>, acteur décisif de la
préservation de l’œuvre dessinée notamment, en ouverture de la journée d’études
organisée le 13 octobre 2017 au Musée des Arts Décoratifs, complète idéalement
ces commentaires radiophoniques. Agé de 78 ans, il retrace la genèse de son
indéfectible passion pour Guimard, depuis la bibliothèque de l’atelier des
Beaux-arts où étudiant en architecture il découvrit l’album du Castel Béranger,
jusqu’à ses visites des constructions parisiennes pour certaines en voie de
désossement. A cette époque (1960) dit-il, <i>l’histoire de l’art, le marché de
l’art ignoraient totalement cette période. C’était comme un trou noir dans
l’histoire récente. Les vestiges qu’on découvrait au hasard de Guimard ou
d’autres étaient souvent abandonnés et destinés à la casse </i><span style="font-style: normal;">(entre autres la grille survivante de l’hôtel Nozal
détruit en 1957 ou l’entrée du métro Bastille, démoli en 1962, dont la R.A.T.P
n’a rien conservé). Dédaignant les </span><i>fantaisies</i><span style="font-style: normal;"> du </span><i>modern style comme on disait en ce
temps-là</i><span style="font-style: normal;">, « l’époque » mise alors
sur une nouvelle architecture sérielle et fonctionnelle au bénéfice des
promoteurs immobiliers. </span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans l’émission <i>Métropolitains</i><span style="font-style: normal;">, Roger-Henri Guerrand attribue la </span><i>démonétisation</i><span style="font-style: normal;"> de l’art nouveau au dégoût d’ordre </span><i>sexuel</i><span style="font-style: normal;"> qu’il peut provoquer. Mais Frédéric Descouturelle
avance pour sa part </span><i>tout un tas de facteurs. Les conditions
économiques </i><span style="font-style: normal;">[après la première guerre
mondiale] </span><i>vont évoluer très rapidement, ce qui fait qu’on va avoir
tout intérêt à simplifier les formules décoratives.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Il s’en produit encore un tout petit peu à Nancy, avec
grandes difficultés. </i><span style="font-style: normal;">Mais parallèlement</span><i>,
</i><span style="font-style: normal;">(…)</span><i> autant cette mode a été
flambante, autant elle va s’éteindre rapidement.</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>On a les premiers signes d’arrêt de commandes de la part des
snobs à partir de 1902. 1904 : ça ne fonctionne plus à Paris, évidemment
plus</i><span style="font-style: normal;"> [non plus]</span><i> à Bruxelles</i><span style="font-style: normal;">,</span><i> et il ne reste plus que Nancy pour faire
de l’art nouveau jusqu’à la guerre de 1914. </i><span style="font-style: normal;">Roger-Henri
Guerrand renchérit en désignant le </span><i>rejet intellectuel</i><span style="font-style: normal;"> de l’art nouveau compris comme un</span><i>
maquillage de l’architecture</i><span style="font-style: normal;">, une</span><i>
espèce d’anarchie où le végétal envahit tout.</i><span style="font-style: normal;">
(29’14’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans la deuxième partie de l’émission, François Chaslin
concentre son attention sur les livraisons de Guimard pour le métro parisien. À
son micro, l’ingénieur André Mignard raconte sa mission confiée par la R.A.T.P.
(sur l’initiative de son président Jean-Paul Bailly) pour investiguer les
ressources de la compagnie, à l’occasion du centenaire de la naissance du métro
en l’an 2000. 42’10’’ : <i>On a plongé dans les archives dites techniques
et on s’est dit : on va regarder les 1500 entrées de métro qui ont existé
(parce que certaines ont disparu aujourd’hui) et</i><span style="font-style: normal;"> [dont] </span><i>on a les plans de construction,</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>- </i><span style="font-style: normal;">[non]
</span><i>pas de l’ouvrage Guimard</i><span style="font-style: normal;"> [mais] </span><i>du
gros œuvre - et on va faire une enquête sur chaque </i><span style="font-style: normal;">[pour savoir]</span><i> ce qui a pu être installé. Là, j’avais certains
éléments pour pouvoir trouver ce qu’il y avait. Et après on a cherché la photo
- en particulier, on a acheté des cartes postales. Et puis on a fait appel à
toutes les personnes qui s’intéressaient à l’art nouveau et qui nous ont ouvert</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>leurs archives</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Et on a pu, quasiment sur la totalité des ouvrages
Guimard</i><span style="font-style: normal;"> [c’est-à-dire] </span><i>tous les
modèles conçus par Guimard</i><span style="font-style: normal;"> [confondus], </span><i>compter
167</i><span style="font-style: normal;"> [installations] </span><i>pour le
métro.</i><span style="font-style: normal;"> </span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
À la traîne du métro londonien ouvert en 1865, Paris imagine
en hâte son réseau de chemin de fer pour l’exposition universelle de 1900,
décidé par le conseil municipal en 1896 et entrepris dans la foulée en 1898 (la
première ligne Vincennes-Maillot est mise en service le 19 juillet 1900 à 13h).
La ville, sous tutelle de la préfecture, lance à ce titre un concours
d’édicules en août 1899 pour habiller les stations auquel répondent 21
concurrents. </div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Frédéric Descouturelle : <i>Guimard ne participe pas et
la C.M.P.</i><span style="font-style: normal;"> [Compagnie du chemin de fer
Métropolitain de Paris] </span><i>annonce très clairement qu’elle picorera les
idées intéressantes dans les projets qui seront sélectionnés.</i><span style="font-style: normal;"> (…) Mais aucun des dossiers présentés ne retient
l’attention de la préfecture. </span><i>Alors, on s’affole un peu</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>et on va rechercher</i><span style="font-style: normal;"> [l’architecte Jean Camille] </span><i>Formigé</i><span style="font-style: normal;"> (…). Nouveau refus. </span><i>Là on a quasiment dit
que c’était</i><span style="font-style: normal;"> [Adrien] </span><i>Bénard, le
président de la C.M.P. qui va faire choisir Guimard. En fait, il semble bien
que non et que c’est un complot plus ou moins</i><span style="font-style: normal;">
</span><i>ourdi par les membres influents du conseil municipal et de la
préfecture de France en particulier, qui obligent la C.M.P. et le conseil
municipal à choisir Guimard en bloquant tout autre choix possible. On en a
quasiment la preuve. </i><span style="font-style: normal;">André
Mignard abonde : </span><i>On a bien un document interne à la C.M.P. qui
date de 1902</i><span style="font-style: normal;"> [où] </span><i>le directeur de
l’époque dit à son successeur : on m’a informé que si on présentait des
projets d’un dénommé Hector Guimard, ces projets seraient acceptés. </i><span style="font-style: normal;">Frédéric Descouturelle entérine : </span><i>On
soupçonne que Guimard avait préparé des plans </i><span style="font-style: normal;">[donc
que son élection était pressentie avant la décision officielle du conseil
municipal], </span><i>parce qu’en l’espace de 15 jours, il est censé être
contacté et présenter des plans de deux types d’édicules et un type d’entourage
découvert </i><span style="font-style: normal;">(49’37’’). Une force de travail
sans doute moins spectaculaire qu’il n’y paraît en somme.</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Que subsiste t-il des toutes premières réalisations de
Guimard pour le métro parisien ? Une note écrite par André Mignard et mise
en ligne par le site<a href="https://www.ars-metallica.fr/wp-content/uploads/2015/08/guimard-texte-historique-ratp.pdf" target="_blank"> Fontes d’art.org</a> nous l’apprend :</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Pour les entrées du métro du premier tronçon ouvert en
1900, Guimard a conçu et supervisé :</i></div>
<div class="MsoBodyText" style="text-align: justify;">
- 3 gares qui s'apparentent à de vastes pavillons, aussi
imposants qu'exubérants, dont les toitures superposées les feront surnommer par
les Parisiens "pagode" ou "pavillon chinois". (Les deux pavillons de la place de l'Étoile seront
démontés en 1926, le dernier, place de la Bastille subsistera jusqu'en 1962),</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEge__9WfYGg8umjY1EEJRADAzGYV9oKiTS49KDUq5mlSzVxi7125O74MTTydyhrS-GbM0J1_1CKhXfl1SvaXuaR3vqxjvl7EA4yNdYKJYfogvG_cfR0ihW5t5v8ecnJMw4DEYSGROKJZK6-/s1600/etoile+pti+def.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="254" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEge__9WfYGg8umjY1EEJRADAzGYV9oKiTS49KDUq5mlSzVxi7125O74MTTydyhrS-GbM0J1_1CKhXfl1SvaXuaR3vqxjvl7EA4yNdYKJYfogvG_cfR0ihW5t5v8ecnJMw4DEYSGROKJZK6-/s1600/etoile+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À
gauche : pavillons de la place de l'Étoile cerclés en rouge par André
Mignard, de part et d'autre de l'avenue de Wagram (collection RATP,
source <a href="https://www.ars-metallica.fr/ads/guimard-ratp-documents-sur-lhistoire-dune-relation/" target="_blank">ars-metallica.fr</a>, historique 4) et carte postale dénichée sur Internet (le double toit est nettement visible).</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjeGIvwqb1kKgxkpeJ2nTGVcZ2MiWRqYhAdUOcXY3bpncFTcSKGDAVhp2lCe2WYPN5If_NG2TMnFGqiq6nwJxXcaCzUReC9BfkBs1S4bdYiX9o5O_xZNPigrOguZ7oH6NDIXQ6t9l3yNWjQ/s1600/bastille+pti+def.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="611" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjeGIvwqb1kKgxkpeJ2nTGVcZ2MiWRqYhAdUOcXY3bpncFTcSKGDAVhp2lCe2WYPN5If_NG2TMnFGqiq6nwJxXcaCzUReC9BfkBs1S4bdYiX9o5O_xZNPigrOguZ7oH6NDIXQ6t9l3yNWjQ/s1600/bastille+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes du film<i> Zazie dans le métro</i>
de Louis Malle (1960), comparés avec une carte postale d'époque
colorisée. 3 plans montrent Zazie se cognant le nez à la station
Bastille. En l'espace de 60 ans (1900-1960), les marquises de la station
ont disparu et une deuxième entrée sur le côté droit (voir cercles) a
été aménagée.<span class="Apple-style-span" style="font-size: small;"> </span></td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>- 9 édicules fermés, à fond arrondi (dont il ne reste
qu’un),</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi2uaAvMZDyCI_eC0Dwm2dsVO5qZbWixWkg-wMHeYNtQiwu65SeuhcYqA_5_E8Yy9IVtIeO6ES9O8F3EUgpXV7teO5UjpgqP2XlOlhgVL2x04OI8-h5OKtBtY063CAl-RBwAhitLD9HYKnL/s1600/e%25CC%2581dicule+ferme%25CC%2581+pti+def.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="485" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi2uaAvMZDyCI_eC0Dwm2dsVO5qZbWixWkg-wMHeYNtQiwu65SeuhcYqA_5_E8Yy9IVtIeO6ES9O8F3EUgpXV7teO5UjpgqP2XlOlhgVL2x04OI8-h5OKtBtY063CAl-RBwAhitLD9HYKnL/s1600/e%25CC%2581dicule+ferme%25CC%2581+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Tel
que légendé par Guimard (lu grâce à André Mignard) : Édicule modèle B à
fond arrondi, toiture coupe en V dite en « libellule ». Réalisation
d'époque installée en 1900 à la station Porte Dauphine (ligne 2),
restaurée en 1999. Crédits image de la moitié supérieure du montage : <a href="http://lartnouveau.com/artistes/guimard/metro/metro_porte_dauphine.htm" target="_blank">lartnouveau.com</a> ; de la moitié inférieure plans (élévations latérale et transversale) et cliché RATP : <a href="https://www.ars-metallica.fr/ads/guimard-ratp-documents-sur-lhistoire-dune-relation/" target="_blank">ars.metallica.fr</a> (historique 1 et historique 5).</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
<i>- 2 édicules fermés, à fond carré (aujourd’hui tous
disparus),</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEirGgqArKr9cLYCeEPskEIDMSgWsr0bL6gGkWsyqSxcWCsN984iawrkRykTMae35fA5ADeibvqcUNKLM2pGz5iP9H-UPtxByfgIvvnbVa9iNZVafEthlDjY5iGkOtocgOekYujpeqCdsQ02/s1600/edicule+ferme%25CC%2581+rect+pti+def.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="272" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEirGgqArKr9cLYCeEPskEIDMSgWsr0bL6gGkWsyqSxcWCsN984iawrkRykTMae35fA5ADeibvqcUNKLM2pGz5iP9H-UPtxByfgIvvnbVa9iNZVafEthlDjY5iGkOtocgOekYujpeqCdsQ02/s1600/edicule+ferme%25CC%2581+rect+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Tel
que légendé par Guimard (lu grâce à André Mignard) : Édicule modèle A
fermé à fond rectangulaire, toiture coupe classique. Réalisation en 1900
à la station Reuilly-Diderot, déposée en 1928. Cliché et plans RATP
(élévations latérale et frontale)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>- 2 édicules prototypes à claire-voie, un à fond arrondi,
un à fond carré (subsistants tous deux),</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjxBt4rxR1CP93Vsmv4J_H7mWj5fWyMAYdo6H1Gr7MIh7G69KGljS-TFT0xbb25BQOpA-Dv7iK1FETE9AzJgSitaj1H_4rWjvhf_5M-4DcySb9dgcrUgK8bQ8As70EjYV8J8dTYe93JX19F/s1600/hotel+de+ville+pti+def.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="615" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjxBt4rxR1CP93Vsmv4J_H7mWj5fWyMAYdo6H1Gr7MIh7G69KGljS-TFT0xbb25BQOpA-Dv7iK1FETE9AzJgSitaj1H_4rWjvhf_5M-4DcySb9dgcrUgK8bQ8As70EjYV8J8dTYe93JX19F/s1600/hotel+de+ville+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Tel
que légendé par Guimard (lu grâce à André Mignard) : Édicule à
claire-voie ouvert à fond rectangulaire, toiture coupe classique.
D'abord installée en 1900 à la station Hôtel de ville (ligne 1, rue
Lobeau, haut, gauche), cette réalisation d'époque a été transférée en
1974 à la station Abbesses (ligne 12) et rénovée en 2001 (bas, gauche).
Crédits images : <a href="http://www.hguimard.fr/2018/05/21/station-hotel-de-ville/" target="_blank">hguimard.fr</a> ;
Reprenant à mon compte l'angle de vue photographique de la carte
postale, j'ai remarqué que l'édicule 1900 ne correspondait ni à l'accès
parking souterrain en raison duquel il a été déplacé (haut, droit), ni à
l'actuelle entrée de métro (bas, droit), mais se situe quelque part
entre les deux. La simulation rectangulaire blanche (garantie non
exacte) le spatialise. (photos : ma pomme)</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>- 13 entourages à écussons,</i><br />
<i>- 2 entourages à cartouches.</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvo2quSZVslL-cFGiJCT2iBBXIRhXRla7QfbW2FFAHA9XKCjYd8VIzuJJnZ0B_xbnexILLVPJkhZlmFWdG4RuIc-gMklF2bn65UqRhqW9_hexpoFe-yCR6YXpKCvvX4dx2pMinvmQ4pd2i/s1600/ecussons+cartouches+pti+def.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="196" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvo2quSZVslL-cFGiJCT2iBBXIRhXRla7QfbW2FFAHA9XKCjYd8VIzuJJnZ0B_xbnexILLVPJkhZlmFWdG4RuIc-gMklF2bn65UqRhqW9_hexpoFe-yCR6YXpKCvvX4dx2pMinvmQ4pd2i/s1600/ecussons+cartouches+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À
gauche, station Chardon-Lagache (ligne 10) (entourage à écussons) ; à
droite, station Mouton-Duvernet (ligne 4) (entourage à cartouches)
(crédits images : <a href="http://lartnouveau.com/artistes/guimard/metro_entrees.htm" target="_blank">lartnouveau.com</a>)</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Historique et point complet sur la situation contemporaine à
lire <a href="http://www.lecercleguimard.fr/fr/hector-guimard-architecte/loeuvre-de-guimard/le-metropolitain-hector-guimard/" target="_blank">sur le site du cercle Guimard</a>.</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Il semblerait que 8 stations aient été inaugurées en juillet
1900. Mais entre les dates disponibles sur Wikipedia et celles renseignées par
André Gillois dans cette pépite radiophonique intitulée <i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/jai-fait-le-premier-voyage-du-metropolitain-le-19-juillet-1900" target="_blank">Soyez témoins, inauguration en 1900 de la ligne numéro 1 du métropolitain de Paris</a> </i><span style="font-style: normal;">(1<sup>ère</sup> diffusion le 16 février 1956 sur la
chaîne parisienne), deux stations diffèrent (Tuileries et Nation). </span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Selon André Gillois (33’38’’), les stations ouvertes
seraient : </div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Porte Maillot </div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Obligado (aujourd’hui Argentine) (peut-être confonfue avec
Marbeuf, aujourd’hui Franklin D. Roosevelt)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Champs-Elysées (aujourd’hui Champs-Elysées Clémenceau) </div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Palais Royal<span style="mso-spacerun: yes;"> </span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Hôtel de ville </div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Place de la Bastille<span style="mso-spacerun: yes;">
</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Gare de Lyon </div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Porte de Vincennes.</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjlV3mnCsHr9I7hiYVGhO5nPcqvVW-kdqonj3NMeyqaP_4CYxwnZ2c6kY_uB6d9MtMyw_Atwjem7-i4CI3HyeVUOstnDCrIMbu3D31vNQkM9VnWlm0NBqmjZA29R17AzJtGtnC2oIdRhNHV/s1600/metro+ligne+1+1900+pti+def.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="296" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjlV3mnCsHr9I7hiYVGhO5nPcqvVW-kdqonj3NMeyqaP_4CYxwnZ2c6kY_uB6d9MtMyw_Atwjem7-i4CI3HyeVUOstnDCrIMbu3D31vNQkM9VnWlm0NBqmjZA29R17AzJtGtnC2oIdRhNHV/s1600/metro+ligne+1+1900+pti+def.jpg" /></a></div>
<br />
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Quoi qu’il en soit réellement, un conflit d’ordre financier
a tôt fait d’entraver la bonne collaboration « arrangée » entre les deux
parties. André Mignard dans le document à l’instant cité écrit : <i>À
partir du 2<sup>ème</sup> trimestre de l'année 1902, le divorce naît entre la
CMP et son architecte</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i> </i><span style="font-style: normal;">[qui]</span><i> se règle à l'amiable le 1<sup>er</sup>
mai 1903. Moyennant un dédommagement conséquent, Guimard abandonne la plus
grande partie de ses droits de propriété artistique sur ses modèles. La CMP
peut à sa guise installer les entourages de modèle Guimard agréés en 1900 par
le Conseil Municipal : elle le fait jusqu'en 1914.</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Gallica nous offre la chance de lire la version de Guimard
au sujet de cette discorde. Sa franchise témoigne du goût amer qu’elle lui a
laissé. Voici comment : en 1904, une polémique naît au sujet du
« trou » creusé pour les escaliers menant au métro de la place de
l’Opéra. Elle ne concerne pas Guimard qui vient de rompre avec la CMP, mais
n’empêche pas le journaliste Julien Chéroy d’offrir une tribune opportune à
l’architecte dans le bien nommé <i><a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5511096.item" target="_blank">La presse</a></i><span style="font-style: normal;">
pour asseoir la position du journal vis-à-vis des bouleversements urbains
causés par le nouveau métro. Aujourd’hui, on qualifierait cette interview de
formidable coup de communication de la part de Guimard.</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEifujHPFmGBsYosTbkCiouIQTELGLrH5Vs5asbysxA0ECijyHmFlvBA2sqKJg5yBVxo-EzB8IvBdBvJ1a9GRqZtZyxbOHF8uPLJoD9w88q04zvHRZwPKGMxuLK-oG1XdWaJFnwRZIHU8HXQ/s1600/la+presse+pti+def.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="645" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEifujHPFmGBsYosTbkCiouIQTELGLrH5Vs5asbysxA0ECijyHmFlvBA2sqKJg5yBVxo-EzB8IvBdBvJ1a9GRqZtZyxbOHF8uPLJoD9w88q04zvHRZwPKGMxuLK-oG1XdWaJFnwRZIHU8HXQ/s1600/la+presse+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Article de Julien Cheroy, journal <i>La presse</i>, dimanche 02 octobre 1904</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
Julien Chéroy pour <i>La presse</i><span style="font-style: normal;">, 02 octobre 1904 : (…) </span><i>On nous donne un
trou ; par exemple, il est large et spacieux, trois des côtés de ce trou
rectangulaire, sont ornés d’une balustrade que l’on pourrait aisément
enjamber ; cette balustrade, œuvre de l’architecte Cassien-Bernard, est
d’un style indécis, Louis XV en Louis XVI ; elle est massive ; elle
ne s’harmonise pas avec l’Opéra ; elle ne présente aucun intérêt d’art
nouveau ; elle est laide, enfin.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>La
Société du Nouveau Paris, réunie hier soir, a décidé de protester publiquement
contre l’installation d’une gare semblable devant l’Opéra </i><span style="font-style: normal;">(…)</span><i>. Dès que nous avons connu la décision
de la Société du Nouveau Paris, nous sommes allés demander à M. Hector Guimard,
architecte des gares du Métropolitain, son avis sur cette gare où il n’est pour
rien.</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Hector Guimard : <i>- Tout d’abord, nous a répondu
l’éminent architecte, je dois vous dire que la Compagnie du Métropolitain,
quand elle dût s’occuper de ses gares, ouvrit un concours ; aucun projet
ne fut retenu ; des plans furent demandés à M. Formigé ; on ne les
accepta pas ; la Compagnie, alors, s’adressa à moi ; on parlait
beaucoup, à ce moment de mon Castel Béranger, primé par la Ville de Paris. Je
présentai des modèles de gare ; on en accepta un, celui que tous les
Parisiens connaissent, et qui constitue aujourd’hui, la véritable
« enseigne » du Métro.</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<i>On a critiqué ces gares.</i><span style="font-style: normal;">
(…) [Mais] </span><i>à la Compagnie du Métro, on trouvait mes gares
superbes ; quand il s’agit de les payer, on estima leur prix trop
élevé ; un expert fut nommé, qui m’accorde à mille francs près, ce que je
demandais ; la Compagnie jura de se venger ; elle s’est vengée :
1° en commandant la gare centrale de Paris à M. Cassien-Bernard, 2° en faisant
publier dans tous les journaux des notes tendancieuses contre mes gares et
contre l’art nouveau.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Une
Compagnie a-t-elle le droit de jeter le discrédit sur un art naissant, parce
qu’elle a eu un différent d’argent avec un artiste nouveau ? Je vous le
demande. </i><br />
<br />
*<br />
<br />
<b>Lire la suite >></b> <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.com/2018/06/guimard-et-lart-nouveau-le-castel_7.html" target="_blank">Guimard et l'art nouveau : Le Castel Henriette au cinéma (3-3)</a><br />
<b>Lire la première partie >> </b><a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.com/2018/06/guimard-et-lart-nouveau-metropolitains.html" target="_blank">Guimard et l'art nouveau : Méropolitains (19 novembre 2003) : le Castel Béranger (1-3)</a><br />
<i></i>Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-37544277013607851312018-06-07T15:47:00.000+02:002018-12-23T20:49:04.096+01:00Guimard et l'art nouveau : le Castel Henriette au cinéma (3-3)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=15ULKdmJCgxyZIwxxW0XSa4Zj_wszu_g0" target="_blank">Télécharger le PDF</a></b> de ce post (10 pages, texte et images)<br />
<br />
Cet appendice aux posts<a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.com/2018/06/guimard-et-lart-nouveau-metropolitains.html" target="_blank"> Guimard et l’art nouveau : Métropolitains (19 novembre 2003) (1-3)</a> et <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.com/2018/06/guimard-et-lart-nouveau-metropolitains_17.html" target="_blank">(2-3) </a>se propose de retracer les « apparitions » du
Castel Henriette au cinéma. Achevé entre 1899 et 1900, le Castel Henriette sis
à la hauteur du 46 rue des Binelles à Sèvres (92310) perd son campanile dès la
première année (bas, gauche), et s’adjoint un agrandissement vers 1903, d’après
<a href="http://www.lecercleguimard.fr/fr/hector-guimard-architecte/chronologie-hector-guimard/" target="_blank">le site du Cercle Guimard</a> (voir encadré rectangulaire, haut et bas gauche).
Sans doute abandonné au début des années 1960 par la famille de sa commanditaire,
Madame Hefty, il est reconverti en décor de cinéma pendant 5 ans, et finalement
détruit en mars 1969 en dépit d’une campagne lancée pour sa préservation. Deux
photos de Laurent Sully Jaulmes en témoignent et nous permettent de constater
ce qui a survécu à cette disparition : le muret supportant l’ancienne grille
dessinée par Guimard, aujourd’hui dévolu à une clôture de hauteur comparable
(voir ellipses). <o:p></o:p></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjdSLKyoGQEwk-wzvdtOeeQnjRuzqZNZNeyB2ZqfgcgntbVKnKE0OPrtYzq9_P0_SQoEUBx8-4JW3BP6C6IzwecOy3eyGONXy3rEaJEIDZIwOS-osGR8Z0LQsPYqjVnFhPzoYdhyphenhyphenfhzj5Ct/s1600/grille+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="651" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjdSLKyoGQEwk-wzvdtOeeQnjRuzqZNZNeyB2ZqfgcgntbVKnKE0OPrtYzq9_P0_SQoEUBx8-4JW3BP6C6IzwecOy3eyGONXy3rEaJEIDZIwOS-osGR8Z0LQsPYqjVnFhPzoYdhyphenhyphenfhzj5Ct/s1600/grille+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Haut, gauche : le Castel Henriette en 1965 (photogramme du film <i>What's new Pussycat</i>, de Clive Donner) ; haut, droite : copie d'écran Google map (septembre 2017) du 46 rue des Binelles, à Sèvres (le muret cerclé en blanc semble avoir résisté à la démolition du Castel). Bas, gauche, vue du Castel Henriette à sa livraison : avec son campanile-belvédère en 1900. Centre et bas, droite, photos de Laurent Sully Jaulmes dégotées dans <a href="http://atelierdaudet.free.fr/pdf/lavilla.pdf" target="_blank">le document PDF écrit par Philippe Sabourdin</a> (les images ont manifestement été retouchées au niveau du ciel)</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
<a name='more'></a>Un document <a href="http://atelierdaudet.free.fr/pdf/lavilla.pdf" target="_blank">PDF de Philippe Sabourdin</a> consacré à la
définition de la villa donne une liste semble t-il exhaustive des films qui ont
été tournés au Castel Henriette (pages 14 et 15) :</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Michel Mitrani, <i>Sans Merveilles</i><span style="font-style: normal;"> (film pour la télévision). Diffusion : 14 avril
1964 (voir la <a href="http://php88.free.fr/bdff/image_film.php?ID=7769#haut&p=film" target="_blank">fiche du film</a></span><span style="font-style: normal;">) </span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Roger Vadim, <i>La Ronde</i><span style="font-style: normal;">,
Paris Films Production/ S.N. Pathé Cinéma. Tournage : 26 décembre 1963 –
09 mars 1964. Sortie : 16 octobre 1964.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Clive Donner, <i>What’s New Pussycat ?</i><span style="font-style: normal;">, MGM Home Entertainment (France). Tournage :
octobre 1964 – janvier 1965. Sortie : 28 janvier 1966.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Pierre Granier-Deferre, <i>La métamorphose des cloportes</i><span style="font-style: normal;">, Paris, Films du Siècle. Tournage : 04 mars
1965 – 27 avril 1965. Sortie : 1965<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Yves Plantin, Alain Blondel, <i>Hectorologie</i><span style="font-style: normal;">, (1965), Anthony Roland Collection of Films on Art,
1990 (documentaire). <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Michael Hayes, <i>A Flea in her ear</i><span style="font-style: normal;">, BBC Entertainment, 1967 (film pour la télévision). <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Jacques Charon, <i>A Flea in her ear</i><span style="font-style: normal;">, 20th Century Fox. Tournage : 20 juillet 1967 –
19 octobre 1967. Sortie : 19 octobre 1968.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Philippe Fourastié, <i>La Bande à Bonnot</i><span style="font-style: normal;">, Intermondia et TC Productions. Tournage : 18
mars 1868 – non renseigné. Sortie : 30 octobre 1968<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Avant d’en venir à la comparaison de certains films, écoutons le récit édifiant d’Alain Blondel dans sa communication intitulée <i><a href="http://madparis.fr/francais/nous/presentation/ressources-et-recherche/seminaires-colloques-et-journees-d-etudes/journee-d-etudes-autour-d-hector-guimard-pour-le-150e-anniversaire-de-sa" target="_blank">La redécouverte d’Hector Guimard autour de 1970</a></i><span style="font-style: normal;">,
qui ouvre la journée d’études du 150<sup>e</sup> anniversaire de la naissance
de l’architecte (13 octobre 2017) :<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>En 1964, on était consterné de l’état d’abandon du Castel
Henriette, réduit à l’état de décor pour film d’époque. Roger Vadim y tournait
La ronde avec Jane Fonda, et on découvrait que les décorateurs du film gênés
par certains meubles fixes qui étaient encore en place les avaient sortis dans
le jardin où ils finissaient de pourrir sous la pluie. Dans La métamorphose des
cloportes (1965), on assistait à une séance de spiritisme avec Charles Aznavour
habillé en fakir devant la cheminée de Guimard utilisée sans doute comme un
exemple de délire opiacé. Enfin, il y eut What’s new pussycat, tourné en 1965
avec Woody Allen qui n’a guère été plus respectueux des lieux. Tous ces
tournages ont été dévastateurs pour le Castel dont la destruction était de
toute façon programmée </i><span style="font-style: normal;">(1969). (à partir de
9’30’’)</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<br />
<div style="text-align: center;">
*</div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Composé d’au moins cinq niveaux (sauf erreur) et de
plusieurs escaliers, le Castel Henriette découvre, à l’image de son architecture
<i>giratoire,</i><span style="font-style: normal;"> une multiplicité de visages.
Les tournages cinématographiques qui l’ont investi ont exploité ses couloirs,
rampes d’escaliers, balcons, chambres, vitraux, du rez-de-chaussée jusqu’au
dernier étage, de jour comme de nuit, en noir et blanc comme en couleurs, en
s’attachant à prouver son implantation effective dans le tissu urbain à la
faveur de plans d’ensemble sur le Castel ou sur les rues adjacentes. Vous trouverez ci-dessous les photogrammes de quatre des huit films produits au Castel Henriette. Ces captures d'écran ont été réalisées par nos soins pendant les visionnages et ensuite montées pour accompagner la lecture de ce post.</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Au nombre des films auxquels nous avons eu accès, il y a <i>What’s New Pussycat ?</i><span style="font-style: normal;"> de </span><span style="font-style: normal;">Clive Donner, <i>La métamorphose des cloportes</i> de Pierre Granier-Deferre, <i>A flea in her ear</i> (La puce à l'oreille) de Michael Hayes et <i>La bande à Bonnot </i>de Philippe Fourastié. Si ceux-ci se distinguent franchement les uns des autres, force est de constater que la mythologie véhiculée par le Castel Henriette reste toujours la même. </span><br />
<br />
Symbole de luxure, il représente une garçonnière dans <i>La
ronde</i><span style="font-style: normal;"> de Roger Vadim, un hôtel de débauche
dans </span><i>A flea in her ear</i><span style="font-style: normal;"> de Jacques Charon et un cabinet de psychanalyse dans </span><i>What’s
new Pussycat</i><span style="font-style: normal;"><i> ?</i> de Clive Donner où la
confession érotique le dispute à l’obsession lubrique. Seuls </span><i>La bande
à Bonnot</i><span style="font-style: normal;"> de Philippe Fourastié et </span><i>La
métamorphose des cloportes</i><span style="font-style: normal;"> de Pierre
Granier-Deferre emploient le Castel Henriette à d’autres fins. D’une part
comme la maison d’un larcin. D’autre part comme le refuge d’une secte
hindouiste. Encore que, à bien y regarder, le court extrait filmé dans </span><i>La bande à Bonnot</i><span style="font-style: normal;"> conjugue le vol d'une automobile avec un flagrant délit d'adultère. À la maîtresse de maison nue dans son lit, le braqueur Jules Bonnot, incarné par Bruno Cremer dit sans détours : <i>«</i> </span><i>Vous
trompez votre mari… Dieu vous punira...<span style="mso-spacerun: yes;">
</span></i><i>Salope. »</i><br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiUfM1j8KKwl-x5kCRHx4XnbecqmoP1J5oqRC9HItLCU9_Bm926KGO99ROAgy77mihDONOXlYH0UMdxlKCFt7UyqIO1SEfFzeMUtYM3JpUk25Hyw9eBZKkMmq0hQtbQ2Ji3s14B82Q156Re/s1600/Bonnot+5+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="305" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiUfM1j8KKwl-x5kCRHx4XnbecqmoP1J5oqRC9HItLCU9_Bm926KGO99ROAgy77mihDONOXlYH0UMdxlKCFt7UyqIO1SEfFzeMUtYM3JpUk25Hyw9eBZKkMmq0hQtbQ2Ji3s14B82Q156Re/s1600/Bonnot+5+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes extraits de <i>La bande à Bonnot</i>, de Philippe Fourastié, 1968, dernier film à avoir été tourné au Castel Henriette avant sa destruction en mars 1969. </td></tr>
</tbody></table>
Selon l’importance qu’il prend dans l’histoire du film, le
Castel Henriette est modifié en conséquence. Dans<i> La métamorphose des
cloportes</i><span style="font-style: normal;"> et dans </span><i>La bande à
Bonnot</i><span style="font-style: normal;">, les séquences tournées sur place
n’excèdent pas les 5 minutes de pellicule et empruntent plus aux décors tels
qu’ils ont été laissés par les équipes précédentes qu'ils n'en importent de nouveaux. Filmé
l’année suivant </span><i>What’s new Pussycat</i><span style="font-style: normal;"> <i>?</i>,
</span><i>La métamorphose des cloportes</i><span style="font-style: normal;">
compose par exemple avec le même papier peint (salon, escaliers) et évacue
discrètement le souvenir de l’autre film en parant l’espace de quelques
voilages blancs. Un choix qui, si l’on en comprend la signification
spirituelle, laisse dubitatif, quand tous les autres films tournés au Castel
ont justement tiré parti de la surcharge visuelle des lieux. </span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgsqX2TITtSnr0Wq3bou4XKNHfQggvsBQbjh3jL7q6QoeWe3xDMAUiuaKB4elsTJUropZX5BNVxCsLDqBdZmn2jZBqg0vTjM4WCkdjPV7uHUgj-KGYwM09gBtMZb5_5IvHRfTejY85Ch8-x/s1600/papier+peint+2+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="209" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgsqX2TITtSnr0Wq3bou4XKNHfQggvsBQbjh3jL7q6QoeWe3xDMAUiuaKB4elsTJUropZX5BNVxCsLDqBdZmn2jZBqg0vTjM4WCkdjPV7uHUgj-KGYwM09gBtMZb5_5IvHRfTejY85Ch8-x/s1600/papier+peint+2+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">D'une année sur l'autre, les lieux se ressemblent forcément quand les tournages s'enchaînent. Entre la couleur de <i>What's new Pussycat</i> tourné en 1964 et le noir et blanc de <i>La métamorphose des cloportes</i> filmé l'année d'après, le papier peint est le même.<br />
<br /></td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><img border="0" data-original-height="209" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEic3lWkV5mz0siT42wl8htnla0DkKNY5J6q835BBwqPHOqT_-qta_YE_dazpBQB8g3xxLUEqS-VFN2MnbR31T-SAwJ4glMIiFAAxVTFsRSMwnjzFtF-Zb4FHeXj7-0e9gLjn1_PBAvgTClo/s1600/papier+peint+pti+def+1.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;" /></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À la coïncidence des papiers peints, <i>What's new Pussycat</i> et <i>La métamorphose</i> <i>des cloportes</i> ajoutent celle de la descente mystique. De blanc vêtus, Eddra Gale déguisée en Brunehilde (à gauche) et Charles Aznavour jouant le fakir (à droite) tentent d'amadouer leurs interlocuteurs, sans succès.</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: 0px; margin-right: auto; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><div style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;">Idem pour </span><i>La
bande à Bonnot</i><span style="font-style: normal;"> qui bénéficie de l’une des
deux curieuses installations extérieures guimardesques héritées de </span><i>A
flea in her ear</i>, terminé 5 mois avant,<span style="font-style: normal;"> dans l’un de ses plans. Cela n'impacte toutefois par le fil de l'histoire dans la mesure où la séquence est tournée de nuit.</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjsPHoz4pKtud8IRs9RrQOHHzgrm8pZTePTpWtfh-0k_hIs6nWVjfJ3Q4yZlH549HIdfyflwVW8W4pA-IQsSbRfUAzUMcofhwk_CogS6MqU4KAZhHvdlJ8LI9a0PsoyxNyGEDbrWJpXTQ2E/s1600/mur+exte%25CC%2581rieur+hte+def.jpg" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="306" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjsPHoz4pKtud8IRs9RrQOHHzgrm8pZTePTpWtfh-0k_hIs6nWVjfJ3Q4yZlH549HIdfyflwVW8W4pA-IQsSbRfUAzUMcofhwk_CogS6MqU4KAZhHvdlJ8LI9a0PsoyxNyGEDbrWJpXTQ2E/s1600/mur+exte%25CC%2581rieur+hte+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Les films <i>A flea in her ear</i>, de Jacques Charon (1968) (à gauche) et <i>La bande à Bonnot</i>,
de Philippe Fourastié (1968) (à droite) sont sortis à 15 jours
d'intervalle au mois d'octobre 1968. Une décoration aux airs de
candélabres pour métropolitain installée par le film anglais se retrouve
sans dommages dans le plan français tourné quelques mois plus tard. Une
prise de vue commune permet de les comparer.</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5s4oXL4JQdsuSuf8BOXH5_9zTeZJsqFSw3J5LHVuw-_wHTROLkosQtgn5VEy1rOm0-WK1q5trVJYdCpYwO0rWV8J34mupARAFFDsNyIIWTzBId8eTSJJEC-_JJTKYeAj_YrIYbK4oJvMy/s1600/chemine%25CC%2581e+2+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="551" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5s4oXL4JQdsuSuf8BOXH5_9zTeZJsqFSw3J5LHVuw-_wHTROLkosQtgn5VEy1rOm0-WK1q5trVJYdCpYwO0rWV8J34mupARAFFDsNyIIWTzBId8eTSJJEC-_JJTKYeAj_YrIYbK4oJvMy/s1600/chemine%25CC%2581e+2+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le salon situé au rez-de-chaussée conserve des éléments originaux du Castel Henriette communs à ceux du Castel Béranger, achevé deux ans plus tôt. Grâce à l'album édité pour l'occasion, nous pouvons identifier sans difficultés la cheminée de salon de la planche 62 et sauf erreur, la glace (haut, gauche) désolidarisée du lavabo de toilette dessinée sur la planche 59 (voir cercle bas, droite).</td></tr>
</tbody></table>
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
*</div>
<br />
Avant d’en venir plus précisément au film de Clive Donner,
observons les dégâts volontairement occasionnés dans le Castel Henriette pour
les « besoins » de la narration. Ils se divisent en deux catégories : les
factices et les véritables. Dans <i>A flea in her ear</i><span style="font-style: normal;">, la course poursuite finale à l’intérieur de la
demeure se solde par plusieurs vitraux apparemment brisés, qu’on ne voit cependant
pas éclater à l’écran. L’optimisme conduit à imaginer que les décorations
originales ont été soigneusement déposées pour être temporairement remplacées par quelque succédané. Il n’en va pas de même pour les nombreuses
portes claquées et l’aspersion d’eau au milieu d’une des chambres.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjTRVTVfG8Kocqatz67i6nojiBGalUDm6Nl1dRYnfK_ywpnZttBs5vhdT0Tmj50t2CHaU2wCUp8c7rgXoU6RctsulROAzFLFfaNt6aJHtwpevSddrhQR2G29K7y_FJXGZS6SuQ5lRQOuXMN/s1600/casse+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="314" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjTRVTVfG8Kocqatz67i6nojiBGalUDm6Nl1dRYnfK_ywpnZttBs5vhdT0Tmj50t2CHaU2wCUp8c7rgXoU6RctsulROAzFLFfaNt6aJHtwpevSddrhQR2G29K7y_FJXGZS6SuQ5lRQOuXMN/s1600/casse+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes d'<i>A flea in her ear</i>, de Jacques Charon, 1968. À gauche, un pompier derrière les bris d'un carreau. À droite, Rex Harrison, sauvé de sa chute grâce au crochet de l'armature en fer, a traversé l'auvent en verre.</td></tr>
</tbody></table>
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
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<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
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<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
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<div style="text-align: center;">
<br /></div>
<div style="text-align: center;">
<br /></div>
<br />
Il est aujourd'hui difficile de regarder dans le détail les dégradations successives causées par les tournages dans la mesure où certains titres manquent encore d'édition DVD. Seule une qualité de visionnage en haute définition permettra d'évaluer chronologiquement l'importance des modifications mises en oeuvre dans le Castel (voir à ce titre les splendides photogrammes de <i>La ronde</i> de Roger Vadim (1964) postés sur le site <a href="http://www.hguimard.fr/2015/05/11/la-ronde-roger-vadim-1964/" target="_blank">hguimard.fr</a>).<br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhEqOkRUnRohrs3wtuv0-rPAaUlS7Ufqh1TqghyUhSdhuXgYZFPv11F4uuxP9kDIsGmkeFld-Slucs8fq0qh4NH97-W8Xoef216_MryzZM9kiUOAyGjFftL7AIXZ11JIH10s-WoeyfL4XAU/s1600/porte+d%2527entre%25CC%2581e+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="283" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhEqOkRUnRohrs3wtuv0-rPAaUlS7Ufqh1TqghyUhSdhuXgYZFPv11F4uuxP9kDIsGmkeFld-Slucs8fq0qh4NH97-W8Xoef216_MryzZM9kiUOAyGjFftL7AIXZ11JIH10s-WoeyfL4XAU/s1600/porte+d%2527entre%25CC%2581e+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Entre <i>What's new Pussycat</i>, de Clive Donner (1965) et <i>A flea in her ear</i>, de Jacques Charon (1967), il semble que le vitrail de la porte d'entrée ait disparu. </td></tr>
</tbody></table>
<br />
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<div style="text-align: center;">
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<br /></div>
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<br />
<br />
Dans la Grande traversée qu’elle a consacrée à Woody Allen
pendant l’été 2015 sur France Culture, Judith Perrigon revient quelques minutes
sur le tournage de <i>What’s new Pussycat</i><span style="font-style: normal;">,
le premier film de Woody Allen en tant qu’acteur et scénariste. </span><i>Le
tournage tourne mal, les stars ont pris le pouvoir. Peter Sellers n’aime pas ce
jeune Woody Allen avec lequel on le confond parfois à cause de leurs lunettes
en écaille. Il fait sans cesse réécrire le script. La fin sera défaite et laissée
aux mains des acteurs stars. </i><span style="font-style: normal;">(…) (à 57'48'' dans : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/woody-allen-stories-multidiffusion/woody-allen-manhattan-ou-le-cordon-ombilical" target="_blank">Woody Allen : Manhattan ou le cordon ombilical, première diffusion le 14 juillet 2015</a></span><span style="font-style: normal;">)</span><br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj2Z4Ol4UiDVa5bI07pQI7BF9wOMlTrsZY_NMgl7cchZ5j7Ff8Cjv8FPJrzW3EQsD8e9xd0Jy6DAzy1sdmaHwdKQA3juhLwdPPTRw8KwywqyElUKPhMNizH3odcwuSlToA82rpRm1BcmLv8/s1600/communic+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="257" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj2Z4Ol4UiDVa5bI07pQI7BF9wOMlTrsZY_NMgl7cchZ5j7Ff8Cjv8FPJrzW3EQsD8e9xd0Jy6DAzy1sdmaHwdKQA3juhLwdPPTRw8KwywqyElUKPhMNizH3odcwuSlToA82rpRm1BcmLv8/s1600/communic+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes extraits de <i>What's new Pussycat</i>, de Clive Donner (1965). Eddra Gale et Peter Sellers communiquent par fenêtres interposées.</td></tr>
</tbody></table>
<br />
<br />
<br />
<span style="font-style: normal;">Il n’empêche que le film, rangé au rayon des « sex comedy », est un
succès. Clive Donner y marie à merveille le jeu loufoque de Peter Sellers avec
l’architecture sans commune mesure du Castel Henriette (d’ailleurs, la période
art nouveau qui a vu naître le style Guimard est déclinée tout au long du film
par une profusion de fleurs, d’arabesques et de décors japonisants - générique
inclus). Les plans extérieurs sur les balcons, terrasses et fenêtres du début
du film rendent hommage à la distribution « scénique » de la maison
dont les niveaux représentent autant de plateaux communicants. Les couleurs
vives et les motifs ornementaux des vitraux, papiers peints et tentures
concourent également au délire collectif des séances de psychanalyse organisées
par Peter Sellers, alias le docteur Fritz Fassbender. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-dNUFvo0AX-sD1SaA60jX0rx9rHcH6dB5aWzeQz1te-cGMiS8j53AMaSl_qO-yoy0YzFD_hk7eN1dNsX-yKeJiOtFpGzhKr8-h0gWJeEDR0P7mBLFQzzhFh3if3c04cLxN_jp4Tw51V6Y/s1600/inte+cast+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="257" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-dNUFvo0AX-sD1SaA60jX0rx9rHcH6dB5aWzeQz1te-cGMiS8j53AMaSl_qO-yoy0YzFD_hk7eN1dNsX-yKeJiOtFpGzhKr8-h0gWJeEDR0P7mBLFQzzhFh3if3c04cLxN_jp4Tw51V6Y/s1600/inte+cast+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes extraits de <i>What's new Pussycat</i> de Clive Donner (1965). À gauche, on reconnaît la cheminée dépeinte dans la planche 51 du Castel Béranger tandis qu'à droite, la scène équilibre dans un mariage heureux couleurs unies et motifs décoratifs, du premier à l'arrière plan.</td></tr>
</tbody></table>
<br />
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><div style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;">Mais une scène combinant le style Guimard avec
un décor peint sort du lot, pour ne pas dire du Castel Henriette. Elle montre Romy
Schneider donner un cours d'anglais à des étudiants étrangers dans un amphithéâtre. Le
lieu est agrémenté de ferronneries Guimard soutenues par des socles en faux
marbre sur lesquels ont été posés des écussons en provenance des entourages de
métro. À l’instar du site <a href="http://www.hguimard.fr/2006/10/21/whats-new-pussycat/" target="_blank">hguimard</a> qui interroge sa véracité, on distingue mal ce qui relève du décor construit de la place authentique. </span></div>
<span style="font-style: normal;"> </span><img border="0" data-original-height="257" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhq2LFRm2q1gIkDaC6lJCh35Zi-zHmPspiqenAcGBZCRGRN5YqndQ4OK9f9vRb2n8iErwNiFTEW3SLl2tb60pX_GM-RfDFc-AdAjS1lVMGYSZDOQ49IWYz1OBxmnPaYKlhPc6qft6FT2xvI/s1600/romy+pti+def.jpg" /></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Dans cette scène, le cours de Romy Schneider est interrompu par l'arrivée furibonde de Peter O'Toole. Jean-Pierre Mocky déclare dans le deuxième épisode de la grande traversée Woody Allen diffusée le 14 juillet 2015 sur France Culture que l'acteur, également scénariste du film, lui a acheté le gag mis en scène dans l'amphithéâtre (voir <i>Snobs !</i>, 1962).</td></tr>
</tbody></table>
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
On pourrait continuer de comparer les différentes facettes prises par le Castel Henriette dans ses dernières années au cinéma. Il est tantôt « villa Volubilis » à Bourg-la-Reine, tantôt hôtel « Coq d'or » sur la ligne hippomobile Pont des Invalides-Montretout. Ses modes d'accès aussi varient en fonction de la nature de ses visites oscillant entre rendez-vous amoureux, passage incessant, effraction nocturne ou règlement de comptes.<br />
<br />
<div style="text-align: left;">
</div>
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiGwTQUulU-lKgeb3EuYLbPObTDbwh_ZJpq8m1cjL5n4Yja4f9N-qJh2HHQzS98jbyGWcZFXZEOkCVhvUYs-udFHLkKUh0KPq_pB9vZgh8i3-bD0q5ZcK1M9wy41cbVNVk-5omYP-o-R1sF/s1600/entre%25CC%2581e+castel+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="489" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiGwTQUulU-lKgeb3EuYLbPObTDbwh_ZJpq8m1cjL5n4Yja4f9N-qJh2HHQzS98jbyGWcZFXZEOkCVhvUYs-udFHLkKUh0KPq_pB9vZgh8i3-bD0q5ZcK1M9wy41cbVNVk-5omYP-o-R1sF/s1600/entre%25CC%2581e+castel+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Dans la moitié supérieure, photogrammes extraits de <i>La métamorphose des cloportes</i>, dans la moitié inférieure, de <i>A flea in her ear</i>. </td></tr>
</tbody></table>
<br />
<br />
<br />
<br />
Pour finir, vous trouverez ci-dessous quelques photogrammes du film <i>A flea in her ear</i>. À l'évidence son réalisateur Jacques Charon a pris un plaisir non dissimulé à mettre en scène l'adaptation de la pièce de Georges Feydeau. Lit tournant à double-face, chute spectaculaire, chasse à l'homme enragée permettent de multiplier les angles de vues sur les étages supérieurs du Castel Henriette. <o:p></o:p><br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhAIYvCaksNYCPIhACTiQNe56CKei44sFvEsykQ2CnR3_gbcbmJ9zqAYHuHbXz_F2vaozBBRqF7BTsnij7SUyqCGqtQprLz1mLMSgic1M_0k8ARjijpH5wkpCyhm6RHHWjYHRjrru_HfDV5/s1600/e%25CC%2581tages+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="312" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhAIYvCaksNYCPIhACTiQNe56CKei44sFvEsykQ2CnR3_gbcbmJ9zqAYHuHbXz_F2vaozBBRqF7BTsnij7SUyqCGqtQprLz1mLMSgic1M_0k8ARjijpH5wkpCyhm6RHHWjYHRjrru_HfDV5/s1600/e%25CC%2581tages+pti+def.jpg" /></a></div>
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwbTtGfWSNDkZfhrFUimar3N_H-NRZr-qNvyfOuCC1ayKpUMDwUcQLFDbuLcFkq2DkbFWAscK5cD2z24OrZiLG0hbj0dafwopy7QJHhGUye-oCL6MmF3QuRo1b2UnW0BvT3Y6ATNc9viiP/s1600/int+2+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="313" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwbTtGfWSNDkZfhrFUimar3N_H-NRZr-qNvyfOuCC1ayKpUMDwUcQLFDbuLcFkq2DkbFWAscK5cD2z24OrZiLG0hbj0dafwopy7QJHhGUye-oCL6MmF3QuRo1b2UnW0BvT3Y6ATNc9viiP/s1600/int+2+pti+def.jpg" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgR6_rBzgeeQEvJ_BddUbGQ3589M_sIhh0lHkbeah16_h6yVDFKx8pkWoDdW_1BQMuAuNX3LbXzPcTJJVZnnzNuwfpHjLUmkaL6BX0fYIyp-ahMYp4m_iNIE1jh5HOUjJnRMiMZgcvNIWam/s1600/int+3+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="313" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgR6_rBzgeeQEvJ_BddUbGQ3589M_sIhh0lHkbeah16_h6yVDFKx8pkWoDdW_1BQMuAuNX3LbXzPcTJJVZnnzNuwfpHjLUmkaL6BX0fYIyp-ahMYp4m_iNIE1jh5HOUjJnRMiMZgcvNIWam/s1600/int+3+pti+def.jpg" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiOY5nbpR3KIOBlgrWqZvbc2Fcp_FUTK8hI3Dk0ZfCL31e6IriXYno6jCy9bOnk5Juqa2IlDBeUzUTd_5W5f6X5R6alqcUYt3TQgG1RNzQJTiSaeCILYsRrjykTeyPP1MrhZfMnUY-uOdFR/s1600/int+5+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="313" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiOY5nbpR3KIOBlgrWqZvbc2Fcp_FUTK8hI3Dk0ZfCL31e6IriXYno6jCy9bOnk5Juqa2IlDBeUzUTd_5W5f6X5R6alqcUYt3TQgG1RNzQJTiSaeCILYsRrjykTeyPP1MrhZfMnUY-uOdFR/s1600/int+5+pti+def.jpg" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjDve5JNmEn2Jwv7Sf4QQ4Ztao-528arhhfPnvPYO4e7OBfU4fynXU9irGW24QXWVBNjQ16VBi-ufw-7WkGh5-UN_NwbPNZ7hL8586IaCuy9Lb1NUe4jhs-ps16Wt28f0FeoxzvO47hmnyu/s1600/inte%25CC%2581+4+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="314" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjDve5JNmEn2Jwv7Sf4QQ4Ztao-528arhhfPnvPYO4e7OBfU4fynXU9irGW24QXWVBNjQ16VBi-ufw-7WkGh5-UN_NwbPNZ7hL8586IaCuy9Lb1NUe4jhs-ps16Wt28f0FeoxzvO47hmnyu/s1600/inte%25CC%2581+4+pti+def.jpg" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjmQ4HVpDhF00P2sOLUgjRICXDz8k7UyblhKzP55lD_-FZvw1EHCR7XoqUej2j8E65OlstdfBgWruH6RwN9_WMFOAWSHUHYB6RFFADQBIRf_V2E958MkqiRCkmudmQ2Hn3IbD6Ra3tmFPRg/s1600/int+6+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="314" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjmQ4HVpDhF00P2sOLUgjRICXDz8k7UyblhKzP55lD_-FZvw1EHCR7XoqUej2j8E65OlstdfBgWruH6RwN9_WMFOAWSHUHYB6RFFADQBIRf_V2E958MkqiRCkmudmQ2Hn3IbD6Ra3tmFPRg/s1600/int+6+pti+def.jpg" /></a></div>
<br /></div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-75561436708842589932018-03-26T19:46:00.000+02:002018-12-14T19:55:22.925+01:00Vladimir Jankélévitch : Agora (07 février + 24 décembre 1980)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<!--StartFragment-->
<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1L1ofDw4SH2LTenVpe7pYC_A6KPiFeuZq" target="_blank">Télécharger le PDF</a></b> de ce post (3 pages texte) <br />
<br />
Vous trouverez ci-dessous les comptes rendus de deux
émissions <i>Agora</i> qui recevait à deux reprises en 1980 le philosophe Vladimir
Jankélévitch (1903-1985) âgé de 77 ans. <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Agora</i> : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/vladimir-jankelevitch-le-je-ne-sais-quoi-n-est-pas-un-joujou" target="_blank">Le je-ne-sais-quoi et l'identité</a>, par Jacques Paugram, avec Vladimir Jankélévitch (première diffusion : 07 février 1980)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Au micro de Jacques Paugram pour la parution de trois livres ayant pour titre commun <i>Le Je-ne-sais-quoi et le Presque-rien</i>, Vladimir Jankélévitch
se défend d'ajouter un concept <i>à la liste de concepts déjà longue qui
meublent l’histoire de la philosophie. </i>Par la négative i<span style="font-style: normal;">l
dissocie le je-ne-sais-quoi de toute connotation </span><i>romantique</i><span style="font-style: normal;"> qui ménagerait une part à </span><i>l’ineffable</i><span style="font-style: normal;"> ou au </span><i>charme des poètes du XIXe siècle.</i><span style="font-style: normal;"> (3’28’’) Non, la notion étudiée puisqu'on ne peut l'appeler concept, </span><i>est née à
l’époque rationaliste en France et en Espagne</i><span style="font-style: normal;">,
chez Baltasar Gracian notamment (1601-1658) qui dans le vocable « el despejo* » exprimait </span><i>la désinvolture, la grâce, l’aisance, une
espèce de laisser-aller</i><span style="font-style: normal;">. En France, on la trouve dans les</span><i> Oraisons funèbres</i><span style="font-style: normal;">
de Bossuet (1680) et dans un chapitre de </span><i>L’essai sur le goût</i><span style="font-style: normal;"> de Montesquieu (1757). Avec cette entité forgée au XVIIe
siècle, les rationalistes avaient trouvé le moyen de saisir </span><i>tout ce
surplus qu’on ne peut pas expliquer par la raison.</i><br />
<a name='more'></a><i> </i><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Que renferme le je-ne-sais-quoi et comment délimiter son horizon ? Cela peut être <i>les sentiments ambivalents,
c’est-à-dire contradictoires, qui sont composés d’amour et de haine, qui sont
éprouvés par rapport à un être, et nous ne sommes pas loin de penser que tous
les sentiments sont comme ça.</i><span style="font-style: normal;"> (7’31’’) Ou
encore, en dépit des conditions réunies pour concourir à la plus grande des
satisfactions, l’avènement d’</span><i>un grand vide : vous ne sentez pas
le bonheur que vous escomptiez</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>C’est
qu’il y a autre chose</i><span style="font-style: normal;"> (de ce point de vue,
le philosophe n’envisage jamais la psychanalyse comme un secours, bien au
contraire, il pointe sa grossièreté devant la finesse de ce qui reste</span><i>
aux frontières du savoir</i><span style="font-style: normal;">). Au nombre des
contenus recevables par le je-ne-sais-quoi, Jankélévitch compte aussi avec le </span><i>charme</i><span style="font-style: normal;">. Quand une femme </span><i>n’a rien pour plaire,
rien de canonique</i><span style="font-style: normal;"> (au sens de </span><i>règles</i><span style="font-style: normal;">) </span><i>et qu’en même temps, vous êtes
mystérieusement subjugué, envoûté par quelque chose qui n’est pas dans les
traits, que vous ne pouvez pas désigner</i><span style="font-style: normal;">,
c’est, pour le dire simplement, qu’une forme de magie opère. À cet instant, le
philosophe convoque Plotin, qui parle </span><i>d’une beauté</i><span style="font-style: normal;"> (kallos [κάλλος]*) </span><i>qui habille la personne entière.
Ce n’est pas la symétrie du visage. On peut avoir le visage parfaitement
symétrique et être très ennuyeux, insipide même.</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> Non, c'est ailleurs, par exemple dans</span> le </span><i>charme</i><span style="font-style: normal;"> qui exerce un attrait </span><i>insituable, qui est sans
circonstances, sans précisions et qui pourtant est absolument présent.
C’est-à-dire que c’est une effectivité qui nous prend</i><span style="font-style: normal;"> (14’07’’) dit Pierre Michel Klein, l’un des élèves
de Jankélévitch, dans une émission préparée par Adèle van Reeth intitulée </span><i>Avoir
raison avec Vladimir Jankélévitch</i><span style="font-style: normal;"> : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/avoir-raison-avec-vladimir-jankelevitch/le-temps" target="_blank">Le temps</a> (première diffusion : 10
août 2017).<o:p></o:p></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans une autre émission intitulée <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/vladimir-jankelevitch-14-le-temps-ce-je-ne-sais" target="_blank">Le temps, ce je-ne-sais-quoi</a> des <i>Nouveaux chemins de la connaissance</i> (première
diffusion : 21 avril 2014), Adèle van Reeth fait remarquer <i>le goût du
paradoxe </i><span style="font-style: normal;">[du philosophe] </span><i>comme
pour mieux signifier l’impossibilité de nommer ce qu’il cherche à dire</i><span style="font-style: normal;">. Cynthia Fleury, son invitée, explicite la
méthode : </span><i>C’est un philosophe qui s’est intéressé à l’entre, à
ce qui est en train de se faire, à ce qui est avant même le phénomène, sur le
point de.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Qu’est-ce qui fait
vie ? Et de fait, c’est quelque chose qui est du domaine de l’invisible,
de l’indicible, de l’ineffable. </i><span style="font-style: normal;">(12’56’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Retour en 1980 à l’émission <i>Agora</i>. Invité par Jacques
Paugram à commenter l’une de ses phrases (« <i>Le charme dans la musique
révèle le sens du sens </i><span style="font-style: normal;">»),
Jankélévitch rappelle que si l’homme a besoin de sens en raison de ses besoins, il constate qu'</span><i>au delà du sens, il y a un autre sens encore plus impalpable que
j’appelle pour cette raison le sens du sens. Il y a donc l’objet, sa
morphologie (il sert à ci, il sert à ça), et puis le sens</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>, et d’autre part au delà encore, le
sens de ce sens, encore plus secret, </i><span style="font-style: normal;">[surtout]</span><i>
quand il se réfère à la temporalité par exemple, au passé, aux choses révolues.</i><span style="font-style: normal;"> (18’15’’) </span><span style="font-style: normal;">Dans la seconde émission diffusée cette même année et consacrée cette fois à la musique (à lire ci-dessous), il semble poursuivre ce raisonnement : </span><i>Même lorsque la musique réveille en moi quelque chose d’indéterminé, que je ne peux pas préciser, un passé qui n’a même pas de date dans ma vie, alors j’ai une reconnaissance infinie qui m’arrache les larmes même, sans que je puisse dire ce que j’ai reconnu. </i><span style="font-style: normal;">(11’07’’) </span><span style="font-style: normal;"><span style="font-style: normal;">Jankélévitch mise sur la </span><span style="font-style: normal;"><i>positivité</i></span><span style="font-style: normal;"> du je-ne-sais-quoi qui est une </span><span style="font-style: normal;"><i>espérance,</i></span><span style="font-style: normal;"> </span><span style="font-style: normal;">l’objet d’une quête, qui aussi </span><span style="font-style: normal;"><i>rend heureux, nous fait sourire</i></span><span style="font-style: normal;">. </span><span style="font-style: normal;"><i>M</i></span></span><i>ême
quand je l’ai démantibulée</i><span style="font-style: normal;"> (une mesure de
Chopin)</span><i>, analysée, montré l’harmonie sur laquelle elle repose,
indiqué des préférences de jeu, quand vous savez tout cela, vous ne savez rien.
C’est l’essentiel qui vous échappe.</i><span style="font-style: normal;"> </span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
En 2014, Adèle van Reeth marque un arrêt sur les définitions
possibles du je-ne-sais-quoi. <i>C’est une manière de nommer quelque chose
qu’on ne peut pas nommer, c’est presque l’autre nom de l’innommable, ce qui est
là mais</i><span style="font-style: normal;"> qui reste hors de portée du
langage, une </span><i>évidence</i><span style="font-style: normal;"> de la
pensée si grande que </span><i>les mots paraissent incapable de la ressaisir</i><span style="font-style: normal;">. Cynthia Fleury poursuit : </span><i>Vous avez
aussi ce « je » lointain, socratique : je sais que je ne sais
pas, qui est d’une certaine manière tout le nom de la philosophie regroupé dans
un concept, parce que je rappelle qu’en plus, il y a des tirets entre les mots
de ce je-ne-sais-quoi, qui ne se baladent pas séparément.</i><span style="font-style: normal;"> Puis les pistes suivies par les deux intervenantes
se séparent : est-ce volontairement que Jankélévitch s’escrime </span><i>à
laisser du reste </i><span style="font-style: normal;">dans le </span><i>dire </i><span style="font-style: normal;">? (Fleury) Ou le je-ne-sais-quoi fuit-il à l'insu de son auteur parce qu'embrasser la totalité d'un concept est impossible ? (van Reeth)
Pour appuyer son hypothèse Cynthia Fleury prend l’exemple de la
musique dans laquelle </span><i>on entend le je-ne-sais-quoi. Elle ne le
dit pas. Elle le fait ressentir.</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Telle une résurgence mystérieusement
formée des parties d’un tout dont on peine à trouver l’exact point d’origine.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
L’entretien entre Jacques Paugram et Vladimir Jankélévitch en 1980 se termine abruptement sur la relation du je-ne-sais-quoi à la liberté, sujet
du troisième livre. <i>Dès que vous avez trouvé l’élément dont dépend votre
liberté et qui la constitue, vous vous apercevez que vous êtes aliéné. D’un
homme libre, vous devenez un serf. Parce que la liberté n’est ni ceci, ni cela,
mais elle est toujours au delà. </i><span style="font-style: normal;">Cynthia
Fleury nous permet d’y voir un peu plus clair en ajoutant que réfléchir la
liberté permet de </span><i>prendre conscience que je n’ai pas été assez libre
à un moment donné. Donc c’est ça notre liberté. C’est toujours la trace
nostalgique d’avoir à un moment donné manqué de liberté</i><span style="font-style: normal;"> (…). </span><i>Nous faisons l’expérience de notre
liberté essentiellement par le défaut de notre liberté.</i><span style="font-style: normal;"> (29’58’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;">*</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Agora</i> : La création en musique, par Olivier Germain-Thomas, avec Vladimir Jankélévitch (première diffusion : 24 décembre 1980)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Au début de l’entretien conduit par Olivier Germain-Thomas,
Vladimir Jankélévitch désigne un point commun à la musique et à la
radio-télévision : l’omniprésence <i>des compteurs de temps</i><span style="font-style: normal;"> qui affolent </span><i>comme si il y avait un
épuisement véritable.</i><span style="font-style: normal;"> (4’35’’) Au sujet des
autres arts avec lesquels la musique entretient un rapport de proximité ou
d’exclusion, le philosophe explique que </span><i>dans la poésie, la
temporalité est moins à l’état pur</i><span style="font-style: normal;">, la
faute aux</span><i> mots </i><span style="font-style: normal;">[qui] </span><i>portent
un sens</i><span style="font-style: normal;">, tandis que </span><i>la musique, à
la lettre, n’est pas autre chose qu’une continuité temporelle, irréversible.</i><span style="font-style: normal;"> Quant à la peinture, si elle est capable d’émouvoir
le spectateur, </span><i>elle reste un objet</i><span style="font-style: normal;">,
une </span><i>marchandise</i><span style="font-style: normal;"> alors que </span><i>la
musique n’est pas un objet négociable.</i><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Contre <i>la phobie de la répétition qui remplit la musique
contemporaine</i><span style="font-style: normal;"> de la fin des années 1970,
Vladimir Jankélévitch défend le droit à </span><i>reconnaître un thème</i><span style="font-style: normal;"> musical </span><i>dans ce brouillamini où</i><span style="font-style: normal;"> [l’auditeur] </span><i>ne comprend rien, où il est
perdu</i><span style="font-style: normal;">. Ce parti pris n’a rien d’un caprice
et dépasse le champ de la musique. </span><i>Reconnaître quelque chose, c’est
comme reconnaître une amie qu’on n’a pas vue depuis très longtemps </i><span style="font-style: normal;">(…) : </span><i>on est reconnaissant à la destinée de
nous mettre subitement en sa présence</i><span style="font-style: normal;"> (…).
La </span><i>réitération</i><span style="font-style: normal;">, </span><i>la
deuxième fois est une grâce, alors me la supprimer, me l’enlever, c’est un acte
barbare. </i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>(10’09’’) Il poursuit : </span><i>La deuxième fois n’est
pas comme la première. Aucune matinée ne ressemble à la précédente ni aux
autres.</i><span style="font-style: normal;"> (…) En cela, la répétition est
aussi bien un recommencement qu'un gage de compréhension.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
L’entretien est malheureusement trop court pour permettre à
Olivier Germain-Thomas et Vladimir Jankélévitch de développer plus en longueur
les différents thèmes suivants : l’<i>ordre</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>nouveau</i><span style="font-style: normal;"> apparemment </span><i>désordonné</i><span style="font-style: normal;"> du compositeur russe Modeste Moussorgski
(1839-1881), le sentiment de l’auditeur dans l’acte de création face à un
professeur (ou un compositeur) qui </span><i>tire à la ligne</i><span style="font-style: normal;">, le génie de l’innocence et le danger de la
complaisance du créateur.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;">* Toute ma gratitude à P. pour l'aide apportée à la bonne orthographe de ces mots.</span></div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-47572601429376778942018-02-14T10:59:00.000+01:002019-04-20T10:47:56.258+02:00La Loi chez Kafka : journée spéciale (1983) + Les nouveaux chemins de la connaissance (2015)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<!--StartFragment-->
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><div style="text-align: left;">
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1xcvPPDfdazsr-B1i9U9_reDkwF0q7gZt" target="_blank">Télécharger le PDF</a></b><a href="https://drive.google.com/open?id=10tD6TdR8f4rUdH-ESQFj6n9vj3ks24Wk" target="_blank"> </a>de ce post (8 pages, texte et images)</div>
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjzdxw39cEX8Wg5a3-X4BOhxsY0lpaemKLF1xoG4VqJeURiWabTSlVNa3_za0wxztuH85wFmTWTlipo152ei8INTgDBfwcK_8VmlNgjs28iynanOyXWNpWFHWs6h9jK1WJzcgJH5sLCtktd/s1600/porte+welles+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="259" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjzdxw39cEX8Wg5a3-X4BOhxsY0lpaemKLF1xoG4VqJeURiWabTSlVNa3_za0wxztuH85wFmTWTlipo152ei8INTgDBfwcK_8VmlNgjs28iynanOyXWNpWFHWs6h9jK1WJzcgJH5sLCtktd/s1600/porte+welles+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes extraits du <i>Procès</i> d'Orson Welles, 1962. À gauche, illustration de la parabole de la Loi (forteresse sans porte). À droite, K. (Anthony Perkins) referme la porte du tribunal.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Au chapitre IX du <i>Procès</i> (1925 ; 1933 pour la
traduction française), Franz Kafka glisse au milieu d’un dialogue entre K. et
l’abbé un <i>fragment qui a sa place</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>et
sa fonction</i><span style="font-style: normal;"> dans le cours de la narration
mais qui </span><i>en même temps s’en trouve détaché comme petit texte autonome</i><span style="font-style: normal;"> (Derrida). Cet extrait est aujourd’hui communément
appelé : </span><i>Devant la Loi</i><span style="font-style: normal;"> (</span><i>Vor
dem Gesetz</i><span style="font-style: normal;">) ou </span><i>La parabole de la
Loi</i><span style="font-style: normal;">. Devenu l’objet de nombreux commentaires
au fil du temps, il a été analysé en 1983 par Jacques Derrida dans une journée
spéciale sur France Culture célébrant le centenaire de la naissance de Kafka.
32 ans plus tard, le 22 avril 2015, il est à nouveau au cœur d’une discussion entre
Denis Salas, magistrat et essayiste, et Adèle van Reeth dans </span><i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/qui-fait-la-loi-34-les-proces-de-kafka" target="_blank">Les nouveaux chemins de la connaissance</a></i><span style="font-style: normal;">. Avant d’en venir à leurs commentaires, offrez-vous
une piqûre de rappel du texte de Kafka dans la traduction de l’édition folio
classique :</span><br />
<a name='more'></a></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
K. : <i>« Tu es une exception parmi les gens de justice.
J’ai plus de confiance en toi qu’en aucun d’entre eux quoique j’en connaisse
beaucoup. Avec toi, je peux parler franchement. <o:p></o:p></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>- Ne te méprends pas, dit l’abbé. <o:p></o:p></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>- Sur quoi me méprendrais-je donc ? demanda K. <o:p></o:p></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>- C’est sur la justice que tu te méprends, lui dit l’abbé,
et il est dit de cette erreur dans les écrits qui précèdent la Loi : « Une
sentinelle se tient postée devant la Loi ; un homme [de la campagne] vient un
jour la trouver et lui demande la permission de pénétrer [dans la Loi]. Mais la
sentinelle lui dit qu’elle ne peut pas le laisser entrer en ce moment. L’homme réfléchit et demande alors s’il pourra entrer plus tard. “
C’est possible, dit la sentinelle, mais pas maintenant. ” La sentinelle
s’efface devant la porte, ouverte comme toujours, et l’homme se penche pour
regarder à l’intérieur [à travers la porte]. La sentinelle, le voyant faire,
rit et dit : “ Si tu en as tant envie essaie donc d’entrer malgré ma défense.
Mais dis-toi bien que je suis puissant. Et je ne suis que la dernière des
sentinelles. Tu trouveras à l’entrée de chaque salle des sentinelles, de plus
en plus puissantes ; dès la troisième, même moi, je ne peux plus supporter leur
vue. ” L’homme [de la campagne] ne s’était pas attendu à de telles difficultés,
il avait pensé que la Loi devait être accessible à tout le monde et en tout
temps, mais maintenant, en observant mieux la sentinelle, son manteau de
fourrure, son grand nez pointu et sa longue barbe rare et noire à la tartare,
il se décide à attendre quand même jusqu’à ce qu’on lui permette d’entrer. La
sentinelle lui donne un escabeau et le fait asseoir à côté de la porte. Il
reste [assis là des jours et des] années. Il multiplie les tentatives pour
qu’on lui permette d’entrer et fatigue la sentinelle de ses prières. La
sentinelle lui fait subir parfois de petits interrogatoires, l’interroge sur
son village et sur beaucoup d’autres sujets, mais ce ne sont que des questions
indifférentes comme les posent les grands seigneurs et pour finir elle dit
toujours qu’elle ne peut pas le laisser entrer. L’homme, qui s’est abondamment
pourvu pour son voyage de toutes sortes de provisions, emploie tout, si
précieux que ce soit, pour soudoyer la sentinelle, Et la sentinelle prend bien
tout, mais en disant : “ Je n’accepte que pour que tu ne puisses pas penser que
tu as négligé quelque chose. ” Pendant ses longues années d’attente, l’homme ne
cesse presque jamais d’observer la sentinelle. Il en oublie les autres
gardiens, il lui semble que le premier est le seul qui l’empêche d’entrer dans
la Loi. Et il maudit bruyamment la cruauté du hasard pendant les premières
années ; plus tard, en devenant vieux, il ne fait plus que grommeler. Il
retombe en enfance, et comme, au cours des longues années où il a étudié la
sentinelle, il a fini par connaître jusqu’aux puces de son col de fourrure, il
prie les puces elles-mêmes de l’aider à fléchir le gardien. Finalement, sa vue
s’affaiblit et il ne sait si la nuit se fait vraiment autour de lui on s’il est
trompé par ses yeux. Mais maintenant il discerne dans l’ombre l’éclat d’une
lumière qui brille [inextinguiblement] à travers les portes de la Loi. Il n’a
plus pour longtemps à vivre désormais. Avant sa mort, tous ses souvenirs
viennent se presser dans son cerveau pour lui imposer une question qu’il n’a
pas encore adressée [à la sentinelle]. Et, ne pouvant redresser son corps
raidi, il fait signe au gardien de venir. Le gardien se voit obligé de se
pencher très bas sur lui, car la différence de leurs tailles s’est extrêmement
modifiée. “ Que veux-tu donc encore savoir ? demande-t-il, tu es insatiable. -
Si tout le monde cherche à connaître la Loi, dit l’homme, comment se fait-il
que depuis si longtemps personne que moi ne t’ait demandé d’entrer ? ” Le
gardien voit que l’homme est sur sa fin et, pour atteindre son tympan mort, il
lui rugit à l’oreille : “ Personne que toi n’avait le droit d’entrer ici, car
cette entrée n’était faite que pour toi, maintenant je pars, et je ferme [la
porte]. ”</i><br />
<div style="text-align: center;">
<br /></div>
<div style="text-align: center;">
*</div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Le 29 août 1983, à l’invitation de Jean Daive, Jacques Derrida
propose une lecture polysémique de la Loi telle qu’elle est
« écrite » dans la parabole du <i>Procès</i><span style="font-style: normal;">. Quelle place occupe t-elle ? À première vue, à travers la porte
gardée qui la précède, la Loi ne relève pas du visible. C’est une </span><i>place
vide </i><span style="font-style: normal;">dit Jacques Derrida. Néanmoins, </span><i>si
la Loi occupe cette place vide, c’est que l’interprétation de la Loi, qui n’est
pas moins importante que la Loi, est aussi ce qui fait Loi.</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>Et l’hypothèse que la Loi n’existe pas est
une hypothèse </i><span style="font-style: normal;">[qui repose encore] </span><i>sur
la structure même de la Loi, qui agit comme Loi - peut-être - en tant qu’elle
n’existe pas. </i><span style="font-style: normal;">(1h33’45’’) <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
À la fois concrète et abstraite, la Loi s'énonce depuis un lieu qui semble paradoxalement « abandonné » par elle. Inassignable, elle flotte autour des hommes en leur échappant. La matérialiser sous la forme symbolique d'une porte qui n'ouvre sur « rien » (la Loi est une <i>place vide</i>)<span style="font-style: normal;"> joue comme un leurre tout en ayant le mérite de fixer la modalité de sa connaissance : son impénétrabilité. Ce qui signifie qu'on ne peut pas « garder à vue » la Loi. Son contrôle est rendu impossible. En immobilisant sur son seuil l'homme qui s'obstine à la rencontrer, la Loi grandit son emprise sur lui et renverse le rapport de force. C'est elle qui garde maintenant l'homme « à l'oeil », où qu'il soit</span>.<i> </i>Adèle van Reeth :<span style="font-style: normal;"> </span><i>Puisque la Loi est partout, lui</i><span style="font-style: normal;"> [K.] </span><i>n’est jamais au bon endroit. Elle
vient le chercher, incarnée par les différents personnages qu’il rencontre
comme si il était la projection de sa propre absurdité.</i><span style="font-style: normal;"> (28’28’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
À Jean Daive qui se demande si l’impossibilité de la « fixer » en quelque endroit ne jouerait pas contre son élémentaire probité
(comme <i>piège</i><span style="font-style: normal;"> ou </span><i>stratagème</i><span style="font-style: normal;">), Jacques Derrida rappelle </span><i>la transcendance
intouchable de la Loi</i><span style="font-style: normal;">. La forme sous
laquelle elle se présente (le vide) </span><i>ne signifie pas qu’on y projette
ce qu’on veut</i><span style="font-style: normal;">. (1h41’19’’) Bien au contraire,
son mode </span><i>impératif</i><span style="font-style: normal;"> induit une
distance incommensurable, et seule l’écriture est
capable de générer cette autorité : </span><i>le texte produit
ce non-lieu depuis lequel la Loi commande, en quelque sorte</i><span style="font-style: normal;">. Dit autrement, suivant la formule lapidaire d'un autre intervenant </span>une heure avant la fin de l'émission : <span style="font-style: normal;"><i>On ne discute pas avec la Loi.</i></span><span style="font-style: normal;"> Pendant « naturel » de cette
parole volatile, </span><i>la servitude volontaire</i><span style="font-style: normal;"> de l’homme de la campagne (remarquée par Denis Salas
avec qui s’entretient Adèle van Reeth) qui continue d’attendre en vain, année après
année, </span>devant la porte de la Loi : la
scène semble confiner à une relation de type sado-masochiste entre lui et le gardien.<br />
<br />
Georges Kiejman, avocat, au micro de Jean
Daive : <i>C’est en ça que Kafka me paraît peut-être le plus clairvoyant,
c’est dans la manière de bien souligner que chacun consent au procès qui va lui
être fait, si injuste, si incompréhensible que puisse paraître ce procès</i><span style="font-style: normal;">. (4h29’42’’) Georges-Arthur Goldschmidt (traducteur du </span><span style="font-style: normal;"><i>Procès</i></span><span style="font-style: normal;">) dans le dernier numéro de la série </span><span style="font-style: normal;"><i>Kafka de la tête aux pieds </i></span><span style="font-style: normal;">diffusée du 03 au 31 août 2003 abonde : </span><span style="font-style: normal;"><i>Je suis allé plusieurs fois à la 17e chambre correctionnelle. Et vous entrez dans </i>[la peau de]<i> l'accusé. C'est terrifiant, vous devenez lui. Vous entrez dans les boutons de sa veste, dans les replis un peu misérables du tissu car tous les accusés ont toujours un côté râpeux, misérable. C'est terrifiant. Et c'est vous.</i></span><span style="font-style: normal;"><i> </i></span><span style="font-style: normal;">(47'12'') Marthe Robert dans l'émission produite par Jean Amrouche </span><span style="font-style: normal;"><i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/des-idees-et-des-hommes-a-propos-de-franz-kafka-quelques-remarques-sur-le-proces-1ere-diffusion" target="_blank">Des idées et des hommes</a></i></span><span style="font-style: normal;"> (première diffusion le 04 avril 1955) décrit quant à elle l'incorporation de la culpabilité chez Joseph K. dans </span><span style="font-style: normal;"><i>Le procès</i></span><span style="font-style: normal;"> : </span><span style="font-style: normal;"><i>Il est arrêté, c'est-à-dire, immobilisé</i></span><span style="font-style: normal;"> (...)</span><span style="font-style: normal;"><i>, c'est tout, on n'en dira pas davantage. On aura peu à peu l'impression que c'est lui</i></span><span style="font-style: normal;"> [Joseph K.] </span><span style="font-style: normal;"><i>qui se comporte en accusé, que de l'arrestation, il a conclu à une inculpation</i></span><span style="font-style: normal;"> (...) (10'04''). </span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<span style="font-style: normal;">Ainsi injustement mis en cause, l'homme présumé coupable cesse temporairement de coïncider avec lui-même pour se dédoubler, voire se superposer à lui-même</span><span style="font-style: normal;">, coiffé de l'intolérable soupçon qui dénature tout. Même infime, même inconcevable, l'instillation du doute conduit l'homme qui se divise au carrefour de plusieurs vérités. D'abord, la sienne, intime. Puis celle projetée sur lui par les autres, prêtée. La dernière étant résolue par la Loi, ultime. Ce que Marthe Robert résume brillamment par cette formule : </span><span style="font-style: normal;"><i>Le drame vient de ce que l'accusé est en même temps le témoin, le juge et l'avocat. </i></span><span style="font-style: normal;">(27'54'') Or, rien n'est plus difficile que de cohabiter avec ces trois vérités quand une méprise est à l'origine de l'innocence bafouée. C'est toute l'histoire du film </span><span style="font-style: normal;">intitulé</span><span style="font-style: normal;"><i> Le faux coupable </i></span><span style="font-style: normal;">(</span><span style="font-style: normal;"><i>The wrong man</i></span><span style="font-style: normal;">) sorti en 1957, d'</span><span style="font-style: normal;">Alfred Hitchcock qui serait inspiré d'un fait-divers. Son résumé tient en une ligne : un homme pris pour un autre est accusé de </span><span style="font-style: normal;"><i>hold-up</i></span><span style="font-style: normal;"> qu'il n'a de fait pas commis.</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
À l'aide de quelques photogrammes, observons comment Hitchcock a préparé l'espace de la future accusation de son protagoniste Christopher Emanuel Balestrero, dit Manny (Henry Fonda) dans les premières minutes de son film. Joueur de contrebasse dans un club de jazz, Balestrero quitte chaque soir au pas de course l'établissement pour rejoindre sa femme. Sa première sortie dans la rue le montre en train de marcher vers l'entrée du métro. Dans le plan, la silhouette nocturne du musicien est immédiatement prise en charge par deux policiers croisés fortuitement qui « l'encadrent ». Ils annoncent ceux qui l'escorteront peu après au commissariat, au tribunal, en prison.<br />
<br />
Poursuivant son trajet, Balestrero marque plusieurs arrêts avant de rentrer chez lui. Au <i>diner</i> d'abord pour commander une tasse de café aux deux serveurs préposés et identiquement vêtus. Plus tard, à la porte de son pavillon au pied de laquelle il ramasse deux bouteilles de lait. Puis, devant la chambre de ses deux petits garçons couchés l'un à côté de l'autre dans une même position. Enfin, face à sa femme éveillée dans la chambre conjugale décorée de deux tableaux de fleurs similaires. Toutes ces paires comme autant de dédoublements préfigurent la confusion dont sera victime Balestrero d'être reconnu coupable à la place d'un autre homme.<br />
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg6Afo5oEiEdmBrazUNx0QI9Y3Igu2dboX97eG3gOs6KqYzuNIh6ofhYaGJvjNCvJU-xSJpK_SlYy4O_POoWAYLzWeVb7zsWaURGC_Hoia0KcTlBK2avQ5SYVTmEE8M1bBeMdMBJBtIXyvJ/s1600/double+1+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="240" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg6Afo5oEiEdmBrazUNx0QI9Y3Igu2dboX97eG3gOs6KqYzuNIh6ofhYaGJvjNCvJU-xSJpK_SlYy4O_POoWAYLzWeVb7zsWaURGC_Hoia0KcTlBK2avQ5SYVTmEE8M1bBeMdMBJBtIXyvJ/s1600/double+1+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><i>Le faux coupable</i>, d'Alfred Hitchcock (1957). À gauche, la sortie du club de jazz (deux policiers). À droite, Balestrero (Henry Fonda) commande une tasse de café (deux serveurs).</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi8BbcJrU0liSzabhIP0Zy4QLS7bNJBW4Mhsbl_UnEU-V8dzHw1InQtP6u9GxcEbtkooS5qwca__WwyRH_yJukLajxvyXpQLqaQZi0h9Xsbyixo1AAgUjQYvV_J-leB_gOewL7pB6ARGmBS/s1600/double+2+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="241" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi8BbcJrU0liSzabhIP0Zy4QLS7bNJBW4Mhsbl_UnEU-V8dzHw1InQtP6u9GxcEbtkooS5qwca__WwyRH_yJukLajxvyXpQLqaQZi0h9Xsbyixo1AAgUjQYvV_J-leB_gOewL7pB6ARGmBS/s1600/double+2+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><i>Le faux coupable</i>, d'Alfred Hitchcock (1957). À gauche, deux enfants endormis. À droite, deux tableaux de fleurs entre lesquels se tient Balestrero pour parler à sa femme alitée (Vera Miles).</td></tr>
</tbody></table>
<span style="font-style: normal;">L'argent est à l'origine de l'erreur humaine et judiciaire dans cette histoire. Endettés, les Balestrero ne peuvent pas honorer les dépenses de santé auxquelles ils voudraient faire face. Résolu à subvenir aux besoins dentaires de sa femme, Manny décide un jour de contracter un prêt sur le compte de sa femme ouvert à la compagnie d'assurances. </span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<span style="font-style: normal;">Son attente au guichet marque le début de ses tourments. Reconnu par l'employée comme un brigand ayant braqué</span> <span style="font-style: normal;">l'une de ses collègues quelques jours plus tôt, Balestrero est</span><span style="font-style: normal;"> subitement cadré par Hitchcock comme un prisonnier depuis le petit portail à barreaux situé de l'autre côté du comptoir. Sa condamnation ne se fait pas attendre. Le soir même de sa requête à la compagnie d'assurances, il est interpellé par trois inspecteurs pour vérifications devant son domicile et conduit au commissariat de la 110e brigade. Un test graphologique et plusieurs identifications de témoins auront raison de son innocence. Il est placé sur le champ en détention dans l'attente de son procès. Sa famille, soudée et confiante obtient néanmoins sa libération sur caution. </span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<span style="font-style: normal;">Alors qu'une défense solide s'organise avec un avocat, la femme de Manny commence de présenter des troubles du comportement. </span>Sa parole se raréfie, son intégrité physique et mentale se délite. Bientôt, elle prend en charge la culpabilité supposée de son époux à tel point qu'elle finit par se faire « enfermer » dans une maison de repos. Balestrero, esseulé et acculé, est finalement délivré par un coup du sort. Un seul plan ingénieux permet au spectateur de comprendre le retournement de situation. Grâce à la superposition du visage du véritable coupable sur celui de Manny, Hitchcock révèle la méprise et permet au protagoniste de se rassembler en faisant un avec la vérité. Le double, dorénavant tenu à distance est chassé.<br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgfz8CIaygf-mIfJr5_sWDJh1Foe1uTs4fW8qhozeqjdt_tKwa2yIUifehYQUwzQblPF54IBUfSWkQLSaS-P7zxnS_sSHIeEMjXvrIBm_Zixq1NNi6qKI0SzL_BDfh0KXtYexhIVlW-1Btu/s1600/double+3+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="241" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgfz8CIaygf-mIfJr5_sWDJh1Foe1uTs4fW8qhozeqjdt_tKwa2yIUifehYQUwzQblPF54IBUfSWkQLSaS-P7zxnS_sSHIeEMjXvrIBm_Zixq1NNi6qKI0SzL_BDfh0KXtYexhIVlW-1Btu/s1600/double+3+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><i>Le faux coupable</i>, d'Alfred Hitchcock (1957). À gauche, Manny Balestrero (Henry Fonda) est observé depuis le guichet de la banque comme un prisonnier. Peu de temps après, conduit dans sa cellule sans mot dire, son équilibre psychique bascule : il tourne en rond avant que la caméra ne simule son vertige. (à droite)</td></tr>
</tbody></table>
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTWh2htF1cKvX5-pBkB3yZ7Sn2YOc_riENtGK7U2B9pASWTlOy3VDcr23rkqr1EK1yhRXvvNQtRFHLcCaZYu7FDGJPe-ssmTQbWYrvMwjQzi3RpCGe2fz9Cse8Vb1tDAn3CywbqzxxXeHK/s1600/double+4+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="241" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTWh2htF1cKvX5-pBkB3yZ7Sn2YOc_riENtGK7U2B9pASWTlOy3VDcr23rkqr1EK1yhRXvvNQtRFHLcCaZYu7FDGJPe-ssmTQbWYrvMwjQzi3RpCGe2fz9Cse8Vb1tDAn3CywbqzxxXeHK/s1600/double+4+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><i>Le faux coupable</i>, d'Alfred Hitchcock (1957). À gauche, Hitchcock réunit en transparence les visages des deux hommes confondus par les témoins accusateurs. À droite, au commissariat, Balestrero croise son double : les deux hommes se regardent en miroir.</td></tr>
</tbody></table>
<br />
<br />
<br />
<br />
<br />
Le <i>deus ex machina</i> du film pourrait trouver son explication dans les mots de Jean Amrouche extraits de sa conversation avec Marthe Robert à la fin de l'émission citée ci-dessus <i><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/des-idees-et-des-hommes-a-propos-de-franz-kafka-quelques-remarques-sur-le-proces-1ere-diffusion" target="_blank">Des idées et des hommes </a></i>(04 avril 1955) : <i>Il est bien clair que l'homme ne pourrait se justifier lui-même. Si il Est, il peut être justifié et son existence peut être justifiée mais c'est le juge, c'est la justice qui le justifier</i>[ont] <i>et non pas lui-même.</i> (26'57'') Ce à quoi Marthe Robert répond avec intelligence : <i>Le seul besoin de se dire « juste » déclenche le procès, et nécessairement, une fois qu'il est déclenché, rien ne peut l'arrêter, ni l'infléchir. Donc, le seul espoir qu'il y a si bizarre que cela paraisse dans le livre </i>[Le procès]<i> - presque incroyable tellement il s'affirme en dépit de tout - le seul espoir est que l'Être arrive à un tel degré de connaissance que le besoin de se justifier n'existe plus. </i>(28'58'')<br />
<br />
<div style="text-align: center;">
*</div>
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<span style="font-style: normal;">Retour à l'émission spéciale consacrée à Kafka le 29 août 1983. À rebours de la pensée conceptuelle de
Jacques Derrida, Georges Kiejman déclare que </span><i>la loi est un piège,
n’importe comment.</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>Le mérite de
Kafka est de montrer que la Loi est une règle qui contraint alors que personne
n’en connaît ni le contenu ni la justification. Bien sûr, chacun de nous est
prêt à admettre qu’il y a des lois qui ont un contenu clair, celles qui
défendraient la propriété privée ou de l’État</i><span style="font-style: normal;">
(…). Mais, </span><i>la Loi est une interdiction plus vague, plus abstraite,
qui pèse sur chacun de nous, qui nous maintient en état de dépendance et qui
par là protège un ordre. Mais quel ordre ? On ne le sait pas. Quand
l’abbé, dans un des chapitres du</i><span style="font-style: normal;"> Procès </span><i>lui
raconte l’histoire du gardien de la Loi, c’est très caractéristique. Le gardien
garde la Loi, mais finalement, puisqu’on ne peut jamais rentrer dans la maison
de la Loi, on n’en connaît encore une fois jamais le visage.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Vous savez, les gens disent :
« Nul n’est censé ignorer la Loi ». Mais c’est devenu quelque chose
d’assez comique avec le temps. Parce que si autrefois la Loi était l’expression
de quelques valeurs très simples, aujourd’hui, c’est une sorte de maquis bureaucratique,
un amas de textes, dont précisément on ne retrouve jamais le fondement moral
commun</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Nous savons que la
Loi existe, nous ignorons tous ce qu’elle est.</i><br />
<!--EndFragment--></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhf_HKJqUdsB4dKLhXiMPPBfDKFEUwVI5Xhxs4Y-0xC-ti8a8tTajR_HsJMBGxgrxcZi5-QajzUqbh1IOw00dnBHSb63IYxJTAizoDiBgO9QAj3MLb1qx476Z02YasnIcPiUV7EBki_RzOc/s1600/devant+la+loi+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="258" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhf_HKJqUdsB4dKLhXiMPPBfDKFEUwVI5Xhxs4Y-0xC-ti8a8tTajR_HsJMBGxgrxcZi5-QajzUqbh1IOw00dnBHSb63IYxJTAizoDiBgO9QAj3MLb1qx476Z02YasnIcPiUV7EBki_RzOc/s1600/devant+la+loi+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes extraits du <i>Procès</i> d'Orson Welles, 1962. À gauche, illustration de l'homme de la campagne <i>se pench</i>[ant] <i>pour regarder à l'intérieur [de la porte]. </i>À droite, Joseph K. (Anthony Perkins) face à son avocat (Welles) alité. Le cadrage en légère contre-plongée positionne son corps devant un toit de verre (voir les « barreaux ») pouvu de rideaux à demi-tirés de part et d'autre. Ce décor fonctionne comme la porte de la Loi : à la fois ouvert et fermé.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans la deuxième partie de son argumentation, Derrida ajoute
que les suites d’interprétations auxquelles se livrent l’abbé et K. sont de<i>
type talmudique</i><span style="font-style: normal;">. La Loi est complexe, </span><i>et
le juridique n’est qu’une des instances déterminées de</i><span style="font-style: normal;"> [celle-ci]. </span><i>Et justement, ce qui est
fascinant dans</i><span style="font-style: normal;"> Devant la loi, </span><i>c’est
qu’à aucun moment </i><span style="font-style: normal;">[Kafka]</span><i> ne
détermine la Loi, </i><span style="font-style: normal;">[ni] </span><i>ne dit de
quelle loi il s’agit : loi naturelle, loi morale, loi politique. C’est LA
Loi. C’est ce qui fait qu’une Loi est une Loi.</i><span style="font-style: normal;">
(…)</span><i> L’être Loi de la Loi. </i><span style="font-style: normal;">(1h45’10’’)
Le philosophe poursuit en rapportant la réflexion mise en œuvre par Kafka à son
appartenance à la religion juive. </span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<span style="font-style: normal;">STOP. </span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<span style="font-style: normal;">À ce point précis de l’écoute, il est
nécessaire de rembobiner un peu la bande pour comprendre les enjeux sous-tendus
par la judéïté assimilée de Kafka.</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Marthe Robert, autre intervenante de cette émission de dix heures qui compte de nombreux invités, synthétise les éléments de l’équation de
la façon suivante : À Prague, à la fin du XIXe siècle, les communautés allemande, tchèque et juive
cohabitent à des niveaux de respectabilité différents. <i>Les juifs qui
s’identifient à la culture allemande (parce qu’elle est la culture supérieure à
l’époque) en sont exclus.</i><span style="font-style: normal;"> [Mais] </span><i>ils
font comme si ils en faisaient partie : ils vont à l’école allemande, ils
connaissent les classiques allemands mieux que leurs camarades allemands mais
il n’empêche que, comme le dit fort bien Kafka, ils sont très conscients du
fait qu'il y a là « larcin » quelque part. Il y a possession
illégitime. Dans la mesure où ils ont quitté le ghetto d’Europe orientale, ils
sont à demi-assimilés.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Jusqu’à
l’âge de 30 ans, Kafka masquera le problème. Il joue le jeu. Sauf qu’il est
gêné par ses parents, par cette famille qui parle très mal l’allemand et qui
veut lui imposer à la fois un simulacre de vie juive qui n’a plus de
consistance</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>et en même temps
le jeu de la famille intégrée à l’allemande, ce qu’elle n’est pas non plus.
Kafka, passionné de vérité, ne peut pas tolérer cette situation.*</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>(…) Plus
tard, il s’enthousiasmera pour la langue et le théâtre Yiddish. (1h24’02’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Retour à Jacques Derrida : <i>Il me semble que ce qui
fait la singularité de Kafka, c’est ce croisement d’appartenance et de non
appartenance qui lui a sans doute permis de recevoir de ce rapport étrange au
judaïsme quelque chose de l’étrange familiarité avec la Loi. Une familiarité
sans familiarité. Certains diront que c’est ça précisément qui est judaïque
chez lui : le fait d’avoir vécu sur le mode de l’étrangeté, de
l’extériorité, de la marginalité, l’appartenance instable à une communauté.
Alors là, on entre dans une logique que je trouve paradoxale et redoutable</i><span style="font-style: normal;"> (…). Le parallèle paraît en effet fragile entre la
judéïté de Kafka a priori « déterminée » par son déficit de transmission et la condamnation indubitable de l’homme la campagne déduite de son
empêchement devant la Loi. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Comment donc éclairer la conclusion de la parabole ?
Pourquoi la porte de la Loi ne « vivait » -elle que pour l’homme de
la campagne venu mourir jusqu’à elle ? <i>La loi est ce à quoi il n’est
pas question d’échapper. Quand on définit un espace quel qu’il soit, cet espace
est limité par des repères, des frontières, des clôtures qui se donnent comme
pouvant être transgressés ou franchis. La Loi en ce sens ne peut pas occuper un
espace. Et c’est pourquoi elle est, comme le disait Kafka dans le texte,
insituable. </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>Si une Loi est une
Loi, c’est-à-dire, si elle commande catégoriquement, à ce moment-là, elle ne
doit pas pouvoir être dérivée, expliquée par une généalogie, une genèse, une
histoire. Par conséquent, étant anhistorique, elle ne peut pas être
réappropriable, et on ne peut pas y accéder. Ou quand on accède à la Loi, on
accède à ses modes de révélation, à ses modes de présentation historique, mais
à la Loi elle-même, on n’accède pas. Donc, on ne peut pas y échapper parce
qu’on ne peut pas y accéder. Dès lors qu’on ne peut pas y accéder, la Loi - ce
qu’elle commande à travers tous les autres commandements qu’elle peut donner -
c’est : « ne viens pas jusqu’à moi ». Par conséquent, d’une
certaine manière : « ignore moi comme Loi. N’accède pas à ma demande
au moment où tu m’obéis. » Et cela crée une situation que certains
appellent « de double contrainte », qui est le rapport de folie à la Loi. Le
rapport vigilant à la Loi ne peut qu’être un rapport de folie, un rapport dans
lequel la Loi est interdite. Et cette expérience de la Loi comme ce qui est
interdit, c’est la folie à laquelle on ne peut pas échapper.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Traditionnellement, on met la Loi du
côté de la raison, de la rationalité, de l’organisation, du logos. Mais je
dirai que le rapport vigilant est du côté de la folie.<o:p></o:p></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Adèle van Reeth aboutit à un raisonnement similaire, quoique plus simplement formulé : <i>Que nous dit la parabole qu’on a entendue ?
Peut-être tout simplement qu’il ne faut pas chercher à connaître ni à discuter
la Loi, puisque dès lors qu’on rentre dans une attitude réflexive ou
interprétative, on n’agit pas. C’est ça la morale, si morale il y a.
C’est : peu importe la Loi, agissez. Y compris si ça implique d’aller
contre cette Loi.</i><span style="font-style: normal;"> (38’40’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVom8w1_x3MNS2LlUMDdXK_VB8bU9QexJRXISY-HpjDt1yOxlJ1X2Pb2IQLKCZCmUKLM-elrA_idesIjrVxvp9kc57F2y59pc8dlLhk3_P0PF3ZI14fEtynZKcK56308LKxD1WDQtuLud3/s1600/loi+welles+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="260" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVom8w1_x3MNS2LlUMDdXK_VB8bU9QexJRXISY-HpjDt1yOxlJ1X2Pb2IQLKCZCmUKLM-elrA_idesIjrVxvp9kc57F2y59pc8dlLhk3_P0PF3ZI14fEtynZKcK56308LKxD1WDQtuLud3/s1600/loi+welles+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photogrammes extraits du <i>Procès</i> d'Orson Welles, 1962. À gauche, la Loi est symbolisée par un spectre, une sculpture recouverte d'un drap. À droite, l'avocat de Joseph K. ne se présente pas autrement à ses clients : voilé et dissimulé sous les draps de son lit.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoBodyText" style="text-align: justify;">
Derrida, de nouveau : <i>Être devant la loi, ça ne veut pas dire qu’on ne peut pas
entrer dans la Loi comme l’homme de la campagne qui ne veut pas seulement
accéder à la Loi. Il veut entrer en elle. Etre devant la loi, c’est comparaître
devant la Loi, être le sujet de la Loi, tout en étant précisément dans l’espace
du hors-la-Loi. Que le sujet devant la Loi soit en même temps hors-la-Loi,
qu’il n’arrive pas à y entrer, c’est ça la folie du rapport à la Loi. </i><o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Si vous considérez maintenant que le dispositif
d’écriture de ce texte : </i>Devant la Loi<i> est tel que l’expression </i>Devant la
Loi <i>est située avant le texte comme titre ou bien comme incipit du texte
(« Une sentinelle se tient postée devant la Loi »), cette expression
décrit en même temps l’opération par laquelle le texte </i>Devant la Loi<i> fait la
Loi et défie à l’infini les commentateurs, les exégètes qui vont se trouver
eux-mêmes devant : </i>Devant la Loi<i>, qui aura fait la Loi par un coup
d’écriture, qui est le très doux et modeste coup de force de Kafka. Il a par le
fait démontré comment une écriture qui s’explique avec la Loi pouvait se signer
et faire la Loi à son tour. Comment un texte peut devenir Loi.</i><span style="font-style: normal;"> (1h47’55’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* <i>À son ami Max Brod, il a mis face à face les impossibilités
où il se trouvait </i>(…) [et notamment]<i> l’impossibilité de ne pas être juif, de
l’être encore, de le redevenir dans un sens authentique.</i> Marthe Robert, dans la journée spéciale Franz Kafka diffusée le 29 août 1983 sur France Culture. (2h59'24’’)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
P.S. : Les méthodes de travail d'Orson Welles ont fait l'objet d'un numéro de <i>Surpris par la nuit</i> le 28 septembre 2007 (1h14'). Malheureusement remonté pour rentrer dans la case d'un atelier de la création radiophonique (<i>ACR</i>), il a été rediffusé le 14 mai 2014 : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/latelier-de-la-creation-14-15/la-petite-boutique-dorson-welles" target="_blank">La petite boutique d'Orson Welles</a> (un court passage, dix minutes après le début, concerne <i>Le procès</i>).<br />
<br />
<div style="text-align: center;">
*</div>
<br />
Annexe : <a href="https://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.com/2019/04/annexe-le-cinema-et-son-double-jean-luc.html" target="_blank">La critique de Jean-Luc Godard du film <i>Le faux coupable</i> d'Hitchcock : Le cinéma et son double, in <i>Les cahiers du cinéma </i>n°72, juin 1957</a><br />
<br />
P.P.S. : Il n'est pas rare de qualifier une situation de « kafkaïenne » pour décrire confusément un sens qui échappe, un environnement hostile sans l'être tout à fait, une progression dans des sables mouvants. Y faire face relève du combat perdu d'avance tant la situation parait dénuée de prises. Ci-dessous, un exemple de lecture fortuite croisée à l'écriture de ce post, qui semble réunir plusieurs des traits à l'origine du cauchemar kafkaïen :<br />
<br />
Dans le <i>Courrier international</i> n° 1030-32, été 2010, extraits traduits du Washington post de l'article « Dans la nébuleuse des services secrets », par Dana Priest et William Arkin, page 20 :<br />
<br />
<i>L'univers top secret que le gouvernement américain a créé à la suite des attentats du 11 septembre 2001 est devenu si vaste, si complexe et si impénétrable que personne ne sait combien il coûte, combien de personnes il emploie, combien de programmes il chapeaute, ni combien d'agences effectuent le même travail. « Les choses se sont tellement développées depuis le 11 septembre que s'en faire une idée exacte représente un véritable défi », a récemment déclaré le ministre de la défense, Robert Gates. </i><br />
<i><br /></i>
<i>Au Pentagone, qui contrôle plus des deux tiers des programmes de renseignements, seule une poignée de hauts responsables, baptisés les « Super-Utilisateurs », sont théoriquement au courant de l'ensemble des activités du ministère. Mais, comme deux de ces Super-Utilisateurs nous l'ont confié, il s'agit d'une mission impossible. « Je ne vivrai jamais assez longtemps pour être au courant de tout », nous a avoué l'un d'eux. Le second nous a raconté que, pour son premier briefing, il a été conduit dans une pièce minuscule où on l'a invité à s'asseoir en l'avertissant qu'il n'était pas autorisé à prendre des notes. L'un après l'autre, les différents programmes lui ont été présentés à toute allure sur un écran jusqu'à ce que, n'en pouvant plus, il ait demandé que la projection soit interrompue. « Je ne parvenais pas à mémoriser quoi que ce soit ».</i><br />
<i><br /></i>
<i>Les conclusions du général à la retraite John R. Vines, chargé l'année dernière d'examiner les processus de contrôle des programmes les plus sensibles du ministère de la Défense, ne font que souligner la gravité du problème. Vines a été stupéfié par ce qu'il a découvert. « La complexité de ce système défie toute description », souligne-t-il. Le résultat, selon lui, est qu'il est impossible de déterminer si le pays a gagné en sécurité. </i>(...)<br />
<i><br /></i>
Pour boucler la boucle, plus loin dans l'article, ce paragraphe du même tonneau :<i> Au-delà de la redondance, le culte jaloux du secret dans le monde du renseignement porte également tort à l'efficacité des services. Pour le ministère de la Défense, la racine de ce problème est à rechercher dans un bouquet de programmes ultrasecrets contrôlés par des officiers de sécurité spécialement formés. Il s'agit des fameux Special Acces Programs (SAP). « Il n'y a qu'une seule entité dans l'Univers qui dispose d'une pleine visibilité sur l'ensemble des SAP - c'est Dieu », a déclaré James R. Clapper </i>(...).<br />
<br />
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=10tD6TdR8f4rUdH-ESQFj6n9vj3ks24Wk" target="_blank">Télécharger le PDF</a></b><a href="https://drive.google.com/open?id=10tD6TdR8f4rUdH-ESQFj6n9vj3ks24Wk" target="_blank"> </a>de ce post (9 pages, texte et images)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-68293823822877504782018-02-13T10:40:00.000+01:002019-04-20T10:47:22.786+02:00Annexe : « Le cinéma et son double », Jean-Luc Godard, 1957<div class="separator" style="clear: both; text-align: justify;">
En complément du post <a href="https://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.com/2018/02/la-loi-chez-kafka-1983-2015.html" target="_blank">La loi chez Kafka : Journée spéciale (1983) + Les nouveaux chemins de la connaissance (2015)</a> où est mis en regard le film <i>Le faux coupable</i> (<i>The wrong man</i>) d'Alfred Hitchcock avec la parabole de la Loi écrite dans <i>Le procès</i> de Franz Kafka, vous trouverez ci-dessous la critique du film écrite par Jean-Luc Godard dans <i>Les cahiers du cinéma</i> n°72 de juin 1957 intitulée : « Le cinéma et son double ».</div>
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<br />Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-74547055658207810712018-01-30T19:18:00.000+01:002018-03-09T18:10:11.109+01:00La lumière du noir : Matinée des autres (2000) + Soulages : Le bon plaisir (1992)<!--[if gte mso 9]><xml> <w:WordDocument> <w:Zoom>0</w:Zoom> <w:HyphenationZone>21</w:HyphenationZone> <w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery>0</w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery> <w:DisplayVerticalDrawingGridEvery>0</w:DisplayVerticalDrawingGridEvery> <w:UseMarginsForDrawingGridOrigin/> </w:WordDocument> </xml><![endif]--> <!--StartFragment--> <br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Mille noirs. Vous trouverez ci-dessous les comptes rendus de deux émissions qui se répondent : l'une est consacrée à la couleur noire d'un point de vue artistique, métaphysique, astrologique et ethnologique (<i>La matinée des autres</i>). Elle est émaillée de quelques considérations historiques de Michel Pastoureau puisées dans l'émission <i>Les lundis de l'histoire</i>. L'autre est une plongée dans la vie de Pierre Soulages. En 1992, le peintre a 73 ans et se déplace d'un atelier à l'autre, de Sète à Paris en passant par Conques. L'émission est résumée à la manière des synthèses détaillées de l'I.N.A. (<i>Le bon plaisir</i>).</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*</div>
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<i><br />
</i></div>
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<i>Matinée des autres</i> : La lumière du noir, par Pascale Lismonde, avec Sonia Rykiel, Bernar Venet, Claire Illouz, Bruno Pinchard, Marc Lachieze-Rey et un extrait des premières minutes du <i>Bon plaisir</i> de Pierre Soulages (première diffusion : 04 janvier 2000).<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
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Pascale Lismonde : <i>Noir d’encre, de suie, de fumée, de charbon calciné, cet atramentum dont parlait Pline l’Ancien, pigment fort apprécié par les peintres depuis l’antiquité, mais aussi par les calligraphes qui fondent un art fort prisé en Chine et au Japon. Œuvre noire des alchimistes, étape préparatoire de l’élaboration du grand œuvre, mélancholia (humeur noire) signe distinctif des génies créateurs à la Renaissance</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>, chambre noire des expériences optiques</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>. Noir des vêtements qui disent en occident la dignité, la distinction, mais aussi la perte, le deuil et la révolte. Le noir distingue, isole. Le noir n’est plus une couleur, il les détruit toutes.</i><span style="font-style: normal;"> (…) (1'44'')</span><br />
<a name='more'></a><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Aux acceptions formulées par Pascale Lismonde, l’artiste Claire Illouz ajoute que la couleur noire qui permet souvent de commencer une œuvre (encre de chine ou fusain) est le résultat d’une <i>combustion</i><span style="font-style: normal;">, </span><i>donc de la mort de quelque chose,</i><span style="font-style: normal;"> [soit]</span><i> quelque chose qui a brûlé et à partir de laquelle on arrive à faire naître une pensée.</i><span style="font-style: normal;"> Revenu à un état premier dans une forme nouvelle (liquide, bâtonnet, pierre), le noir accompagne également le geste inaugural de l’artiste, celui qui fouille le blanc du support, feuille ou toile. Il est à la fois </span><i>essentiel</i><span style="font-style: normal;"> et </span><i>limitation</i><span style="font-style: normal;"> (Pascale Lismonde). Couleur née de la trace laissée par le feu (combustion), le noir peut également résulter de l’action d’un temps que la vie a peu à peu abandonné : celui de la moisissure ou de la </span><span style="font-style: normal;"><i>putréfaction</i></span><span style="font-style: normal;"> telle que la distingue Fulcanelli dans </span><i><a href="http://www.jefflemat.fr/autres/208_fulcanelli.pdf" target="_blank">Le mystère des cathédrales</a> </i><span style="font-style: normal;">(1926) : </span><br />
<i><br /></i>
<i>Batsdorff,<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>auteur présumé d’un ouvrage classique, que d’autres attribuent à Gaston de Claves, enseigne que la putréfaction se déclare quand la noirceur apparaît, et que c’est là le signe d’un travail régulier et conforme à la nature. Il ajoute : « Les Philosophes lui ont donné divers noms et l’ont appelée</i><span style="font-style: normal;"> Occident, Ténèbres, Eclypse, Lèpre, Teste de Corbeau, Mort, Mortification du Mercure… </span><i>Il appert donc que par cette putréfaction on fait la séparation du pur et de l’impur. Or, les signes d’une bonne et vraye putréfaction sont une</i><span style="font-style: normal;"> noirceur </span><i>très noire ou très profonde, une </i><span style="font-style: normal;">odeur </span><i>puante, mauvaise et infecte, dite des Philosophes </i><span style="font-style: normal;">toxicum et venenum, </span><i>laquelle odeur</i><span style="font-style: normal;"> n’est pas sensible</span><i> à l’odorat, mais seulement à l’entendement.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>» </i>(page 32)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Bruno Pinchard, philosophe, commente le texte en expliquant que Fulcanelli<i> veut mettre en mouvement. </i><span style="font-style: normal;">[Il]</span><i> pense que ça bouge encore dans la mort.</i><span style="font-style: normal;"> (24’35’’) Le noir produit par les éléments est indubitablement le fruit d’un processus. Bernar Venet*, peintre sculpteur, ne dit pas autre chose : </span><i>Ad Reinhardt que j’ai connu</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>peignait des croix avec de la peinture, il faisait ça avec application avec des brosses spéciales tandis que moi, je peignais avec du goudron que je versais brutalement sur la toile. Avec une sorte de raclette, je recouvrais la totalité, et puis ensuite, je levais mon tableau verticalement pour que le goudron coule, ce qui était très important. En fait, j’étais peintre, mais je ne montrais pas de la peinture, je montrais de la matière qui vivait sa propre vie.</i><span style="font-style: normal;"> (32’53’’) Venet tient à reconnaître la </span><i>brillance</i><span style="font-style: normal;"> de sa peinture tout autant que sa profondeur : </span><i>pour ce qui me concerne, c’est surtout le sobre et le sombre qui m’intéressent. Justement, c’est ce refus de la couleur, de la séduction facile.</i><span style="font-style: normal;"> À Pascale Lismonde qui observe une contradiction dans les termes, l’artiste répond par le cheminement du noir, capable d’états transitoires.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br />
</span></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgggIGAQAuFkq4mJl5KfJ8a1gDSJl9YGRbwEKcw7TDCnTwM2_L9v5z6kXUpX8PDL8jXqVT1Czqullp6z4FYCTZqUkTmq-a22xgdNrAnrRvPtupaAZ4nkcGl0lstLvXISNclPaYqZP_Zk3NT/s1600/venet+goudrons.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="450" data-original-width="700" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgggIGAQAuFkq4mJl5KfJ8a1gDSJl9YGRbwEKcw7TDCnTwM2_L9v5z6kXUpX8PDL8jXqVT1Czqullp6z4FYCTZqUkTmq-a22xgdNrAnrRvPtupaAZ4nkcGl0lstLvXISNclPaYqZP_Zk3NT/s1600/venet+goudrons.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Bernar Venet, <i>Goudrons</i>, 1963, <a href="http://www.botoxs.fr/evenement/bernar-venet-origines-1961-1966/" target="_blank">Exposition : Nouveau musée / Institut d'art contemporain de Villeurbanne</a>, 1997.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans son livre <i>Les sept trésors du lettré</i><span style="font-style: normal;">, Claire Illouz fait part des degrés de saturation du noir qui recèlent autant de dénominations particulières pour le définir. Hokusaï : </span><i>Pour donc connaître la véritable encre de chine, il nous faut que frotter le bout du pin avec un peu d’eau et laisser sécher le pin. Et lorsqu’il sera sec, si l’endroit qu’on a frotté est trouble et granuleux, c’est une marque infaillible qu’elle </i>[l'encre]<i> ne vaut rien. Si au contraire il </i>[le pin]<i> est uni clair et luisant, c’est une preuve certaine qu’elle est bonne, et par conséquent véritablement de la Chine</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>D’autre part, l’addition de couleurs très diluées à l’encre</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>permet d’en varier encore la totalité.</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>On multiplie ainsi encore les gammes de gris ou de noir. Il y a le noir antique</i><span style="font-style: normal;"> [mélangé au rouge] </span><i>et le noir frais</i><span style="font-style: normal;"> [au bleu].</span><i> Le noir brillant</i><span style="font-style: normal;"> [à de la colle] </span><i>et le noir mat</i><span style="font-style: normal;"> [au blanc]</span><i>. Le noir à la lumière</i><span style="font-style: normal;"> [reflété de gris] </span><i>et le noir dans l’ombre.</i><br />
<br />
Au registre de la correspondance des mots avec les tons
d’une couleur, Michel Pastoureau nous apprend dans son entretien bâclé avec Michelle Perrot (<i>Les lundis de l'histoire</i>, 3 novembre 2008) que le <i style="font-style: italic;">vocabulaire</i><span style="font-style: normal;"> relatif au noir reflète </span><i style="font-style: italic;">une perte de
sensibilité au fil des siècles</i><span style="font-style: normal;">. </span><i style="font-style: italic;">En
latin classique par exemple, il y a deux termes courants pour dire noir : « ater » qui est le noir mat et inquiétant et « niger » qui est le noir brillant et
favorable. Même chose dans les langues germaniques qui connaissent « blach » qui
est le noir brillant et « swarz » qui a donné le schwartz, qui est le noir mat.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i style="font-style: italic;">Notre sensibilité à la gamme des noirs
est certainement plus pauvre que celle de nos ancêtres</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i style="font-style: italic;">qui faisaient du noir non seulement
une couleur à part entière, mais un pôle fort de tous les systèmes de la
couleur,</i><span style="font-style: normal;"> et ce pour une longue durée. </span><i style="font-style: italic;">Des
origines jusqu’à la fin du Moyen-Age, le noir est une couleur comme les autres.
Puis, il y a cette période qui va de l’apparition de l’imprimerie jusqu’au
début du XXe siècle où le noir sort de l’ordre des couleurs, puis devient une
non-couleur. Et puis, une période plus courte, le XXe siècle où le noir peu à
peu redevient couleur à part entière</i><span style="font-style: normal;">.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>(6’47’’)</span><br />
<!--EndFragment--></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Inscrite dans la matière ou prêtée par commodité de langage, la couleur noire est aussi le vecteur de significations qui peuvent dépasser ses qualités premières. René Guénon dans sa réflexion intitulée « Les têtes noires » (1948) publiée dans <i>Les symboles de la science sacrée</i><span style="font-style: normal;"> (1962) (<a href="https://electrodes.files.wordpress.com/2008/12/guenon_symboles-de-la-science-sacree.pdf" target="_blank">accessible en ligne</a>) cherche à savoir pourquoi </span><i>tant de peuples divers </i><span style="font-style: normal;">[ont]</span><i> adopté, pour eux-mêmes ou pour leur pays, une désignation qui aurait eu un sens péjoratif</i><span style="font-style: normal;">, que ce soit les </span><i>« visages brûlés » (Aithi-ôps) </i><span style="font-style: normal;">pour les Éthiopiens, le </span><i>« peuple noir » (li-min)</i><span style="font-style: normal;"> pour les Chinois, ou la </span><i>« terre noire » </i><span style="font-style: normal;">[</span><i>Kêmi</i><span style="font-style: normal;">] pour les Égyptiens. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Il poursuit : <i>Ce n’est donc pas à ce sens inférieur de la couleur noire qu’il convient de se référer ici, mais bien plutôt à son sens supérieur</i> (...)<span style="font-family: "timesnewromanpsmt"; font-size: 14.0pt; font-style: normal;">.</span><span style="font-family: "timesnewromanpsmt"; font-size: 14.0pt;"><i> </i></span><i>On sait que, dans son sens supérieur, la couleur noire symbolise essentiellement l’état principiel de non-manifestation, et que c’est ainsi qu’il faut comprendre notamment le nom de</i><span style="font-style: normal;"> Krishna</span><i>, par opposition à celui d’</i><span style="font-style: normal;">Arjuna </span><i>qui signifie « blanc », l’un et l’autre représentant respectivement le non-manifesté et le manifesté, l’immortel et le mortel, le « Soi » et le « moi »,</i><span style="font-style: normal;"> Paramâtmâ </span><i>et</i><span style="font-style: normal;"> jîvâtmâ. </span><i>Seulement, on peut se demander comment un symbole du non-manifesté est applicable à un peuple ou à un pays ; nous devons reconnaître que le rapport n’apparaît pas clairement à première vue, mais pourtant il existe bien réellement dans les cas dont il s’agit. </i>(...)<span style="font-family: "timesnewromanpsmt"; font-size: 14.0pt; font-style: normal;"> </span><i>Pour comprendre ce qu’il en est, il faut se souvenir que les peuples dont nous venons de parler sont de ceux qui se considéraient comme occupant une situation « centrale » ; on connaît notamment, à cet égard, la désignation de la Chine comme le « Royaume du Milieu » (Tchoung-kouo), ainsi que le fait que l’Égypte était assimilée par ses habitants au « Cœur du Monde ». Cette situation « centrale » est d’ailleurs parfaitement justifiée au point de vue symbolique, car chacune des contrées auxquelles elle était attribuée était effectivement le siège du centre spirituel d’une tradition, émanation et image du centre spirituel suprême, et le représentant pour ceux qui appartenaient à la tradition envisagée, de sorte qu’elle était bien véritablement pour eux le « Centre du Monde ». Or, le centre est, en raison de son caractère principiel, ce qu’on pourrait appeler le « lieu » de la non-manifestation ; comme tel, la couleur noire entendue dans son sens supérieur, lui convient donc réellement. Il faut d’ailleurs remarquer que, par contre, la couleur blanche convient aussi au centre sous un autre rapport, nous voulons dire en tant qu’il est le point de départ d’une « irradiation », assimilée à celle de la lumière ; on pourrait donc dire que le centre est « blanc » extérieurement et par rapport à la manifestation qui procède de lui, tandis qu’il est « noir » intérieurement et en lui-même ; et ce dernier point de vue est naturellement celui des êtres qui, pour une raison telle que celle que nous venons de rappeler, se situent symboliquement dans le centre même. </i>(pages 86-87)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Bruno Pinchard, à l’origine de la source textuelle citée, ajoute : <i>S’il y a un rapport entre le noir et le milieu, c’est que l’essence même des grands mystères se tient dans l’idée qu’arriver au milieu, c’est disparaître à la manifestation.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span></i><span style="font-style: normal;">(45’33’’) À l’invitation de Pascale Lismonde, il convoque le symbole de la croix : </span><i>Cette inscription</i><span style="font-style: normal;"> [INRI] </span><i>qui est sur la croix du Christ qui rappelle que Jésus de Nazareth est le roi des Juifs peut être lue en un jeu d’écriture proprement alchimique qui résume tout le propos . Ce sera Igne (par le feu) Natura (la nature) Renovatur (sera renouvelée) Integra (dans son intégralité)</i><span style="font-style: normal;">. (51’02’’)</span><br />
<br />
Michel Pastoureau, plus vague, relate l'enjeu moral sous-jacent au noir : <i>Quand on prend les sociétés primitives, on s’aperçoit que le
noir est totalement ambivalent : il y a un bon et un mauvais noir. Le bon
noir, dans les périodes anciennes, en Egypte par exemple ou pour les peuples de
la Bible, est signe de fertilité, de fécondité. Avec Rome, surtout à l’époque
impériale et les débuts du christianisme, on a l’impression que le</i> (…) <i>mauvais
noir commence à occuper une large place du terrain symbolique. C’est le noir de
la mort, de la faute, du péché, du monde souterrain, plus tard de l’enfer.
</i>(11’12’’ + 14’09’’)<br />
<span style="font-style: normal;">
<!--EndFragment--></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>État principiel de non-manifestation</i><span style="font-style: normal;">, visage du </span><i>centre</i><span style="font-style: normal;">, le noir est sans conteste une part de la nuit, mais </span><i>quand on regarde bien, </i><span style="font-style: normal;">indique l’astrologue Marc Lachieze-Rey, </span><i>on s’aperçoit que le ciel n’est pas tout à fait noir, puisqu’il y a toutes ces étoiles. Donc, il est noir finalement « entre » les étoiles. Mais un des problèmes quand on regarde avec des jumelles, hé bien</i><span style="font-style: normal;"> [c’est qu’]</span><i>on s’aperçoit que là où on voyait du noir à l’œil nu, les jumelles nous révèlent des tas d’étoiles.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Notre regard reçoit ce qui peut venir de très loin dans l’univers. Et très loin, finalement, il y a presque toujours quelque chose</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>qui nous enverra quelques petits photons qui vont contribuer à une luminosité du ciel.</i><span style="font-style: normal;"> (…)<span style="mso-spacerun: yes;"> </span></span><i>Indépendamment de toutes ces considérations, malheureusement on s’aperçoit que c’est très rare que le ciel soit vraiment noir, parce qu’</i><span style="font-style: normal;">[outre la lune] (…) </span><i>la réflexion des lumières des villes, des phares des voitures sur les nuages et les couches de pollution</i><span style="font-style: normal;"> empêchent l’obscurité d’advenir complètement. (54’24’’) Et ce ne sont pas les trous noirs qui prouveront le contraire : </span><i>ils relèvent du domaine de la croyance</i><span style="font-style: normal;">, dit Marc Lachieze-Rey.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* <i>Je trouvais intéressant de signer Bernar comme ce noir et je me disais que le -d gênait. Il ne servait à rien ce -d de toutes façons. Et donc Bernar était plus près du noir que j’utilisais tous les jours. Et c’est comme ça que j’ai signé d’ailleurs Venet Bernar. Je terminais par cette sonalité-là</i><span style="font-style: normal;"> (sic). (19’50’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Le bon plaisir</i> : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/la-nuit-revee-de/le-bon-plaisir-pierre-soulages" target="_blank">Pierre Soulages ou la lumière agissante</a>, par Marie-Christine Navarro, avec Michel Ragon, Georges Duby, Michel Lorblanchet, Paul Verdier, Gilles Racot, David Quéré, Pierre Encrevé, Pierrette Bloch, Roger Laville, Dominique Fleury (première diffusion : 05 décembre 1992).<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
1<sup>ère</sup> heure : <b>jusqu’à 10’50’’</b> : balade dans le jardin de la maison, à Sète (1/2) ; <b>de 11’01’’ à 20’55’’</b> : collaboration musicale (Gilles Racot), bruits environnants (ville, vent), goûts musicaux (rejet du sentiment) ; <b>de 20’59’’ à 25’46’’</b>: titre des toiles, visite de Picabia en 1947, devenir de l’œuvre achevée ; <b>de<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>25’58’’ à 37’45’’</b> : conditions d’accrochage à la galerie de France (Paris 4e), accidents de peinture sur la toile, présentisme de l’expérience <i>avec ces toiles qui se construisent par la lumière au moment où on les regarde</i><span style="font-style: normal;"> opposé à la fabrication psychologique déduite du geste pictural, théorie du pair et de l’impair ; <b>de 38’49’’ à 43’50’’</b> : rapprochement par Georges Duby de </span><i>la majesté, la robustesse de cette peinture</i><span style="font-style: normal;"> de l’esthétique cistercienne (rigueur et austérité, espace construit mathématiquement, ombre et lumière en rapports changeants constants) ; <b>de 43’50’’ à 51’11’’</b> : mémoire de Pierre Soulages (enfance, menhirs, désir d’être peintre, l’école des Beaux-Arts fuie, visites au Louvre, peintres préférés) ; outils de l’atelier de la rue Schoelcher (Paris 14<sup>e</sup>) : lames de grandes dimensions, morceaux de carton ; manières de peindre (parallèlement ou perpendiculairement à la surface) ; <b>de 51’22’’ à 56’38’’</b> : conversation entre Pierre Soulages et Michel Lorblanchet, préhistorien à Cajarc (département du Lot) au sujet des couleurs de l’art pariétal (</span><i>j’ai toujours pensé que le noir, c’était la couleur d’origine, d’origine de la peinture</i><span style="font-style: normal;">), des tracés digitaux (grotte du Pech Merle) : du geste à la forme ; <b>de 56’38’’ à 1h01’00’’ </b>: positions du corps dans le travail, abandon du mouvement figurant pour la recherche d’une présence.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br />
</span></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0QqMcymeJot-Eja81P0_f21fLNxP7AUfK7UtMgrubBUTuJFZwwhzKtV0w_PKfdhMZKQZ6DNVTqpO5wuhPe6N3CDCePLTHkFqWrgmBjQnpNKMuG1ALGjnGq9SQivs0WOewIZb1T9j8pDTN/s1600/cranach.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="624" data-original-width="401" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0QqMcymeJot-Eja81P0_f21fLNxP7AUfK7UtMgrubBUTuJFZwwhzKtV0w_PKfdhMZKQZ6DNVTqpO5wuhPe6N3CDCePLTHkFqWrgmBjQnpNKMuG1ALGjnGq9SQivs0WOewIZb1T9j8pDTN/s1600/cranach.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Lucas Cranach dit l'Ancien, <a href="http://cartelfr.louvre.fr/cartelfr/visite?srv=car_not_frame&idNotice=26241" target="_blank">Portrait présumé de Magdalena Luther</a>, 1529-1542, Musée du Louvre. (l'une des toiles régulièrement observées dans les années de jeunesse parisiennes de Soulages)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
2<sup>ème</sup> heure : <b>de 1h01’00’’ à 1h06’13’’</b> : témoignage de Michel Ragon (1/3) : rencontre en 1947 avec Soulages, groupe formé avec Hans Hartung et Gérard Schneider, goût pour la forme littéraire brève (poésie de René Char), critique de Roger Vailland dans la revue <i><a href="http://archives.pierre-soulages.com//pages/psecrits/vailland.html" target="_blank">Clarté</a></i><span style="font-style: normal;"> n°43, en 1962 ; <b>de 1h06’25’’ à 1h09’56’’</b> : récit d’une exposition d’art abstrait français montée après-guerre en Allemagne, connaissance des expositions d’art dégénéré par la revue nazi </span><i>Signal</i><span style="font-style: normal;"> (découverte de Mondrian) ; <b>de 1h09’57’’ à 1h15’57’’ </b>: description des outils de travail (tenailles), éloge et limites de l’artisanat, retour sur la publication d’un article de Claude Levi-Strauss (primat du sens véhiculé par l’œuvre sur sa forme), différence non-figuration/abstraction ; <b>de 1h16’10’’ à 1h21’02’’</b> : Michel Ragon (2/3) : vie de l’atelier, exposition au centre Pompidou en 1979 (scénographie), importance de Jean-Michel Atlan (magique et sacré) ; <b>de 1h22’43’’ à 1h41’44’’</b> : paysage environnant l’abbaye de Conques, description de l’abbatiale (nef, rythme, hauteur, orientation géographique, fenêtres, lumière), séance de travail dans l’atelier du maître verrier : composition et élaboration technique des vitraux ; <b>de 1h41’53’’ à 1h47’14’’</b> : exposé de Paul Verdier, archéo-astronome : histoire de la construction de l’abbaye de Saint-Sauveur devenue l’abbaye de Sainte-Foy, rencontre de la lumière avec le temps cosmologique ; <b>de 1h47’15’’ à 1h48’35’’</b> : relation de travail entre Pierre Soulages et le maître verrier ; <b>de 1h48’36’’ à 1h55’42’’</b> : témoignage de Roger Laville vigneron acquéreur, origine du nom Soulages (« champ exposé au soleil » ou étymologiquement : « soleil agissant ») ; <b>de 1h55’48’’ à 2h09’51’’</b> : le jardin de Sète (2/2), récit de la visite d’une équipe de tournage (télévision japonaise), indifférence aux prix artistiques, reconnaissance de l’activité d’artiste (expulsion d’un atelier de la rue Galande, Paris 5<sup>e</sup>), contre l’impôt sur les grandes fortunes, apprentissage (copies d’antique, Fra Angelico, Nicolas Poussin), reconnaissance rapide, emploi du brou de noix.</span><br />
<div class="MsoNormal" style="mso-layout-grid-align: none; mso-pagination: none; tab-stops: 28.0pt 56.0pt 84.0pt 112.0pt 140.0pt 168.0pt 196.0pt 224.0pt 252.0pt 280.0pt 308.0pt 336.0pt; text-autospace: none;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="mso-layout-grid-align: none; mso-pagination: none; tab-stops: 28.0pt 56.0pt 84.0pt 112.0pt 140.0pt 168.0pt 196.0pt 224.0pt 252.0pt 280.0pt 308.0pt 336.0pt; text-autospace: none;">
3<sup>ème</sup> heure : <b>de
2h09’52’’ à 2h15’42’’</b> : témoignage de Pierrette Bloch, artiste, et
collectionneuse des toiles de Soulages, rencontre des femme et mère du
peintre ; <b>de 2h15’43’’ à 2h21’13’’ </b>: à la société sportive du jeu de
paume et de raquette rue Lauriston (Paris 16<sup>e</sup>), origine monastique
du jeu, forme du filet, manière de jouer ; <b>de 2h21’14’’ à 2h23’38’’</b>
: commentaire d’un poème de Guillaume IX d’Aquitaine ; <b>de 2h23’03’’
à 2h27’55’’</b> : témoignage de Pierre Encrevé, linguiste (1/2) :
contextualisation des œuvres de Soulages à la fin des années 1950, adresse de
la peinture : <i>le seul sens qu’elles ont, c’est d’être là. Il n’y a pas
un message caché. </i><span style="font-style: normal;"><b>De 2h27’57’’ à
2h35’45’’</b> : différence monochrome/monopigmentation : [les peintures] </span><i>ont
les couleurs de la lumière</i><span style="font-style: normal;">, problème posé
par les dimensions des toiles à la vente, premières gravures ; <b>de
2h35’51’’ à 2h38’30’’</b> : Pierre Encrevé (2/2) : réalisation du
catalogue raisonné ; <b>de 2h38’32’ à 2h44’48’’</b> : manières de
graver : ceux qui poussent et ceux qui arrachent, renoncer en peinture
(contre la </span><i>joliesse</i><span style="font-style: normal;">), fabriquer
ses instruments : </span><i>j’ai toujours pensé qu’un outil apportait tout
à la fois une surface et une forme</i><span style="font-style: normal;"> ;
<b>de 2h45’05’’ à 2h47’21’’</b> : Michel Ragon (3/3) : Pierre Soulages,
homme affable et réservé ; <b>de 2h47’22’’ à 2h49’32’’</b> : formation par
Rodez ; <b>de 2h49'33'' à la fin</b> : définitions du noir (28) lues dans le Littré.<o:p></o:p></span></div>
<!--EndFragment--><span style="font-style: normal;">.</span></div>
<span style="font-family: "times"; font-size: 12.0pt;">
<!--[if gte mso 9]><xml> <w:WordDocument> <w:Zoom>0</w:Zoom> <w:HyphenationZone>21</w:HyphenationZone> <w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery>0</w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery> <w:DisplayVerticalDrawingGridEvery>0</w:DisplayVerticalDrawingGridEvery> <w:UseMarginsForDrawingGridOrigin/> </w:WordDocument> </xml><![endif]--> <!--StartFragment--><span style="font-family: "times"; font-size: 12.0pt;"> </span><!--EndFragment--> </span>Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-22088888061588165482018-01-07T20:44:00.000+01:002018-02-11T00:04:47.330+01:00Howard Hawks : Les mardis du cinéma (1995) + L'humeur vagabonde (2015)<!--[if gte mso 9]><xml> <w:WordDocument> <w:Zoom>0</w:Zoom> <w:HyphenationZone>21</w:HyphenationZone> <w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery>0</w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery> <w:DisplayVerticalDrawingGridEvery>0</w:DisplayVerticalDrawingGridEvery> <w:UseMarginsForDrawingGridOrigin/> </w:WordDocument> </xml><![endif]--> <!--StartFragment--> <br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span class="Apple-style-span">Une fois n'est pas coutume, la lecture qui suit risque de donner le tournis à la molette de votre souris. Les photogrammes des films d'</span>Howard Hawks (1896-1977)<span class="Apple-style-span">, indispensables pour accompagner les paroles transcrites (et qu'on aurait même souhaité plus nombreux), n'y sont pas pour rien.</span><br />
<br />
Cela avait pourtant bien commencé. Comparer et relater deux émissions distantes de vingt ans en provenance de deux stations de radio différentes (française et suisse) n’avaient rien de sorcier. Il s’agissait tout au plus d’écouter 3 heures et demi de commentaires et d’analyses. Mais il s’est avéré difficile de croiser comme je l’imaginais <i>Les Mardis du cinéma</i><span style="font-style: normal;"> (France Culture, 1995) et </span><i>L’humeur vagabonde</i><span style="font-style: normal;"> (R.T.S., Espace 2, 2015). La première trop thématique se contente de tirer des lignes transversales entre quelques films d'Hawks en faisant croire qu’elles concernent toute l’œuvre. La seconde, chronologique, sépare à bon escient les films pour les envisager rigoureusement l’un après l’autre d’un point de vue biographique et cinématographique. Si d’aucuns diront qu’après tout, les deux approches peuvent se compléter, elles se succéderont néanmoins ci-dessous. Et allongeront d'autant le défilement de ce post...</span><br />
<a name='more'></a></div>
<o:p></o:p> <br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Les deux émissions s’engagent toutefois sur un terrain commun : celui de la prétendue absence de singularité stylistique d’Howard Hawks<span style="font-style: normal;"> et de sa reconnaissance artistique outre-atlantique par </span><i>Les Cahiers du cinéma</i><span style="font-style: normal;">. Michel Ciment : </span><i>Il n’a jamais apporté des solutions formelles nouvelles, ce n’est pas du tout un novateur comme Orson Welles, mais c’est quelqu’un qui à chaque fois, quand il a travaillé dans le western, dans le film de gangsters, dans le film policier, dans la comédie, a réussi le chef d’œuvre du genre</i><span style="font-style: normal;"> (7’24’’). Charles Sigel : </span><i>Chez lui, il n’y a pas de cadrages reconnaissables comme chez Welles, ou de constructions dramatiques à la Hitchcock, ou de virilité humoristique à l’irlandaise comme chez Ford par exemple, ou d’humanisme à la Capra,</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>mais il y a un culte du rythme, une insolence dans les rapports hommes femmes, une façon de se concentrer sur les relations humaines</i><span style="font-style: normal;"> (7’20’’). <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
France Culture : « Howard Hawks et ses héros », dans <i>Les mardis du cinéma</i><span style="font-style: normal;"> par Pascale Lismonde, avec Jean Douchet, Luc Moullet, Michel Ciment, Patrick Brion (première diffusion : 7 novembre 1995)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Trois axes gouvernent cette émission qu’on peut résumer ainsi : qu’est-ce qu’un héros hawksien ? ; la femme introduite comme un corps étranger dans le groupe ; un cinéma guidé par la croyance en l’immanence de l’homme. Sans plus tarder, voici comment Michel Ciment définit le héros hawksien : il est <i>toujours entouré de deux ou trois personnages</i><span style="font-style: normal;"> (voir l'équipée de l’aéropostal dans </span><i>Seuls les anges ont des ailes</i><span style="font-style: normal;">, des chasseurs dans </span><i>Hatari</i><span style="font-style: normal;"><i> !</i>, des cavaliers dans </span><i>La rivière rouge</i><span style="font-style: normal;">), </span><i>établit un code de conduite</i><span style="font-style: normal;">, et chérit </span><i>l’idée du travail bien fait</i><span style="font-style: normal;"> (10’21’’). Jean Douchet ajoute qu’il</span><i> aime l’action pour l’action, propre de l’homme américain. </i><span style="font-style: normal;">(…) [Les personnages masculins]</span><i> sont des joueurs, ce sont la plupart du temps des sportifs, la quasi-totalité des films d’aventure ou de films d’action se déroulent avec des hommes qui jouent à l’avion, à la voiture. Et </i><span style="font-style: normal;">Scarface </span><i>joue au gangster.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Quand il vient de recevoir une mitrailleuse, il fait sauter tout son bureau, simplement pour le plaisir de tirer</i><span style="font-style: normal;"> (…). </span><i>Ses personnages masculins, reliés à la notion d’énergie</i><span style="font-style: normal;"> ont vocation </span><i>à dompter le monde.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>C’est pour ça qu’à la fin de</i><span style="font-style: normal;"> Scarface</span><i>, vous avez</i><span style="font-style: normal;"> [face à l’appartement, la publicité lumineuse] </span><i>« Le monde vous appartient</i><span style="font-style: normal;"> » (…) symbole </span><i>du grand rêve américain. </i><span style="font-style: normal;">(14’59’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Le rôle occupé par la femme est <i>destructeur</i><span style="font-style: normal;"> selon Michel Ciment. </span><i>Elle représente la nature, l’inconscient, l’instinct, donc elle est un danger. On a pu dire à juste titre que les drames de Hawks étaient optimistes, </i>[que] <i>les comédies étaient pessimistes.</i><span style="font-style: normal;"> (…) Le critique étaye cette théorie (semble t-il répandue dans </span><i>beaucoup de livres américains</i><span style="font-style: normal;">) en associant la femme à la ville, reflet des rapports sociaux avec son lot de contingences qui </span><i>ligotent</i><span style="font-style: normal;"> le masculin en propre et le rendent </span><i>ridicule </i><span style="font-style: normal;">(cf.</span><i> L’impossible monsieur bébé</i><span style="font-style: normal;">) ; et l’homme à son besoin des grands espaces, que ce soient le ciel dans </span><i>Seuls les anges ont des ailes</i><span style="font-style: normal;">, ou les plaines désertiques dans </span><i>La rivière rouge</i><span style="font-style: normal;"> et </span><i>Hatari</i><span style="font-style: normal;"><i> !</i>. (24’51’’) </span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<span style="font-style: normal;">Luc Moullet déclare quant à lui que </span><i>bien souvent</i><span style="font-style: normal;"> la femme joue </span><i>un rôle directeur dans la vie sentimentale et professionnelle</i><span style="font-style: normal;"> [tandis que] </span><i>l’homme est en porte-à-faux.</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>Ce qui complique encore un peu c’est qu’il fait appel pour ses personnages masculins principaux à des acteurs qui dans la vie sont typés comme homosexuels et qui jouent toujours le rôle de séducteur à l’écran, comme <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.fr/2017/11/katharine-hepburn-cary-grant-mardis-du.html" target="_blank">Cary Grant</a> et Rock Hudson</i><span style="font-style: normal;">. (32’34’’) Mais encore, la femme </span><i>insolente</i><span style="font-style: normal;"> d’après Patrick Brion, et</span><i> d’autant plus dangereuse qu’elle est à égalité avec l’homme</i><span style="font-style: normal;">, représente </span><i>une atteinte à sa virilité</i><span style="font-style: normal;"> (cf. Angie Dickinson dans </span><i>Rio Bravo</i><span style="font-style: normal;">). Elle est </span><i>l’étrangère par excellence</i><span style="font-style: normal;">, qui </span><i>veut rentrer dans l’univers masculin, être acceptée comme telle </i><span style="font-style: normal;">(…) [quitte]</span><i> à détruire</i><span style="font-style: normal;"> [la cohésion] </span><i>du groupe</i><span style="font-style: normal;"> ou </span><i>renier</i><span style="font-style: normal;"> [même illusoirement]</span><i> sa féminité.</i><span style="font-style: normal;"> Et cela est rendu possible à la condition que l’actrice choisie pour le rôle </span><i>est d’abord un châssis et un canon</i><span style="font-style: normal;"> ou du moins dotée de </span><i>beaucoup d’allure</i><span style="font-style: normal;">. (Jean Douchet à 44’32’’) <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiKDwHKdhRqQUwaD5efByXVhbdK_4FEMis9YLbYBNMW4NBLloQ5yRppFYI31Q0IKtLQwDdrKvGCA42ZIlLDpT1IFnvGFhAbB3F3_DDCV-by1jrkS5D7OaIGZKvYE8L16E8X0cwjvrIat2Tb/s1600/au+bar+rio+les+anges.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="263" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiKDwHKdhRqQUwaD5efByXVhbdK_4FEMis9YLbYBNMW4NBLloQ5yRppFYI31Q0IKtLQwDdrKvGCA42ZIlLDpT1IFnvGFhAbB3F3_DDCV-by1jrkS5D7OaIGZKvYE8L16E8X0cwjvrIat2Tb/s1600/au+bar+rio+les+anges.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Dans<i> Rio Bravo</i> de même que dans <i>Seuls les anges ont des ailes</i>, les femmes qui passent derrière le comptoir pour soutenir l'action savent se hisser (pour un temps seulement) à « hauteur d'homme ». À gauche, Angie Dickinson et John Wayne, et à droite, Rita Hayworth et Cary Grant.</td></tr>
</tbody></table>
La multiplication des interprétations est un des marqueurs des films d’Howard Hawks. Elle peut servir la mise en scène de la mise en scène (voir l’ouverture saisissante de <i>Chérie, je me sens rajeunir</i><span style="font-style: normal;"> : « <a href="https://www.youtube.com/watch?v=eAiTvtGIJ-0" target="_blank">Not yet Cary</a> ») ou receler une deuxième langue cachée dans la langue dialoguée. Patrick Brion : </span><i>Dans</i><span style="font-style: normal;"> Seuls les anges ont des ailes</span><i>, il est question des oiseaux, « the birds ». Ils peuvent être aussi bien les avions que les oiseaux auxquels est confronté l’avion</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Les oiseaux c’est </i><span style="font-style: normal;">[aussi]</span><i> les emmerdeurs mais en même temps « birds » est un terme argotique qui évoque les femmes.</i><span style="font-style: normal;"> (…) Les codes de censure obligeaient à ces sens </span><i>déguisés</i><span style="font-style: normal;"> (53’12’’). En revanche, de même que le personnage masculin est entièrement voué à l’accomplissement de sa tâche, </span><i>il y a chez Hawks une sorte de refus de la métaphysique ou de la religion</i><span style="font-style: normal;"> (…). </span><i>Il a fait beaucoup de films relatifs à la science avec des savants complètement idiots</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>S’il doit y avoir une recherche, elle doit servir à quelque chose de précis.</i><span style="font-style: normal;"> (cf. </span><i>La chose d’un autre monde</i><span style="font-style: normal;">, </span><i>Chérie,<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>je me sens rajeunir</i><span style="font-style: normal;">, </span><i>Boule de feu</i><span style="font-style: normal;">. Un contre-exemple peut être donné par </span><i>Si bémol et fa dièse</i><span style="font-style: normal;">) (59’09’’) Charles Sigel dans </span><i>L’humeur vagabonde</i><span style="font-style: normal;"> corrobore à merveille l'exposé de cette ligne en rapportant dans son introduction le leitmotiv d’Howard Hawks : </span><i>« Je raconte une histoire, un point, c’est tout. » </i><span style="font-style: normal;"> (8’32’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
RTS (Espace 2) : <a href="https://www.rts.ch/play/radio/lhumeur-vagabonde/audio/howard-hawks-je-raconte-une-histoire-un-point-cest-tout-version-integrale?id=7175612" target="_blank">Howard Hawks</a> dans <i>L’humeur vagabonde</i><span style="font-style: normal;"> par Charles Sigel (première diffusion : 31 octobre 2015) (*Merci à fred de rouen d'avoir eu la bienveillance de partager cette émission*)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Né en Pasadena (Californie du sud) en 1896 de parents ayant fait fortune dans l’industrie, Howard Hawks bénéficie en <i>enfant gâté</i><span style="font-style: normal;"> d’une scolarité avantageuse et de </span><i>jouets coûteux</i><span style="font-style: normal;"> comme la voiture de course que lui offre son grand-père peu avant ses 20 ans. Un cadeau presque providentiel qui lui donne l’occasion de s’initier à la compétition automobile mais aussi surtout de rencontrer parmi les mécaniciens qui concourent Victor Fleming, de 13 ans son aîné (1883-1949), avec qui il devient ami. Par son entremise, Hawks fait la connaissance de Marshall Neilan, chauffeur de David W. Griffith, puis d’Allan Dwan. </span><i>Un jour, la grosse voiture de Dwan tomba en panne. Neilan pensa à son vieux copain Fleming, qui trouva la cause de la panne, répara le monstre, causa avec Allan Dwan, lui raconta qu’il faisait aussi de la photo. Du coup, Dwan l’engagea pour développer ses négatifs. C’est comme ça que Fleming</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>était devenu de fil en aiguille directeur de la photo des films de Douglas Fairbanks que Dwan tournait pour D.W. Griffith qui les produisait à la</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>Triangle Motion Pictures Company</i><span style="font-style: normal;">. (16’15’’) De la sorte, Hawks devient à son tour assistant de plateau, d’abord pour Douglas Fairbanks (</span><i>In Again, Out Again</i><span style="font-style: normal;">, 1917), puis pour Cécil B. DeMille et Marshall Neilan, lequel </span><i>buvait sec</i><span style="font-style: normal;">. </span><i>Un jour,</i><span style="font-style: normal;"> [Neilan]</span><i> ne</i><span style="font-style: normal;"> [venant] </span><i>pas aux studios, Mary Pickford aurait dit à Hawks : « Tu pourrais faire ça toi ? </i><span style="font-style: normal;">(…)</span><i> et c’est ainsi qu’il aurait tourné la manivelle de ses premiers plans. » </i><span style="font-style: normal;">(dans </span><i>La petite princesse</i><span style="font-style: normal;">, 1917) (17’56’’)<o:p></o:p></span></div>
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La première guerre mondiale suspend les débuts d’Howard Hawks qui devient instructeur pour pilotes de ligne. Mais en 1919, il retourne à Hollywood et <i>se lance dans la production</i><span style="font-style: normal;"> grâce à l’argent de sa famille, tout en lorgnant franchement du côté de la mise en scène. C’est à Irving Thalberg (1899-1936), jeune surdoué en charge de la production de films, qu’il doit </span><i>d’être engagé à la Paramount</i><span style="font-style: normal;"> en tant que </span><i>superviseur du département scénario</i><span style="font-style: normal;">. Suit un passage par la MGM (où il tourne son premier film </span><i>Road to glory</i><span style="font-style: normal;">, perdu) et la Fox (9 films muets, dont </span><i>Poings de fer, cœur d’or</i><span style="font-style: normal;">, 1928, dans lequel il découvre Louise Brooks, </span><i>à la fois garçon manqué et extrêmement féminine</i><span style="font-style: normal;">)</span><i>.</i><span style="font-style: normal;"> <o:p></o:p></span></div>
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En 1930, son film <i>La patrouille de l’aube</i><span style="font-style: normal;"> est l’objet d’un litige avec Howard Hughes qui l’accuse de plagiat (voir </span><i>Les anges de l’enfer</i><span style="font-style: normal;">, tourné au même moment) tout autant que le théâtre d’une collision tragique d’avions entraînant la mort de son frère Kenneth. Charles Sigel : </span><i>Si on écoute certains acteurs de</i><span style="font-style: normal;"> La patrouille de l’aube, </span><i>on entend que quelque chose est en train de changer dans la façon d’envoyer le dialogue.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Fairbanks Jr.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>et Richard Barthelmess</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>s’approchent de la musique des dialogues de l’avenir, cette manière cynique, sans fioritures d’envoyer les mots à toute vitesse.</i><span style="font-style: normal;"> [Apparaissent] </span><i>aussi quelques motifs hawksiens : quelques personnages qui sont enfermés dans un lieu clos</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>cernés par un milieu hostile, qui préfèrent leurs initiatives personnelles à l’ordre social</i><span style="font-style: normal;"> (…). (36’20’’)<o:p></o:p></span></div>
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À la suite de ce film, Howard Hawks entre en conflit avec ses producteurs, les frères Warner, et gagne le procès que ceux-ci lui intentent. Il signe alors avec Howard Hughes (contre lequel il vient de gagner un autre procès !) et partage avec lui <i>le mépris pour les patrons de studios</i><span style="font-style: normal;">, teinté semble t-il d’antisémitisme. (voir à 39’55’’) <o:p></o:p></span></div>
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41’28’’ : <i>Scarface</i><span style="font-style: normal;"> (1932) doit son aura mythique aux jalons posés par Howard Hawks pour un nouveau genre de cinéma : le film de gangster. Le thème visuel de la croix y est omniprésent, depuis la balafre qui fend la joue de Tony Camonte joué par Paul Muni (1895-1967) jusqu’aux éléments du décor qui l’exposent (la croix) du premier à l’arrière-plan. Ses significations sont multiples selon qu’on la considère d’un point de vue orthogonal (christique) ou transversal (cible). Annonciatrice ou signature du crime, elle revêt une quantité réjouissante de formes qui circulent du corps à l’écriture en passant par l’ombre et la lumière (Charles Sigel nous apprend à ce propos qu’un film de Martin Scorsese, </span><i>Les infiltrés</i>,<span style="font-style: normal;"> 2006, rend hommage à cette ingénieuse mise en scène*). <o:p></o:p></span></div>
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<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjWPvKiKeR3O_gBXtuz-TJe44vntdXGrNcqSsgVstXe2HHFA0vOzwhrJjFj38sXPsgegGnf752w3waLejJcfiyjYnVaMgOugGJXx6Lg55TcmD-iuUxGTmJ_hyvP_qif-WP6n8qSiPlIbyIu/s1600/croix+e%25CC%2581crite+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="314" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjWPvKiKeR3O_gBXtuz-TJe44vntdXGrNcqSsgVstXe2HHFA0vOzwhrJjFj38sXPsgegGnf752w3waLejJcfiyjYnVaMgOugGJXx6Lg55TcmD-iuUxGTmJ_hyvP_qif-WP6n8qSiPlIbyIu/s1600/croix+e%25CC%2581crite+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">C'est chez le barbier que le spectateur découvre le visage scarifié de Tony Camonte (Paul Muni, à gauche). À droite, le motif crucial est inscrit au centre d'une feuille de pointage de bowling (la case est cochée = la mission est remplie).</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgQdiIFvyNIG6sqqlm_HIPqj15ROkl7OvaWHdEYOuU2kPNZhCXDIFjRuq6K_hFxTFSsJ_eG07HTXyFbRYwW3ZERR2w822rZAz7jPRs4rx6R4Ka9rNl7B5P_wszELITbfx-e9ih7vEjk9s33/s1600/montage+croix+vetement.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="240" data-original-width="849" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgQdiIFvyNIG6sqqlm_HIPqj15ROkl7OvaWHdEYOuU2kPNZhCXDIFjRuq6K_hFxTFSsJ_eG07HTXyFbRYwW3ZERR2w822rZAz7jPRs4rx6R4Ka9rNl7B5P_wszELITbfx-e9ih7vEjk9s33/s1600/montage+croix+vetement.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Du corps au vêtement, la croix contamine aussi bien la robe de chambre en soie de Camonte (à gauche) que la tenue de soirée de sa soeur Cesca (Ann Dvorak, de dos) (à droite).</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtAZo7ujQeyn6agGw_5W8sLX0ifJvNfc_s8j__fChPMpdepY7Y2A_kaa2obmKVszjwRIYNcLxIdfijsUyaa4QFitPN4nH9ugekP_Q3FXGx4iS7A2hkHrB9DiZXWUF63op9ev2xW4Qqx6-K/s1600/croix+de%25CC%2581cor+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="315" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtAZo7ujQeyn6agGw_5W8sLX0ifJvNfc_s8j__fChPMpdepY7Y2A_kaa2obmKVszjwRIYNcLxIdfijsUyaa4QFitPN4nH9ugekP_Q3FXGx4iS7A2hkHrB9DiZXWUF63op9ev2xW4Qqx6-K/s1600/croix+de%25CC%2581cor+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Enseigne lumineuse énigmatique urbaine (à gauche) ou curieuse projection ombrée domestique (à droite), la croix véhicule son inquiétante forme de l'arrière plan...</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh1lWsW0ZQRTlbER5Ch8jheR_4l74fJ2m83tPa5ev-osjkt98iTswrPcNFtrXqBVJ4_uv8pG45sSCmp-GahTVpgST9k17DfdXg-Dp7Rg98a_Z-V9HIhD-TryLobZhEgOQnZtX54-QjDHb6S/s1600/croix+premier+plan+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="314" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh1lWsW0ZQRTlbER5Ch8jheR_4l74fJ2m83tPa5ev-osjkt98iTswrPcNFtrXqBVJ4_uv8pG45sSCmp-GahTVpgST9k17DfdXg-Dp7Rg98a_Z-V9HIhD-TryLobZhEgOQnZtX54-QjDHb6S/s1600/croix+premier+plan+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">... au premier plan. À gauche (Ann Dvorak) elle barre l'accès au visible. À droite, elle signifie qu'il n'y a rien à voir (la scène de meurtres est laissée hors-champ).</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
<i>C’est bien le plus marquant dans</i><span style="font-style: normal;"> Scarface, </span><i>le noir des scènes nocturnes : les rues de Chicago,</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>, le pavé mouillé, les carrefours, les fusillades dans la nuit</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>. Cette invasion d’images par le noir n’est pas sans faire penser aux recherches de cinéastes expressionnistes allemands des années 20 et de leurs chefs opérateur. Ce qui marque aussi dans</i><span style="font-style: normal;"> Scarface, </span><i>c’est la fulgurance des scènes de violence, la façon dont elles sont montées en plans très courts, soulignées par l’agressivité des mitraillettes dans la bande son.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Il y a d’autres choses qui ne sont pas encore au point, il faut bien le dire. Paul Muni, notamment au début du film - après, ça s’améliore nettement, il devient une sorte de mythe ambulant, très beau - au début, Muni surjoue péniblement, il roule des yeux, un peu comme au temps du muet</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>, et puis</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>ça ne va pas assez vite, le montage est un peu flasque, les dialogues sont téléphonés,</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>les scènes avec la mère de Scarface font très « vieux théâtre ». Il y a des fondus au noir à la fin de chaque séquence qui plombent le rythme. Bref, c’est encore un prototype.</i><span style="font-style: normal;"> (…) Enfin, la mort de Scarface va être refusée par la censure : [la fin]</span><i> fait de cet homme un mythe. D’où l’existence d’une fin alternative, où on ne verra pas Paul Muni arroser les forces de l’ordre</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>mais où il sera arrêté, jugé et finalement pendu</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>. Ces derniers plans exigés par la commission Hayes qui veilla à la morale publique furent tournés sans Paul Muni (donc avec une doublure), sans Hawks non plus, et c’est cette version édulcorée qui sortit enfin.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Le succès</i><span style="font-style: normal;"> [du film] </span><i>fut absolument énorme jusqu’en 1936, date à laquelle le film disparut à la suite des difficultés que connaissait l’empire de Hughes, jusqu’en 1980, où on put enfin le voir avec sa fin originelle</i><span style="font-style: normal;">. (42’08’’)</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br />
</span></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjwECp-AFpO5mWUigJoDZpYx2N3PxzmkMC45AecmldyKpI9_iie9LxwcN3O5SlE-d-ElePTzym9VNJF3lUSyqzprHKNMjN9SO-w063CxbugFyxgZUtt6AVhP_YVGNRr5Cx5fugUOpjrZ-hc/s1600/croix+mort+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="316" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjwECp-AFpO5mWUigJoDZpYx2N3PxzmkMC45AecmldyKpI9_iie9LxwcN3O5SlE-d-ElePTzym9VNJF3lUSyqzprHKNMjN9SO-w063CxbugFyxgZUtt6AVhP_YVGNRr5Cx5fugUOpjrZ-hc/s1600/croix+mort+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Du positif au négatif, la croix ne laisse aucune place au doute : elle annonce le crime sur le corps endolori (à gauche) comme elle désigne la mort sur le corps allongé (à droite).</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiG42mnU1XVJRNILSn2lx3AgyzOqHPezEMA11mmyVIAw8K9a_R4SlciXGBLtqq2iOC9tZoqvGB35QfdjFEmjril3DlOX29Md6NBmMvChOqXau043gV_xdWe82hsoH3H9aj1XYr_jrAx4sFj/s1600/scar+gino+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="314" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiG42mnU1XVJRNILSn2lx3AgyzOqHPezEMA11mmyVIAw8K9a_R4SlciXGBLtqq2iOC9tZoqvGB35QfdjFEmjril3DlOX29Md6NBmMvChOqXau043gV_xdWe82hsoH3H9aj1XYr_jrAx4sFj/s1600/scar+gino+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Dans la scène du meurtre de Guino Rinaldo (George Raft), la croix recule dans l'espace visuel du plan : avant l'ouverture de la porte, elle a remplacé un numéro ou un nom (l'identité est effacée). Après l'ouverture, elle change de dimension pour adresser un « clin d'oeil » au spectateur. </td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans <i>Les mardis du cinéma</i><span style="font-style: normal;">, Michel Ciment interprète le rôle de Tony Camonte-Al Capone comme celui d'</span><i>un personnage de comédie</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Il n’est pas du tout maître de lui et de l’univers</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>parce que c’est un enfant</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Il adore les colifichets, alors, il se rapprocherait plutôt de la femme, de l’indien, du noir, de tous ces êtres qui sont proches de l’état de nature pour le mâle américain civilisé</i><span style="font-style: normal;"> [!] (…). </span><i>C’est un être très naïf</i><span style="font-style: normal;">, (…) </span><i>incestueux puisqu’il aime sa sœur</i><span style="font-style: normal;"> (…), </span><i>son état de développement intellectuel et moral est extrêmement réduit d’où les dangers qu’il fait encourir à son entourage.</i><span style="font-style: normal;"> (1h11’30’’) Patrick Brion, plus loin, prolongera cette idée en comparant la face de Paul Muni à celle d’un </span><i>singe</i><span style="font-style: normal;">. <o:p></o:p></span></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjq7CjEMA4Ne0AgIezhItnYrUH1JMzi2e5uzokU6rJcnF6A9ruq72eS059YsgooRSmYIYId70MDrb7EFDseqsEXwbSbB9VCE7XKMV6OsdpvmYp6VshZPda1u0vcAKu6I0F5PNdtdCiThzt2/s1600/croix+ombre+lum+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="315" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjq7CjEMA4Ne0AgIezhItnYrUH1JMzi2e5uzokU6rJcnF6A9ruq72eS059YsgooRSmYIYId70MDrb7EFDseqsEXwbSbB9VCE7XKMV6OsdpvmYp6VshZPda1u0vcAKu6I0F5PNdtdCiThzt2/s1600/croix+ombre+lum+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Une ombre ou une projection cruciformes presque fortuites ne doivent étonnamment jamais rien au hasard. À gauche, l'enchevêtrement des lignes autour du corps étendu fait l'effet d'une crucifixion. À droite, la croix est suspendue comme une épée de Damoclès surnaturelle au-dessus du futur mort.</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgFz9OPXmRsXrFPockMG4_mtc02b01m-Oj-L8TiHXPT8ldUxaiz_H5Kqol4zYvEsGUolJ9v-7vjQ5TTTHsnqFvBTHsAOMhAgyAhHNBMsyZQbk4pRsDIll6QpQhTR_YXMPCsIPn3s2zJTWMA/s1600/scarf+de%25CC%2581b+fin+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="314" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgFz9OPXmRsXrFPockMG4_mtc02b01m-Oj-L8TiHXPT8ldUxaiz_H5Kqol4zYvEsGUolJ9v-7vjQ5TTTHsnqFvBTHsAOMhAgyAhHNBMsyZQbk4pRsDIll6QpQhTR_YXMPCsIPn3s2zJTWMA/s1600/scarf+de%25CC%2581b+fin+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Prophétie de la croix-fenêtre : au début comme à la fin du film, sa forme orthogonale annonce la mort attendue dans la souffrance.</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
Un passage à vide suit <i>Scarface</i><span style="font-style: normal;"> (</span><i>La foule hurle</i><span style="font-style: normal;">, 1932, puis </span><i>Le harpon rouge</i><span style="font-style: normal;">, 1932), après lequel Howard Hawks entre à la MGM (de Louis B Meyer et David O. Selznick), qu’il quitte cependant très rapidement. C’est à cette époque qu’il se lance dans la </span><i>screwball comedy</i><span style="font-style: normal;"> ou comédie loufoque (</span><i>Screwball, c’est une balle de base-ball qui part en vrille et devient incontrôlable</i><span style="font-style: normal;">). Pour </span><i>Train de luxe</i><span style="font-style: normal;">, 1934, il réunit John Barrymore (</span><i>star sur le déclin, à cause de l’alcool, comme beaucoup</i><span style="font-style: normal;">) et Carole Lombard (</span><i>nageuse dans les films de Mack Sennett</i><span style="font-style: normal;">) : </span><i>Pour la première fois, </i><span style="font-style: normal;">[Hawks]</span><i> mettait face à face un vétéran et une débutante, comme plus tard,</i><span style="font-style: normal;"> [Humphrey] </span><i>Bogart et</i><span style="font-style: normal;"> [Lauren] </span><i>Bacall, ou John Wayne et Montgomery Clift, et ça marcha à tous les coups. Là, il mit aussi au point son système</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>, c’est-à-dire des répliques qui se chevauchent légèrement sans rien perdre de ce qui est au centre de la phrase et allaient le plus vite possible. On connaît la célèbre anecdote d’Hawks et de son chronomètre : « c’est parfait, mais maintenant vous me faites la même chose mais 20% plus vite ». </i><span style="font-style: normal;">(57’32’’) Le record est atteint dans </span><i>La dame du vendredi</i><span style="font-style: normal;"> : </span><i>240 mots à la minute</i><span style="font-style: normal;">, </span><i>la moyenne en</i><span style="font-style: normal;"> [langue anglaise]</span><i>, c’est 100, 150</i><span style="font-style: normal;"> (1h12’20’’).</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
1938 marque l’un des sommets de la filmographie de Hawks, <i>L’impossible monsieur bébé</i><span style="font-style: normal;"> (à partir d’1h00’50’’), </span><i>dont le tournage commença assez laborieusement. Katharine Hepburn voulait absolument jouer comique, or</i><span style="font-style: normal;"> [si] </span><i>la situation est drôle, il faut jouer ça sérieusement</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Grant était immédiatement opérationnel et créatif<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>par exemple. Le gag de son habit déchiré et la traîne de la robe d’Hepburn arrachée et du haut de forme dont il se sert pour cacher</i><span style="font-style: normal;"> [s]</span><i>a culotte est de lui.</i><span style="font-style: normal;"> Le film ne rencontre pas son public (</span><i>même, il perd de l’argent : 365 000 dollars sur 1 million 800 000</i><span style="font-style: normal;">) et </span><i>Hepburn avait la réputation de porter la poisse</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Il fallut attendre les années 70 pour que cet</i><span style="font-style: normal;"> Impossible monsieur bébé </span><i>passe dans la catégorie chef d’œuvre absolu.</i><span style="font-style: normal;"> <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjo-fruODP1_OK7145uYlf6Odr5m8EWLy__V8hqbM8HbziBFHYirXjsIrYO6agEc6qF_2g2JCi751GSMOlNR6mpZRXdyYTGU15kXb1YL9blmYGpgaidH2J4GWzR_u5sKN1e-0vvwvWwBsVU/s1600/hawks+x3+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="633" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjo-fruODP1_OK7145uYlf6Odr5m8EWLy__V8hqbM8HbziBFHYirXjsIrYO6agEc6qF_2g2JCi751GSMOlNR6mpZRXdyYTGU15kXb1YL9blmYGpgaidH2J4GWzR_u5sKN1e-0vvwvWwBsVU/s1600/hawks+x3+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le gag des fesses à l'air protégées des regards par un chapeau, une valise ou un torchon revient à plusieurs reprises dans l'oeuvre de Hawks (<i>L'impossible monsieur bébé</i>, 1938, <i>Si bémol et fa dièse</i>, 1949 et <i>Chérie, je me sens rajeunir</i>, 1952, par exemple)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
L’année suivante, en 1939, sort <i>Seuls les anges ont des ailes</i><span style="font-style: normal;">, </span><i>à nouveau une histoire d’aéropostal</i><span style="font-style: normal;">, dont l'action se déroule dans la ville de Barranca (que Charles Sigel croit </span><i>imaginaire</i><span style="font-style: normal;">, or c’est le nom d’une ville et d’une province du Pérou) </span><i>reconstituée en studio </i><span style="font-style: normal;">(…), </span><i>avec ports, débarcadères, bistrots, voie ferrée, piste d’envol</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Jean Arthur est désespérément saine, elle manque un petit peu d’ironie </i><span style="font-style: normal;">(…) [et] </span><i>laisse deviner ce que Bacall, Frances Farmer, Carole Lombard auraient apporté de sex-appeal et d’extravagance à ce rôle féminin. Quant à Rita Hayworth dont le film allait lancer la carrière, c’était l’inverse : trop sexy au sens ordinaire du mot. Elle n’appartenait pas à l’érotique très particulière d’Hawks </i><span style="font-style: normal;">(…). </span><i>À cet univers très adolescent, à ces histoires à dormir debout, à ces trucages attendrissants (les maquettes d’avions, les transparences), on se laisse prendre. Et ça touche sans doute à quelque chose de profond. Peut-être la présence obsédante de la mort et le jeu avec la mort.</i><span style="font-style: normal;"> (1h07’20’’)</span></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg1XRo-aLESNOAwX6meCbHTGHCwv_t9H6fAsmTD8lUH7kPnUAtNyoXRx4nOGIXIdW4Rh3gaVX6i9IEtwLnU3Oqhd3aEkX66TcRBBAW8BYxSc8MmsVN0y1w9kpTz4Tw_zlXNKozhojF0DUJ7/s1600/talons+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="310" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg1XRo-aLESNOAwX6meCbHTGHCwv_t9H6fAsmTD8lUH7kPnUAtNyoXRx4nOGIXIdW4Rh3gaVX6i9IEtwLnU3Oqhd3aEkX66TcRBBAW8BYxSc8MmsVN0y1w9kpTz4Tw_zlXNKozhojF0DUJ7/s1600/talons+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Un talon qui casse consolé par un baiser (ou presque) (à psychanalyser sans tarder) dans deux films tournés l'un après l'autre : à gauche Jean Arthur et Cary Grant dans <i>Seuls les anges ont des ailes</i>, et à droite Katharine Hepburn et le même Grant dans <i>L'impossible monsieur bébé</i>, l'année précédente.</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
1944 : <i>Le port de l’angoisse</i><span style="font-style: normal;"> est extrait de quelques pages d’</span><i>En avoir ou pas</i><span style="font-style: normal;">, d’Hemingway, </span><i>ami proche d’Hawks </i><span style="font-style: normal;">(</span><i>ils avaient tout pour s’entendre, la chasse, la pêche, le laconisme</i><span style="font-style: normal;">). Si Humphrey Bogart fait tout de suite partie de l’écriture du film, </span><i>le problème, </i><span style="font-style: normal;">[c’est]</span><i> la fille</i><span style="font-style: normal;">. </span><i>C’est Slim Hawks</i><span style="font-style: normal;"> [sa femme] </span><i>qui repéra dans « Harper’s Bazaar » une fille « aux airs de panthère » dit-elle qui posait dans une pub pour les donneurs de sang de la croix-rouge. Elle avait 18 ans, elle s’appelait Betty Joan Perske.</i><span style="font-style: normal;"> [par un curieux hasard Bacall sera surnommée « Slim » dans le film] (…) </span><i>Hawks fut évidemment séduit par cette fille qui ressemblait à Slim</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>et lui raconta, au cours de conversations, toutes les actrices qu’il avait sorties du lo</i><span style="font-style: normal;">t (…). Lauren Bacall </span><i>remarqua que dans ces histoires, il avait toujours le dessus.</i><span style="font-style: normal;"> Également, </span><i>quelques remarques antisémites. Et plus tard, quelques amis juifs de Hawks témoignèrent qu’Hawks savait très bien que Bacall était juive, mais qu’il l’avait provoquée pour voir comment elle réagirait.</i><span style="font-style: normal;"> (1h14’03’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEha36b8soeZIvjSngBBSfNWfnfdfeZdJvwjZm74J_Q5B-mWtuD751P-vCH0xDYtF0dLnEhVkPNk0T17EDRhQnIOxbBlEC3Dni6JM7S31Ql8NZVLkBEeqTghOqI60tGHezS-U0noFhQAShhK/s1600/e%25CC%2581tape+1+vol+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="270" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEha36b8soeZIvjSngBBSfNWfnfdfeZdJvwjZm74J_Q5B-mWtuD751P-vCH0xDYtF0dLnEhVkPNk0T17EDRhQnIOxbBlEC3Dni6JM7S31Ql8NZVLkBEeqTghOqI60tGHezS-U0noFhQAShhK/s1600/e%25CC%2581tape+1+vol+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Dans <i>Le port de l'angoisse</i>, la relation d'amour entre Lauren Bacall et Humphrey Bogart naît d'une suspicion de vol, que le héros démasque aussitôt (à gauche).</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5SkO51dssRGZ15pkVKafoIaFXbRQJuhPDQOgkIY3y6Ccf6nf4N_HxZE5UtYP116LHiW4dgQxFfZnuObUk9lkShoC7ATTpFXCWlZCbwKymVqPPsJPl6itjI14wUrCm35W02JdzXSOIaeAm/s1600/e%25CC%2581tape+2+esca+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="270" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5SkO51dssRGZ15pkVKafoIaFXbRQJuhPDQOgkIY3y6Ccf6nf4N_HxZE5UtYP116LHiW4dgQxFfZnuObUk9lkShoC7ATTpFXCWlZCbwKymVqPPsJPl6itjI14wUrCm35W02JdzXSOIaeAm/s1600/e%25CC%2581tape+2+esca+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Une scène qu'Howard Hawks répète quasiment plan par plan 15 ans plus tard dans <i>Rio Bravo</i> (1959) avec Angie Dickinson et John Wayne (à droite) ...</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgT9oiHfHGfxhCad07CP3CseksfjoWlAajv9Fl4U4rUcw-QFgFKIT5vZfKFaRoX51CFatLMYtMDhVxiAAHRkec0DhMKw0Rl_mqzppv_PNX6_rH3HS9YqbRd_ipvAve_jvSh9kDd8ftFDh6-/s1600/e%25CC%2581tape+3+sac+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="269" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgT9oiHfHGfxhCad07CP3CseksfjoWlAajv9Fl4U4rUcw-QFgFKIT5vZfKFaRoX51CFatLMYtMDhVxiAAHRkec0DhMKw0Rl_mqzppv_PNX6_rH3HS9YqbRd_ipvAve_jvSh9kDd8ftFDh6-/s1600/e%25CC%2581tape+3+sac+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">... à cette différence près que la femme n'est pas l'auteur du larcin soupçonné.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Ce qui rend le film troublant, c’est qu’en même temps que le jeu d’attirance entre les deux personnages du film, se mettait en place la même chose entre l’acteur et la débutante, Bogart et Bacall.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Bacall avait peur de Hawks et Hawks en était assez blessé. Et Bogart révélait à Bacall que toutes les histoires qu’Hawks lui racontait</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>étaient pures inventions.</i><span style="font-style: normal;"> (…) (1h16’58’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Charles Sigel nous apprend que la Warner avait décidé la mise en chantier du <i>Grand sommeil</i><span style="font-style: normal;"> (1946) alors même que </span><i>Le port de l’angoisse</i><span style="font-style: normal;"> n’était pas sorti dans les salles. </span><i>Le scénario </i><span style="font-style: normal;">[adapté de Raymond chandler] </span><i>est difficile à comprendre</i><span style="font-style: normal;"> dit-il. Ajoutons que deux visionnages du film ne sont pas de trop pour saisir tous les tenants de l’histoire, prises de notes incluses... </span><i>Comme la première version laissera voir qu’il n’y avait pas assez de scènes entre Vivian et Marlowe (Bacall et Bogart), on en ajoutera de nouvelles écrites par Philip G. Epstein, lourdes de sous-entendus érotiques, et pour les intégrer, on coupera un bon quart d’heure de scènes utiles à la compréhension </i><span style="font-style: normal;">(…)</span><i>. Mais c’est presque un changement d’esthétique ou d’architecture pour Hawks, jusqu’ici préoccupé par la ligne générale d’un film et à partir de là fonctionnant plutôt par scènes intéressantes en elles-mêmes mais plus ou moins bien cousues avec les autres. Ça sera le problème de</i><span style="font-style: normal;"> La captive aux yeux clairs (1952). (1h21’58’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
1948 est l’année de la sortie du premier western d’Howard Hawks : <i>La rivière rouge</i><span style="font-style: normal;">. </span><i>Hawks avait lu dans le Saturday evening post une histoire feuilletonnée de Borden Chase intitulée</i><span style="font-style: normal;"> The Chisholm trail. (…) </span><i>Ce qui sera intéressant là, ce sera la confrontation de John Wayne, encore acteur de série B qui n’avait eu que de petits rôles chez Ford, et d’un jeune acteur qu’Hawks avait vu à New-York dans une pièce de Tennessee Williams et qui s’appelait Montgomery Clift.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Le troisième personnage essentiel fut Walter Brennan, second rôle pittoresque déjà vu en inénarrable vieux marin alcoolo dans</i><span style="font-style: normal;"> Le port de l’angoisse, </span><i>payé 5000 dollars par semaine dans</i><span style="font-style: normal;"> La rivière rouge. </span><i>Cela a l’air absolument inouï pour un second rôle. </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>Ce qui choque notre œil, ce sera l’usage de transparences, c’est-à-dire d’arrière-plans filmés projetés derrière des acteurs qui jouent en studio, pratique encore courante de cette époque</i><span style="font-style: normal;"> (…). </span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i><br />
</i></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiu95WIfX_DtKbzZdFlwuRJlgrKfpGhznfbB8CejFkI_zjeJ_MaFQGepVp6s-XiH40IW1YncEZ4bGuFznf9U-qyGQTfVxyEwCmw93RsxhBMEc9dXcJFvnJ4GyJNB8TEJKk74S8XKnNdEj4-/s1600/raccord+transparences+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="318" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiu95WIfX_DtKbzZdFlwuRJlgrKfpGhznfbB8CejFkI_zjeJ_MaFQGepVp6s-XiH40IW1YncEZ4bGuFznf9U-qyGQTfVxyEwCmw93RsxhBMEc9dXcJFvnJ4GyJNB8TEJKk74S8XKnNdEj4-/s1600/raccord+transparences+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Exemple d'un raccord dans l'axe de <i>La rivière rouge</i> où le photogramme de gauche inscrit John Wayne et Coleen Gray dans le décor tandis que celui de droite les situe la seconde d'après dans un studio.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Malgré ça</i><span style="font-style: normal;">, La rivière rouge </span><i>est un film de grands espaces filmés en Arizona, épique et humaniste. Hawks confiera à Todd McCarthy</i><span style="font-style: normal;"> [journaliste] </span><i>s’être inspiré et même avoir franchement imité le style de Ford pour filmer les grands espaces et sa manière d’utiliser tous les ciels, même les ciels couverts, d’où le nuage dans le ciel de </i><span style="font-style: normal;">[la scène de] </span><i>l’enterrement dont il attendit qu’il vienne se placer juste dans le cadre. Montgomery Clift souffrit de la cohabitation avec la bande de machos que constituait la plupart des acteurs et techniciens.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Mais l’essentiel, le plus mystérieux, le plus riche en sous-entendus est bien dans la relation entre Wayne et Clift qui va avoir des échos dans</i><span style="font-style: normal;"> La captive aux yeux clairs, </span><i>dans</i><span style="font-style: normal;"> Rio Bravo</span><i>, ou dans</i><span style="font-style: normal;"> Hatari !. (1h23’25’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Après la seconde guerre mondiale, Howard Hawks voit sa carrière décliner et une nouvelle génération de cinéastes prendre ses quartiers (Elia Kazan, Nicholas Ray, John Huston, Joseph Losey). Cette période correspond en France à sa consécration par les jeunes critiques des<i> Cahiers du cinéma</i><span style="font-style: normal;"> (Jacques Rivette : </span><i>L’évidence est la marque du génie de Hawks, </i><span style="font-style: normal;">à propos de </span><i>Chérie, je me sens rajeunir</i>, lecture <span style="font-style: normal;"><a href="http://temporaryehliss.blogspot.fr/2014/03/rivette-article-genie-de-howardhawks.html" target="_blank">en accès libre ici</a> (5’52’’). Il tourne </span><i>Allez coucher ailleurs</i><span style="font-style: normal;"> (1949) dans l’Allemagne détruite, puis </span><i>La captive aux yeux clairs</i><span style="font-style: normal;"> (1952), sans transparences et en extérieur avant le laborieux </span><i>Les hommes préfèrent les blondes </i><span style="font-style: normal;">(1953), dont les scènes de comédie musicale sont confiées à Jack Cole (le chorégraphe) et Harry J Wild (le chef-opérateur). <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>La terre des pharaons</i><span style="font-style: normal;"> (1955) marque le seul tournage d’Howard Hawks en cinémascope. </span><i>« Nous avions passé notre vie à concentrer le regard des spectateurs sur un seul point de l’image et voilà qu’il fallait faire le contraire » dira t-il</i><span style="font-style: normal;">. Réalisé en partie en Egypte, en partie en studio à Cinecittà, Hawks </span><i>se demanda comment pouvaient bien parler les pharaons égyptiens </i><span style="font-style: normal;">(…)… Le résultat est </span><i>anachronique et ridicule</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Bref, ça coûta des sommes folles, plus de 5 700 000 dollars pour 4 millions de recettes mondiales</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Catastrophe industrielle donc, et cela valut à Hawks de ne plus tourner pendant trois ans.</i><span style="font-style: normal;"> (1h 37’25’’). <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Retour aux Etats-Unis. En 1959 sort <i>Rio Bravo</i><span style="font-style: normal;">, </span><i>western d’un classicisme impeccable, rien que des lieux clos, presque la trinité classique : le saloon, la prison, l’auberge tenue par un couple de mexicains pittoresques où loge le personnage féminin qui est une joueuse de cartes professionnelle. Ça sera la belle Angie Dickinson qui est typique de l’érotique hawksienne avec ses airs convenables et son audace inattendue. C’est elle qui va draguer Wayne</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i>, nouvel avatar de l’homme </i><span style="font-style: normal;">(…)</span><i> en situation d’infériorité. Ce sera pareil dans</i><span style="font-style: normal;"> Hatari !</span><i>, la belle et élégante Elsa Martinelli va poser un baiser puis un deuxième sur les lèvres de Wayne. Et Bacall avait fait la même chose avec Bogart</i><span style="font-style: normal;"> [dans </span><i>Le port de l’angoisse</i><span style="font-style: normal;">]</span><i> : après le premier, elle avait dit : « c’était pour voir si ça me plaisait. » Et puis, après le second, elle avait dit : « ça me plait encore plus quand vous y mettez du vôtre »</i><span style="font-style: normal;">. Avant </span><i>Hatari !</i><span style="font-style: normal;"> (1962) et après </span><i>Le port de l’angoisse</i><span style="font-style: normal;"> (1944), cette scène du baiser « vérifié » deux ou trois fois de suite est également un motif comique de </span><i>Allez coucher ailleurs</i><span style="font-style: normal;"> (1949) et de </span><i>Si bémol et fa dièse</i><span style="font-style: normal;"> (1949). <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjhEl7ufFJ0dDcnUxZV8n-mc6QXynyiFk2_xxNCHw8iXE_rLeTXIMTqGRJit-vAG60ihJ3Az4DDcpEh5nnmpbZMYv-kDqD-ZpJM3GE_Rzr1oXaX5vLnoiZ84fySKs5tvmWGiCATIWqwb5M0/s1600/Baiser+2+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="316" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjhEl7ufFJ0dDcnUxZV8n-mc6QXynyiFk2_xxNCHw8iXE_rLeTXIMTqGRJit-vAG60ihJ3Az4DDcpEh5nnmpbZMYv-kDqD-ZpJM3GE_Rzr1oXaX5vLnoiZ84fySKs5tvmWGiCATIWqwb5M0/s1600/Baiser+2+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche, Lauren Bacall et Humphrey Bogart dans <i>Le port de l'angoisse</i>, 1944, et à droite Virginia Mayo et Danny Kaye dans <i>Si bémol et fa dièse</i>, 1949.</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiujzFeOq5CHF2fFZEEECU1fEEF2AObjZWuCFdE82Rc931fUzbIbIQz0ySx27bKldGGcBw4SM7Q3-v1LwlWcUWri6Z0O9FRRH51dQPf7NQ2FZw09oXZKu8zfNP4YZuz7B1itmm5_5TerUON/s1600/baiser+1+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="271" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiujzFeOq5CHF2fFZEEECU1fEEF2AObjZWuCFdE82Rc931fUzbIbIQz0ySx27bKldGGcBw4SM7Q3-v1LwlWcUWri6Z0O9FRRH51dQPf7NQ2FZw09oXZKu8zfNP4YZuz7B1itmm5_5TerUON/s1600/baiser+1+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche, Ann Sheridan et Cary Grant dans <i>Allez coucher ailleurs</i>, 1949, et à droite, Elsa Martinelli et John Wayne dans <i>Hatari !</i>, 1962</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Chez Hawks, il y a comme ça des tas de scènes récurrentes. Exemple : Elsa Martinelli qui se met au piano dans</i><span style="font-style: normal;"> Hatari !, </span><i>exactement comme Jean Athur se mettait au piano dans</i><span style="font-style: normal;"> Seuls les anges ont des ailes. Et tant d’autres. (1h43’04’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
1962 : Hatari est tourné au Tanganyika, presque sans scénario, et le plus étonnant : <i>pas de cascadeurs prévus au programme. Chacun allait prendre le risque des scènes de chasse</i><span style="font-style: normal;"> (…). </span><i>Wayne raconte s’être fait beaucoup de belles frayeurs, ballotté qu’il était sur un siège presque éjectable avec son lasso au bout d’une perche à l’avant de la voiture</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>C’est un film qui quand on le revoit aujourd’hui </i><span style="font-style: normal;">(…)</span><i> a quelque chose d’adolescent. Les relations entre les personnages ont un côté immature et d’ailleurs, rétrospectivement, on peut se demander si ce n’est pas le cas de tous les héros hawksiens, Scarface par exemple, ou les différents rôles de Cary Grant, même Bogart et John Wayne.</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>(1h47’’07’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEip2pldFL0IYcV3JZ-N9vsy7pjgCjZzcHuHSxsicHsBVyUvSCLxralSGjSMBm_p9S2SxuFq4slRTaHHwpYmYx5RxykptYbIywsS7EAm6c3reSo8npqEQNYaP_FztVprN3q_Ry9NoekTQodA/s1600/le%25CC%2581op+pti+def.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="268" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEip2pldFL0IYcV3JZ-N9vsy7pjgCjZzcHuHSxsicHsBVyUvSCLxralSGjSMBm_p9S2SxuFq4slRTaHHwpYmYx5RxykptYbIywsS7EAm6c3reSo8npqEQNYaP_FztVprN3q_Ry9NoekTQodA/s1600/le%25CC%2581op+pti+def.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Angie Dickinson dans <i>Hatari !</i> (1962) (à droite) n'est pas sans rappeler une certaine Katharine Hepburn dans <i>L'impossible monsieur bébé</i>, 1938 (à gauche).</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans <i>Les mardis du cinéma</i>, Jean Douchet cite Rivette (sans en être certain) en déclarant qu’<i>Hatari !</i> <i>est au fond l’histoire d’un tournage de film. Dans la journée, il y a l’action (on tourne le film), et le soir, il y a le repos de l’équipe </i><span style="font-style: normal;">(…). </span><i>À part ça, il n’y a pas d’histoire, c’est toujours la même chose. Une femme débarque dans ce groupe d’hommes,</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>elle cherche à s’intégrer, et à la fin, c’est elle qui désintègre tout. </i><span style="font-style: normal;">(1h17’25’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Howard Hawks meurt le 26 décembre 1977, suite à une mauvaise chute qui lui brise un os du dos. Il avait 81 ans. Sa mort est éclipsée par celle de Charlie Chaplin, survenue la veille le 25 décembre 1977. C'était il y a 40 ans.</div>
<br />
<div style="text-align: center;">
<iframe allow="encrypted-media" allowfullscreen="" frameborder="0" gesture="media" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/8yz-nlseVOc" width="560"></iframe><br />
<br />
*<br />
<br />
<div style="text-align: left;">
<div style="text-align: justify;">
* Dans l'émission <i>Pendant les travaux, le cinéma reste ouvert</i> (France Inter) intitulée : <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/pendant-les-travaux-le-cinema-reste-ouvert/pendant-les-travaux-le-cinema-reste-ouvert-16-juillet-2012" target="_blank">Pourquoi Scarface est-il devenu un mythe contemporain ?</a> (première diffusion : 12 juillet 2012), le scénariste Laurent Vachaud explique <i>que ces « X » comme ça, c'est ce qu'on voyait avant quand les bobines changeaient</i> (22'10'').</div>
</div>
<div style="text-align: left;">
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
</div>
<div style="text-align: left;">
<div style="text-align: justify;">
P.S. : D'autres émissions consacrées en tout ou partie à Howard Hawks sont disponibles à l'écoute sur le site de France Culture. Voir <i>Euphonia</i> par Noël Simsolo : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/euphonia-cineastes-et-musiciens-4-howard-hawks-dimitri-tiomkin" target="_blank">Cinéastes et musiciens : Howard Hawks et Dimitri Tiomkin</a> avec Jean-Claude Biette (première diffusion : 23 février 1989). Également, la première partie de la série de Jean-Philippe Costes : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/un-autre-jour-est-possible/les-rebelles-dans-le-cinema-americain-avec-jean-philippe-1" target="_blank">Les rebelles dans le cinéma américain</a> dans <i>Un autre jour est possible </i>(première diffusion : 18 janvier 2016).</div>
</div>
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</div>
Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-71274079878454401422017-12-07T23:27:00.000+01:002018-09-12T01:40:07.551+02:00Le don des langues : les chemins de la connaissance (2007) + Les regardeurs (2015)<!--[if gte mso 9]><xml> <w:WordDocument> <w:Zoom>0</w:Zoom> <w:HyphenationZone>21</w:HyphenationZone> <w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery>0</w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery> <w:DisplayVerticalDrawingGridEvery>0</w:DisplayVerticalDrawingGridEvery> <w:UseMarginsForDrawingGridOrigin/> </w:WordDocument> </xml><![endif]--> <!--StartFragment--> <br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Du 28 mai au 01<sup>er</sup> juin 2007, Jacques Munier a proposé une série de cinq émissions cohérentes et instructives intitulées : Le don des langues, dans <i>Les chemins de la connaissance</i><span style="font-style: normal;">. Je me propose ci-dessous d’en retracer les idées maîtresses incluant parfois les propos directs du producteur et des intervenants. Dans ces recensions brèves, je ne maugréerai pas contre l’impatience régulièrement perceptible de Jacques Munier, ni contre ses « voilà » lancés dès qu’une idée s’expose en longueur, ce qui n’est pas plus mal. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxEX1QfNv0tNMUv4cTJhmCjT3fNpk8D2NokRilelMAHtuTb73SxEihX1qG1mkoeejq8W3TArscq7RnWKnrS27uHVzNPc-3vzE0TxPA3pxHx-D5iqFkjbwIpe9rgfl1TobAEiqD3B1mxOJv/s1600/io.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="1600" data-original-width="691" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxEX1QfNv0tNMUv4cTJhmCjT3fNpk8D2NokRilelMAHtuTb73SxEihX1qG1mkoeejq8W3TArscq7RnWKnrS27uHVzNPc-3vzE0TxPA3pxHx-D5iqFkjbwIpe9rgfl1TobAEiqD3B1mxOJv/s640/io.jpg" width="276" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le Corrège, <i>Jupiter et Io</i>, 1532-33, huile sur toile, Kunsthistorisches Museum, Vienne.</td></tr>
</tbody></table>
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28 mai 2007 : « La langue oubliée », avec Daniel Heller Roazen</div>
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<br /></div>
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Ouverture sur les enjeux du mythe d’Io : dans <i>Les métamorphoses</i><span style="font-style: normal;"> d’Ovide, la nymphe Io est transformée en vache par Zeus et se signale en traçant les lettres de son nom sur le sol ; Arrêt sur le terme médical d’écholalie, phénomène observé dans certaines formes d’aphasie qui consiste à répéter la fin des phrases de son interlocuteur. Pris dans un sens plus large : toute parole contenant l’écho d’une autre parole ; Lecture du mythe de la tour de Babel ou comment la confusion des langues et la dispersion de l’humanité ont entraîné l'oubli de la langue première ; Proximité du babil enfantin avec l'originaire Babel : tous les sons de toutes les langues humaines y sont contenus avant de se perdre (Roman Jakobson) ; La langue « distinguée » après le babil conserve des résidus des sons premiers dans les interjections et les exclamations, ces bruits dits « insignifiants » ; Lecture d’un extrait des </span><i>Confessions</i><span style="font-style: normal;"> de Saint-Augustin (397-401) : sur la relation du langage corporel aux objets qu’il désigne ; Vitalité de la langue qui mute, et déclin de celle qui se fige (cas de la première lettre de l’alphabet hébreux, </span>Aleph,<span style="font-style: normal;"> dont on ne connaît pas la prononciation) ; Que reste-t-il de l’héritage celte (le son « u » de la langue) ? ; Lecture du </span><i>Don de langue</i><span style="font-style: normal;"> de Claude Louis-Combet (1992).</span><br />
<a name='more'></a></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;"><br />
</span> <span style="font-style: normal;">*</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br />
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29 mai 2007 : « Les mots et les signes », avec Clarisse Herrenschmidt</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
L’appareil phonatoire de l’être humain « joué » spontanément sur la langue comme instrument ; La croyance archaïque du lien affectif dans la correspondance mot/chose ; Les débuts de l’écriture, entre logogrammes et phonétique, qui est le lieu de la division proprement intellectuelle où les sons se convertissent en signes graphiques ; L’inscription du corps « social » dans l’alphabet grec complet (-750 avant J.-C., incluant consonnes et voyelles) : l’exemple de la différence entre l’omicron et l’omega ; Lecture d’un extrait de <i>L’essai sur l’origine des langues</i><span style="font-style: normal;"> de Jean-Jacques Rousseau (1781), à la suite duquel est exposée la transition du mode oral à son instance écrite il y a 5000 ans à Uruk dans le sud de la Mésopotamie et plus tard à Elamite (Iran) par des gestionnaires qui ont eu besoin d’enregistrer des transactions d’ordre économique : graines, animaux (logique comptable qui nécessite une liste de signes pour être comprise/transmise) ; Lecture d’un texte (non cité) d’Emile Benveniste sur la constitution du « je » comme identité objective dans la réalité de la langue ; L’art de la langue est celui de la distance pour permettre à l’autre d’advenir.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br />
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<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;">*</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br />
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<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;">30 mai 2007 : « Le secret des origines », avec Bernard Cerquiglini</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span class="Apple-style-span" style="font-family: "times";"><br />
</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
À la recherche des racines de la langue française : ni l’hébreu, ni le latin livresque classique, ni le celte ne seraient à l’origine de notre idiome, mais le latin parlé, celui des rues (hypothèse de Pierre-Nicolas Bonamy qui fit scandale) ; Le français est une langue mélangée, composée d’un latin vulgaire, d’un peu de gaulois, et de beaucoup de germain (langue romane du nord) et daterait des Serments de Strasbourg (842, première trace écrite) ; Lecture d’un extrait du <i>Discours sur l’universalité de la langue française</i><span style="font-style: normal;"> de Rivarol (1783), lequel déduit le rayonnement international du français de sa rigueur et de sa clarté. Tandis que les linguistes du 19<sup>e</sup> siècle remontent aux origines possiblement autochtones de notre langue (entre dialectes picard, bourguignon ou de l’île de France) dans la lecture des textes du Moyen-Age dénués de règles syntaxiques et à l’orthographe « hirsute » (ce sont les déclinaisons héritées du latin qui ordonneront ensuite le français) ; Lecture d’un extrait de </span><i>L’esthétique de la langue française</i><span style="font-style: normal;">, de Rémy de Gourmont (1899), qui ouvre la question ancienne de la glossophobie (réforme de l’orthographe, féminisation des noms, importation de mots nouveaux) ; Extrait radiophonique de Roland Barthes à </span><i>La tribune des critiques</i><span style="font-style: normal;"> (France Culture, 1964) sur l’introduction de la psychologie de l’homme dans le génie de la langue française.</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhR_Rd35eUPWZ71TtaE_g13oi5l8ZD0kNNB0ew0trCU-VM_61V4JBkplPzg2WGuUJ9S8HSJdMXxYf0CuKV1Xd55X2CCvqj5pTAeahXwezwYa775_Z4y7S1e3De9iphTnMs1TErnvnlR-PIa/s1600/my+fair.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="192" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhR_Rd35eUPWZ71TtaE_g13oi5l8ZD0kNNB0ew0trCU-VM_61V4JBkplPzg2WGuUJ9S8HSJdMXxYf0CuKV1Xd55X2CCvqj5pTAeahXwezwYa775_Z4y7S1e3De9iphTnMs1TErnvnlR-PIa/s1600/my+fair.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Audrey Hepburn et Rex Harrison dans <i>My Fair Lady</i>, de George Cukor, 1964.</td></tr>
</tbody></table>
[<u>Aparté</u> : Deviner à l'écoute d'une voix un parlé vernaculaire propre à plusieurs régions de l'Angleterre, c'est tout le travail du Professeur Henry Higgins, joué par Rex Harrison, dans <i>My Fair Lady</i> (George Cukor, 1964). Le film s'ouvre sur la sortie d'un opéra où le public en robes et frac attend sous la pluie face aux marchands d'une halle qu'une grande allée sépare. D'un côté, la condescendance et le mépris des femmes et hommes du monde, de l'autre, l'outrance et l'ignorance des déshérités. Au milieu d'eux, un « traducteur » faisant office de pont entre des mondes qu'il connaît parfaitement, le Professeur Higgins. Sachant lever l'origine géographique des accents locaux, il se plaît à nommer les quartiers qui seront rejoints par chacun de ses interlocuteurs, lesquels apeurés, suspectent l'homme d'être un indicateur ou un détective privé. L'une d'entre eux, la gouailleuse Eliza Doolittle (Audrey Hepburn), le conduit même à dévoiler ses notes prises en phonétique (photogrammes ci-dessus). Le coeur du film est basé sur le « redressement » de l'homme par la langue, sources de mystifications en tous genres.]<br />
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*<br />
<br /></div>
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31 mai 2007 : « C'est chic de parler français », avec Pierre Encrevé</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Jusqu’à la seconde guerre mondiale, une part importante des français parle d’abord la langue régionale (en et hors métropole), puis le français (l’uniformisation de la langue française comme phénomène commun est récent) ; Une nation peut-elle être indivisble si elle ménage le territoire à plusieurs langues ? (exemple de l’Alsace) ; L’universalité de la langue française (Rivarol) relève du mythe (elle se limite en réalité aux cours princières européennes) et la prétendue clarté de sa phrase (l’ordre sujet-verbe-objet) n’a rien de spécifique ; Lecture d’une lettre à Madame Emile Strauss de Marcel Proust (1908), qui observe les mouvements contraires de la langue française sous son apparente immobilité ; Extrait d’une carte blanche radiophonique donnée à Raymond Queneau (11 février 1947) qui fustige avec piquant l’Académie Française ; De Proust à Queneau, chacun mesure l’abîme que représente la langue parlée d’avec la littérature où le français surgit comme une langue étrangère ; Des variétés générationnelles de langues (à l’adolescence, dans les banlieues) permettent le retour d’anciens mots souvent oubliés au cœur de l’argot (comme « daron », qui signifie père) ; Lecture d’un extrait de Montaigne (livre non cité) liant les expressions corporelles à l’ample corpus de verbes qui les désignent.<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
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*<br />
<br /></div>
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01 juin 2007 : « Saussure l'inventeur », avec Michel Arrivé</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Retour sur les conditions de publication à titre posthume du <i>Cours de linguistique générale</i><span style="font-style: normal;"> (1916) de Ferdinand de Saussure, prises en charge par deux anciens élèves, et son déficit d’encadrement scientifique ; L’intérêt de Saussure pour un cas de glossolalie traité par son ami Théodore Flournoy ; Contemporanéité et coïncidence des pensées de Saussure et de Freud ; Lecture d’un extrait de </span><i>Gaspard</i><span style="font-style: normal;"> de Peter Handke (1967) sur l’apprentissage de la puissance de la phrase ; Recherches parallèles de Saussure et Freud sur l’anagramme, soit le mouvement interne des lettres d’un mot pouvant découvrir un sens caché dans une deuxième combinaison : cette révélation peut être désirée (exemple de poésie latine) à moins qu’elle ne relève du hasard, autre nom de l’inconscient ; Extrait radiophonique de Roman Jakobson avec Jean-Pierre Faye (1970) ; Rapprochement du fils (Raymond) de Saussure, psychanalysé par Freud, dans la publication de sa thèse, du </span><i>Cours de linguistique générale </i>avec<span style="font-style: normal;"> la description du lapsus par Freud ; L’anagramme comme mise en cause de la linéarité du signe.</span><br />
<br />
<div style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;">* </span></div>
<!--[if gte mso 9]><xml> <w:WordDocument> <w:Zoom>0</w:Zoom> <w:HyphenationZone>21</w:HyphenationZone> <w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery>0</w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery> <w:DisplayVerticalDrawingGridEvery>0</w:DisplayVerticalDrawingGridEvery> <w:UseMarginsForDrawingGridOrigin/> </w:WordDocument> </xml><![endif]--> <!--StartFragment--> <br />
<div class="MsoNormal">
<b>Bonus</b> : <i>Les regardeurs</i>, <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-regardeurs/jupiter-et-io-1532-1533-d-antonio-allegri-da-correggio-1489-1534" target="_blank">« Io et Jupiter » 1532-33 d'Antonio Allegri da Correggio (1489-1534)</a> (20 septembre 2015).<br />
<br />
Difficile de structurer un compte-rendu de cette heure de conversation entre Jean de Loisy, producteur - mondain passé expert dans l’art d’arrondir les angles - de l’émission <i>Les regardeurs</i><span style="font-style: normal;">, Agnès Thurnauer, artiste, plus fondée à discourir sur son œuvre qu’à cumuler les anachronismes sur la peinture analysée (</span><span style="font-style: normal;"><i>Io et Jupiter</i></span><span style="font-style: normal;">, Le Corrège), et Philippe Morel, professeur d’histoire de l’art, tant les idées sont jetées comme des flèches les unes derrière les autres sans l’ombre d’une construction. Tentons quand même de dégager quelques axes de réflexion :</span></div>
<div class="MsoNormal">
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<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhWVxg4NWNn5YD-vJuhx3PuDb0hdo928oF9_hHQYIWyKXwEhDbmyvyftbrgqC1rpmykeNRo5bTMjh4_UMaeKj-SjHU6v0xbimuEY9xSPrAcApfPFVsZN7Iq7iUE2yVHPYLwUs52aY59Vcpw/s1600/compar+rodin+bis.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="462" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhWVxg4NWNn5YD-vJuhx3PuDb0hdo928oF9_hHQYIWyKXwEhDbmyvyftbrgqC1rpmykeNRo5bTMjh4_UMaeKj-SjHU6v0xbimuEY9xSPrAcApfPFVsZN7Iq7iUE2yVHPYLwUs52aY59Vcpw/s1600/compar+rodin+bis.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le Corrège, <i>Jupiter et Io</i>, 1532-33, huile sur toile, Kunsthistorisches museum, Vienne (à gauche) - Auguste Rodin, <i>Le Baiser</i>, vers 1882, marbre, musée Rodin, Paris (au centre) - Jean-Auguste-Dominique Ingres, <i>La Baigneuse Valpinçon</i>, 1808, huile sur toile, musée du Louvre, Paris (à droite)</td></tr>
</tbody></table>
L’œuvre du Corrège <i>Io et Jupiter</i> peut se lire comme une métonymie du travail du peintre dans l’émergence discrète et comme inattendue de la forme au milieu du néant (cf. le visage de Jupiter dans la nuée) ; L’importance historique de la place donnée au nuage dans la rencontre amoureuse ; Au producteur qui imagine l’influence du Corrège dans la <i>Baigneuse Valpinçon</i> d’Ingres (1808), Philippe Morel oppose <i>Le Baiser</i> d’Auguste Rodin (vers 1882) qui convainc autrement ; Retour sur la commande du cycle des quatre tableaux dont <i>Io et Jupiter</i><span style="font-style: normal;"> fait partie et leurs voyages en Europe ; Les métamorphoses des nuages entre physique et spirituel, siège d’interprétations diverses ; Le visage de Jupiter semble un masque renvoyant à l’amour comme à une illusion et accrédite l’hypothèse d’un amant fantasmé dans le nuage au moment de l’extase solitaire de Io ; Lecture d’un extrait d’une lettre de Ludovico Dolce à propos de </span><i>Vénus et Adonis </i><span style="font-style: normal;">du Titien (1553-1554) destiné à illustrer l’importance du poids ressenti dans le corps des femmes peintes au niveau de leurs fesses et dans le cas du Corrège, soumises à une pression.</span></div>
<div class="MsoNormal">
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<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjeVdLAOuvMyERGELURvihz-hxagY1H7dmNQVhReswCWXb02R0oaJs5K6jgQfq7RXqan276dJzKTblPAzj9-M4oWtEwRzlFhCNlgUS3fCT5OLRGth3a5LCR2fjY7P3Hk2MmSTWosAFqEjdj/s1600/compa+titien.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="546" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjeVdLAOuvMyERGELURvihz-hxagY1H7dmNQVhReswCWXb02R0oaJs5K6jgQfq7RXqan276dJzKTblPAzj9-M4oWtEwRzlFhCNlgUS3fCT5OLRGth3a5LCR2fjY7P3Hk2MmSTWosAFqEjdj/s1600/compa+titien.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le Corrège, <i>Jupiter et Io</i>, 1532-33, huile sur toile, Kunsthistorisches museum, Vienne (à gauche) - Le Titien, <i>Venus et Adonis</i>, 1554, huile sur toile, musée du Prado, Madrid (à droite) (déséquilibre et triple jambes du corps féminin)</td></tr>
</tbody></table>
S’il est question d’enlacement, au mieux d’érotisme, voire d’extase, pas une fois les intervenants de l’émission n’ont pris la peine de préciser la nature de la relation qui unit Io au nuage délicatement incorporé par Jupiter. Elle ne fait pourtant pas l’ombre d’un doute si l’on regarde attentivement les contours disséminés dans les volutes (cernées ci-dessous) : les doigts de la main gauche de Io disparus derrière la forme cotonneuse (serait-ce un bassin ?) ajoutés aux muscles fessiers en appui sur le drap blanc (voir la fesse droite quasiment déformée) témoignent d’une étreinte d’ordre sexuelle dont le pied droit si curieux appelle le regard. Ne serait-ce pas grâce à un corps - quelque nature qu'il ait - qui l'enserre et que la cuisse droite invisible retient peut-être, que Io peut tenir en équilibre sur ses orteils ?<br />
<br />
Rien non plus, ou bien peu sur la « patte » mi-nuagée, mi-humaine dont on voit les doigts de Jupiter en transparence, qui pénètre le corps féminin sous l'aisselle - et accessoirement, l’espace de la toile en son centre pour s’introduire dans l’œil du spectateur. Mi-animale, mi-céleste, mi monstreuse, mi-veloutée, cette incarnation du désir ambivalent (inquiétant/fantasmé, puissant/vaporeux) s’oppose à la silhouette arquée du corps féminin découpée dans la brume et la roche. D'ailleurs, le monticule de terre dans le quart inférieur droit, qui surplombe la jarre, semble répondre à la « patte » qui lui fait face et accentuer l'impression d'enlèvement de Io par la nature. Enfin, la forme peinte du drap blanc ne contribuerait-elle pas à la signification de l'ensemble ? L'étonnante chute de plis sous l'assise de Io pourrait illustrer la figure du père, le dieu fleuve Inachos, tout autant que figurer un fantôme de jambe dans le prolongement du corps féminin dont l'appendice renverrait au talon gauche vers lequel il pointe.</div>
<div class="MsoNormal">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal">
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<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDaX-AAP-LLnnOXIrxfOrlfbTSZV0vgafvQl7Yw4gzZ3u8AznyIejEx5sirj4zRUIaaoamkxcKWZmUCCoPrwtgrrsiQ05YOTxfK_zr2J2Tn4P5tBA4pEHOTinE3Cp5nznoFGo34yNs0V7j/s1600/visage+de%25CC%2581tails.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="1600" data-original-width="956" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDaX-AAP-LLnnOXIrxfOrlfbTSZV0vgafvQl7Yw4gzZ3u8AznyIejEx5sirj4zRUIaaoamkxcKWZmUCCoPrwtgrrsiQ05YOTxfK_zr2J2Tn4P5tBA4pEHOTinE3Cp5nznoFGo34yNs0V7j/s640/visage+de%25CC%2581tails.jpg" width="382" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le Corrège, <i>Jupiter et Io</i>, 1532-33, huile sur toile, Kunsthistorisches museum, Vienne (en bas, à droite, la tête de cerf symbole de l'union amoureuse)</td></tr>
</tbody></table>
Fort heureusement, la publication d’une communication de Nadeije Laneyrie Dagen dans les actes d’un colloque intitulé : <i>Nues, nuées, nuages </i>(Presses Universitaires de Rennes, 2010)<span style="font-style: normal;"> nous permet en quinze pages d’en apprendre bien plus qu’en une heure d’émission. Dans ce brillant article : « Corrège, la nuée et la volupté » (pp. 233-248), elle dévoile une hypothèse historique très stimulante, qui dépasse le texte mythologique d'Ovide (que Corrège n'applique d'ailleurs pas à la lettre) dont l'essentiel est à lire ci-dessous :</span></div>
<div class="MsoNormal">
<br /></div>
<i>Un demi-siècle avant l’exécution de </i>Jupiter et Io<i>, en 1486 à Bâle, a paru la plus célèbre somme démonologique de la fin du Moyen Âge, qui fut aussi le plus répandu des manuels de lutte contre la sorcellerie : le</i> Marteau des sorcières <i>(</i>Malleus Malificarum<i>)</i> <i>d’Henry Kreamer (Institoris) et Jakob Sprenger, référence de tout procès inquisitorial et « somme démonologique », fut réédité, y compris à Venise, pour la dernière fois en 1579. Dans ce traité, il est question longuement de la copulation de femmes avec des amants non humains. Ces puissances copulantes sont les anges déchus de la Bible, devenus créatures sataniques. Les auteurs du</i> Marteau <i>les assimilent aux figures mythologiques anciennes, par exemple les lutins, mais aussi les faunes ou les satyres. En plein début de l’époque moderne, le </i>Malleus Malificarum <i>soutient, cependant, que ces amants maléfiques ne prennent plus le corps d’un lutin ou d’un faune, mais revêtent – précisément – la forme d’une nuée sombre faite de vapeurs alourdies par des substances empruntées à la terre : d’un nuage donc, qui se trouve abaissé jusqu’à toucher le sol.</i> ( …) <i>Sans doute, il ne s’agit pas de prétendre, ici, que Corrège a lu les 600 pages que représente, dans une édition moderne, le manuel des inquisiteurs. Il est simplement question de penser que le climat mental et moral du temps a permis au peintre d’imaginer l’étreinte entre une belle mortelle et un nuage, qui ne serait autre que la forme fécondante prise par un dieu.</i><!--EndFragment--> </div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-47569833623652224682017-11-21T10:55:00.004+01:002018-10-07T17:05:24.778+02:00Katharine Hepburn, Cary Grant : Les mardis du cinéma (1987, 1988)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<!--StartFragment-->
<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Les <i>Mardis du cinéma</i><span style="font-style: normal;">
nous ont offert la chance de croiser les trajectoires de nombreux acteurs et
réalisateurs, parmi lesquels Katharine Hepburn, Cary Grant, Humphrey Bogart et
l’un de leurs metteurs en scène commun, Howard Hawks. Inutile d’avoir absorbé l’intégralité
de leurs filmographies respectives pour apprécier les émissions qui se
limitent, et c’est heureux, aux films incontournables de chacune des carrières.
Ci-dessous, le compte-rendu de deux premières émissions.</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhgel0QfHuJDgFzBJeftVCPLlMw3nWNCO4F85OIXSVX7PbQWKcKZ3x02NwA4O5AT8sGnFJXyRJxwLs1ylCO2fqh_-miJOj0TcVjMGGSPXKBO-XdpN_4d-G7fLcotmy7ZZXt_T7f_naJUvdG/s1600/hepb+grant2+bis.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="312" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhgel0QfHuJDgFzBJeftVCPLlMw3nWNCO4F85OIXSVX7PbQWKcKZ3x02NwA4O5AT8sGnFJXyRJxwLs1ylCO2fqh_-miJOj0TcVjMGGSPXKBO-XdpN_4d-G7fLcotmy7ZZXt_T7f_naJUvdG/s1600/hepb+grant2+bis.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Katharine Hepburn et Cary Grant dans<i> Sylvia Scarlett</i>, de George Cukor, 1935 (à gauche) et dans <i>L'impossible monsieur bébé</i>, d'Howard Hawks, 1938 (à droite).</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<a name='more'></a><i>Mardis du cinéma</i> : Katharine Hepburn ou les charmes de
l’intelligence par Michel Cazenave avec Noël Simsolo, Henry Chapier, Gilbert
Guez (première diffusion le 07 avril 1987).<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
À l'instar de Bette Davis
(1908-1989), la vie de Katharine Hepburn (1907-2003) traverse toute
l’histoire du cinéma parlant du XXe siècle, depuis les années 1930 jusqu'aux années 1990. <i>Garçon manqué, « physique irlandais », femme sportive
d’allure, pas du tout complaisante, pas du tout alanguie dans le sens féminin
du terme</i><span style="font-style: normal;">, Katharine Hepburn ne fait pas </span><i>fantasmer</i><span style="font-style: normal;">*, selon Henry Chapier (7’22</span>’<span style="font-style: normal;">’) qui souligne d'emblée l'importance jouée par le visage et l'expression du corps de l'actrice dans sa carrière. Michel Cazenave le rejoint en se demandant </span><i>dans quelle mesure</i><span style="font-style: normal;">
(…), <i>Katharine Hepburn </i></span><i>ne joue pas sur un certain registre qui est celui de
l’androgynie</i><span style="font-style: normal;"> dans les rôles qu’elle
interprète au théâtre (Shakespeare) alors qu’elle a 21 ans.</span><i> </i><span style="font-style: normal;">Cette </span><i>sexualité bizarre</i><span style="font-style: normal;"> (Noël Simsolo) ou </span><i>ambiguë</i><span style="font-style: normal;">, qui ne passe pas inaperçue, sera prise en charge
très tôt dans sa filmographie par Dorothy Arzner notamment dans </span><i>La
phalène d’argent</i><span style="font-style: normal;"> (1933) ou par George Cukor
dans </span><i>Sylvia Scarlett</i><span style="font-style: normal;"> (1935).</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEil0UuA2UmwjfE6coYL7HCDI-fHD7VWjf_QssZZMZYutOlEnzzk3w5siHhPthkfQBFOW9I57AC495bcZrZ2ifvtE8V_NWnB3K49Ng00h1ghyphenhyphen6M8tzqKw8dj_DFgC09XTSFjHe6SZADaAjP5/s1600/1Sylvia+scarlett+garc%25CC%25A7on+bis.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="311" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEil0UuA2UmwjfE6coYL7HCDI-fHD7VWjf_QssZZMZYutOlEnzzk3w5siHhPthkfQBFOW9I57AC495bcZrZ2ifvtE8V_NWnB3K49Ng00h1ghyphenhyphen6M8tzqKw8dj_DFgC09XTSFjHe6SZADaAjP5/s1600/1Sylvia+scarlett+garc%25CC%25A7on+bis.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Au début de <i>Sylvia Scarlett</i>, le personnage de Katharine Hepburn coupe ses nattes devant un miroir pour mieux se déguiser en jeune homme. La métamorphose qui en résulte est troublante et le jeu ambivalent de l'actrice est proprement stupéfiant.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
À contre-courant de la star plantureuse, la constitution
physique et physiologique de Katharine Hepburn ne cesse d’intriguer les
intervenants de l’émission. Que ce soient sa voix <i>métallique</i><span style="font-style: normal;">, son visage </span><i>fait de maigreur</i><span style="font-style: normal;">, son jeu du corps aérien, son </span><i>magnétisme</i><span style="font-style: normal;">, ou sa </span><i>charge érotique</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>extrêmement profonde</i><span style="font-style: normal;">, l’enveloppe de l’actrice imprègne le sens des rôles
qu’elle incarne à l’écran : une femme de tête, froide, cérébrale,
orgueilleuse, désérotisée. Son intelligence est également soulignée, et sur un
plateau de cinéma, sa technique de jeu prend aussi bien en compte les dialogues
des autres comédiens qu’elle connaît par cœur, que la place de la caméra ou des
idées de mise en scène. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
En 1938, sous la
direction d’Howard Hawks, elle tourne dans une comédie délirante avec Cary Grant, <i>L’impossible
monsieur bébé.</i><span style="font-style: normal;"> (34’03’’) De ce film et du
suivant (</span><i>Indiscrétions</i><span style="font-style: normal;">, George Cukor,
1940) Michel Cazenave dit : </span><i>Katharine Hepburn acquiert une
dimension nouvelle par rapport aux créations qu’elle avait déjà faites, puisque
par-derrière l’apparence de respectabilité</i><span style="font-style: normal;">
(…)</span><i>, en réalité, elle incarne le conflit profond même s’il est traité
sur le mode léger et humoristique de la comédie</i><span style="font-style: normal;">, (…) </span><i>à savoir que d’une part elle est comme contrainte par
une loi morale</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>qui la place
dans le statut traditionnel et romantique de la femme déesse, vestale, qu’on ne
peut pas approcher. Et en même temps,</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>il
y a cette sorte de volonté</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>de
pouvoir plonger dans le monde de ce qui est apparemment la folie, mais qui
représente en réalité la vérité la plus profonde de notre cœur</i><span style="font-style: normal;">. (…) (37’10’’)</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTocrNwbHiM34fg1jA-Ejug_wIp-CBZDlNuNwfPLkcL7rwVCi09Y9Nv1tQ8cFYfPrIkxeiHTwfW-Zn-80V5bFKEwmwqlptLBosO7xXbT2OSL1fNQvCiqmdslsb2_fNB2ldG-Mq-2ReOXjd/s1600/l%2527impo+re%25CC%2581uni+2.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="314" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTocrNwbHiM34fg1jA-Ejug_wIp-CBZDlNuNwfPLkcL7rwVCi09Y9Nv1tQ8cFYfPrIkxeiHTwfW-Zn-80V5bFKEwmwqlptLBosO7xXbT2OSL1fNQvCiqmdslsb2_fNB2ldG-Mq-2ReOXjd/s1600/l%2527impo+re%25CC%2581uni+2.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">L'irrésistible Katharine Hepburn entre délicatesse et folie douce dans <i>L'impossible monsieur bébé</i>, d'Howard Hawks, 1938.</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Retour sur <i>The philadelphia story</i><span style="font-style: normal;">, la pièce de Philip Barry dont fut adapté le film de
Cukor intitulé </span><i>Indiscrétions</i><span style="font-style: normal;">. À
une époque où Katharine Hepburn est perçue comme impopulaire à la suite
notamment de l’échec commercial de </span><i>L’impossible monsieur bébé</i><span style="font-style: normal;">, le personnage de théâtre Tracy Lord représente pour
elle un tournant important. (39’50’’) D’un point de vue personnel, c’est un
succès. Puis le film pour lequel elle avait acquis les droits est primé deux fois
aux Oscars (meilleur scénario et meilleur acteur pour James Stewart). L’actrice
quitte alors la RKO pour la MGM et renoue avec une variété de rôles. Aux
studios, elle rencontre Spencer Tracy, avec qui elle entretient une liaison et
tourne une dizaine de films. Mais leur histoire est tue car l’acteur est marié
et ne veut pas divorcer en raison de son fils handicapé, si bien que</span><i>
leur vie conjugale </i><span style="font-style: normal;">[semble avoir été] </span><i>vécue</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>à l’écran uniquement</i><span style="font-style: normal;">, 25 ans durant.</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjhUt1jZBNUr034bLzDLbxSA4W87CMoTnfPgUJkQZ7lGb-6_7jmkgeA9yAfLIOn-KD0ZQQ6muJJ8-6ljz6PgBDtcAnvyWAQHrYCSruQeu3cWe6asX-TKo32WBGPuTjT-orIQniiViLQagZ5/s1600/madam+re%25CC%2581uni2.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="283" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjhUt1jZBNUr034bLzDLbxSA4W87CMoTnfPgUJkQZ7lGb-6_7jmkgeA9yAfLIOn-KD0ZQQ6muJJ8-6ljz6PgBDtcAnvyWAQHrYCSruQeu3cWe6asX-TKo32WBGPuTjT-orIQniiViLQagZ5/s1600/madam+re%25CC%2581uni2.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Katharine Hepburn et Spencer Tracy, dans leur chambre conjugale comme au tribunal (sous la table !), se partagent l'espace de l'écran comme celui du couple. (<i>Madame porte la culotte</i>, de George Cukor, 1949).</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Les films qu’elle joue sur la vie de couple (<i>La femme de
l’année</i><span style="font-style: normal;"> de George Stevens, 1942 ou </span><i>Madame
porte la culotte**</i><span style="font-style: normal;">, George Cukor, 1949,
voir à partir de 57’24’’) laissent progressivement place à </span><i>des rôles ingrats (par
rapport à ce qu’elle pouvait faire)</i><span style="font-style: normal;">,
c’est-à-dire </span><i>des rôles de vieilles filles</i><span style="font-style: normal;">, dans les années 1950 (</span><i>L’odyssée de l’African Queen</i><span style="font-style: normal;">, John Huston, 1951, voir à partir de 1h00’32’’, ou </span><i>Le
faiseur de pluie</i><span style="font-style: normal;">, de Joseph Anthony, 1956).
Le film de Mankiewicz </span><i>Soudain, l’été dernier</i><span style="font-style: normal;"> (1959) adapté d’une pièce de Tennessee Williams,
rentre dans ce cadre (voir à partir de 1h02’38’’). Michel Cazenave : (…) </span><i>Alors
même qu’elle souffre des premières atteintes</i><span style="font-style: normal;">
(…)</span><i> de la maladie de Parkinson qui lui imposent comme une sorte de
tremblement des mains et de la tête qu’elle ne peut dominer, elle arrive à
l’intégrer dans son jeu de telle manière que ça devient l’une des dimensions
les plus essentielles de ce jeu même, et qu’elle va imposer comme une sorte de
climat de folie non dite au début du film</i><span style="font-style: normal;">
(…) </span><i>tel qu’ensuite, ce sera tout naturellement que nous entrerons
dans une cure qui hésite entre la psychanalyse et la psychiatrie classique</i><span style="font-style: normal;"> (…). À 52 ans, </span><i>elle se sert de tout ce
qu’elle a fait jusqu’ici, de l’ensemble de son expérience</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>pour la magnifier </i><span style="font-style: normal;">(…).<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Les dernières minutes de l’émission consacrent l’aura de
Katharine Hepburn, rencontrée par au moins deux des trois intervenants au
début des années 1990. Gilbert Guez évoque <i>l’allure folle </i><span style="font-style: normal;">(1h18’05’’) de l’actrice, son style vestimentaire
atypique (pantalon et tennis, loin des conventionnelles jupe et robe attendues)
et Noël Simsolo </span><i>la crispation interne</i><span style="font-style: normal;"> de son visage impropre à la séduction lissée hollywoodienne. </span><i>Aujourd’hui
Katharine Hepburn est une star de cinéphile</i><span style="font-style: normal;">
dit-il, [mais] </span><i>n’est pas une star comme Marylin Monroe ou Marlene
Dietrich ou Ava Gardner ou Brigitte Bardot</i><span style="font-style: normal;">.
Henry chapier : </span><i>On</i><span style="font-style: normal;"> [l’] </span><i>imagine
mal se prêter par exemple à des séances de photos interminables, être, comme
tous les studios le réclamaient à l’époque avec des fleurs dans ses bras, un
bébé, ou près de la piscine, à accepter qu’on empiète sur sa vie privée. On ne
connaît rien d’elle </i><span style="font-style: normal;">(…). </span><i>C’est
l’anti-comportement de la star en devenir.</i><span style="font-style: normal;">
(1h23’19’’) <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
* Élégant ce commentaire de Chapier à 15’03’’ : <i>Une
fois que les charmes de la jeunesse d’une femme passent un peu, il est évident
que le côté cérébral va venir en premier</i><span style="font-style: normal;">.</span><br />
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhSGy1s2IriJgX3_qMrGTpz5tDxlNEtKz6IXBYTCs4IKB9GrElPAOmfeEMxfHu9WHtSVlGtBkx27y5zwWggbuKuS91AU4bieRYRTMM7sVGCoWXTP_ph5RrO5YX8C9rpRMo_Am1ne9M9Zcao/s1600/adams+rib+2.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="282" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhSGy1s2IriJgX3_qMrGTpz5tDxlNEtKz6IXBYTCs4IKB9GrElPAOmfeEMxfHu9WHtSVlGtBkx27y5zwWggbuKuS91AU4bieRYRTMM7sVGCoWXTP_ph5RrO5YX8C9rpRMo_Am1ne9M9Zcao/s1600/adams+rib+2.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Dans<i> Madame porte la culotte</i>, les rapports homme-femme changent de nature... À gauche, une « vision » fantasme la victime masculine en femme tandis qu'à droite, l'avocat de l'accusation est tenu à bout de bras par une jurée acrobate.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
** Les ex-<i>Nouveaux chemins de la connaissance</i><span style="font-style: normal;">, d’Adèle van Reeth ont consacré une émission à ce film en compagnie d’Olivier Abel :<a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/philosophie-du-mariage-lage-dor-dhollywood-34" target="_blank"> « Philosophie du mariage à l’âge d’or d’Hollywood (3/4) : Adam’s rib (Madame porte la culotte) de George Cukor »</a> (22 mai 2013)</span><span style="font-style: normal;">, dont voici une esquisse du plan : </span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Introduction d’un fait divers public (en Une des journaux)
dans la vie privée d’un couple d’avocats et déplacement du problème conjugal au
tribunal ; La scène du massage et la tape transformée en claque :
vengeance domestique du mari sur les positions publiques défendues par sa
femme (confusion entre le contrat de mariage et la représentation de la
Loi) ; Double mouvement croisé : 1/ la demande d’égalité entre
l’homme et la femme 2/ La recherche d’une émancipation féminine au nom de cette
égalité ; Le couple : entre solitude inconciliable et compagnonnage
nécessaire, et le mariage : un pacte sujet à l’interprétation ;
Fin de la magie du couple : quand les ficelles sont dévoilées (comment
rester ensemble alors qu’on pourrait se séparer ?) <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Mardis du cinéma</i> : Cary Grant, par Michel Cazenave, avec Jacques Siclier et Gilbert Guez (première diffusion : 05 avril
1988).<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Reconnu comme un homme élégant, au naturel flegmatique et à
l’assurance facile, Cary Grant (1904-1986), de son vrai nom Archibald Alexander
Leach, est né de parents retoucheurs à Bristol. Son enfance est marquée par la
dépression de sa mère (plus tard internée) et par la rencontre de comédiens
ambulants qui l’amènent à quitter le foyer alors qu'il est adolescent. <i>Il a été funambule, il a
été clown, il a été acrobate, et on peut penser que c’est de là qu’il a acquis
cette gestuelle précise</i><span style="font-style: normal;"> (…). </span><i>Il a
appris le sens du comique, il a appris le sens du timing</i><span style="font-style: normal;"> (7’47’’). Quand la troupe se dissout, il poursuit son apprentissage avec des</span><span style="font-style: normal;"> rôles dans des comédies musicales. </span><i>Il
arrive à Hollywood en 1932, il a 28 ans</i><span style="font-style: normal;">. <o:p></o:p></span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiGEhyphenhyphenLyvPMLutEXQUYQ-XGCzAGeNNdFrU46NajwdVxX23-6pBtXJfpp8llRCPyd9R5GMVhMlB3OpssOZJDhLTBwaG2EWhyphenhyphendVAZwU9Pp8DA832GSvsnEdg3bpkbnAzPvDXThtIwhK1SGx6X/s1600/seuls+les+anges.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="619" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiGEhyphenhyphenLyvPMLutEXQUYQ-XGCzAGeNNdFrU46NajwdVxX23-6pBtXJfpp8llRCPyd9R5GMVhMlB3OpssOZJDhLTBwaG2EWhyphenhyphendVAZwU9Pp8DA832GSvsnEdg3bpkbnAzPvDXThtIwhK1SGx6X/s1600/seuls+les+anges.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">En 1939, dans <i>Seuls les anges ont des ailes</i> d'Howard Hawks, Cary Grant a une façon toute personnelle de porter le col de chemise pour dissimuler son cou épais (ici avec Rita Hayworth).</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Rapidement remarqué dans <i>Blonde Venus</i><span style="font-style: normal;"> (Joseph von Sternberg, 1932) par Marlene Dietrich
qui en fait son amant, puis par la croqueuse d’hommes Mae West dans </span><i>Lady
Lou</i><span style="font-style: normal;"> (Lowell Sherman, 1933), Cary Grant séduit, malgré </span><i>un cou épais (c’est là qu’il a adopté ses
cols hauts, relevés)</i><span style="font-style: normal;"> et un physique </span><i>mal
dégrossi.</i><span style="font-style: normal;"> </span><br />
<br />
<span style="font-style: normal;">Selon Gilbert Guez, le couple
qu’il a formé avec Irene Dunne dans </span><i>Cette sacrée vérité</i><span style="font-style: normal;"> (Leo McCarey, 1937) </span><i>a fait plus pour sa popularité
que </i><span style="font-style: normal;">Sylvia Scarlett (George Cukor, 1935)
avec Katharine Hepburn, tourné 3 ans après ses débuts. Néanmoins, face à cette
dernière dans </span><i>L’impossible monsieur bébé</i><span style="font-style: normal;">, (Howard Hawks, 1938)<span style="mso-spacerun: yes;"> </span></span><i>il
a trouvé un comique beaucoup plus moderne, plus sec, plus cynique, basé sur des
rapports de force, des calculs</i><span style="font-style: normal;"> [ce qui
fait] </span><i>que ces comédies traversent les années, elles n’ont rien de
démodé.</i><span style="font-style: normal;"> (17’52’’) Avec ce film,</span><i> </i><span style="font-style: normal;">Cary Grant s’impose comme </span><i>l’un des grands
de la comédie américaine.</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span></span><i>C’est là qu’il y a eu vraiment
l’ironie royale, le cynisme, la loufoquerie, sûrement. Je crois<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>qu’il a trouvé définitivement cet
alliage de vivacité, d’élégance, de souplesse, de lucidité </i><span style="font-style: normal;">(…)</span><i> avec Katharine Hepburn. </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>C’étaient deux animaux insolites
ensemble. </i><span style="font-style: normal;">(24’24’’)</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgXrtH_DgkZXxY9-VQe36ope8yStwLbQMH4Z_fqhb2rmdCA0FUjdZO6WlsYbU-A_1Ln_SCXykbL12Q4pmmc-dTvyx3QBkar8bLg9dk_IVau84sGo1PBnGhw7yjzrPdwjO0hkWgm9E91AJ5d/s1600/l%2527impo+allez+bis+2.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="313" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgXrtH_DgkZXxY9-VQe36ope8yStwLbQMH4Z_fqhb2rmdCA0FUjdZO6WlsYbU-A_1Ln_SCXykbL12Q4pmmc-dTvyx3QBkar8bLg9dk_IVau84sGo1PBnGhw7yjzrPdwjO0hkWgm9E91AJ5d/s1600/l%2527impo+allez+bis+2.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche, dans <i>L'impossible monsieur bébé</i> comme à droite dans <i>Allez coucher ailleurs</i>, Cary Grant est littéralement mené par le bout du nez. Mais qu'il soit enlevé par Katharine Hepburn ou infantilisé par Ann Sheridan, l'acteur n'en reste pas moins drôle et attendrissant.</td></tr>
</tbody></table>
Michel Cazenave : <i>Si on prend ces deux films</i><span style="font-style: normal;"> The Philadelphia story (George Cukor, 1940) </span><i>d’une
part et</i><span style="font-style: normal;"> L’impossible monsieur bébé</span><i>,
de l’autre, avec Katharine Hepburn dans les deux cas, il me semble que</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>le jeu de Cary Grant</i><span style="font-style: normal;"> [est composé] </span><i>des ingrédients qu’il a
imposés (la loufoquerie, l’humour, etc.). Et on a l’impression en même temps
qu’il y a une autre dimension. C’est-à-dire qu’il nous offre ce visage, et
qu’en même temps, lui-même a une sorte de distance intérieure.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Il n’est pas victime de l’illusion qu’il
est en train de créer.</i><span style="font-style: normal;"> Michel Guez : </span><i>Non, et même il y a dans sa diction, dans ses regards, dans certains
arrêts avant les reprises</i><span style="font-style: normal;"> (…), </span><i>il
essaye d’établir une complicité avec nous</i><span style="font-style: normal;">.
(…) </span><i>Il avait à la fois la gouaille populaire et puis un prolongement
snob. </i><span style="font-style: normal;">(27’21’’) Alors quoi de plus excitant que
de mettre à l'épreuve ce « détachement » affecté dans l’interprétation de ses rôles (ce</span><i>
jeu dans le jeu</i><span style="font-style: normal;"> comme l’appelle Cazenave)
en précipitant Cary Grant dans les bras de femmes malicieuses ? Peine perdue, l'acteur redouble de génie !</span><br />
<br />
<span style="font-style: normal;">Quand il est
conduit à se travestir en femme pour se tirer d’un mauvais pas dans deux films
d’Howard Hawks, Cary Grant compose avec sa part féminine dans laquelle Michel Cazenave lit toute </span><i>l’ambiguïté</i><span style="font-style: normal;"> de l’homme, qui était homosexuel. Mais plus généralement, l'acteur tourné en ridicule savait tirer parti du comique créé pour susciter </span><span style="font-style: normal;">un sentiment de tendresse chez le spectateur.</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgq8ENXXiIibN1kCiBpZ9nZ7T8F3XQgEOehoGXL4wXssDDeMS8HDr0lfz0Yblw7p3jyFpgnyhOhtMQXPOi_ISeVoU70oQIcy5iraztZw3KO6-f2G6RxfXErFuSKqlpZpdDL4vBoukzrElSF/s1600/l%2527mpossi+allez+couch+2+bis.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="313" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgq8ENXXiIibN1kCiBpZ9nZ7T8F3XQgEOehoGXL4wXssDDeMS8HDr0lfz0Yblw7p3jyFpgnyhOhtMQXPOi_ISeVoU70oQIcy5iraztZw3KO6-f2G6RxfXErFuSKqlpZpdDL4vBoukzrElSF/s1600/l%2527mpossi+allez+couch+2+bis.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Un Cary Grant fémininé dans deux films d'Howard Hawks : à gauche <i>L'impossible monsieur bébé</i> (1938) et à droite dans <i>Allez coucher ailleurs </i>(1949).</td></tr>
</tbody></table>
Côté vie privé, les mariages successifs de l’acteur (cinq)
dénotent selon les intervenants sa face cachée qu'Hitchcock aurait savamment exploité. Voir à cet égard dans <i>Soupçons</i><span style="font-style: normal;">
(1941) la peur progressive qu’inspire son personnage (à partir de 45’26’’) ou
plus tard dans </span><i>Arsenic et vieilles dentelles</i><span style="font-style: normal;"> (Frank Capra, 1944), la </span><i>névrose</i><span style="font-style: normal;"> supposément déduite de sa composition systématiquement
décalée vis-à-vis des situations comiques ou dramatiques dont il tarde à
découvrir le sens (nous restons dubitatifs devant cette interprétation).</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEieNcBZejbJFhNYtR8r60QJlyiX1NWbR3d9Kkf0PjGYjSMOcZjCP5Qr5RlCUBkON8TEtGTUrO2S6bqTqinflteR-xfabhavH8bGJ-U8xBsWTxygyIdtJ4hY1N5ZXCAHNvMypuh9pw2Ddj5W/s1600/arsenic.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="325" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEieNcBZejbJFhNYtR8r60QJlyiX1NWbR3d9Kkf0PjGYjSMOcZjCP5Qr5RlCUBkON8TEtGTUrO2S6bqTqinflteR-xfabhavH8bGJ-U8xBsWTxygyIdtJ4hY1N5ZXCAHNvMypuh9pw2Ddj5W/s1600/arsenic.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><i>Arsenic et vieilles dentelles</i>, Frank Capra, 1944.</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
À l’heure d’émission, Michel Cazenave évoque les rapports
complices de Cary Grant avec les actrices à travers les <i>soutiens de ses
regards</i><span style="font-style: normal;"> quand l’autre dit son texte
(1h03’48’’). Il rappelle également qu'avec l'âge, l’homme n’en reste pas
moins un jeune premier (un « </span><i>vieux premier </i><span style="font-style: normal;">»</span><i> </i><span style="font-style: normal;">dit-il) aux partenaires de jeu toujours aussi jeunes, serait-on tenté d’ajouter.
Quelques exemples pris dans la dernière décennie de sa filmographie : Dans
</span><i>La main au collet</i><span style="font-style: normal;"> (Hitchcock,
1955), Cary Grant a 51 ans quand Grace Kelly est engagée à 26 ans. Dans </span><i>Embrasse-la pour moi</i><span style="font-style: normal;"> (Donen, 1957) il a 53 ans et Jayne Mansfield, 24 ans.
Dans </span><i>La mort aux trousses</i><span style="font-style: normal;">
(Hitchcock, 1959), il a 55 ans, Eva Marie Saint, 35 ans. Dans </span><i>Charade</i><span style="font-style: normal;"> (Donen, 1963), il a 59 ans, Audrey Hepburn, 34 ans. </span><br />
<br />
<span style="font-style: normal;">Ses rares incursions dans le registre
dramatique n’auront jamais séduit le public (</span><i>On murmure dans la ville</i><span style="font-style: normal;">, Mankiewicz, 1951, </span><i>Grand méchant loup
appelle</i><span style="font-style: normal;">, Eckland, 1964). À sa retraite
cinématographique, il reste un homme d’affaires toujours aussi pris, élégant et
bien accompagné. Il meurt à 82 ans d’une congestion cérébrale à Davenport juste
avant de participer à une discussion publique.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
N.B. : En 1988, l’émission divise avec force délicatesse la parole radiophonique en deux camps : aux femmes revient le
commentaire du modèle masculin incarné par Cary Grant... Aux
hommes sont légués l’analyse cinématographique et les récits d’anecdotes personnelles
(ses complets dupliqués, sa pratique de l'auto-hypnose pour sevrer son tabagisme). <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
*<br />
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Bonus</i> : Juste après ou juste avant l'acquisition de leurs nouvelles identités, Katharine Hepburn (dans sa peau de jeune homme) et Cary Grant (bientôt travesti en femme) s'arrêtent devant une porte de toilettes qu'ils n'ouvrent pas. « Naturellement. »<br />
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjZD5m2vB2Cki3wRg00yUg7J40PyKcYDlIAhtIYXzZ7GUXeac_drpUh4LR1DCJVjVAPWUSs8Q0l7T_u8tEGPGSEu5MgPD3qsdEk-HQYtSwRy2kFRQz_ERx_S5MqlSe4fhBlDXh3eO3DJlOK/s1600/sylvia+allez+reuni+bis.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="313" data-original-width="850" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjZD5m2vB2Cki3wRg00yUg7J40PyKcYDlIAhtIYXzZ7GUXeac_drpUh4LR1DCJVjVAPWUSs8Q0l7T_u8tEGPGSEu5MgPD3qsdEk-HQYtSwRy2kFRQz_ERx_S5MqlSe4fhBlDXh3eO3DJlOK/s1600/sylvia+allez+reuni+bis.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">À gauche : Katharine Hepburn dans <i>Sylvia Scarlett</i>. À droite : Cary Grant dans <i>Allez Coucher ailleurs</i> (la lecture du mot LADIES fait l'objet d'un quiproquo hilarant).</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-75926315189422036442017-10-31T22:45:00.000+01:002018-10-29T16:36:35.313+01:00Analyse spectrale de l'occident : L'esprit nouveau en France (09 décembre 1967)<div style="text-align: justify;">
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1nsoNCbcAWhvTh_5vOZkWE1ZXMEf9HQxo" target="_blank">Télécharger le PDF</a></b> de ce post (7 pages, texte et images)<br />
<br />
Un programme alléchant attend l’auditeur qui lancera l’écoute de l’émission <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/analyse-spectrale-de-l-occident-l-art-nouveau-en-france" target="_blank">Analyse spectrale de l‘occident - L’esprit nouveau en France : fauvisme, cubisme, art noir</a> produite par Pierre Sipriot (première diffusion le 09 décembre 1967). Le titre écrit ci-dessus <i>L’esprit nouveau en France</i>, tel qu’annoncé dans l’indicatif de l’émission originale, diffère de celui référencé par <a href="http://inatheque.ina.fr/doc/TV-RADIO/RD_5909232.001/l-art-nouveau-en-france?rang=1" target="_blank">l’Inathèque</a> (et repris aveuglément par le site de France Culture : « L’art nouveau en France ») pour une raison inconnue. C’est très regrettable, car ce glissement cause un double tort : aux amateurs d’art nouveau, frustrés, d’une part. Aux spécialistes du cubisme qui ne sauront rien de cette émission, d’autre part.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Deux heures durant, au long d’une réflexion pédagogique tenue, Pierre Sipriot déblaie le terrain historique qui mènera l’art du XIXe siècle au cubisme et à ses survivances avérées, qui passent notamment par le surréalisme et abordent aux rives du pop art. Une longue introduction contextualise les conditions d’émergence du mouvement : <i>en 1900, l’art traditionnel à Paris est toujours solidement en place. De bons vieux maîtres</i> (…) <i>continuent d’accomplir avec des efforts de volonté et de précision ce décalque de la réalité que des photographes opèrent en une seconde</i>. De qui parle t-on ? Entre autres d’Alexandre Cabanel, de Jean-Léon Gérôme, de Carolus-Duran et de William Bouguereau à propos duquel Joris-Karl Huysmans écrit dans le quotidien <i>Le Voltaire</i> :<br />
<a name='more'></a><br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgU3eb2fbr5x1_GQa4gT5-8MPXS6hhpGpOzll_FCaYhpGG_TcSWVczxXgIOOYl6Bb4oMht5AIVFD-vYc8-wYJ4V2O650WUGFVSBW5joYaET5uoz8yQnVB9MdA8y2vdtdwxOPen7LYhKzSxO/s1600/boug.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="575" data-original-width="413" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgU3eb2fbr5x1_GQa4gT5-8MPXS6hhpGpOzll_FCaYhpGG_TcSWVczxXgIOOYl6Bb4oMht5AIVFD-vYc8-wYJ4V2O650WUGFVSBW5joYaET5uoz8yQnVB9MdA8y2vdtdwxOPen7LYhKzSxO/s640/boug.jpg" width="458" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">William Bouguereau, <i>La naissance de Vénus</i>, 1879, <a href="http://www.musee-orsay.fr/en/collections/index-of-works/notice.html?no_cache=1&zoom=1&tx_damzoom_pi1[zoom]=0&tx_damzoom_pi1[xmlId]=016649&tx_damzoom_pi1[back]=%2Fen%2Fcollections%2Findex-of-works%2Fnotice.html%3Fnnumid%3D016649%257C" target="_blank">musée d'Orsay</a>, Paris</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div style="text-align: justify;">
La naissance de Vénus, <i>étalée sur la cimaise d’une salle est une pauvreté qui n’a pas de nom. La composition est celle de tout le monde. Une femme nue sur une coquille, au centre. Tout autour, d’autres femmes s’ébattant dans des poses connues. Les têtes sont banales, ce sont ces sydonies qu’on voit tourner dans la devanture des coiffeurs ; mais ce qui est plus affligeant encore, ce sont les bustes et les jambes. Prenez la Vénus de la tête aux pieds, c’est une baudruche mal gonflée. Ni muscles, ni nerfs, ni sang. Les genoux godent, manquent d’attaches ; c’est par un miracle d’équilibre que cette malheureuse tient debout. Un coup d’épingle dans ce torse et le tout tomberait. </i>(…) (8’12’’)</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Un bond téléporte temporairement l’auditeur quelques décennies plus tard, qui rapporte ce début de siècle aux années 1960, celles du pop-art. Salvador Dali (1909-1934), qui passait par là, débite quelques inepties et prédit un retour de l’art pompier. Qu'on ne nous en veuille pas de le laisser soliloquer. </div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Retour en 1905 et aux peintres fauves pour qui <i>le tableau n’est plus une image mais une vision</i> (…) <i>où</i> (…) <i>les couleurs ne renvoient plus au réel </i>[mais] <i>entrent dans une logique colorée faite de contrastes de tons.</i> [Ces derniers] <i>obligent le spectateur à justifier le tableau par la puissance de composition du peintre et non pas par la similitude recherchée avec la réalité.</i> (14’35’’) Maurice de Vlaminck (1876-1958) est l’une des figures de ce mouvement. Lui qui abhorrait la critique d’art, s’est amicalement prêté à une discussion avec Maurice Genevoix (1890-1980) pour les besoins de son livre sobrement intitulé <i>Vlaminck</i> (1954). Au micro de Pierre Sipriot, l’écrivain se souvient : <i>Le cubisme selon lui… Il avait la terreur rétrospective d’un homme qui avait failli y être entraîné. Il l’admettait en soi, mais il le rejettait par l’outrance, et par le coté « école » , docte, « financier du mystère »</i> (…). <i>Il avait des propos extrêmement libres.</i> (…) <i>Il rejetait en principe tous les devanciers. </i>(…) <i>S’il se réclamait d’un maître </i>(…)<i>, il alléguait l’importance dans sa formation d’un bourrelier</i> [personne qui fait et vend des harnais, des sacs, des courroies] <i>du Vésinet qui peignait sur des plaques de verre des portraits, des fantaisies, des décorations géométriques</i> (…) <i>Pour un peu, en effet, Vlaminck aura assimilé ce bourrelier à un Rouault</i> [Georges, 1871-1958] <i>artisanal, rustique… Il exagérait sans aucun doute.</i> (…)</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
L’interview de Maurice Genevoix déborde ensuite le cadre donné par le sujet de l’émission pour se porter sur le métier du peintre Vlaminck, sa personnalité et sa vie d’artiste. </div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Passés l’ère finissante de l’art pompier et l’avènement d’une picturalité brute, c’est avec le temps des « nouveaux pompiers » que Pierre Sipriot poursuit sa réflexion. Le douanier Rousseau, Jean Marchand, Maurice Utrillo <i>(qui se soûlait tellement qu’on l’appelait « Litrillo »</i>, narre André Salmon dans ses souvenirs de la famille de la rue Cortot à Montmartre) sont les têtes de file de cette période. Mais bientôt à l’heure d’émission, l’auditeur se réjouit d’écouter Michel Décaudin (1919-2004) lui parler de Guillaume Apollinaire critique d’art, dont il a publié <i>l’ensemble des œuvres d’esthétique</i>. </div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Michel Décaudin :<i> Rien ne le prédestinait à faire de la critique d’art sinon un goût pour la peinture qui se traduit dès l’adolescence par un certain art du dessin. Nous connaissons des carnets d’esquisses que le jeune Wilhelm de Kostrowitzky a faits alors qu’il avait 12, 13, 14 ans. Nous savons d’autre part qu’il n’a cessé de dessiner en marge de ses brouillons. Sur les épreuves qu’il corrige, il y a des dessins intéressants. Et à la fin de sa brève existence, en 1917 et 1918, il a fait un certain nombre d’aquarelles qui ne sont pas sans intérêt. J’ajoute qu’il est un de ceux qui ont pensé que la poésie pouvait avoir un aspect figuratif. Et non seulement, il a fait des calligrammes, mais il a les également coloriés. Cela, c’est peut-être le premier aspect de ce goût vers l’art, mais ce serait peut-être insuffisant pour expliquer qu’il soit devenu un critique d’art. J’y vois essentiellement deux raisons : la première, très importante, c’est une question de circonstances. Nous sommes au début de ce siècle dans une période où la peinture, la sculpture prennent une importance capitale, et dans le monde artistique, se substituent en quelque sorte à la prééminence de la musique, qui était le fait de l’époque symboliste. Les poètes symbolistes n’ont cessé de vouloir reprendre à la musique leur bien, selon une formule connue, ou rivaliser avec elle. Et, je crois que les poètes du début de ce siècle se tournaient plutôt vers la peinture et ont voulu rivaliser avec</i> [elle]<i>. Pourquoi ? Eh bien, parce que les peintres peut-être avaient été plus audacieux, plus rapides dans la marche vers un renouveau, vers une révolution, et que c’étaient eux qui donnaient, non pas seulement, les formules techniques, mais tout simplement la formule d’un art nouveau.</i> (…) </div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i>Et il y a une autre raison qui est ensuite de simple circonstance de la vie quotidienne. Apollinaire, devant gagner sa vie, cherchant à devenir journaliste (ça a été un grand rêve de son existence, dès sa jeunesse, on le voit désireux d’entrer dans un journal ou de collaborer à une revue), hé bien devenu journaliste, c’est tout naturellement vers la critique d’art qu’il s’est tourné. Et lorsqu’en 1910, André Salmon qui abandonnait une chronique d’art</i> [dans le Journal <i>L’intransigeant</i>]<i>, a proposé comme son successeur son ami Apollinaire, celui-ci est entré tout naturellement dans le travail quotidien de visites d’expositions, de petites notes, etc.</i> (…) (55’04’’)<br />
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiWT-fuGjBaYXrPKl3V83wJC_DTab8-Y3uw_hfaUdhleYMUdy_8aqF9lvsNV3opfT4QV6sJUZ1p03caNQ3PXXZRKQXlzy9Yz4kPseiJly8_rOyH2Q6kQJbjLoEd5weUREGFcDYBISOdrMJY/s1600/l%2527intransi+apol+3+jan+1911.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="1098" data-original-width="800" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiWT-fuGjBaYXrPKl3V83wJC_DTab8-Y3uw_hfaUdhleYMUdy_8aqF9lvsNV3opfT4QV6sJUZ1p03caNQ3PXXZRKQXlzy9Yz4kPseiJly8_rOyH2Q6kQJbjLoEd5weUREGFcDYBISOdrMJY/s640/l%2527intransi+apol+3+jan+1911.jpg" width="466" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Exemple d'une chronique de Guillaume Apollinaire écrite « en revenant de l'expo », dénichée sur <a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k7858519.item" target="_blank">Gallica</a>. Article <i>L'art jaune</i>, paru dans <i>L'intransigeant</i> le 03 janvier 1911, page 1 (entouré en noir). </td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTf5yjp4LSpDLDyoSlXXaICXOogBj3pzGyZ7c4vpGSDtcapQqi2STqsv36ILTAfZLJzqSxRG0hXXsD6zmsBw-6aPwdyO8UtrEmQT5C8b-FSIFmR1c0yuoAnoms_D8IRakJ8WcdZgULdqvP/s1600/l%2527intransi+apol+de%25CC%2581tail.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="401" data-original-width="800" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTf5yjp4LSpDLDyoSlXXaICXOogBj3pzGyZ7c4vpGSDtcapQqi2STqsv36ILTAfZLJzqSxRG0hXXsD6zmsBw-6aPwdyO8UtrEmQT5C8b-FSIFmR1c0yuoAnoms_D8IRakJ8WcdZgULdqvP/s640/l%2527intransi+apol+de%25CC%2581tail.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Détail de la chronique citée ci-dessus.</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div style="text-align: justify;">
Michel Décaudin : <i>Je citerai volontiers la phrase d’Apollinaire qui confirme et illustre ce que vous avez dit : « Les grands poètes et les grands artistes ont pour fonction sociale de renouveler sans cesse l’apparence que revêt la nature aux yeux des hommes. » Mais Proust avait déjà dit : « Le monde n’a pas été créé une fois mais aussi souvent qu’un artiste original est survenu. » C’est au fond exactement la même attitude. Et Picasso : « Je peins des objets tels que je les pense, non pas tels que je les vois ». Nous en revenons toujours à cette même conception.</i> (…)</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Ces trois citations de Michel Décaudin, qu’elles soient précisément exactes ou de l’ordre de la synthèse, permettent de comprendre le cheminement historique proposé par Pierre Sipriot. Les avant-gardes rompent avec ce qui précède dans la mesure où <i>le sujet</i> [ce qui est à peindre]<i>, en lui-même, ne compte pas. Il ne s’agit pas de faire de l’imitation, encore moins de l’imitation en trompe-l’œil. Mais il ne s’agit pas non plus d’échapper complètement au réel.</i> (…) Le professeur de littérature rappelle à cette occasion qu’Apollinaire n’est nullement théoricien du cubisme. (…) <i>En réalité, ce qui l’intéresse, c’est d’abord l’œuvre d’un certain nombre de puissantes personnalités, et en premier lieu, Picasso. Et ces gens étant classés comme « cubistes », il les considère lui aussi comme cubistes. Mais en fait, il n’a jamais été au sens propre le porte drapeau d’un groupe. Et il est très frappant de voir que c’est avec beaucoup de réticence qu’il a utilisé cet adjectif de cubiste.</i> À en croire Pierre Sipriot, Apollinaire est même <i>gêné devant le cubisme de 1911-1912, très sévère, qui refusait la couleur, qui prétendait se limiter à des lignes et à des plats,</i> lui qui avait découvert Picasso à l’époque des <a href="http://www.pablo-ruiz-picasso.net/theme-arlekin.php" target="_blank">arlequins</a> (1905). </div>
<div style="text-align: justify;">
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEit_7MpX4qZV5PpdRvCcm0D3NOitGkJ5-tYDrDc-Hhb8nwHyokiwJDnu1RA69hcMzHOjI-D8_E4boFcVmqdRiXrK_t_UJc1shjQ8acBbXcSKxEZ6e0M9HBTy6BucYfOIu5VhUYgWjX1isnf/s1600/Pablo_Picasso%252C_1905%252C_Acrobate_et_jeune_Arlequin_%2528Acrobat_and_Young_Harlequin%2529%252C_oil_on_canvas%252C_191.1_x_108.6_cm%252C_The_Barnes_Foundation%252C_Philadelphia.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="1230" data-original-width="685" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEit_7MpX4qZV5PpdRvCcm0D3NOitGkJ5-tYDrDc-Hhb8nwHyokiwJDnu1RA69hcMzHOjI-D8_E4boFcVmqdRiXrK_t_UJc1shjQ8acBbXcSKxEZ6e0M9HBTy6BucYfOIu5VhUYgWjX1isnf/s640/Pablo_Picasso%252C_1905%252C_Acrobate_et_jeune_Arlequin_%2528Acrobat_and_Young_Harlequin%2529%252C_oil_on_canvas%252C_191.1_x_108.6_cm%252C_The_Barnes_Foundation%252C_Philadelphia.jpg" width="354" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Pablo Picasso, <i>Acrobate et jeune arlequin</i>, huile sur toile, 1905, Fondation Barnes, Philadelphie</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div style="text-align: justify;">
Libérée de toute visée illusionniste et déchargée du poids des recherches optiques, la peinture de cette époque veut <i>la création absolue, sans antécédents, sans alibis</i> (…). <i>Pour Matisse, il fallait retrouver la pureté des moyens, pour Derain, les tubes deviennent des cartouches de dynamite. Dufy veut créer le monde des choses qu’on ne voit pas, Vlaminck montrer la nature en liberté, Delaunay veut constituer des phrases colorées, la couleur agissant presque en fonction d’elle-même.</i><br />
<i><br /></i>
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<i>*</i></div>
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Dans l’espoir de cerner la chronologie d’un mouvement ponctué de différentes phases, Pierre Sipriot convoque pour finir le regard rétrospectif de Daniel-Henry Kahnweiler (1884-1937), marchand et ami des peintres cubistes, Jean-François Revel (1924-2006) et Emmanuel Berl (1892-1976). Ce dernier : <i>Le cubisme montre que</i> (…) <i>le commencement du monde moderne, la coupure, ne se situent pas généralement en 1914, mais vers 1905-1906, et en somme, après la défaite des Russes devant les Japonais et la révolution russe. À ce moment-là, le recul de l’Europe commence. Et toute une série d’idées et de sentiments du XIXe siècle prend fin. Pour moi, ce qui est très important dans le cubisme, c’est la fin de la foi rousseauiste et romantique dans la nature. Les impressionnistes croient encore que la nature est divine.</i> (…) <i>L’univers cubiste n’est pas un univers mystique de communion avec la nature. </i></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Jean-François Revel : <i>Un des problèmes qui a été posé a été de savoir si le cubisme était en somme une sorte d’exaspération du réalisme ou au contraire un premier pas vers l’abstraction, vers la suppression du sujet. Et l’étude historique dont j’ai publié une traduction française chez Julliard </i>[cf. <i>Le cubisme</i>, de John Golding, 1962] <i>penche pour la thèse du réalisme. C’est-à-dire que pour lui, les cubistes étaient des gens qui au fond voulaient pénétrer beaucoup plus l’objet, contrairement à ce qu’a cru le grand public, qui n’a vu que la déformation apparente, extérieure, le premier pas vers l’abstraction, la suppression du sujet. </i>(1h20’19’’)</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
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Daniel-Henry Kahnweiler : <i>Je crois que toute l’erreur provient de ce qu’on mélange toujours le signe et le signifié. Le cubisme a été un mouvement réaliste, plus réaliste que n’importe quel autre, mais un réalisme de la durée, et non pas, un réalisme du fugitif, comme l’impressionnisme ; que le fait d’introduire ces objets, ou l’idée qu’on a de ces objets, sur une surface plane provoque ce qu’on a appelé la déformation, c’est évident. Et c’est là ce qu’il y avait d’important dans le cubisme, c’est qu’il se voulait réaliste d’un côté, mais que d’autre part, il voulait rétablir le tableau-objet, le tableau en tant que tel, autrement dit, comme aurait dit Gris</i> [Juan] : <i>l’architecture du tableau.</i> (…) <i>Maintenant, tant qu’à dire que le cubisme est un mouvement géométrique, je m’y oppose absolument à cette opinion-là de la façon la plus formelle. Ce n’est pas parce qu’il y a eu des lignes droites et des lignes courbes régulières dans certains tableaux cubistes que c’est un mouvement géométrique. Ils n’avaient pas la moindre idée, croyez-le, de la géométrie.</i> (…) <i>Et que ce mouvement ait abouti par certains peintres à l’abstraction, ça prouve simplement que ces peintres n’ont pas compris de quoi il s’agissait.</i></div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i>L’introduction des papiers collés s’explique très facilement. Il s’agissait de démontrer d’une part que la structure, l’architecture du tableau est assez forte pour digérer des corps étrangers et d’autre part, il s’agissait d’une protestation contre la facilité du pinceau, contre la virtuosité des peintres.</i> (…) <i>Là, on voulait montrer qu’on pouvait faire un beau tableau en se servant d’éléments tout faits, sans pour cela le détruire. Même débuter d’abord par un clou peint en trompe l’œil par Braque en 1909 qui était déjà un détail réel, sans déformation aucune, introduit dans le tableau</i> [ne nuisait en rien au reste cubiste de la composition]<i> et c’est ainsi que ça a continué par les papiers collés.</i></div>
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<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgLDPTtE6BFCqDzxCp5O_I4kAWkggawfBYqv_osvU3AZnw8dEDdg7jfG0RcMb4XNbo3HCpWYRPUqMHcPzf5kvhLnKK5SA3jFTsgqhC0-tZYI3FulPGpqPKy5sczbcKE77MZgQe0zUVYadu5/s1600/clou+braque.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="756" data-original-width="630" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgLDPTtE6BFCqDzxCp5O_I4kAWkggawfBYqv_osvU3AZnw8dEDdg7jfG0RcMb4XNbo3HCpWYRPUqMHcPzf5kvhLnKK5SA3jFTsgqhC0-tZYI3FulPGpqPKy5sczbcKE77MZgQe0zUVYadu5/s640/clou+braque.jpg" width="532" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Georges Braque, <i>Violon et palette</i> (+ détail du clou), huile sur toile, 1909, musée Guggenheim, New-York</td></tr>
</tbody></table>
</div>
<div style="text-align: justify;">
<i>Je voudrais revenir au succès premier du cubisme. C’est une vue de la postérité avant tout. Car enfin, ces peintres n’exposaient nulle part. Ça se passait dans une minuscule boutique, 28 rue Vignon </i>[Paris 9e]<i>, qui était le quart à peu près de la pièce dans laquelle nous sommes. Il y a eu en effet cette espèce de succès énorme du cubisme parmi les peintres. C’est incontestable. Mais le public n’a pas suivi du tout, très loin de là. Et les critiques d’art non plus. Ils parlaient de la mort du cubisme dans tous leurs feuilletons. Il faut toujours vous dire que dans ces années-là, nous avons vécu (les peintres, la galerie, ma femme, moi) avec quelques amateurs, mettons 8 à 10 en tout.</i> (1h33’33’’)</div>
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<br /></div>
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La fin de l’émission est dédiée à « l’exotisme dans les arts-plastiques » avec Marcel Brion (1985-1964). Découverte de l’art africain, désacralisation et désarticulation des masques achetés, confirmation des idées entrevues sur la rigueur formelle, compréhension du lointain sont autant de sujets sur lesquels je reviendrai dans un second post.<br />
<br />
<b>>> <a href="https://drive.google.com/open?id=1nsoNCbcAWhvTh_5vOZkWE1ZXMEf9HQxo" target="_blank">Télécharger le PDF</a></b> de ce post (7 pages, texte et images)</div>
Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-45427537513687798012017-10-24T09:17:00.000+02:002018-10-07T15:34:49.387+02:00Le croquant indiscret, d'Henri Calet (26 juin 1955)<br />
<div style="text-align: center;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px; text-align: justify;">
Cinq ans avant la diffusion des entretiens de la salonnière <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.fr/2017/09/12-portraits-et-souvenirs-par-marie.html" target="_blank">Marie Scheikevitch</a> sur France Culture à l'été 1960, une émission aux contours flous proposait d'expliquer par la voix de ses acteurs la nature du « grand monde » aux auditeurs : c'est <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/le-croquant-indiscret-enquete-dans-le-paris-mondain-des-annees" target="_blank">Soirée de Paris : Le croquant indiscret - enquête dans le Paris mondain des années 50</a> (première diffusion : 26 juin 1955). Le document radiophonique dont nous présentons ci-dessous les grandes lignes navigue aux frontières de la fiction et du documentaire. Son auteur, Henri Calet (1904-1956), assume à la fois la voix off de l’histoire et les entretiens « joués » avec ses interlocuteurs, qui l’initient aux codes de la bulle mondaine. L’auditeur attentif à la progression de l’enquête se plait alors à imaginer les véritables discussions qui ont présidé à l’écriture radiophonique. Naturellement, <i>toute ressemblance avec des personnages ayant existé ou existants, ne serait que purement fortuite</i><span style="font-style: normal;">... (4’00’’)</span><br />
<a name='more'></a></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
<br /></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
Grâce à une liste de noms <i>que l’on lit dans les comptes-rendus de dîners, de cocktails, de mariages, de bals, de fêtes, de générales, ou d’enterrements, </i><span style="font-style: normal;">le narrateur Calet s’introduit non sans mal dans quelques salons où des femmes très affairées répondent à ses questions. Pauline est la première d’entre elles, que nous retrouverons à plusieurs reprises au long du « reportage ». Elle lui conseille d’abord d’aller chez </span><i>un grand couturier des champs-Elysées</i><span style="font-style: normal;"> pour </span><i>s’imprégner</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>de</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>l’atmosphère de luxe dans laquelle</i><span style="font-style: normal;"> [il] </span><i>allai</i><span style="font-style: normal;">[t] </span><i>probablement devoir évoluer</i>, puis<span style="font-style: normal;"> le convie à un déjeuner chez Maxim’s. Pauline : </span><i>Mais comment nous a-t-on placés ? C’est insensé.</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>Nous sommes au milieu, c’est très mauvais.</i><span style="font-style: normal;"> (17’26’’) Au cours du repas lui sont exposés : la composition du monde (</span><i>Il y a le milieu chasse à courre, la banque, les courses</i><span style="font-style: normal;">), ses lieux de villégiature, ses mots de passe (les diminutifs donnés aux habitués), l’importance des généalogies (</span><i>Il y a les gens à demi nés, tout à fait nés, ou pas du tout nés. Les tout à fait nés ne sont pas les plus nombreux</i><span style="font-style: normal;">).<o:p></o:p></span></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
<br /></div>
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<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
De façon amusante, le narrateur témoigne de l’ébranlement intérieur que lui causent ces premiers pas : <i>À la vérité, je n’étais plus tout à fait moi, tout cela était troublant. </i><span style="font-style: normal;">(19’50’’) Invité ensuite à un cocktail chez « Peggy », il découvre </span><i>sur les figures de ces gens une même expression d’affolement de bêtes traquées. Ils n’ont jamais le temps : un dîner, une Générale, un dîner.</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>(27’35’’) De quoi se retrouver rapidement</span><span style="font-style: normal;"><span style="font-style: normal;"> en tête à tête avec la maîtresse de maison, </span>une fate de la pire espèce qui lui confie :</span><i> Après tout, être mondaine, ce n’est pas plus futile qu’être une mère de famille nombreuse qui s’occupe du matin au soir de son ménage, de sa lessive, de sa cuisine et du reste</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Non, non, pas de sensiblerie inutile ! Enfin, les clochards sont-ils à plaindre ? Eh bien, je n‘en suis pas sûre.</i><span style="font-style: normal;"> (30’11’’) Craignant sans doute de compromettre la suite de son enquête, le narrateur Calet qui rend compte de sa visite à Pauline n’ose pas livrer le fond de sa pensée. Heureuse surprise, son amie le fait pour lui : </span><i>Elle ? C’est le plus terrible paillasson de Paris !</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Ce n’est pas une tête de file. Elle est très snob.</i><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
<br /></div>
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<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
Le lendemain, d’autres renseignements sont pris chez madame Victoire, modiste, rue Royale (Paris 8<sup>e</sup>). Calet : « <i>Combien faut-il de chapeaux par an à une femme du monde ?</i><span style="font-style: normal;"> Madame Victoire : _ </span><i>Une femme « bien » prend environ six chapeaux par saison</i><span style="font-style: normal;">. » </span><i>Au total, douze par an, à un prix moyen de 20 000 francs l’un, cela fait 240 000 francs.</i><span style="font-style: normal;"> (39’43’’) Suit un saut de puce chez la marquise De Fuentes de Onoro, pédante à souhait, terminé par un détour chez Pauline qui a organisé une future rencontre avec madame Bidar, </span><i>pas née du tout</i><span style="font-style: normal;">, mais </span><i>qui a été élue Vénus de Saint-Tropez</i><span style="font-style: normal;"> et dont le mari a fait fortune dans le domaine de la laverie automatique. Quelques jours plus tard, le néophyte Calet demande donc à cette </span><span style="font-style: normal;"><i>Vénus</i></span><span style="font-style: normal;"> : </span><i>Mais que faut-il faire pour être accepté dans le monde ? </i><span style="font-style: normal;">Madame Bidar : </span><i>_ Être amusant, surtout ne pas être embêtant, ne jamais parler de politique, des courses, d’automobiles</i><span style="font-style: normal;"> (…). (47’35’’)<o:p></o:p></span></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
<br /></div>
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<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
Arrivé à la moitié du reportage radiophonique, le narrateur formule cette lumineuse réflexion : <i>J’avais vite compris que mes modèles se chargeraient l’un l’autre de parachever leur portrait par touches successives. Une besogne collective en quelque sorte.</i><span style="font-style: normal;"> (49’04’’) À l'oeuvre de laquelle Pauline travaille ardemment ! Cultivant le phrasé enroulé, le ton distancié, la phrase ironique et la voix chantante au point qu'elle en parait fausse, la comtesse de Malplaquet, dite « Marie-Louise », comme nombre des précédentes interviewées, semble d’abord désarçonnée par l'entreprise de Calet : </span><i>Mais qu’est-ce que je pourrais bien vous dire ?<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Votre question me fait rire ! Il n’y a plus de vie mondaine. C’est périmé</i><span style="font-style: normal;">. (51’10’’). Puis développe ce qui ne peut se raconter bien entendu, avant de conclure, totalement désoeuvrée : </span><i>Tenez, par cette fenêtre, j’aperçois quelquefois des clochards. Oui, là sur le boulevard. Eh bien, ce sont les derniers dandys. N’est-ce pas ? Ça saute aux yeux.</i></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
<br /></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
Les tourments du narrateur s’amplifient : <i>Il m’advenait une chose singulière. Ma personne, mon âme si l’on préfère, étaient le lieu d’un avatar. J’étais presque devenu un homme différent de moi-même.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>J’étais chez moi chez les autres.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Le cercle s’élargissait. De l’une j’allais à l’autre. Je commençais à être connu</i><span style="font-style: normal;">. Plus tard, la baronne Decoville, de son sobriquet « Nono », corrobore ce que d’autres ont appris au narrateur avant elle. Calet : </span><i>À quoi reconnaît-on qu’une fête est réussie ?</i><span style="font-style: normal;"> « Nono » : _ </span><i>Une fête est réussie lorsque les gens sont gentils, lorsqu’il y a de la place, lorsqu’on peut danser, lorsqu’il ne fait pas trop chaud</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>quand on reste tard sans s’en rendre compte. Une femme qui dit d’une fête qu’elle était ratée, c’est qu’elle n’était pas invitée.</i><span style="font-style: normal;"> (56’58’’).<o:p></o:p></span></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
<br /></div>
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<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
La vicomtesse de Montjoie Saint-Denis (ou « Meg »), Madame Chabel-Poteau (« Denise Love » de son nom de scène), Jeannie Goldenblum, et la duchesse de Comenterie-Fourchambeau complètent le tableau. Cette dernière affiche elle aussi la nostalgie d’un monde disparu : <i>C’est la « démocratisation ». J’ai vu des femmes « très bien » serrer la main à ma femme de chambre. Dans 25 ans d’ici, les domestiques ne parleront plus à la troisième personne. Ils vous diront : « vous ».</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Il y a moins de politesse.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Les enfants tutoient leurs parents, les parents tutoieront bientôt leurs enfants !</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Presque personne ne met plus de cartes. Cela s’appelait : poser les cartes. On posait de quatre à six cents cartes dans la saison. Le valet de pied allait les porter dans les maisons du quartier. À présent, les faire-part n’ont plus qu’une seule feuille. Il n’y a plus cette page blanche qui était si commode pour griffonner les adresses. Plus non plus de menu que le maître d’hôtel écrivait de sa main. Plus de couronnes sur le papier à lettres ni sur la portière des voitures.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Au théâtre, tous vont à l’orchestre ! Avant, les femmes n’allaient que dans une loge ou dans une baignoire</i><span style="font-style: normal;">.</span><span style="font-style: normal;"> (…)<o:p></o:p></span></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
<br /></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="margin-bottom: 0px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; margin-top: 0px;">
Fin du voyage chez la princesse de Montmirail, qui revenue du monde, <i>n’a plus que des souvenirs de bals à 20 ans. </i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span></span><i>Le monde ? C’est une sorte de jeu, une<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>piste avec des figurants.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Les femmes ne sont la plupart du temps que des déléguées de leurs maris</i><span style="font-style: normal;">.</span><i> </i><span style="font-style: normal;">(1h 22’08’’) On le voit, les deux faces du monde ne coïncident jamais, sans cesse partagées entre le rêve qu’il suscite et la déception qu’il induit immanquablement. </span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<span style="font-style: normal;"><i>Post-Scriptum</i></span><span style="font-style: normal;"> : Philippe Garbit nous informe dans la désannonce que </span><span style="font-style: normal;"><i>Le croquant indiscret</i></span><span style="font-style: normal;"> a été publié chez Grasset après sa diffusion sur la Chaîne Nationale, livre que nous n'avons pu consulter pour la bonne orthographe des noms écrits ci-dessus, « à l'oreille ».</span></div>
</div>
Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-85952256124278000472017-10-06T23:37:00.001+02:002017-10-16T03:04:47.843+02:003/3 : Portraits et souvenirs par Marie Scheikevitch (émissions 10 à 12) (1960)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<!--StartFragment-->
<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<i>Avant de commencer votre lecture, reportez-vous, si le coeur vous en dit, à la publication de ces deux précédents posts :</i><br />
<i><br /></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
- <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.fr/2017/09/12-portraits-et-souvenirs-par-marie.html" target="_blank">1/3 : Portraits et souvenirs par Marie Scheikevitch (émissions 1 à 6) (1960) </a></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
- <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.fr/2017/10/23-portraits-et-souvenirs-par-marie.html" target="_blank">2/3 : Portraits et souvenirs par Marie Scheikevitch (émissions 7 à 9) (1960)</a></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br />
<div style="text-align: center;">
*</div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Suite et fin des entretiens de Marie Scheikevitch avec Roger
Pillaudin. Dans le prolongement de la dernière émission résumée dans le post
précédent (cf. <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.fr/2017/10/23-portraits-et-souvenirs-par-marie.html" target="_blank">Émission 9</a>), les trois dernières émissions sont consacrées à
Marcel Proust, son personnage, puis sa personne et au travers de ceux-ci, de
temps en temps, son œuvre. Elles s’écoutent encore une fois avec délectation
pour la qualité de la langue parlée, la vivacité d’esprit de Marie Scheikevitch, sa mémoire sans faille et les reflets de l'accent russe dans sa voix qui roule.<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/entretiens-avec-marie-scheikevitch-44-portraits-et-souvenirs" target="_blank">Émission 10</a></b> : Marcel Proust (rencontre et amitié) (première diffusion : 18 septembre 1960)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Marie Scheikevitch voit Marcel Proust pour la première fois
en 1905 chez Madeleine Lemaire (1845-1928), artiste peintre. <i>Un soir, je
remarquai au fond de l’atelier, dans un groupe, un jeune homme très pâle avec
des yeux admirables</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Ses
gestes étaient souples, ses mains longues et fines.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>La voix de Marcel était très étrange. Elle avait
plusieurs registres. De confidentielle, elle s’enflait par moments pour devenir
éclatante. Puis s’éteignait peu à peu dans un murmure.</i><span style="font-style: normal;"> (4’24’’) À cette époque, Marie Scheikevitch ne
connaît que les premiers livres de Proust (</span><i>Les plaisirs et les jours</i><span style="font-style: normal;"> et les traductions de Ruskin), puis quelques
facettes de sa personne grâce aux indiscrétions de ses amis. Même si peu croient
à son génie littéraire, sa constitution fragile et son mode de vie original
font parler, et dans les salons, préparent déjà sa </span><i>légende</i><span style="font-style: normal;">. </span><i>Reynaldo Hahn, un jour que nous dînions
chez Caroline Reboux</i><span style="font-style: normal;"> [modiste] (…)</span><i>
me dit mystérieusement que Proust était en train d’écrire un livre qui ferait
sensation et il me pria de m’intéresser à son œuvre.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Je lui promis que, étant très liée avec Adrien Hébrard qui
était le directeur du</i><span style="font-style: normal;"> Temps, </span><i>je
lui en parlerai</i><span style="font-style: normal;">. </span><i>Reynaldo m’a
dit : _ Il ira vous voir</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Proust
vint me voir, sans me prévenir d’ailleurs. Cependant, soit par discrétion, soit
pour se rendre compte pendant cette première visite si j’étais digne ou non d’apprendre quelque chose de l’oeuvre qui était déjà tout l’intérêt de sa vie,
chaque fois que la conversation approchait du sujet de son livre, par une
manœuvre très habile, il évitait d’en parler.</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>(9’14’’) Ainsi, la conversation s'embarque du côté de la littérature russe et surtout de la musique russe, très en vogue à ce moment dans les représentations données de Serge Diaghilev (1872-1929). </span><i>Au
moment de son départ, je me risquai de lui dire que j’avais lu tout ce qu’il
avait publié jusqu’à ce jour. Il me regarda avec méfiance, se rassit, et
insidieusement me posa des colles. Je compris qu’il me faisait passer une
espèce d’examen déguisé.</i></div>
<a name='more'></a><br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
C’est à l’été 1912, à la faveur de vacances passées à
Houlgate avec des amis que Marie Scheikevitch et Marcel Proust nouent le
commencement d’une amitié. <i>Un soir de septembre, je fus toute surprise
d’apercevoir Marcel, errant, perdu, titubant sous les lumières, vêtu malgré la
chaleur d’un lourd pardessus, entrouvert sur un smoking flottant, et qui
laissait voir plusieurs gilets de laine. Il portait à cette époque une barbe
qui allongeait son visage et le faisait ressembler à un Greco. Et à la main, il
tenait un étonnant chapeau de paille. Joyeusement, j’allai à lui</i><span style="font-style: normal;">.</span><i> Je passai toute la soirée avec Proust qui
s’étonnait de m’avoir rencontrée si près des salles de jeu </i><span style="font-style: normal;">[le casino de Cabourg/Balbec]<span style="mso-spacerun: yes;"> </span></span><i>moi qui ne jouais pas</i><span style="font-style: normal;">. (14’15’’) De cette première entrevue naquit une suite d’entretiens
que Proust appela plus tard : « Les brillants et vifs souvenirs de
Cabourg » au cours desquels il se confie sur son œuvre en cours : </span><i>Il
exposait les idées directrices du livre, conçu et en partie écrit, faisait de
longues paranthèses pour m’expliquer sa composition, s’arrêtait soudain pour
préciser un détail important, tout cela avec des digressions, des comparaisons
prises dans la vie des gens que nous connaissons. J’avais l’impression de
l’envers d’une tapisserie dont je ne pourrais comprendre le dessin et le sens
que lorsque son auteur m’en aurait révélé la face. </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>Sa mauvaise santé n’était plus pour moi un secret, il
m’avait expliqué les soins qu’il lui fallait prendre les fumigations auxquelles
il s’astreignait pour combattre son asthme, son regret de ne pouvoir respirer
une rose.</i><span style="font-style: normal;"> <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i><br /></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<i>*</i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>Émission 11</b> : les derniers mois de la vie de Marcel
Proust (première diffusion : 2 octobre 1960) (même lien que ci-dessus, à partir de 23’18’’) </div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Rien ne pouvait vaincre, je dirai même, cette espèce de
neurasthénie qui l’a saisi les derniers temps</i><span style="font-style: normal;">,
déclare Marie Scheikevitch à propos de ses ultimes rencontres avec Marcel
Proust. Alors, pour l’amuser un peu et dissiper momentanément son accablement,
elle lui dit un jour :</span><i> _ Vous ne vous rendez pas compte, Marcel, que
vous nagez en pleine gloire ? Il me regarda tristement. _ Hé bien, dis-je,
même si je ne peux pas vous le prouver, je peux vous amuser. Et je dépliais
devant lui une coupure du journal. C’était une réclame d’un marchand de
ceinture qui afin de s’attirer de nouvelles clientes, mettait dans son annonce
les lignes suivantes : « Si vous voulez avoir la démarche charmante
et souple des jeunes en fleurs, achetez la ceinture X » Marcel éclata de
rire : _ Où avez-vous trouvé cette</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>perle ?
_ Tout simplement dans </i><span style="font-style: normal;">Le Figaro. Marie
Scheikevitch apprend la mort de l’écrivain (51 ans) par un pneumatique de
Reynaldo Hahn en novembre 1922. </span><i>Anéantie</i><span style="font-style: normal;"> elle attend quelques mois avant d’aller rendre visite à Céleste
Albaret, la servante dévouée de Proust : </span><i>Je pris un taxi et
j’allai 14 rue des Canettes</i><span style="font-style: normal;"> [6<sup>e</sup>
arrondissement de Paris] </span><i>dans le petit hôtel qu’elle possédait avec
son mari.</i><span style="font-style: normal;"> <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Roger Pillaudin : <i>Comment était Céleste ?</i><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Marie Scheikevitch : _ <i>Du temps de Marcel, c’était
une grande personne, élancée, mince, blonde, fade, qui avait des allures de
chatte étirée si je peux dire. Elle venait d’Aurillac, elle était la femme de
son chauffeur Odilon. Alors, en arrivant là, je trouvais une Céleste solide,
mère de famille, qu’elle n’avait pas pu être chez Marcel, parce qu’elle était
tout le temps trop occupée.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Et quand<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>elle me vit, elle éclata en sanglots.</i><span style="font-style: normal;"> <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Lecture par René Farabet (sans doute du livre <i>Souvenirs
d’un temps disparu</i><span style="font-style: normal;">, de Marie Scheikevitch):
</span><i>À la fin de septembre, Monsieur Proust, me dit-elle, se sentit plus
fatigué que d'habitude. Après une sortie vers la première semaine d’octobre, il
prit froid</i><span style="font-style: normal;">. </span><i>Il rentra avec un
fort mal de gorge. Le lendemain, il était enrhumé. Et une crise d’asthme
s’ensuivit. Il s’inquiéta de se voir si souffrant à cause de la correction de
son livre </i><span style="font-style: normal;">Albertine disparue</span><i>. Au
lieu de se soigner, il crut bon de redoubler d’ardeur au travail, craignant que
son état de santé ne l’empêcha de continuer la correction de ses épreuves.
Quelques jours de souffrance passèrent où il s’absorba dans son labeur. La
fièvre commencait à monter. Céleste insista pour qu’il appelât le Dr. Bize, son
médecin habituel. Trois jours plus tard, quand il vint sur son appel, le
docteur déclara, c’était vers le 15 octobre, que Marcel Proust n’avait encore
rien de grave, mais qu’ayant pris froid, il devait arrêter tout travail et se
soigner. À cette condition, il promettait la guérison dans huit ou dix jours. </i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>(…)</span><i>
Malgré la défense du docteur, malgré la fièvre, il s’habilla et voulut sortir à
la fin d’une après-midi. Ses forces le trahirent et il fut obligé de rentrer
presque aussitôt. Il remonta et s’allongea sur sa chaise longue, il était
transi de froid, grelottait et se sentit si mal qu’il dût regagner son lit. Il
demanda à Céleste une fumigation, et essaya de se remettre à la besogne en lui
défendant cependant de rallumer le feu. </i><span style="font-style: normal;">(…)
(30’15’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;">*</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>Émission 12</b> : Marcel Proust, éléments de sa personnalité (première diffusion : 25 novembre 1960) (même lien que ci-dessus, à partir de 41’25’’) </div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Pendant la première guerre mondiale, à l’été 1916, Marie
Scheikevitch organise la rencontre entre Walter Van Rensselaer Berry
(1859-1927), dit Walter Berry, diplomate américain <i>pro-français</i><span style="font-style: normal;"> et Marcel Proust. </span><i>Moi, qui ayant trouvé
dans sa bibliothèque deux petits volumes aux armes des Guermantes, j’avais
décidé de les faire rencontrer pour que Berry en fît cadeau à Marcel Proust.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Quand ces deux messieurs se rencontrèrent,
le contact fut pris immédiatement, et ce jour-là même ils ne purent pas se
quitter. Ainsi, nous passâmes toute la journée à la maison jusqu’au dîner et
nous nous sommes séparés seulement à deux heures du matin.</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;">
</span>(43’14’’)<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Roger Pillaudin : <i>Chaque connaissance était pour
Proust une source de documentation ?</i><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Marie Scheikevitch : <i>C’était un sujet d‘étude. Il
les perforait absolument de questions. Il les interrogeait d’une manière tout à
fait particulière. Il était désireux de se mettre à la disposition de ses
interlocuteurs plus tard, non seulement par des indications personnelles mais
aussi en leur procurant le contact d’aide qu’il connaissait, des gens, des
spécialistes, des questions qui les intéressaient.<o:p></o:p></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Roger Pillaudin : <i>Je crois que lorsque quelqu’un
l’intéressait, il n’hésitait pas à envoyer Odilon, le mari de Céleste chercher
la personne en question.<o:p></o:p></i></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Marie Scheikevitch : <i>Absolument. Il l’envoyait
d’autant plus qu’il disait à Odilon : _ Vous, vous n’êtes pas un sujet
intéressant pour moi. Puisque vous me dites à peu près la vérite. Mais il y a
là un personnage que j’ai déjà vu plusieurs fois et qui m’intéresse au plus
haut point. Cependant, jusqu’à présent, il ne m’a raconté que des mensonges. Et
il croit que je le crois. Hé bien, je vais le faire venir encore une fois,
allez le chercher. Et cette fois-ci, je vais faire écrouler son édifice de
mensonges, comme un château de cartes. </i><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Suivent une anecdote relative à un allume-cigarette reçu de
son frère parti au front que Proust s’empressa de demander à Marie Scheikevitch
pour le transposer quelque temps plus tard dans <i>Le temps retrouvé</i><span style="font-style: normal;">, les habitudes de l’écrivain dans son lit (la préparation du café toujours servi bouillant,
les fumigations, la finesse des tissus portés), sa passion pour les roses.<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoBodyText" style="text-align: justify;">
<i>Partout où il pénétrait, il y avait toujours un moment de
stupeur, parce que Marcel arrivait avec ce teint blafard de plante qui aurait
été dans un sous-sol n’est-ce pas, sous une cloche de verre. Il avait des yeux
extrêmement cernés, il était très élégamment habillé, mais un peu à l’ancienne
mode. Il avait une grande pelisse doublée de fourrure, il avait un magnifique
cache-nez blanc, des gants trop grands pour ses petites mains, il avait des
souliers qu’il n’avait pas mis depuis longtemps et qui craquaient </i>(…) <i>et puis
surtout il y avait quelque chose qui frappait : c’étaient les registres
différents de sa voix. Tantôt sa voix était éclatante et sonore, et tantôt
c’étaient des chuchotements de chapelles et il avait l’air de vous raconter des
secrets. Alors notre groupe paraissait très bizarre n’est-ce pas, les gens
autour de nous chuchotaient, ils ne disaient probablement pas grand chose. Mais
Marcel s’est levé brusquement et s’est dirigé vers le maître d’hôtel qui était
arrêté là. Il lui a dit : _ Monsieur, voulez-vous donner ma carte de visite
à ces messieurs qui sont là derrière nous et qui ont l’air de ne pas savoir qui
est Madame, je ne le supporterai pas, ils sont parfaitement inconvenants. </i>Une façon comme une autre de détourner l'attention tout en faisant montre d'une courtoisie extrême envers Marie Scheikevitch. <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-80808455792163052152017-10-04T05:22:00.000+02:002017-10-16T03:16:08.807+02:002/3 : Portraits et souvenirs par Marie Scheikevitch (émissions 7 à 9) (1960)<!--[if gte mso 9]><xml>
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<br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
<i>Se reporter à la lecture de ce précédent post pourrait ne pas être inutile : </i><br />
<i><br /></i></div>
<div style="text-align: center;">
- <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.fr/2017/09/12-portraits-et-souvenirs-par-marie.html" target="_blank">1/3 : Portraits et souvenirs par Marie Scheikevitch (émissions 1 à 6) (1960)</a><br />
<br />
*</div>
<br />
Suite des recensions des entretiens de Marie Scheikevitch avec Roger Pillaudin dont les premières diffusions remontent à l'été 1960. Comme observé <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.fr/2017/09/12-portraits-et-souvenirs-par-marie.html" target="_blank">dans les précédentes conversations</a>, Marie Scheikevitch, qui tenait salon au début du XXe siècle, alterne réactions spontanées et lectures de réponses manifestement préparées. L'auditeur qui savoure la reconstitution des moments marquants de sa vie ne peut manquer cependant de s'interroger quelquefois sur la réelle influence de la maîtresse de maison dans le monde. Ses « nombreux » courtisans, ses relations amicales systématiquement dénigrées par un bout ou un autre (physique, intérieur domestique) à l'exception d'Anna de Noailles, les confidences reçues des personnages les plus en vue servent toujours, en creux, sa personne, sa prestance, son entregent. Mais déposons là cette impression somme toute flottante pour laisser place aux résumés des émissions 7, 8, 9.<br />
<br />
<div style="text-align: center;">
*</div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/entretiens-avec-marie-scheikevitch-34-portraits-et-souvenirs-0" target="_blank"><b>Émission 7</b></a> : Les hommes politiques : Louis Barthou, Paul Painlevé, Joseph Paul-Boncour, Léon Bérard, Adrien Hébrard (première diffusion : 28 août 1960)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
La conversation du jour est dédiée au commerce entretenu par
Marie Scheikevitch avec les hommes politiques de son salon. À l’invitation de
Roger Pillaudin, c’est Louis Barthou (1862-1934), rencontré <i>vers 1905 ou 06</i><span style="font-style: normal;">, qui a les honneurs de sa première
description : </span><i>C’était un homme vif, combatif, très rageur, mais
avec un excellent cœur. Il n’était pas beau mais il était charmant.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Il se présentait avec des petits pas
très menus, il arrivait à vous tout d’un coup.</i><span style="font-style: normal;">
(…) </span><i>Il adorait beaucoup la musique. Il avait un théâtrophone chez lui
installé, et quand on voulait téléphoner à Madame Barthou le soir, il n’y avait
pas moyen parce que Monsieur Barthou écoutait soit </i>La Walkyrie<i> ou </i>Manon
Lescaut<i>, enfin n’importe.</i><span style="font-style: normal;"> (4’55’’) À la même
époque, Marie Scheikevitch rencontre Paul Painlevé (1863-1933) qui n’était
« qu’un » savant : </span><i>Il ne pouvait parler qu’avec
Einstein. D’ailleurs, il racontait chaque fois qu’il avait vu et qu’il s’était
entretenu avec Einstein, il venait m’expliquer tout ça, je n’y comprenais
goutte.</i><span style="font-style: normal;"> (9’15’’) Puis vint le temps
politique et celui d’une mystérieuse élection présidentielle perdue : </span><i>Il
n’avait pas cette sympathie que dégageait Monsieur Briand</i><span style="font-style: normal;"> [qui] (…) </span><i>plaisait sans faire exprès.</i><span style="font-style: normal;"> (10’48’’) Place à Paul-Boncour (1873-1972),
rencontré chez Madame de Caillavet en 1905 : </span><i>Je revenais du
midi. J’avais acheté à la gare de Marseille un petit livre qui était l’histoire
du syndicalisme et cetera</i><span style="font-style: normal;"> [sans doute </span><i>Les
syndicats de fonctionnaires</i><span style="font-style: normal;"> paru en 1906,
pourvu d’une préface d’Anatole France, ce qui pourrait expliquer les raisons de
cette emplette] (…). </span><i>C’était de Paul-Boncour. Le lendemain, je suis
allé dîner chez Madame de Caillavet et je vois arriver Paul-Boncour</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Il avait l’air d’un conventionnel. Il
en avait tellement l’air que j’ai suggéré à mon beau-frère François Sicard, le
sculpteur qui a fait un groupe pour le Panthéon, de le prendre comme type. </i><span style="font-style: normal;">(14’08’’) Suit la figure de Léon Bérard (1876-1960),
monté à Paris du pays landais. </span><i>C’était un garçon</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>grand, mince, avec un immense nez (et il
croyait qu’il ressemblait au Grand Condé), </i><span style="font-style: normal;">très
gai et de tempérament farceur. Il n’en cultive pas moins un sentiment
d’hostilité à l’égard de Louis Barthou (</span><i>ils ne pouvaient pas se
sentir ni l’un, ni l’autre</i><span style="font-style: normal;">), mu par leurs
positions politiques respectives, semble t-il opposées. </span><i>Mais l’homme
le plus spirituel et qui avait le plus d’esprit, c’était Adrien Hébrard </i><span style="font-style: normal;">(1833-1914), </span><i>le directeur du</i><span style="font-style: normal;"> Temps. </span><i>Ha ça ! Toutes les femmes
étaient folles d’Hébrard.</i><span style="font-style: normal;"> [Il] </span><i>arrivait
dans mon salon, tout le monde venait se mettre autour de lui. Il était petit,
presque bossu, il avait un petit ventre, il avait des mains khâgneuses,</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>il avait quatre cheveux qui se
baladaient comme ça, une grosse moustache, une dent dans la bouche, et malgré
tout, c’était l’homme le plus charmant. </i><span style="font-style: normal;">(…)
</span><i>Dès qu’il parlait, c’était un enchantement. Il pouvait dire n’importe
quoi, sa phrase retombait à point. Il avait tellement d’esprit - il a
dit : _ Je ne veux pas voir cette guerre - il est mort le 31 juillet
1914 : juste avant la déclaration de la guerre.</i><span style="font-style: normal;"> (20’05’’)</span><br />
<a name='more'></a><span style="font-style: normal;"><o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
*</div>
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>Émission 8 </b>: Aristide Briand (première diffusion : 4 septembre 1960) (même lien que ci-dessus, à partir de 22’32’’) (bien que numéralement séparé, le présent entretien se rattache directement au
précédent).<br />
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi4PRXeAxF9uLV9upRD8oiDU2q16lBgXs7J0pGI-woZ4hjb7CkPiiMZ36gMbg0YBCh_JA4STZWZMvuFbWkFArX6tcuUx6QJXyGvxPzbZwuukhcn50-WWp7iIRYJEc-eXvLRoEIh2TTwpWe3/s1600/steinlein+3+bis.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="596" data-original-width="850" height="448" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi4PRXeAxF9uLV9upRD8oiDU2q16lBgXs7J0pGI-woZ4hjb7CkPiiMZ36gMbg0YBCh_JA4STZWZMvuFbWkFArX6tcuUx6QJXyGvxPzbZwuukhcn50-WWp7iIRYJEc-eXvLRoEIh2TTwpWe3/s640/steinlein+3+bis.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">L'un des trois panneaux d'Alexandre Steinlein peint pour <i>La Taverne de Paris</i>, localisée au 3, avenue de Clichy, Paris 17e (1905). En haut de la fresque, un moulin coiffe une butte (Montmartre). En bas, les têtes des lambris sculptés. (voir <a href="http://ctgpublishing.com/taverne-de-paris-3-avenue-de-clichy/" target="_blank">cette photographie</a> pour un aperçu intérieur de la salle).</td></tr>
</tbody></table>
Conviés par le peintre Steinlein (1859-1923) à visiter ses
panneaux installés à <i>La Taverne de Paris</i>, Marie Scheikevitch,
Madame de Caillavet et Anatole France ont la surprise d’accueillir un invité à
leur table : <i>Monsieur Briand était assez grand, mince, la poitrine
creuse</i><span style="font-style: normal;"> (…), </span><i>des cheveux rejetés
en arrière avec des rouflaquettes, enfin l’air un peu hirsute</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>et il avait ses deux poches de veston
remplies de cigarettes</i><span style="font-style: normal;">. À cette époque
(1910), Aristide Briand </span>(1862-1932) <span style="font-style: normal;">est </span><i>le défenseur des grévistes du nord</i><span style="font-style: normal;"> et pique immédiatement la curiosité des convives.
Marie Scheikevitch est conquise par la simplicité de l’homme, modeste,</span><i>
très droit, d’une grande élévation de pensée.</i><span style="font-style: normal;">
(26’01’’) Elle raconte : </span><i>Les petits mots de Monsieur Briand
étaient toujours parfaits. Je peux dire par exemple, un jour, je passe avenue
Kleber </i><span style="font-style: normal;">[n°52, dans le 16<sup>e</sup>
arrondissement de Paris], (…), </span><i>je venais de l’exposition des tableaux
de Degas, (après</i><span style="font-style: normal;"> [sa]</span><i> mort)</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>et j’avais encore le catalogue.</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i> C’était tellement laid chez lui qu’on
ne savait pas où mettre l’œil.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Il
me dit : _ D’où venez-vous ? Ah, je vois… Eh bien, c’est abominable,
quelle horreur ! Je dis : _ Monsieur Briand, quand on a, au mur, son
portrait fait par un monsieur Brouillet</i><span style="font-style: normal;">,</span><i>
qu’on a cette vieille croûte, cette horreur, cette ordure, on n’a pas le droit
de parler de Degas. Il me dit : _ Mais vous savez, ce n’est pas de ma
faute, c’est Thomson qui m’a forcé de me faire faire mon portrait par André
Brouillet</i><span style="font-style: normal;">. [1857-1914] (27’57’’) </span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiAKTWue7efYQPb_8k5IRXM7vxX9SYodzNkslYolWTvAdNM6EpqyVFlSR3N5vmq7xgJY3BTn6rVfLhRPmbhLpPMaHCZmRlsSHrKDvrd8tusMfeoE5EY5fK3ON0B19xzJuCDEJA_9B53RuCG/s1600/brouillet+briand.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="1153" data-original-width="851" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiAKTWue7efYQPb_8k5IRXM7vxX9SYodzNkslYolWTvAdNM6EpqyVFlSR3N5vmq7xgJY3BTn6rVfLhRPmbhLpPMaHCZmRlsSHrKDvrd8tusMfeoE5EY5fK3ON0B19xzJuCDEJA_9B53RuCG/s640/brouillet+briand.jpg" width="470" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">André Brouillet, <i>Portrait de M. Aristide Briand </i>(reproduction photographique), 1909, conservé à la bibliothèque Carnegie de Reims (collection de portraits)<br />
(*<i>merci à la bibliothèque municipale de Reims pour son aide dans cette recherche</i>*)</td></tr>
</tbody></table>
<span style="font-style: normal;">Devenus
complices et sûrs l’un de l’autre, Marie Scheikevtich et Aristide Briand
entretiennent une relation d’amitié qui demeure intacte avec les années. Si
elle est heureuse de </span><i>lui donner les petits plats qu’il aimait, comme
à tous</i><span style="font-style: normal;"> [s]</span><i>es amis</i><span style="font-style: normal;">, il n’hésite pas à la mandater pour user de ses
charmes (un </span><i>service psychologique</i><span style="font-style: normal;">,
dit-elle…) auprès d’Émile Vandervelde (1866-1938), homme politique socialiste
belge au moment de la conférence de la paix à Paris. Aristide Briand sait aussi
se montrer prévenant et délicat dans les moments douloureux. Alors que Marie
Scheikevitch est malade (nous n’en savons pas davantage) et suit un traitement
coûteux, il ne tergiverse pas avant de lui faire porter les 10 000
francs qu’il a reçus de son prix Nobel. Puis : (visiblement émue) </span><i>Quand
mon frère a été tué le 15 septembre 1914 à Tracy-le-Val </i><span style="font-style: normal;">[Oise] </span><i>au 103<sup>e</sup> d’infanterie,
Monsieur Briand était à Bordeaux avec le gouvernement. Il m’a envoyé
immédiatement une dépêche.</i><span style="font-style: normal;"> (…) [I]</span><i>l
m’a donné la permission de faire des recherches sur 10 km 2</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>pour retrouver le corps de mon frère
qui malheureusement n’a pas été retrouvé, parce Tracy-le-Val et Tracy-le-Mont
ont été bouleversés de fond en comble.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>Ça,
je ne pourrais jamais l’oublier</i><span style="font-style: normal;">. (39’51’’)</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<div style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<span style="font-style: normal;">*</span></div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>Emission 9</b> : Marcel Proust (première diffusion : 11 septembre 1960) (même lien que ci-dessus, à partir de 42’17’’) </div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiBgfhWs2SeRUT1qrE-eMoMIxHlZNjqdpX-USp2yP10A31bi83q6sv75bzg0J0yvGIOYlC6AQT2Mh9sPrU4Mypz2zvHSfNF3gtfGnyFRwZtcMqxlKwxsHLFCTenuZ3nqhYHQfXljGqnGHRH/s1600/proust+encadre%25CC%2581.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="1140" data-original-width="850" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiBgfhWs2SeRUT1qrE-eMoMIxHlZNjqdpX-USp2yP10A31bi83q6sv75bzg0J0yvGIOYlC6AQT2Mh9sPrU4Mypz2zvHSfNF3gtfGnyFRwZtcMqxlKwxsHLFCTenuZ3nqhYHQfXljGqnGHRH/s640/proust+encadre%25CC%2581.jpg" width="476" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Première interview de Marcel Proust (par lui-même) signée Élie-Joseph Bois, parue dans le journal <i>Le Temps </i>le 13 novembre 1913 (page 4). À lire <a href="https://www.hostingpics.net/viewer.php?id=775743proustde769coupe.jpg" target="_blank">en cliquant sur ce lien</a> (remodelée par mes soins). Tous les numéros du <i>Temps</i> sont en accès libre et téléchargeables <a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k241617g.item" target="_blank">depuis la base de données Gallica</a> (B.N.F.) </td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
En novembre 1913, est publié <i>à compte d’auteur</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>Du côté de chez Swann</i><span style="font-style: normal;">, le premier volume d’</span><i>À la recherche du
temps perdu</i><span style="font-style: normal;">. Marcel Proust (1871-1922), qui </span><i>s’occupait
très activement de sa propre publicité</i><span style="font-style: normal;">
(Roger Pillaudin), fait appel à toutes ses relations pour satisfaire son
entreprise. Marie Scheikevitch est de celles-ci, qui demande à Adrien Hébrard (cf.
émission 7), directeur du journal </span><i>Le temps</i><span style="font-style: normal;">, d’accorder dans le mois un papier à son ami : </span><br />
<span style="font-style: normal;">Marie Schekevitch : Le temps </span><i>n’avait
pas l’habitude faire paraître des interviews d’auteur qui n’avait pas encore
produit des œuvres importantes. Et en plus de ça, j’avais obtenu que des
extraits de </i><span style="font-style: normal;">Du côté de chez Swann </span><i>paraissent
avant la publication du livre - cela ne s’était jamais fait.</i><span style="font-style: normal;"> <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Roger Pillaudin : <i>Qui fut chargé de cet entretien
avec Marcel Proust pour </i><span style="font-style: normal;">Le temps ? <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Marie Scheikevitch : _ <i>Hé bien, monsieur Hébrard a
choisi un de ses rédacteurs : Joseph-Élie Bois</i><span style="font-style: normal;"> [ou Élie-Joseph Bois en regard de sa signature] </span><i>qui plus
tard devint le directeur du</i><span style="font-style: normal;"> Petit parisien.
</span><i>Cet entretien sans doute est remarquable puisqu’il a été presque
entièrement rédigé par Marcel Proust lui-même</i><span style="font-style: normal;">.
<o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Roger Pillaudin : <i>Il parut dans</i><span style="font-style: normal;"> Le temps </span><i>le 12 novembre 1913</i><span style="font-style: normal;"> [il s’agit en réalité du jeudi 13 novembre 1913]. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Marie Scheikevitch : _ <i>Joseph-Elie Bois était de
ceux qui a tout de suite compris l’intérêt<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>principal du livre. Il n’a pas hésité à en programmer
l’originalité et la grande valeur. C’est-à-dire qu’ayant passé presque tout
l’après-midi avec Marcel Proust, quand il est rentré chez lui, il a lu jusqu’au
matin toute son œuvre. Marcel lui avait prêté un volume</i><span style="font-style: normal;">, (…) </span><i>il a été absolument enthousiasmé.
Mais son article a voyagé plusieurs fois entre son domicile et le boulevard
Haussmann parce que Proust ajoutait toujours quelque chose</i><span style="font-style: normal;">. (43’32’’) <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<span style="font-style: normal;"><br /></span></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzk3k1dK1UguGr4waOgwF7P3ouFWu1gLmz1u1WPrAx5CFq0XxpD6xQKAiyV_fyMpZxKqxbpC1kU9v-jnhu5G_WI8neMBQ2Eml74ClPSsrAqnRfDbhu18LN89Dr0AaxOi5MxQp5BW1Ge_lt/s1600/critique+encadre%25CC%2581+proust.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="1132" data-original-width="850" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzk3k1dK1UguGr4waOgwF7P3ouFWu1gLmz1u1WPrAx5CFq0XxpD6xQKAiyV_fyMpZxKqxbpC1kU9v-jnhu5G_WI8neMBQ2Eml74ClPSsrAqnRfDbhu18LN89Dr0AaxOi5MxQp5BW1Ge_lt/s640/critique+encadre%25CC%2581+proust.jpg" width="480" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Première critique de <i>Du côté de chez Swann </i>signée Paul Souday<i>, </i>parue dans le journal<i> Le temps</i> le 10 décembre 1913 (page 3). À lire <a href="https://www.hostingpics.net/viewer.php?id=301570se769lectionproust.jpg" target="_blank">en cliquant sur ce lien</a> (les rédacteurs du site Internet de France Culture feraient bien de lire le passage sur l'orthographe dans la deuxième colonne) Tous les numéros du <i>Temps</i> sont en accès libre et téléchargeables <a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k241644c.item" target="_blank">depuis la base de données Gallica</a> (B.N.F.)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
La parution de ce premier entretien ne signe pas
l’approbation pleine et entière de l’auteur de <i>La recherche</i><span style="font-style: normal;"> aux yeux des rédacteurs du </span><i>Temps</i><span style="font-style: normal;">. À en croire Marie Scheikevitch, un autre personnage
restait à </span><i>dompter</i><span style="font-style: normal;"> : </span><i>c’était
monsieur Paul Sauday. Monsieur Hébrard n’imposait jamais quoi que soit à ses
rédacteurs. Cependant pour me faire plaisir, il a rappelé plusieurs fois à
monsieur Souday qu’il devrait lire</i><span style="font-style: normal;"> Du côté
chez Swann </span><i>et en parler. Et en effet, le 10 décembre 1913, le
feuilleton du Temps analysait </i><span style="font-style: normal;">Swann. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Roger Pillaudin : <i>Comment cela ?</i><span style="font-style: normal;"> <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Marie Scheikevitch : _ <i>Hé bien, j’ai l’impression
que ce n’était pas très favorable. Naturellement, il en reconnaissait beaucoup
la valeur, seulement il lui faisait de grandes critiques parce qu’il pensait
que c’était une œuvre à peu près complète.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Il ne savait pas du tout que c’était le commencement d’une
vaste fresque</i><span style="font-style: normal;">. [souvenir très juste
notamment illustré par cette phrase du critique : « Il nous semble que le gros
volume de M. Marcel Proust n’est pas composé et qu’il est aussi démesuré que
chaotique, mais qu’il renferme des éléments précieux dont l’auteur aurait pu
former un petit livre exquis »] <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Roger Pillaudin : <i>J’imagine qu’en remerciement, vous
avez reçu de Marcel Proust témoignage de son affection</i><span style="font-style: normal;">. <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Marie Scheikevitch : _ <i>Oh ! J’ai reçu quelque
chose de tellement précieux que je ne peux pas dire que c’est un témoignage de
reconnaissance : j’ai été comblée</i><span style="font-style: normal;">.
Suit la lecture de la lettre reçue. (45’10’’) <o:p></o:p></span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Les efforts de Marcel Proust pour la promotion de son livre
ne sont pas immédiatement récompensés, loin s’en faut. Balançant entre
consternation et étonnement, une partie de ses lecteurs reste interdite devant
la nouveauté de son style (<i>il écrit en allemand, il n’écrit pas en français</i><span style="font-style: normal;">,</span><i> </i><span style="font-style: normal;">s’entend-elle
dire). Cette circonspection, Marie Scheikevitch ne l’a pas oubliée, elle qui
était </span><i>folle</i><span style="font-style: normal;"> du premier tome au
point de le </span><i>relier dans du parchemin blanc</i><span style="font-style: normal;">. Un jour que Proust lui </span><i>disait son découragement et le peu
d’intérêt que présentait tout effort littéraire</i><span style="font-style: normal;">, elle eut la primeur de recevoir un avant-goût des tomes à
venir : _ </span><i>Hé bien, murmura t-il, puisque vous voulez bien savoir
ce qu’Odette est devenue, prêtez-moi votre exemplaire, et je vais vous résumer
la suite de mon œuvre. C’est ainsi qu’il m’écrivait en manière de préface les
pages que voici : « Réponse d’outre-tombe aux critiques
notamment à Louis de Robert et Benjamin Crémieux qui discutaient la question de
savoir si Marcel Proust avait fait un plan d’ensemble </i><span style="font-style: normal;">: </span><i>Madame, vous voulez savoir ce que Madame
Swann est devenue en vieillissant. C’est assez difficile à vous résumer. Je
peux vous dire qu’elle est devenue plus belle.</i><span style="font-style: normal;">
(…) [lettre datée du début novembre 1915 à écouter à partir de 53’10’’]</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
<div style="text-align: center;">
*<br />
<br /></div>
<div style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;"><b>Poursuivez votre lecture :</b> <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.fr/2017/10/33-portraits-et-souvenirs-par-marie.html" target="_blank">3/3 : Portraits et souvenirs par Marie Scheikevitch (émissions 10 à 12) (1960)</a></span></div>
</div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-3341434589458900682017-09-25T03:32:00.000+02:002017-10-08T18:15:06.648+02:001/3 : Portraits et souvenirs par Marie Scheikevitch (émissions 1 à 6) (1960)<!--[if gte mso 9]><xml> <w:WordDocument> <w:Zoom>0</w:Zoom> <w:HyphenationZone>21</w:HyphenationZone> <w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery>0</w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery> <w:DisplayVerticalDrawingGridEvery>0</w:DisplayVerticalDrawingGridEvery> <w:UseMarginsForDrawingGridOrigin/> </w:WordDocument> </xml><![endif]--> <!--StartFragment--> <br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Des pépites radiophoniques. Les douze entretiens de vingt minutes livrés par Marie Scheikevitch à Roger Pillaudin en 1960 sont un voyage dans le temps. Au long de descriptions délicates, émues et piquantes, l’ancienne femme du monde alors âgée de 78 ans revient sur sa découverte des salons parisiens et déplie avec pédagogie les us et coutumes d’une époque révolue. À travers les portraits de femmes et d’hommes illustres qui ont marqué de leur personne (comme modèle) ou de leur œuvre l’histoire des arts, Marie Scheikevitch (1882-1964) offre à l’auditeur de se plonger en pensée dans <i>un 1900 littéraire et peintre, parfois scientifique </i><span style="font-style: normal;">en lui ouvrant une porte sur </span><i>un salon doré à la feuille où s’inclinent des fantômes en concile</i><span style="font-style: normal;">. J’arrête ici les quelques citations empruntées à la magnifique introduction aux entretiens écrite par Armand Lanoux (1913-1983) (cf. la première émission) qui a le mérite d’envoyer paître le grossier préambule de Christine Goémé pour vous proposer, ci-dessous, un résumé des six premiers entretiens.</span><br />
<br />
<div style="text-align: center;">
*</div>
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/entretiens-avec-marie-scheikevitch-14-portraits-et-souvenirs" target="_blank"><b>Émission 1</b></a> : l'enfance et l'arrivée à Paris (première diffusion : 17 juillet 1960)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Née dans le quartier de Petrovka à Moscou en 1882, Marie Scheikevitch quitte la Russie à l’âge de <i>neuf ou dix ans</i><span style="font-style: normal;"> pour Paris, où elle est élevée dans le </span><i>respect de tous les Beaux-Arts</i><span style="font-style: normal;"> grâce à son père, grand collectionneur de gravures (celui-ci possédait </span><i>tous les Dürer, tous les Rembrandt, tout le XVIIIe en couleurs, tous les petits maîtres hollandais</i><span style="font-style: normal;">). Alors qu’elle ne sait rien des hommes et étudie la philosophie, elle se fiance à Carolus-Duran (Pierre) qui déploie un arsenal de lettres (écrites par sa mère...) et de déclarations romantiques pour arriver à ses fins. Hélas, trois jours avant le mariage, son père lui apprend que son volage de promis a déjà englouti la dot dans l’achat d’</span><i>un collier de perles</i><span style="font-style: normal;">… destiné à une autre (Mariette Sully vraisemblablement, chanteuse de l’opérette </span><i>Véronique</i><span style="font-style: normal;">, d’André Messager, 1898). Mise en garde, elle se marie néanmoins contre l’avis de sa famille mais déchante bientôt : </span><i>J’ai essayé de me suicider en me tirant des coups de revolver…<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>qui ne m’ont pas tuée mais qui dans l’inconnu ont déclenché des sympathies et des affections que je ne soupçonnais pas. C’était en 1905. Tout de même, j’ai patienté cinq ans et demi, presque six ans avec mon mari. J’espérais toujours que j’allais le transformer. Mais on ne transforme pas un caractère fait</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>J’ai fait ça à Paris même, dans le taxi qui me conduisait rue de l’Université.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>J’ai fait ça sur la place de la Concorde. Le chauffeur a entendu des coups. Il a cru que c’étaient des pneus qui éclataient. </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>J’étais absolument décidée de me supprimer</i><span style="font-style: normal;">. (19’40’’) Elle a 21 ans.</span><br />
<a name='more'></a></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<span style="font-style: normal;">*</span></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b>Émission 2</b> : Anatole France (première diffusion : 24 juillet 1960) <o:p></o:p>(même lien que ci-dessus, à partir de 23’20’’)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
L’accident tragique ne passe pas inaperçu (<i>Tout d’un coup, on a commencé à s’intéresser à moi</i><span style="font-style: normal;"> (24’20’’)). Mieux, il constitue le point de départ d’une cascade de rencontres qui introduisent Marie Scheikevitch dans « le monde ». Voici comment : après le suicide raté dont elle a vent, </span><i>Madame de Saint-Marceaux téléphon</i>[e]<i> pour demander si son fils Baugnies<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>ne pourrait pas faire mon portrait. Et alors, à partir d’un moment, je suis entré dans un premier salon. Vous savez, c’est une boule de neige</i><span style="font-style: normal;">. (25'13’’) Curieuse des </span><i>gens de lettres</i><span style="font-style: normal;"> et fervente admiratrice d’Anatole France, le comte Primoli lui offre d’intégrer ensuite le cercle de<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Madame de Caillavet, égérie de l’écrivain, notamment pour son roman </span><i>Le lys rouge</i><span style="font-style: normal;">. L’impayable description qu’elle donne de Léontine Lippmann (son nom de jeune fille) mérite une transcription intégrale : </span><i>J’ai vu une vieille femme effondrée avec la bosse des vieilles femmes, avec des ongles comme ça, n’est-ce pas, avec des yeux bleus globuleux<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>- vous avez vu ses photographies ? Avec des petits chichis attachés, des cheveux acajou d’une couleur invraisemblable, avec un bibi extraordinaire sur la tête et ficelé comme je ne sais pas quoi, des mains crispées, couvertes de bagues multicolores et d’un goût affreux. Une vieille robe de soirée pour sortir l’après-midi, vous comprenez, avec des pampilles et des machines comme ça, un petit chapeau ridicule, dadadadada comme ça, deux dents qui manquaient par-devant, là, enfin, quelque chose d’horrible ! Et je me disais : si c’est ça l’égérie d’Anatole France, comment est-il ?</i><span style="font-style: normal;"> (26’30’’) <o:p></o:p></span></div>
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Suivent : l’engagement financier de Madame de Caillavet envers Anatole France, leurs opinions politiques divergentes et les disputes qui en découlent (<i>Monsieur France n’a jamais eu aucune pensée profonde. Monsieur France, c’est une pièce montée</i><span style="font-style: normal;"> (32’22’’)), les troussages dont l’écrivain est coutumier, la mort de la salonnière et le refuge de son protégé dans les bons soins (temporaires) de Marie Scheikevitch.<o:p></o:p></span></div>
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<b>Émission 3</b> : Jules Lemaitre (première diffusion : 31 juillet 1960) (même lien que ci-dessus, à partir de 42’55’’)</div>
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La troisième émission est l’occasion de revenir en détail sur la relation d’amitié qui a uni Jules Lemaitre (1853-1914) à Marie Scheikevitch. Rencontré en 1905 chez Madame de Saint-Marceaux qui recevait le vendredi à dîner dans son hôtel particulier du 100 boulevard Malesherbes (<i>c’étaient des invités très « select »</i><span style="font-style: normal;"> (44’19’’)), Jules Lemaitre bénéficie encore en ce temps du soutien et de la protection de Madame de Loynes (1837-1908). À l’instar de Madame de Caillavet pour Anatole France, celle-ci </span><i>lui suggérait des idées de pièces et de romans </i><span style="font-style: normal;">[tout en étant] </span><i>beaucoup plus impérative que Madame de Caillavet </i><span style="font-style: normal;">[qui]</span><i> était en adoration devant Anatole France</i><span style="font-style: normal;"> (…). </span><i>Très gracieuse, très fine, très déliée et très élégante</i><span style="font-style: normal;">, Madame de Loynes sait impressionner Jules Lemaitre - </span><i>pauvre petit professeur du Havre </i><span style="font-style: normal;">- par quantité d’égards en </span><i>l’installant dans son hôtel</i><span style="font-style: normal;">, lui faisant </span><i>voir les hommes les plus illustres</i><span style="font-style: normal;">, avant de l’asseoir dans un fauteuil d’académicien. Pour autant, et Roger Pillaudin ne manque pas de le faire rappeler à Marie Scheikevitch, </span><i>le monde se moquait un peu</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>d’elle :</i><span style="font-style: normal;"> _ </span><i>Oh, mais naturellement ! On la tenait à côté, c’était somme toute ce qu’on appelait un demi-castor</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i> </i><span style="font-style: normal;">(51’42’’), autrement dit une femme </span><i>qui avait un mari, un amant, qui alimentaient la maison d’une manière invisible</i><span style="font-style: normal;">. <o:p></o:p></span></div>
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Au cours de ce numéro sont également exposés l’antisémitisme de Madame de Loynes, anti-dreyfusarde convaincue, la fatuité d’Edmond Rostand, les fréquentations diverses de Jules Lemaitre (de Jean Cocteau à <i>Myriam Harry qui l’a tué par des pratiques physiques que vous pouvez imaginer</i><span style="font-style: normal;"> et à qui il a tout légué (58’30’’)) et l’histoire de la tiare de Saïtapharnès.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span></span><br />
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<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiUD0VxhOxewnES1G70yQEyF5lN1eHsCbKQkSTjZW5ICUET_I0QJpPp-pTvwSEXAmmGBdxzTNWvjr7hgJ9C6gzGRCr3si_5FJ1pTVbXx7VQJtYtQCINdVcCPrNTSOu83MRstO-aIn9QogP1/s1600/mme+de+Loynes.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="689" data-original-width="548" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiUD0VxhOxewnES1G70yQEyF5lN1eHsCbKQkSTjZW5ICUET_I0QJpPp-pTvwSEXAmmGBdxzTNWvjr7hgJ9C6gzGRCr3si_5FJ1pTVbXx7VQJtYtQCINdVcCPrNTSOu83MRstO-aIn9QogP1/s640/mme+de+Loynes.jpg" width="508" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><span class="Apple-style-span" style="font-size: x-small;">Amaury-Duval, <i>Madame de Loynes</i>, huile sur toile, 1862, (legs de Jules Lemaitre, 1914), <a href="http://www.musee-orsay.fr/fr/collections/catalogue-des-oeuvres/notice.html?no_cache=1&nnumid=1029&cHash=c08816d5da" target="_blank">Musée d'Orsay</a>, Paris</span></td></tr>
</tbody></table>
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<b><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/entretiens-avec-marie-scheikevitch-24-portraits-et-souvenirs" target="_blank">Émission</a><a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/entretiens-avec-marie-scheikevitch-24-portraits-et-souvenirs" target="_blank"> 4</a></b> : Gabriele D’Annunzio (première diffusion : 07 août 1960)<o:p></o:p></div>
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C’est par le truchement d’un objet envoyé à Marie Schekevitch en 1920 par Gabriele d’Annunzio (1863-1938) que débute l’entretien : <i>«</i> <i>Il y a une personne à Paris que j’aime par dessus tout (je m’excuse de ce peu de modestie, </i><span style="font-style: normal;">glisse t-elle</span><i>), c’est Marie « la blanche ». Voulez-vous</i><span style="font-style: normal;"> (la lettre s'adresse à la femme de Marcel Boulanger et à une autre femme) </span><i>lui remettre de ma part l’étoile de Fiume qui est un ordre que j’ai fondé après avoir survolé Fiume</i><span style="font-style: normal;"> </span><i>? »</i><span style="font-style: normal;"> (4’02’’) Après Jules Lemaitre </span><i>en adoration devant</i><span style="font-style: normal;"> [elle], c’est à un deuxième homme que Marie Scheikevitch refuse les avances vers 1911 : </span><i>dès le premier jour, je lui dis que pas un cil de ma personne ne serait jamais amoureux de lui</i><span style="font-style: normal;">, </span><i>Dieu merci</i><span style="font-style: normal;">. Rencontré par hasard chez le comte Primoli (1851-1927), </span><i>l’homme le plus mondain qui soit</i><span style="font-style: normal;">, Gabriele D’Annunzio est précédé de sa légende : </span><i>On avait dit qu’il était né dans une parencelle au bord de l’Adriatique balancé par les vents et cetera</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Sa mère s’est écriée quand il est né : qu’est-ce qui va t’arriver mon fils, tu es né un jour de mars et un vendredi : tu vas faire de grandes choses</i><span style="font-style: normal;">. (8’55’’) Dépeint par Marie Scheikevitch comme un homme endetté, coureur invétéré et travailleur acharné, D’Annunzio crée </span><i>Le Martyre de Saint-Sébastien</i><span style="font-style: normal;"> en 1911, œuvre qui étonna par sa maîtrise du vieux français. Mais encore : quelques jours avant sa représentation, </span><i>l’archevêque de Paris avait lancé un mandat pour interdire aux fidèles d’assister à cette représentation</i><span style="font-style: normal;">. <o:p></o:p></span></div>
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Dans ce portrait un peu répétitif que l’on aurait souhaité par ailleurs plus consistant, d’autres considérations tout aussi légères informent l’auditeur, qu’elles soient d’ordre physique (<i>il n’avait pas de jolies dents, mais il avait un charmant sourire malgré tout</i><span style="font-style: normal;">), amical (c’était un farceur) ou mondain.<o:p></o:p></span></div>
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<b>Émission 5</b> : Anna de Noailles (première diffusion : 14 août 1960) <o:p></o:p>(même lien que ci-dessus, à partir de 22’26’’)</div>
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Marie Scheikevitch rencontre Anna de Noailles en 1899, à l’âge de 14 ans, par l’intermédiaire de son amie Amélie Cruppi, fille du futur ministre des affaires étrangères Jean Cruppi (1855-1933) et dont la femme (Louise Crémieux), musicienne, organisait des réunions dans son grand appartement du 80 rue de l’université : <i>Un jour, je suis arrivée pour goûter - je goûtais plutôt dans la chambre de mon amie, qui m’a dit : _ Ecoute, écoute, il faut aller au salon, il y a les deux merveilleuses sœurs qui viennent d’arriver ! J’ai dit :_ Qui ça ? Elle m’a dit : _ La comtesse Mathieu de Noailles - la célèbre Anna de Noailles qui est un grand poète - et sa sœur, la charmante Hélène de Chimay. Alors, je suis entrée et j’ai vu un petit être, tout petit, mais qui avait une allure extraordinaire. C’était un petit aigle. Elle avait le plus joli visage pâle qu’on puisse imaginer avec d’énormes yeux que tout le monde croyait être noirs et elle aimait à dire : _ Regardez mes yeux, vous voyez bien, ils sont gris</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>Elle avait une bouche, tout ce qu’il y a de plus mobile. Elle parlait avec une telle volubilité que personne ne pouvait ni la contredire, ni la faire taire.</i><span style="font-style: normal;"> (…) </span><i>On pouvait être aussi charmé qu’effrayé de ce qu’elle disait parce qu’elle n’avait peur de rien.</i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>(…) </span><i>Rien qu’en respirant, elle attrapait les choses. Je l’ai vue plus tard prendre un livre, ne pas le lire, le humer et savoir ce qu’il y avait dedans.</i><span style="font-style: normal;"> (24’40’’) De la taille de ses mains à la forme de sa bouche en passant par les modulations de sa voix jusqu’à son sens de l’observation, la figure d’Anna de Noailles </span>(1876-1933)<i> </i><span style="font-style: normal;">se trace dans le souvenir de Marie Scheikevitch comme au premier jour. C’est vers l’âge de 20 ans cependant qu’elle la fréquente régulièrement, subissant les assauts de ses questions diverses et insistantes au pied de son lit : </span><i>Elle voulait tout voir et tout connaître par elle-même</i><span style="font-style: normal;">. Une force de caractère qui la dote d’une aura qui lui permettra d’user d’un pouvoir d’influence, notamment politique, au bénéfice de ceux qu’elle protège.</span></div>
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<span class="Apple-style-span"><b>Émission 6</b> : Anna de Noailles « et les autres » (première diffusion : 21 août 1960) <o:p></o:p>(même lien que ci-dessus, à partir de </span>(42’03’’)</div>
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Dans le prolongement de l’émission qui précède, le producteur Roger Pillaudin propose à Marie Scheikevitch d’embrasser un panorama des personnalités illustres rencontrées (de gré ou de force) par Anna de Noailles. Le bal est ouvert par Alexandre Kerenski (1881-1970), acteur de la révolution russe réfugié à Paris en 1918 après avoir été chassé de la tête du gouvernement provisoire par le Parti bolchévique. <i>Dès que Madame de Noailles a su que les journaux ont annoncé son arrivée à Paris, elle m’a téléphoné. Elle m’a dit : _ Il faut me l’amener.</i><span style="font-style: normal;"> (43’30’’) À en croire le récit fait par Marie Scheikevitch et d’autant mieux remémoré qu’elle a assuré la traduction de la conversation entre les différents intervenants, Kerenski est resté coi devant les questions (pour ne pas dire l’interrogatoire) de la comtesse, escortée pour l’occasion de Maurice Barrès et d’Edmond Rostand. S’ensuivent quelques propos relatifs à l’écriture d’Anna de Noailles </span><i>qui aimait à dire que toute sa poésie était sortie du piano de sa maman</i><span style="font-style: normal;">, <a href="http://gw.geneanet.org/garric?lang=fr&p=michel+constantin&n=bibesco+bassaraba+de+brancovan" target="_blank">Rachel Musurus</a> (1847-1923) qui</span><i> jouait de manière absolument remarquable, en très grande artiste</i><span style="font-style: normal;"> mais, </span><i>très nerveuse, très susceptible, très impressionnable</i><span style="font-style: normal;"> (…)</span><i> elle n’admettait pas qu’on l’écoutât. Il fallait s’éloigner dans une pièce voisine pour l’entendre jouer. </i><span style="font-style: normal;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Anna de Noailles </span><i>disait ses vers de manière tout à fait uniforme. Elle détestait les porte-voix. </i><span style="font-style: normal;">(…) </span><i>Elle exhalait comme un petit parfum discret d’héliotrope. </i><span style="font-style: normal;">(55’54’’)</span><br />
<span style="font-style: normal;"><br /></span>
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<span style="font-style: normal;"><b>Poursuivez votre lecture :</b> <a href="http://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.fr/2017/10/23-portraits-et-souvenirs-par-marie.html" target="_blank">2/3 : Portraits et souvenirs par Marie Scheikevitch (émissions 7 à 9) (1960)</a></span></div>
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<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-87495080594057830252017-08-16T10:48:00.001+02:002017-10-08T18:15:54.728+02:00Paul Klee et Monsieur la Mort, de Célia Houdart : L'atelier fiction (10 mars 2015)<!--[if gte mso 9]><xml> <w:WordDocument> <w:Zoom>0</w:Zoom> <w:HyphenationZone>21</w:HyphenationZone> <w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery>0</w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery> <w:DisplayVerticalDrawingGridEvery>0</w:DisplayVerticalDrawingGridEvery> <w:UseMarginsForDrawingGridOrigin/> </w:WordDocument> </xml><![endif]--> <!--StartFragment--> <br />
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Avant d’en juger le résultat, saluons l’excellente idée de <i>L’Atelier fiction</i> d’avoir passé commande à Célia Houdart d’une pièce radiophonique entrant en résonance avec le Journal de Paul Klee, intitulée : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/latelier-fiction/paul-klee-et-monsieur-la-mort-journal-imaginaire-1915-1917" target="_blank">Paul Klee et Monsieur la Mort - Journal imaginaire 1915-1917</a> (première diffusion le 10 mars 2015). Selon la note d’intention de l’auteur publiée <a href="http://www.celiahoudart.com/2015_Paul_Klee_et_Monsieur_la_Mort" target="_blank">sur son site</a>, <i>il ne s’agit pas d’une adaptation du Journal de Paul Klee, mais d’un texte composite, entre journal intime, notes d’atelier et danse macabre.</i> Une bien vague façon de décrire son objet…<o:p></o:p></div>
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Marcher dans les pas de l’écrivain Paul Klee est une gageure : la traduction donnée à lire par Pierre Klossowski est d’une telle splendeur ! Les années choisies par Célia Houdart pour sa composition (1915, 1916, 1917) ne représentent qu’une quinzaine de pages dans la collection « Les Cahiers Rouges » chez Grasset (pages 328 à 343) et terminent le <i>Journal</i> dans son segment principal (vient ensuite un appendice). Le lecteur qui jusqu’ici suivait précisément le récit des journées du diariste est soudainement dépourvu de repères réguliers. Seules des indications de mois et de saisons, plus rarement de jours, ponctuent les années, si bien qu’il est difficile de comprendre si Klee a harmonisé des bouts de notes épars <i>a posteriori</i> ou s’il a synthétisé des souvenirs laissés dans sa mémoire après une longue période.<br />
<a name='more'></a><o:p></o:p></div>
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Dans l’introduction de la pièce, Aurélie Charon dit : <i>Célia Houdart imagine un journal fictif des années 1915 à 1917. Dans le vrai Journal que Paul Klee a tenu toute sa vie, il y a des ellipses, des trous, des blancs, des suspens. Célia Houdart se glisse dans l’espace laissé tout en respectant les silences de Paul Klee</i> (0’30’’). Rien de plus faux que cette hypothèse qui mériterait d’être étayée pour tenir debout. De quoi parle Charon ? Quelles ellipses ? Quels trous ? Quels silences ? Quelles règles président à l’écriture d’un journal ? Il semble plutôt que l’auteur ait puisé à la source de lettres envoyées et reçues par Paul Klee, qu’elle se soit imprégnée des œuvres et photographies produites à l’époque et qu’elle ait pris appui sur des éléments concrets du <i>Journal</i> pour forger sa création.<o:p></o:p></div>
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La pièce radiophonique est placée sous le patronage de : Monsieur la Mort, une « poupée de théâtre guignol », selon la dénomination du Zentrum Paul Klee de Bern, qui <i>fait partie d’un ensemble que Klee commence en 1916, pour le neuvième anniversaire de son fils Felix, qui s’était pris de passion pour le Kasperltheater – l’équivalent bavarois du théâtre de Guignol. À la première série de huit poupées à gaine, accompagnées d’un castelet fait d’un cadre et de décors en tissu, viennent s’ajouter de nouveaux personnages qui se sont affranchis du seul Kasperltheater. Jusqu’en 1925, Klee crée plus de cinquante figures. Pendant les années où il enseigne au Bauhaus de Weimar, ces créations sont plus abouties et deviennent les protagonistes de représentations animées avec succès par Felix - alors étudiant dans l’atelier de menuiserie - au cours desquelles est parodiée la vie de l’école. Parmi la collection, plusieurs marionnettes ont disparu, ainsi que le petit théâtre ; seules trente d’entre elles sont conservées à Berne, au Zentrum Paul Klee. Les originaux, très fragiles, ont fait l’objet de répliques, initiées en 2003-2004 par la Paul-Klee-Stiftung</i> (Camille Morando dans le catalogue de l’exposition tenue au Centre Pompidou du 06 avril au 1<sup>er</sup> août 2016, p. 122).<o:p></o:p></div>
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<i>Une tête de marionnette. Yeux comme deux larges cratères. Maxillaires inférieures protégées par une mentonnière de cuir blanc. Double rangée de dents sur toute la longueur du visage. Lorsqu’elle parlera, les mots paraîtront traverser les barreaux d’une grille. Longue tunique en gros coton beige, rêche, trouvée dans une mercerie qui vendait pour rien des fins de rouleaux de tissus pour torchons. </i>(8’45’’)<o:p></o:p></div>
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<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgs2fRVLpwDmdvD4NkylNgUVgTa023iRXJXAGnRlWTI9l4etz_-eV4ITlnft3jAHaba9g4WkijEg9EV8EJOHeKFBE7bPveJUJQTfPk7IxEm9l237ecLeU1lmAfUuicvnAkl4rxQaG4V6QzR/s1600/Kl2.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="560" data-original-width="855" height="418" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgs2fRVLpwDmdvD4NkylNgUVgTa023iRXJXAGnRlWTI9l4etz_-eV4ITlnft3jAHaba9g4WkijEg9EV8EJOHeKFBE7bPveJUJQTfPk7IxEm9l237ecLeU1lmAfUuicvnAkl4rxQaG4V6QzR/s640/Kl2.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Paul Klee, <i>Sans titre (Monsieur la Mort)</i>, poupée de théâtre guignol, 1916, Zentrum Paul Klee, Bern</td></tr>
</tbody></table>
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La création de ces marionnettes et leur animation par Felix dans des pièces qu’il imagine sont le fil rouge du journal fictif de Célia Houdart. Mais leur figure de proue, « Monsieur la Mort », contextualise aussi l’époque dans laquelle ce petit théâtre voit le jour : la première guerre mondiale, incarnée notamment par les lettres, les visites et la mort de Franz Marc. En voici les occurrences dans le texte imaginé, comparées quand c’est possible avec le vrai <i>Journal</i> (<b>en gras</b>) :</div>
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Célia Houdart : <o:p></o:p></div>
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<i>19 octobre 1915 :</i> (...)<i> Franz</i> (…)<i> reste convaincu du bien fondé de la guerre. Sentiment presque mystique que j’essaye en vain de raccorder aux idées qui nous lient. Effet dissolvant de la vie de régiment sur la pensée.</i> (4’42’’)<o:p></o:p></div>
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<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>26 octobre 1915 : Coup de téléphone de Franz Marc : inaudible, grésillements, phrases tronquées. Je reconnais la voix de mon ami, sa façon de prononcer les « t » et les « d ».</i> (6’48’’)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
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<i>02 novembre 1915 : Franz Marc, promu lieutenant, vient me rendre visite lors d’une permission. Il a le visage rougi par le froid. Sa nouvelle tenue d’officier lui va bien, hélas. Il chauffe ses mains devant le feu de la cheminée du salon. Nous lui offrons un café, puis du vin chaud à la cannelle. Nous nous installons au premier étage de mon atelier. Franz parle peu. Je tâche de déchiffrer ce que je vois sur la partition ouverte de son visage. Infime tressaillement de l’œil aussitôt réprimé.</i> (…) <i>Vers une heure du matin, Franz dessine à la mine de plomb sur un papier buvard un chien de chasse endormi dans la neige</i> [date guère raccord avec la peinture de la toile ci-dessous, soit dit en passant] <i>Dehors, c’est la nuit noire figée. Le poêle chargé ronfle. Nous avons soudain presque trop chaud. Nous heurtons nos verres d’un coup sec. Nous finissons tous plus ou moins cuits.</i> (9’37’’)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhyFO_1QDKwmK-0pXRiXPd-1JRetkad_tBK39KO9WlYiFP_2fHaKlyXdph5Mmt4o94ItwfD3RaNyE1ZQEbtjyhNAJdfux7fU4M8FAaGTdLFEBTn7IT0MjBCSAvscUCc_Yg-YU8Z1Bm8ZnT7/s1600/kl+fr+Marc+.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="505" data-original-width="855" height="378" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhyFO_1QDKwmK-0pXRiXPd-1JRetkad_tBK39KO9WlYiFP_2fHaKlyXdph5Mmt4o94ItwfD3RaNyE1ZQEbtjyhNAJdfux7fU4M8FAaGTdLFEBTn7IT0MjBCSAvscUCc_Yg-YU8Z1Bm8ZnT7/s640/kl+fr+Marc+.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Franz Marc, <i><a href="http://www.staedelmuseum.de/de/sammlung/liegender-hund-im-schnee-um-1911" target="_blank">Liegender hund im schnee</a></i> (<i>Chien couché dans la neige</i>), huile sur toile, 1911, Städel Museum, Francfort</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<!--[if !supportEmptyParas]--><b> <i>Journal</i> de Paul Klee :</b></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b><i>En novembre, (Franz) Marc, promu lieutenant, revint en permission. Il avait bonne mine cette fois-ci ; officier, il avait tout le loisir de prendre soin de son extérieur, et il avait même adopté l’allure de l’officier. La nouvelle tenue lui seyait bien, je dirai même « malheureusement » bien. Était-il encore l’ancien Marc ou avait-il cessé de l’être, je n’en suis pas sûr. J’avais chez moi quelques </i>Variations<i> de Jawlensky et j’étais presque anxieux de les lui montrer. Il vint passer son dernier soir chez nous à l’Ainmillerstrasse, sans sa femme. Elle était souffrante et il avait pris congé d’elle ; c’était pour lors un fait accompli. Un profond sérieux émanait de sa personne et il parlait peu.</i></b> (…)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Célia Houdart :<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Bern, le 23 février 1916 : Cher Franz, ma première pensée ce matin a été pour vous. Le journal rapporte qu’il y a eu une grande offensive allemande près de Verdun en France. J’ai trouvé l’autre samedi avec Felix au marché aux puces une revue avec des reproductions de plusieurs de vos toiles et d’un Kandinsky. Donnez-nous de vos nouvelles. Je vous serre dans mes bras. Paul Klee. </i>(22’08’’)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b><i>Journal</i> de Paul Klee : </b><o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b><i>1916. (…) Marc et moi ne nous écrivons plus depuis sa dernière permission</i></b> [novembre 1915] <b><i>; il savait désormais ma répugnance à théoriser. Il fallait d’abord laisser passer ces temps anormaux, d’autant plus que je devais m’attendre, chaque jour, à abandonner à mon tour couleurs et pinceaux.</i></b> <b>(…)</b><o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Célia Houdart :<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>4 mars 1916 : Nouvelle télégraphique : mort de Franz Marc. Mon âme tremble.</i> (…) <i>Un peu plus tard dans la journée, nous recevons un billet de Maria Frank, qui nous décrit les circonstances de la mort de Franz. Lettres et lignes très penchées, comme si Maria ne parvenait pas à faire tenir un mot droit sur la page. Lors d’une reconnaissance à cheval près de Verdun, Franz a été touché à la tête par un éclat d’obus. Il a perdu connaissance et est mort peu après sur un brancard.</i> (28’28’’)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEivPoBaMm51-ROIxyd72oQy3QnQ2Wxav6NrS6pcukwzSXLvp5i-irzGzEnJNuY7p96d3QE2choijc6vqBwyI3wSdU2FyT-6qwnInZv6FaVw_4jgOFf-yabIsUW-Xd9NFjuOEBiyb0AiL8xL/s1600/kl+te%25CC%2581le%25CC%2581g.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="664" data-original-width="855" height="497" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEivPoBaMm51-ROIxyd72oQy3QnQ2Wxav6NrS6pcukwzSXLvp5i-irzGzEnJNuY7p96d3QE2choijc6vqBwyI3wSdU2FyT-6qwnInZv6FaVw_4jgOFf-yabIsUW-Xd9NFjuOEBiyb0AiL8xL/s640/kl+te%25CC%2581le%25CC%2581g.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><a href="https://www.zwitscher-maschine.org/archiv-zm2/2016/9/11/jung-paul-klee-in-landshut-1916" target="_blank">Télégramme</a> de Maria Marc à Paul Klee annonçant la mort de Franz Marc, 5 mars 1916, Zentrum Paul Klee Archives, Bern</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b><i>Journal</i> de Paul Klee :<o:p></o:p></b></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<b><i>(…) Dans pareil état d’attente et d’espérance, je fus comme foudroyé par la nouvelle télégraphique de sa mort. Sa femme me l’avait envoyée de Bonn où elle résidait à ce moment chez la veuve d’August Macke. Une prémonition l’avait poussée à la rejoindre et à respirer le même air. Son télégramme m’appelait à Francfort ; jusque-là on l’avait accompagnée. Seule, elle ne pouvait continuer. Le même jour je reçus le bulletin rouge m’avisant de mon incorporation à la date du 11 mars. </i></b>(…)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Cent un ans après ce télégramme, un article de <i>L’Est Républicain</i> intitulé : <a href="http://www.estrepublicain.fr/edition-de-verdun/2017/05/05/c-est-la-que-franz-marc-est-tombe" target="_blank">C’est là que Franz Marc est tombé</a> (5 mars 2017) nous apprend qu’à l’occasion <i>de la commémoration du centenaire de [l]a mort [de Franz Marc] en 2016, son arrière-petit-neveu, Erwin Winners [a] sollicité l’aide de Jean-Louis Périquet pour localiser l’endroit où tomba son aïeul. Par recoupement des informations apportées par la famille Wimmers, l’historien a pu situer ce lieu à la sortie de Braquis sur la route d’Herméville. C’est là, </i>(…) <i>qu’un panneau a été dévoilé par les fils d’Erwin Winners, décédé depuis peu et à qui Maryse Francois maire de Braquis, rendit hommage. Les derniers moments du soldat-artiste, écrits par Josef Hagspiel, son ordonnance, seul témoin des faits ont été lus par Jean-Louis Périquet. « Après être sortis de la forêt, nous arrivâmes près d’un croisement où il y avait un petit pont. Franz Marc descend de cheval pour consulter sa carte, lorsqu’un obus éclate près de lui et le tue sur le coup. Nous sommes le 4 mars 1916, il est 16 heures. »</i><o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
***<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Ces quelques rapprochements journal fictif/<i>Journal</i> original nous montrent quelques limites des directions prises par cette pièce radiophonique : 1/ Pourquoi les paraphrases (qui se poursuivent) ont-elles été préférées aux citations directes ? 2/ Si Célia Houdart écrit dans les espaces laissés vacants par Paul Klee, comment expliquer les régulières incohérences qui émaillent sa composition ? Pensons par exemple à ce qu’elle écrit à la date du 11 mars 1916 : <i>Je</i> [Paul Klee] <i>fais ma valise à l’aube. Vêtements, plusieurs calepins, du papier format Raisin et Grand Univers, ma boîte d’aquarelle</i> (…) (33’30’’). Pour rappel, les dimensions format Raisin sont de : 50 x 65 cm et Univers : 100 x 130 cm (la dénomination « Grand Univers » n’existe pas, confondue sans doute avec les « Grand Aigle » ou « Grand Monde »). Sous le bras, le transport de ces feuilles, même roulées, au <i>Kommando d’arrondissement</i> ne paraît pas très plausible… Puis la datation de certaines marionnettes pose aussi question, dans la mesure où nombre d’entre elles sont postérieures à la période concernée. Des détails, j’en conviens.<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>16 mars 1916 : J’ai continué de fabriquer pour Felix des marionnettes que je lui envoie dans des boîtes cartonnées contenant d’ordinaire des munitions. Le dernier personnage est un sultan. Turban, djellaba. Visage sans relief mais peint. Yeux fardés, ombrés. Cils très visibles. Front orné de perles. Une fine moustache s’étirant des joues aux oreilles.</i> (37’06’’) Ou encore : <i>2 mai 1916 : À partir d’un méchant bout de bois, d’un os de bœuf et d’un chiffon trouvé sur le bord de la route, j’imagine une nouvelle marionnette qui serait mon portrait imaginaire. Yeux immenses comme ceux qui ornent la proue des trières grecques ou des navires étrusques afin d’effrayer l’ennemi. Joues légèrement rosées. Lèvres rouges. Bonnet d’astrakan. Barbe et sourcils noirs. Un foulard de soie gris cendré noué autour du cou et dont le raffinement contraste avec une longue tunique à gros points irréguliers découpée à même l’étoffe de ma vieille veste bernoise</i>. (…) (44’02’’)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhyDHXa1qV-3XYmDZ_kk2XWh9YWX8GKvHCU02TVceIUK8Dl_7LCIlkwL9y1PdbzhJlEPhGg5cmqKzP_UqBM2AGb5mXoctrWzl-ZuA_yfWjrRWw-maE-s0vJpXWPUpMswkCL91r10kbQBDp1/s1600/kl+sul+aut.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="578" data-original-width="794" height="464" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhyDHXa1qV-3XYmDZ_kk2XWh9YWX8GKvHCU02TVceIUK8Dl_7LCIlkwL9y1PdbzhJlEPhGg5cmqKzP_UqBM2AGb5mXoctrWzl-ZuA_yfWjrRWw-maE-s0vJpXWPUpMswkCL91r10kbQBDp1/s640/kl+sul+aut.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Paul Klee, <i>Sans titre (Le Sultan)</i> (à gauche), 1921 et <i>Sans titre (Autoportrait) </i>(à droite), 1922, poupées de théâtre guignol, Zentrum Paul klee, Bern</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
Les remarques tatillonnes énoncées ci-dessus destinées à aiguillonner un peu l’auteur sont bien peu de choses en regard du travail considérable fourni par Célia Houdart pour une seule heure de radio. Comme il est très documenté - tant et si bien qu’il semble que de subtiles allusions à des œuvres passent parfois dans des descriptions -, j’ai importé ci-dessous quelques références citées, avec le minutage donné par le<a href="https://www.franceculture.fr/emissions/latelier-fiction/paul-klee-et-monsieur-la-mort-journal-imaginaire-1915-1917" target="_blank"> fichier d’écoute</a>.</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i>21 octobre 1915 :</i> (…) <i>Nouvelle aquarelle : un géant articulé en habit d’arlequin. Goélette à trois mats et cheminées de steamers. Nuit claire. Lune bleue. Éléments jaune citron. À la droite du port, on distingue un sémaphore. </i>(5’35’’)</div>
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgSrwXIp2i65Cx05XOqinNAym3WVcYe8WShX_3QWFqaUf8kK2SZGjdAh-ci_ZwPj3FLZFs-RhOxqX4Ze62f6iQq6EfPakzpgejF42WnnRLRpgVGstZd81CGa4Wd9hyphenhyphenwlNekhjRaT6yNM1iG/s1600/Kl+2+Da%25CC%2588mon+u%25CC%2588ber+den+Schiffen.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="984" data-original-width="855" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgSrwXIp2i65Cx05XOqinNAym3WVcYe8WShX_3QWFqaUf8kK2SZGjdAh-ci_ZwPj3FLZFs-RhOxqX4Ze62f6iQq6EfPakzpgejF42WnnRLRpgVGstZd81CGa4Wd9hyphenhyphenwlNekhjRaT6yNM1iG/s640/Kl+2+Da%25CC%2588mon+u%25CC%2588ber+den+Schiffen.jpg" width="556" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Paul Klee, <i><a href="https://www.moma.org/collection/works/34207?locale=en" target="_blank">Dämon über des Schiffen</a></i> (<i>Démon au-dessus des bateaux</i>), aquarelle, 1916, Moma, New-York</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
<i>06 janvier 1916 : </i>(...) <i>Pendant ce temps, je dessine dans mon calepin des personnages aux visages tachés d'encre, et un masque effrayant qui pend au bout d'un fil. Celui souffle sur deux êtres dont l'un a la taille d'un enfant.</i> (17'45'')</div>
<div>
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiC_i5H1UnNJF2cgiMknYb0KMTmNoqhKERM0K7FDXhPAu0L7beZa7nwwRk_fDGBed42993S1-z2pmF5EXxJbxtP7_eJWwLCWriDchnG4de4ja-osreTwOBB7JplOjLj-mW_XhYKaqvXiWcI/s1600/kl+cat.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="492" data-original-width="855" height="368" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiC_i5H1UnNJF2cgiMknYb0KMTmNoqhKERM0K7FDXhPAu0L7beZa7nwwRk_fDGBed42993S1-z2pmF5EXxJbxtP7_eJWwLCWriDchnG4de4ja-osreTwOBB7JplOjLj-mW_XhYKaqvXiWcI/s640/kl+cat.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Paul Klee, <i>Spiritistische Katastrophe </i>(<i>Catastrophe spirite</i>), Plume sur papier sur carton, 1916, Zentrum Paul Klee, Bern</td></tr>
</tbody></table>
<div>
<div style="text-align: justify;">
<i>8 janvier 1916 : Je regarde tomber la neige, puis je dessine des acrobates. Le jongleur lance des balles qui forment au-dessus de sa tête une auréole en pointillés.</i> (18'38'')</div>
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBekgii5ZhEmnVq_bh72YKG0yrG_mZUdAhJ_Ja9O1UDptHR-Gew3oxqKxrMznnnx9KpUQg9Q5BM7dksZtQsRCb0DK6W89MXEkYF5xlHXGG00EJxUPYX2xCIds-tGCZGOmYFk9ytbNhcKwd/s1600/kl+acro.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="720" data-original-width="855" height="538" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBekgii5ZhEmnVq_bh72YKG0yrG_mZUdAhJ_Ja9O1UDptHR-Gew3oxqKxrMznnnx9KpUQg9Q5BM7dksZtQsRCb0DK6W89MXEkYF5xlHXGG00EJxUPYX2xCIds-tGCZGOmYFk9ytbNhcKwd/s640/kl+acro.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Paul Klee, <i>Artisten</i> (<i>Acrobates</i>), pastels et crayons sur papier, 1915, Solomon R. Guggenheim Museum, New-York</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
La consultation de la revue allemande <i>Der Sturm </i>à laquelle participe Klee à partir du <a href="http://bluemountain.princeton.edu/bluemtn/cgi-bin/bluemtn?a=d&d=bmtnabg19160415-01.2.2&e=-------en-20--1--txt-txIN-------" target="_blank">15 avril 1916 </a>permet d'accéder à des dessins peu reproduits et notamment cette couverture du <a href="http://bluemountain.princeton.edu/bluemtn/cgi-bin/bluemtn?a=d&d=bmtnabg19170315-01.2.2&e=-------en-20--1--txt-txIN-------" target="_blank">15 mars 1917</a> intitulée : <i>Akrobaten :</i><br />
<i><br /></i></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEipjF-nR5d2-kLggT_FLLx5165aQBX2F8Y5aT8hXkf6mZAsBs5sVwZtaxxrNednSOTME3kWV-GZJdnzkfi1PPfhoqaJczvaL_QrdhXeOaj8xC7c6_faI28nU5_clHnn9FVTG5Vdig1YlCw7/s1600/kl+sturm.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="559" data-original-width="855" height="418" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEipjF-nR5d2-kLggT_FLLx5165aQBX2F8Y5aT8hXkf6mZAsBs5sVwZtaxxrNednSOTME3kWV-GZJdnzkfi1PPfhoqaJczvaL_QrdhXeOaj8xC7c6_faI28nU5_clHnn9FVTG5Vdig1YlCw7/s640/kl+sturm.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Couverture du bimensuel <i>Der Sturm</i> dessinée par Paul Klee, <i>Akrobaten</i>, 15 mars 1917</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
<i>06 avril 1916 :</i> Vorführung des Wunders - Introduction au miracle. <i>Aquarelle pour laquelle je cherche des tons vifs et purs des miniatures de la Perse. Bleu de cobalt et bleu topaze.</i> (39'22'')</div>
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhNSH0-XohKNGEeLcpbEb-eX3kE2GqAxMZoO7aqyPgmOm8RhodFulUu5-Q_qEh0xhFxYiaAnrNmtHmx5l5Z4jgD1whowO5Y0O2yZMWR8g26uGTH5tAcHETHo9cT9VED8OLckApAJmgpU-Yv/s1600/kl+intro.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="1002" data-original-width="836" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhNSH0-XohKNGEeLcpbEb-eX3kE2GqAxMZoO7aqyPgmOm8RhodFulUu5-Q_qEh0xhFxYiaAnrNmtHmx5l5Z4jgD1whowO5Y0O2yZMWR8g26uGTH5tAcHETHo9cT9VED8OLckApAJmgpU-Yv/s640/kl+intro.jpg" width="532" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Paul Klee, <i><a href="https://www.moma.org/collection/works/79614?locale=en" target="_blank">Vorführung des Wunders</a></i> (<i>Présentation du miracle</i>), gouache, stylo et encre sur tissu apprêté, monté sur carton, 1916, Moma, New-York</td></tr>
</tbody></table>
<div style="text-align: justify;">
Tenu par Walter Benjamin (à qui il a appartenu) pour « le plus beau de tous les tableaux », voici comment<i> Vorführung des Wunders</i> est décrit par Reto Sorg dans le catalogue de l'exposition cité plus haut (p. 96) :</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<i>La composition, d'une palette de couleurs et d'un équilibre admirable, invente un nouveau mode de figuration, où le fantastique se mêle à la précision mathématique, où l'abstraction du cubisme cristallin s'allie aux motifs burlesques de carnaval et aux références mythologiques les plus étranges. L'esthétique de fête foraine, avec sa théâtralité propre, est à l'époque en vogue ; le décor excentrique évoque à la fois</i> Bébuquin <i>(1912), roman de Carl Einstein qui tourne en dérision la passion immodérée de la modernité pour les miracles, et les grotesques cosmico-comiques de Paul Scheerbart ou de Mynona, qui font miraculeusement disparaître les frontières de l'espace et du temps. La petite image de Klee est exemplaire du processus de modernisation des arts dont le point de fuite consiste, selon Eisntein, en la transformation « du miracle en bizarre », en « la dégradation esthétique du religieux, qui subsiste secrètement dans le poétique »</i>.</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
Si vous souhaitez optimiser votre écoute en retrouvant toutes les autres oeuvres citées de Paul Klee, vous pouvez vous aider <a href="http://paulklee.fr/html/1916.html#1916_1" target="_blank">de ce site</a>.<br />
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div style="text-align: justify;">
<u>P.S.</u> : Après avoir appris sa mobilisation le 11 mars 1916 pour<i> le dépôt de recrues de Landshut, Klee est transféré à Munich, au second régiment de réserve d'infanterie, puis à Schleissheim, à la compagnie des chantiers d'aviation. Grâce à l'intervention de l'écrivain Max Pulver, il n'est pas envoyé au front, bénéficiant d'une décision du roi Louis III de protéger les artistes de Bavière</i> (extrait de la chronologie du catalogue d'exposition, p. 281)</div>
<div style="text-align: justify;">
<br /></div>
<u>P.P.S.</u> : 14 mars : (...) <i>Je pense à Franz. Nous étions comme deux cercles d'égale circonférence qui se touchent et qui à l'endroit où ils se rencontrent ont tout un monde en commun. Je dessine sur une page de mon calepin nos cercles et je strie à l'encre violette la zone que nous partagions. </i>(...) (35'03'')<br />
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5nWDMyvuy7GYNk_K2Z7MAP2m86M5jQB7yIxbm7srSEjDT3AKQIm_sedr2glLIvhUV1GKDKtykhhc72uE9S4RSDbc3dZkHfH13mUq9s1yQeEasziUZlrR7CHykCPvKCY1cV127WycmgsY1/s1600/kl+cercle.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="743" data-original-width="855" height="556" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5nWDMyvuy7GYNk_K2Z7MAP2m86M5jQB7yIxbm7srSEjDT3AKQIm_sedr2glLIvhUV1GKDKtykhhc72uE9S4RSDbc3dZkHfH13mUq9s1yQeEasziUZlrR7CHykCPvKCY1cV127WycmgsY1/s640/kl+cercle.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le dessin décrit par Célia Houdart est issu d'une lettre de Klee à Franz Marc, reproduit dans le <i>Journal</i> (année 1916), éd. Grasset, coll. Les cahiers rouges, p. 333.</td></tr>
</tbody></table>
<br /></div>
</div>
Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-15368871573489227242017-08-03T12:43:00.000+02:002018-10-08T14:31:14.182+02:00Jeanne Moreau : Comme ça (27 avril 1983)<div style="text-align: justify;">
Le jour de la mort de Jeanne Moreau le 31 juillet 2017, une <a href="https://www.franceculture.fr/cinema/la-mort-de-jeanne-moreau-comedienne-fleuve" target="_blank">page Internet dédiée</a> publiée sur le site de France Culture proposait à l'écoute une archive, sauf erreur, inédite : l'émission <i>Comme ça</i>, découpée en trois parties, de Francis Rousseau, diffusée pour la première fois le 27 avril 1983. L'inathèque nous apprend que les trois parties correspondent à trois horaires d'écoute différents : La première partie (28 minutes) fut diffusée entre 13h30 à 14h, la deuxième (54 minutes) entre 17h30 et 18h25 et la troisième (d'une durée de 2 heures 30, mais réduite à 2 heures 22 sur le site de France Culture) entre 20h à 22h30.</div>
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<br /></div>
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Quasiment quatre heures d'émissions furent mises en ligne environ 2h30 après l'annonce du décès de la comédienne, si l'on s'en réfère à l'heure de publication des premières nécrologies des journaux numériques (11h). Ce qui n'empêche pas Antoine Lachand et Hélène Combis-Schlumberger de taper à toute vitesse* des citations extraites (et presque exactes) du premier quart d'heure de chacune des parties et des résumés succincts des morceaux choisis (<i>* la page a depuis été largement remaniée, merci à leurs auteurs)</i>. Tentons d'échapper à cette course à l'information et d'exposer plus longuement le contenu des trois parties de l'émission <i>Comme ça</i>.</div>
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<b>Première partie :</b><br />
<b><br />
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Interviewée dans un bar huppé près des Champs-Elysées, Jeanne Moreau commence par évoquer la musique d’un film sorti 25 ans plus tôt : <i>Ascenseur pour l’échafaud</i> (Louis Malle, 1958) enregistrée par Miles Davis dans les studios du cinéma Le Marignan (« actuels » 27-33 avenue des Champs-Elysées, Paris, 8<sup>e</sup>), de 19h à 5h. L’actrice qui a assisté aux séances d’improvisations sur des thèmes décidés à l’avance par le trompettiste et ses musiciens, raconte avoir fait <i>l’hôtesse</i> en servant <i>à manger et à boire</i> cette nuit-là (du 4 au 5 décembre 1957 nous apprend Susana Poveda dans son numéro spécial Polar (05'40'') de <a href="http://www.fipradio.fr/emissions/certains-l-aiment-fip/2016/certains-l-aiment-fip-les-polars-11-02-2016-20-00" target="_blank">Certains l'aiment FIP</a>, 02 novembre 2016). Suivent des propos sur sa démarche dans les films, sa voix, et de manière générale, sur l’authenticité dégagée ou non par un(e) acteur (-trice) devant l'objectif d'une caméra. <i>La sincérité, ça « passe ». Le mensonge n'est pas victorieux. C'est ça la force des grands acteurs</i> (...). (13'18'')</div>
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<a name='more'></a></div>
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Jeanne Moreau se confie ensuite plus longuement sur la préparation de son rôle d’<i>Eva</i> dans le film éponyme de Joseph Losey (1962) (15’20’’). Ayant loué le château de Bilo à Minihy-Tréguier (Côtes-d'Armor) <i>très beau et très laid en même temps</i><span style="font-style: normal;"> (<a href="http://www.letelegramme.fr/ar/viewarticle1024.php?aaaammjj=20010401&article=2525935&type=ar" target="_blank">démoli en 2001</a>), elle explique avoir inventé la biographie de son personnage avec le réalisateur pendant huit jours. Au cours de ces discussions, elle choisit d’intégrer les disques de Billie Holiday au film : </span><i>Quand elle ne chantait pas juste, c’est parce qu’elle perdait les pédales. Elle était complètement</i><span style="font-style: normal;"> high </span><i>ou</i><span style="font-style: normal;"> down (…) </span><i>On touche là à quelque chose qui a à voir avec la fragilité humaine… ça nous déchire. C’est tellement difficile de vivre. Alors, que quelqu’un l’exprime pour nous, c’est comme si c’était fait. On n’est pas obligé de souffrir autant. Les artistes, ça sert à ça, ça sert à exorciser</i><span style="font-style: normal;">. (…) </span><i>C’est comme une saignée, comme un exorcisme, c’est très utile les artistes. C'est vrai, je ne rigole pas. </i>(22'58'')<i><br /></i></div>
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<br /></div>
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<b>Extraits musicaux :</b><o:p></o:p></div>
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Ouverture : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=l7KLCn8Y608" target="_blank">Je suis vous tous qui m’écoutez</a> (1967) (Album : <i>Les chansons de Clarisse</i>)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
8'50’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=PINB3hq9OVw" target="_blank">Quelle histoire </a>(1969) (Album : <i>Jeanne chante Jeanne</i>)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
16’47’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ljY0HnTrp3U" target="_blank">Ill Wind</a>, de Billie Holiday (1956) (Album : <i>All ou nothing at all</i>)<o:p></o:p></div>
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<br /></div>
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<b>Extraits filmiques :</b><o:p></o:p></div>
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<i>Eva</i>, de Joseph Losey (1962)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Les amants</i>, de Louis Malle (1958)<o:p></o:p></div>
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<b>Deuxième partie :</b></div>
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<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>On se dit merde, si c’est ça la vie d’adulte, c’est trop con. Moi, je ne veux pas vivre comme ça. Ça ne vaut pas le coup. Ça cohabite avec des idées aussi de suicide, à cause de l’absolu. Je veux dire, si c’est ça la vie, moi, j’aime mieux crever. Donc, c’est accepter de vivre différemment, d’être différent, et ç’a un prix. Et c’a un prix, c’est-à-dire que le capital à exploiter, c’est soi</i> (…). (3’09’’)<o:p></o:p></div>
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<br /></div>
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Dans la deuxième partie de l’émission <i>Comme ça</i>, Jeanne Moreau revient sur la chronologie de ses rencontres avec les metteurs en scène de ses films (1951 : Orson Welles à la Comédie Française) et partage les mœurs répandues au sein de sa famille. Pour ses parents, le théâtre est <i>un bordel, un lieu de perdition</i>, et le cinéma [du] <i>racolage de troisième ordre</i>. Sans transition, la poésie de Marguerite Duras est l’objet d’une fine analyse (récit des voix intérieures brisées sur de la pensée articulée ou l’inverse) (30’40’’), et d’ailleurs la voix de l'écrivain est même donnée à entendre via une archive : <i>La plupart des voix sont fausses. Surtout les voix de comédiens.</i> (37’45’’)<o:p></o:p></div>
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Plus loin, Jeanne Moreau distingue deux types de cinéma : celui fait avec urgence, en vertu d’une nécessité et celui fabriqué, sachant produire des émotions avec artifices : <i>Je m’aperçois qu’il y a des gens</i> [cinéastes] <i>qui font le même métier et qui ne le font pas : ce sont des fraudeurs.</i> (…) [Ils] <i>sont à l’affût de tout. Et si à l’intérieur d’un film de Duras, ou d’un film qu’on appelle d’avant-garde, il y a un moment fort, vous pouvez être sûr que 18 mois après, vous le retrouverez dans un film fait autrement, digéré, et utilisé, employé.</i> (…) <i>Et il n’y a rien de plus étonnant que la fascination des réalisateurs américains pour certaines périodes du cinéma français et pour les films d’avant-garde du cinéma français.</i> (…) [Mais] <i>eux le disent, au moins.</i> (44’41’’)<o:p></o:p></div>
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<br /></div>
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<b>Extraits musicaux :</b><o:p></o:p></div>
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Ouverture : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=l7KLCn8Y608" target="_blank">Je suis vous tous qui m’écoutez</a> (1967) (Album : <i>Les chansons de Clarisse</i>)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
06’06’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=_nbw9T04g2I" target="_blank">Je m’ennuie la nuit sans toi</a> (extrait du film : <i>Le jardin qui bascule</i> de Guy Gilles, 1975)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
12’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ahnJl2QyHSU" target="_blank">La célébrité, la publicité</a> (1969) (Album : <i>Jeanne chante Jeanne</i>)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
27’34’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=BHiCvmFajhQ" target="_blank">Rumba des Îles</a>, avec Marguerite Duras (album<i> India Song</i>, 1975)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
32’53’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=wF1I5gfAIhE" target="_blank">Do Nothing till You Hear from Me</a>, de Billie Holiday (1956) (Album : <i>All or nothing at all</i>)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
40’47’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=AtzT4ykwx8s" target="_blank">Les voyages </a>(1969) (Album : <i>Jeanne chante Jeanne</i>)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
52’23’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=RCwQ8M11S-8" target="_blank">Embrasse-moi </a>(extrait du film <i>Peau de banane</i>, de Marcel Ophuls, 1963)<o:p></o:p></div>
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<br /></div>
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<b>Extrait filmique :</b><o:p></o:p></div>
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<i>Les amants</i>, de Louis Malle (1958)<o:p></o:p></div>
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<b>Troisième partie :</b></div>
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<br /></div>
<div class="MsoNormal">
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<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<i>Je voudrais que tout le monde sache qu’on peut tout faire.</i> (…) <i>En fait, toutes les capacités que nous avons, nous les employons d’une façon tellement parcimonieuse, parce qu’il y a une organisation, il y a une tradition : « Ah vous savez bien faire ça ? Vous faites ça ? » Et vous ne faites pas autre chose. Mais pourquoi ?</i> (8’35’’)<o:p></o:p></div>
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Jeanne Moreau ouvre brillamment la dernière partie de l’émission en parlant de <i>sa faculté immédiate à voir très facilement les gens quand ils étaient enfants, quelques âges qu’ils aient. </i>(…) <i>L’enfant est enfoui, il y a des expressions sur le visage</i> (…) (14’12’’) Une question de Francis Rousseau conduit ensuite la comédienne à faire part de son exécration du jeu politique/politicien (…) <i>qui met de côté ce qui est essentiel : c’est-à-dire l’être humain.</i> (…) <i>Comme si certaines personnes selon la classe de la société à laquelle elle</i>[s] <i>appartien</i>[en]<i>t ne pouvai</i>[en]<i>t pas s’assumer. Comme si la personnalité de l’individu était complètement annihilée et que les gens les plus pauvres et les plus démunis, matériellement parlant, ne pouvaient être que des débiles mentaux. Comme s’ils ne pouvaient agir, se défendre, qu’entourés par une organisation qui les récupère.</i> (…) (21’02’’)<o:p></o:p></div>
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Après lecture de plusieurs poèmes extraits de <i>Le canard de ma tante</i> de Norge (1898-1990), la comédienne déclare avoir en horreur les films porno : <i>On baise pas toujours avec des gens qui ont des corps parfaits !</i> (38’38’’), occasionnant en cela un pont avec le dernier film de Rainer Werner Fassbinder : <i>Querelle</i> (1982), adapté d’un roman de Jean Genet. Sur le tournage, Jeanne Moreau confesse avoir été<i> en osmose</i> avec le réalisateur qu’elle avoue cependant n’avoir jamais vu pendant ses prises : (…) <i>j’arrivais à une sensation très étrange d’aucune différence dans les sexes</i> [l’homosexualité est au cœur de l’histoire]. <i>Un climat de calme et de jeu comme quand on est enfant, quand rien n’est encore teinté de tous ces a priori qui mènent à la séduction, au regard en douce. </i>(1h00’18’’)<o:p></o:p></div>
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<br /></div>
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S’ensuivent des considérations sur les préjugés différenciant les relations homosexuelles des hétérosexuelles, sur ses expériences de spectatrice comme présidente de festival (notamment pour la Berlinale en 1983), sur son constat navré de mises en scène éculées, avant que la voix ne se raréfie pour laisser place à de longues plages musicales. À 25 minutes de la fin de l’émission, le réalisateur chamboule le programme par surprise et propose un cocktail détonnant de sons remixant les films et les propos de Jeanne Moreau jusqu’ici écoutés. Cela dure dix minutes et pourrait ressembler à une bouillie musicale si l’auditeur ne n’amusait à distinguer toutes les strates de voix superposées. (1h56’23’’) Mais ce montage ne doit rien au hasard : (…) <i>Vous n’avez jamais été frappé, vous, de ce changement perpétuel d’humeurs, de sensations, exactement comme la modification des nuages dans le ciel ? C’est insaisissable.</i> (…) <i>C’est ça qui est exaltant et qui angoisse en même temps. Parce qu’on aurait tellement besoin de quelque chose qui s’arrête.</i> (2h08’02’’)<o:p></o:p></div>
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<br /></div>
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<b>Extraits musicaux :</b><o:p></o:p></div>
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Ouverture : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=l7KLCn8Y608" target="_blank">Je suis vous tous qui m’écoutez </a>(1967) (Album : <i>Les chansons de Clarisse</i>)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
15’40’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=0l8dIXkAAlg" target="_blank">I Beg Your Pardon</a>, de Tom Waits (Album : <i>One from the Heart</i>, bande originale du film éponyme, 1982)<o:p></o:p></div>
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23’17’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ZAU_ubLaBLc" target="_blank">Les petits ruisseaux font les grandes rivières </a>(1969) (Album : <i>Jeanne chante Jeanne</i>)<o:p></o:p></div>
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1h09’21’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=U9L4FrjA8hY" target="_blank">C’est pas sérieux</a>, de Les chats sauvages (1962) (45 tours)<o:p></o:p></div>
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1h33’03’’ : musique répétitive (à déterminer)<o:p></o:p></div>
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1h42’03’’ : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=8k41D9por6c" target="_blank">Ouverture de Parsifal</a>, Wagner<o:p></o:p></div>
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<b>Extrait filmique :</b><o:p></o:p></div>
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<i>Eva</i>, de Joseph Losey (1962)<o:p></o:p></div>
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<u>P.S. </u>: Au moins deux rôles radiophoniques de Jeanne Moreau sont à écouter dans <i>Les Nuits</i> : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/madame-bovary-1ere-diffusion-16031948" target="_blank"><i>Madame Bovary</i></a> (première diffusion : 16 mars 1948) et <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/fictions-theatre-et-cie/le-hussard-sur-le-toit-de-jean-giono" target="_blank"><i>Le hussard sur le toit</i></a> (première diffusion : 11 février 1953) dont aucune des rediffusions n'autorise le podcast ou la réécoute. Seul un accès <a href="https://www.youtube.com/watch?v=L6HyABwID-4" target="_blank">Youtube</a> est possible vers cette pièce.</div>
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<iframe allow="encrypted-media" allowfullscreen="" frameborder="0" gesture="media" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/l7KLCn8Y608" width="560"></iframe></div>
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<b>Appendice : </b><a href="https://lesnuitsetlesjoursdefranceculture.blogspot.com/2018/10/appendice-jeanne-moreau-dans-les-mardis.html" target="_blank">Jeanne Moreau dans Les mardis du cinéma (04 décembre 1984)</a></div>
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<!--EndFragment--><br />
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3388448950960019658.post-87879422509133212272017-07-28T21:00:00.001+02:002017-10-01T23:32:50.584+02:00Marie-José Mondzain, Abdelwahab Meddeb : Cultures d'Islam <!--[if gte mso 9]><xml> <w:WordDocument> <w:Zoom>0</w:Zoom> <w:HyphenationZone>21</w:HyphenationZone> <w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery>0</w:DisplayHorizontalDrawingGridEvery> <w:DisplayVerticalDrawingGridEvery>0</w:DisplayVerticalDrawingGridEvery> <w:UseMarginsForDrawingGridOrigin/> </w:WordDocument> </xml><![endif]--> <!--StartFragment--> <br />
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Trois entretiens de Marie-José Mondzain avec Abdelwahab Meddeb (1946-2014) producteur de feu <i>Cultures d'Islam </i>permettent de retracer quelques éléments de sa pensée sur l'image tenus à l'antenne entre 2002 et 2012, au fil de la présentation de ses ouvrages. Les émissions résumées ci-dessous, de trois formats différents (30 minutes, 50 minutes et 1 heure) ont été diffusées le 19 avril 2002, le 04 mai 2008 et le 23 novembre 2012.</div>
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<b>Première émission</b><i> </i>: <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/cultures-d-islam-l-image-pure-illusion-1ere-diffusion-19042002" target="_blank">L'image, pure illusion</a> (première diffusion : 19 avril 2002) </div>
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Sept mois seulement après la destruction des tours du World Trade Center, Marie-José Mondzain cherche à comprendre en quoi le traitement médiatique du 11 septembre 2001 a privé les consciences d'un fait historique de premier plan. Immédiatement prise en charge par l’image, la réception de l'attentat, retransmis en direct sur les chaînes de télévision du monde, a moins sollicité le raisonnement critique de l'homme qu'activé son regard de spectateur fasciné. Entre la sidération devant le fait enregistré, le risque d’identification aux victimes, la conversion de l'action criminelle en spectacle et la saturation visuelle de l'information, les facteurs empêchant une distance réflexive vis-à-vis de l'événement sont multiples.<br />
<br />
(Douze ans plus tard, dans une émission dédiée à la mémoire d'Abdelwahab Meddeb (<a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/nuit-speciale-hommage-abdelwahab-meddeb-entretien-23-avec" target="_blank">Nuit spéciale</a> du 27 décembre 2014), la philosophe ne dit pas autre chose en parlant des vidéos fournies par les bourreaux de l’État Islamique et servilement relayées par l'Occident. Les effets déclenchés par le regard sont les mêmes et priment encore sur l'analyse. Restent que les auteurs des images ont changé de camp et que la diffusion des exactions s'opère sans doute à plus grande échelle.)<br />
<o:p></o:p></div>
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L’image répétée - on le mesure aujourd’hui avec le succès des chaînes d’information continue - neutralise toute notion de durée de sorte que <i>la plus grande violence que l’on puisse faire contre la pensée, c’est de lui enlever le temps par le phénomène du flux, et de la paralyser.</i> (10’19’’) <o:p></o:p></div>
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<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Ce que Marie-José Mondzain appelle « image » dans son livre <i>L’image peut-elle tuer ?</i> (2002) n’a que peu de rapport avec les résidus d’enregistrements véhiculés par les canaux médiatiques. Considérée du point de vue de la tradition iconique chrétienne, l’image, suivant ses mots, est <i>ce qui a pris vie dans l’écart</i>, <i>ce qui vaut pour sa relation à l’absence</i>, et non le fruit de l’adhésion à un réel présent. De cette manière, elle échappe à l’idolâtrie, à la « scénographie » du simulacre, et acquiert une fonction qui implique le spectateur. C'est précisément le sens de l'oeuvre d'art.<br />
<a name='more'></a></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<!--[if !supportEmptyParas]-->*** <!--[endif]--><o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<br />
<i><u>Aparté</u></i><br />
<br />
<div style="text-align: justify;">
[En 2001, les télévisions de la première puissance mondiale
retransmettaient dans sa totalité un crime d’une ampleur inédite (unité de
temps, de lieu, d’action). Plus tard, la reprise de vidéos amateurs des mises
à mort de prisonniers entérinait la reconnaissance des chaînes occidentales
envers la communication des pays ennemis. Aujourd’hui (2015/2016) et pour un
impact tout aussi retentissant, les moyens employés pour répandre une tuerie
peuvent se concentrer dans de petites caméras portatives parfois directement
reliées à un réseau social Internet. L’accès à une technologie simple pensée en
relation avec un espace de stockage de données gratuit, favorisant de surcroît
une interconnexion en temps réel (Facebook, Youtube et d’autres sans doute), a
supplanté la chaîne traditionnelle hiérarchiquement ordonnée de l’information
(reporter envoyé, montage images, diffusion télé).<br />
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Il n’empêche : si l’auteur d’un plan macabre peut
interagir avec des visionneurs abonnés à son compte, son objectif reste malgré
tout d’être connu du plus grand nombre. Quand ce ne sont pas les chaînes de
télévision qui l’appellent, le terroriste ne manque pas de les contacter pour leur faire part de son identité et de ses revendications (cas BFM TV de la prise
d’otage dite du supermarché « hypercacher »). Or, il y a quarante ans, Sidney
Lumet mettait précisément en scène ce mode de relation dans un huis clos
ayant pour cadre le braquage raté d'une banque : <i>Un après-midi de chien</i> (1975).<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhKQNgOQ1MlGo2K4BmMJNHlbKuFUWsI4uQZPApgxEYw-jkKaIzUFC46FD3xOaWEXQHYHam8IUtz15utYUcQOewKUJI-AwMOu6xVu_i_nN-RR_NQ94Egz1aaUTxKzflhap2P5i085BboXJD4/s1600/dog+after+3.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="480" data-original-width="855" height="358" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhKQNgOQ1MlGo2K4BmMJNHlbKuFUWsI4uQZPApgxEYw-jkKaIzUFC46FD3xOaWEXQHYHam8IUtz15utYUcQOewKUJI-AwMOu6xVu_i_nN-RR_NQ94Egz1aaUTxKzflhap2P5i085BboXJD4/s640/dog+after+3.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Journalistes prêts à tout pour recueillir la parole d'un otage (<i>Un après-midi de chien</i>, Sidney Lumet)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Inspirée d’un fait divers, l’histoire des deux malfaiteurs
incarnés par Al Pacino et John Cazale est autrement plus comique (sinon
pathétique) que les drames évoqués ci-dessus. Conduits par la force des choses
à transformer leur assaut initial en prise d’otages, les deux gogos sont
rapidement cernés et pris entre les feux
des agents de police postés un peu partout sur terre et dans les airs, d’une
foule massée autour de la scène, et surtout de caméramens et journalistes sans
foi ni loi. Arrivés les derniers mais se servant en premiers, ceux-ci
contribuent à rendre la prise d’otages populaire et à ériger leur maître
d’œuvre en vedette.<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh_VBZH6mAg9oO_3DV2EltjY_IPoQxJhY38bsICt-yHo3aLzf8SoOJOy38WRn6l314PWtVgtstJTWbC4GJJSoDqd6nrP8FHX0IPbs6LLQJjxPcX-x4M99K5ug0CdZQA6M3DDyJ-OMFN_iZz/s1600/dog+after+1.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="480" data-original-width="855" height="358" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh_VBZH6mAg9oO_3DV2EltjY_IPoQxJhY38bsICt-yHo3aLzf8SoOJOy38WRn6l314PWtVgtstJTWbC4GJJSoDqd6nrP8FHX0IPbs6LLQJjxPcX-x4M99K5ug0CdZQA6M3DDyJ-OMFN_iZz/s640/dog+after+1.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Derrière l'inspecteur qui négocie, deux photographes, un preneur de sons et un caméraman (Sonny / Al Pacino en amorce) (<i>Un après-midi de chien</i>, Sidney Lumet)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Tous les moyens sont bons pour déborder la police :
acrobatie au-dessus de la porte d’entrée de la banque, zoom intrusif d’une
caméra à travers la vitre de cette même porte, diffusion d’archives sur la
personnalité d’un des preneurs d’otages à la télévision (photographie à
l’appui). Une scène retient l’attention : Sonny (Al Pacino) prévenu de la
couverture médiatique qui s’organise répond justement au téléphone aux
questions d’un journaliste de télévision surgi via un petit écran posé sur le
bureau du directeur de la banque. Découvrant tout à coup son image filmée en
direct sur le moniteur, il est littéralement fasciné par la mise en abyme
dont il est l'objet et ne retrouve ses esprits qu’après quelques instants. Il y a de quoi.
Les perceptions simultanées entre le raccord de sa silhouette imaginée dans
l’œilleton de la caméra avec l’image vue sur l’écran, puis entre la voix du
journaliste au téléphone et sa retransmission parallèle télévisée, le tout diffusé sur
une chaîne nationale (CBS) plongent les sens dans une confusion
momentanée : elles privent le protagoniste de la maîtrise des événements.<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
</div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjorfQPJFny66BAc7dlpbH9h8OG07spUGEQW8HAf1SgpFXqUJRCWdqGqRYHNaY8UaeQ-cUbepgYQqGOKvzabAStQw4vqSArptWyjZkC6wjtBm8gKdEKeku4sOQdnyLpTwZ1V697FKhyfgWa/s1600/dog+after+6.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="478" data-original-width="855" height="356" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjorfQPJFny66BAc7dlpbH9h8OG07spUGEQW8HAf1SgpFXqUJRCWdqGqRYHNaY8UaeQ-cUbepgYQqGOKvzabAStQw4vqSArptWyjZkC6wjtBm8gKdEKeku4sOQdnyLpTwZ1V697FKhyfgWa/s640/dog+after+6.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Au téléphone avec le journaliste, Sonny se découvre sur l'écran de télévision retransmettant son interview.</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7s9Q2CIY5E8_9uQxtA8lM7QFiYqaUmM_bHZxh3i6t766n9AixDlx2oCu3NB8_OiOARk6kVRHClAKLNIA_gqq0OYajflp7_u301ZRik-MFZ2THIDSHePrgyhatpH-_W-XwcOWxZmtQbXvX/s1600/dog+after.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="480" data-original-width="855" height="358" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7s9Q2CIY5E8_9uQxtA8lM7QFiYqaUmM_bHZxh3i6t766n9AixDlx2oCu3NB8_OiOARk6kVRHClAKLNIA_gqq0OYajflp7_u301ZRik-MFZ2THIDSHePrgyhatpH-_W-XwcOWxZmtQbXvX/s640/dog+after.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Depuis l'intérieur de la banque, Lumet zoome sur un opérateur qui zoome sur la conversation de Sonny. (<i>Un après-midi de chien</i>, Sidney Lumet)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Au centre du plan ci-dessous (dans la même scène), à l’intersection de deux pans
de murs situés à l’arrière-plan, et à mi-chemin entre les otages et le
directeur, le câble du téléphone d’un côté et l’antenne du téléviseur de
l’autre, Sonny émerge du lot et acquiert une stature médiatique. Il hystérise
tous ceux qui rentrent en contact avec lui : le mari d’une des otages qui
se jette sur lui, le livreur de pizza enchanté, sa femme vociférante, le
chauffeur du mini-bus qui doit le conduire au jet privé, la foule des
transexuels qui l’acclame. Les otages, qui prennent conscience du pouvoir que
leur confère cette situation, n’hésitent pas à se mettre en scène à la suite de cet appel : salut
à l’opérateur de prise de vue ou simulation de peur au téléphone pour un pervers
en mal de sensations. <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgQlqU8cKXn3GpPNdvoBZ9cRgsxNHsDY3sMUYBdjZvfi4CcfpTISzpOTzw6hQ-RwwTFPN8wVzUgDPaHRkVrjO8M1yAsBLuNWHlWO6V7hEoP16pyXSZac0lDP0L0tELJxiXKemjyvPDtcJ15/s1600/dog+after+4.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="480" data-original-width="855" height="358" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgQlqU8cKXn3GpPNdvoBZ9cRgsxNHsDY3sMUYBdjZvfi4CcfpTISzpOTzw6hQ-RwwTFPN8wVzUgDPaHRkVrjO8M1yAsBLuNWHlWO6V7hEoP16pyXSZac0lDP0L0tELJxiXKemjyvPDtcJ15/s640/dog+after+4.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Sonny / Al Pacino (<i>Un après-midi de chien</i>, Sidney Lumet)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Le rôle joué par les images est si fort qu’il inverse les
pôles du bien et du mal (la police n’est-elle pas réprimandée par Sonny et
sifflée à son invitation par la foule ?) et entraînent les otages à prendre la
défense des ravisseurs (= jugement défaillant). Puis, comment comprendre le soutien du public transexuel/gay sinon par la personnalisation à outrance du protagoniste
(marié à un homme qui veut changer de sexe) développée dans le récit télévisuel
? (= identification) Le danger de mort qui pèse sur les otages ajouté à la gravité de l'infraction semblent mis en sourdine au profit de la construction d'une histoire dont le spectateur attend la fin : les informations données au compte-goutte par la police ou les deux branques participent de cet effet de suspense (= spectacle). Ainsi rapportée aux catégories de Marie-José Mondzain relatives au pouvoir anesthésiant des images sur la
pensée, la fiction de Sidney Lumet coche toutes les cases. D’ailleurs, Sonny ne répond-il
pas au journaliste qui l’interroge (en français dans le texte) : <i>On vous
fait le spectacle pour pas un rond, alors qu’est-ce qui est prévu pour nous ?</i> ]<br />
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiG97juJpjS9deR2eEJlbL-AmjO84sIm5Up-Lw20m8VlX8yRfuLdubalKFpGmCqDnLeMj1ccVZpRr9FTmSJvyEcJECV_wAQgXEcY8Zb6N_xA5SkRHPEkeZiCWyYK8fzj6JMakjqr3qjgWbU/s1600/dog+after+7.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="479" data-original-width="855" height="358" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiG97juJpjS9deR2eEJlbL-AmjO84sIm5Up-Lw20m8VlX8yRfuLdubalKFpGmCqDnLeMj1ccVZpRr9FTmSJvyEcJECV_wAQgXEcY8Zb6N_xA5SkRHPEkeZiCWyYK8fzj6JMakjqr3qjgWbU/s640/dog+after+7.jpg" width="640" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Au deuxième plan, l'une des otages « ravie » de passer à la télé salue son public... (<i>Un après-midi de chien</i>, Sidney Lumet)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal">
<!--[if !supportEmptyParas]-->***<br />
<br /></div>
<!--EndFragment--></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<b>Deuxième émission</b> : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/cultures-dislam/philosophie-de-limage" target="_blank">Philosophie de l'image</a> (04 mai 2008) (non écoutable)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Au début de la conversation, Marie-José Mondzain rappelle que le visible, depuis la tradition grecque, est le lieu de <i>la fugacité des apparences</i>, de <i>la fragilité de l’opinion</i>. En raison de ce soupçon originel, elle explique travailler à la <i>reconquête philosophique</i> de l’image en ouvrant son champ de compétence aux <i>dehors</i> qui le vivifieront : anthropologie, histoire ou paléontologie. <i>L’image est un objet de pensée</i>, dit-elle. Elle est <i>un</i> <i>site inter-générationnel</i>, dans la mesure où <i>l’enfant accède à la parole par l’image</i> et que l’adulte y tisse sa relation à l’enfance. Remontant aux origines de l’humanité, la philosophe s’intéresse à la façon dont l’homo-sapiens s’est donné <i>par ses gestes un objet à son propre regard</i> en apposant ses mains recouvertes de pigments sur la paroi d’une grotte. L'action suivie de son retrait a converti la trace en objet de visibilité et fait de l’homme un spectateur. Conservé jusqu’à nous, ce témoignage inscrit la naissance de l’image dans les <i>ténèbres</i> aux sens géographique et philosophique du terme. <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
La discussion roule ensuite sur les rapports de l’image à la peur. Une population régulièrement confrontée aux effets d’une culture de la violence (catastrophe naturelle, guerre, sexe) accueillera sans ciller les mesures de sécurité renforcée telles qu’elles sont en mises en oeuvre dans de nombreuses villes, à l’instar du <i>système de surveillance et d’intrusion qui fait que nous sommes sans arrêt vus par des enregistreurs invisibles d’images pour nous sécuriser.</i> (18’48’’) Marie-José Mondzain désigne un effet collatéral de cette délégation aux autorités politiques : le découragement. <i>Je défends fortement l’image et le spectateur pour inviter l’homo-spectator de la caverne à</i> (…) <i>prendre en mains notre destinée, notre histoire, et affronter les périls avec les armes majeures qui sont les nôtres</i> (…) : <i>celles de la pensée et de la parole</i> (21’55’’). Mais encore : <i>l’émancipation du sujet commence dès l’école primaire. Le désastre commence aussi dès l’école primaire.</i> (26’06’’)<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Le temps comme vu plus haut est à nouveau au cœur de ses préoccupations : <i>L’image n’est pas un problème de vision et de perceptions. L’image pose un problème de temporalité et de patience. L’image demande du temps, et nous fait accéder à la dimension temporelle de ce que nous partageons.</i> (31’25’’) À l'aune de cette citation, rapportons ici cette autre extraite de la première émission évoquée ci-dessus, dans laquelle Mondzain associe robinet télévisuel (aujourd'hui web) et création de l'oeuvre : <i>Nous sommes dans un monde où il y a de moins en moins d’images. Le visible cache l’image.</i> (18’37’’)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
La fin de l’émission est consacrée au voyage de l'auteur en Iran et à sa relation de travail avec le cinéaste Abbas Kiarostami.</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
***</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: center;">
<b>Troisième émission</b> : <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/cultures-dislam/limage-et-la-lettre-les-arts-de-lislam-au-louvre" target="_blank">L'image et la lettre (Les arts de l'Islam au Louvre)</a> (23 novembre 2012)</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Élevée en Algérie comme une chrétienne dans une famille de culture hébraïque, Marie-José Mondzain confie avoir grandi au carrefour de plusieurs civilisations au début de cet entretien. Son père destiné au rabbinat ayant été l’objet d’une malédiction de la part de sa communauté pour avoir choisi de devenir peintre, a sans doute guidé sa réflexion d’une vie : <i>Je suis allée vers les images pour régler quelque chose avec cette filiation.</i> (7’18’’) <o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
Dans la mesure où l'émission est un compte-rendu d’une visite de l’ouverture des salles du département des Arts de l’Islam au musée du Louvre, je propose de recenser ci-après les thèmes successivement discutés. Entres autres, la crise iconoclaste dans le bassin méditerranéen ; la calligraphie en tant que mélange de figuration (plaisir des yeux)<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>et géométrie de l’esprit (<i>Épîtres des Frères de la pureté</i>) ; la religion du livre vis-à-vis de la religion de l’image ; la notion d’<i>historia</i> (récit à la fois fictionnel et historique) chez les byzantins ; la représentation de la chasse, exercice guerrier et de culturation ; les présences chrétienne et juive dans l’esthétique islamique (tension lettre/figuration) ; l'aménagement des espaces d'exposition au sein du musée.<br />
<br />
Les oeuvres qui suivent ont également été l'objet de commentaires de la part d'Abdelwahab Meddeb et Marie-José Mondzain :<o:p></o:p></div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhonePpiFpIR-owvyTIQZ9X9ACOL70ovfoQAb-mdqS0hpe3slxM10JwqbU7HloK1IZorrOmXjT4h41WiULndBSfwpgsrsJZPUV2_mduuan-K9vSXwWJKuXOSiLNZ7yRj_N-Z8hyphenhyphenddQDWSbw/s1600/pyxide.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="556" data-original-width="855" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhonePpiFpIR-owvyTIQZ9X9ACOL70ovfoQAb-mdqS0hpe3slxM10JwqbU7HloK1IZorrOmXjT4h41WiULndBSfwpgsrsJZPUV2_mduuan-K9vSXwWJKuXOSiLNZ7yRj_N-Z8hyphenhyphenddQDWSbw/s1600/pyxide.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><a href="http://www.louvre.fr/oeuvre-notices/pyxide-d-al-mughira" target="_blank">Pyxide d'al-Mughira</a> (hauteur : 16 cm) , 968, Ivoire sculpté, trace de jais, Musée du Louvre (© Hughes Dubois)</td></tr>
</tbody></table>
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjacIkKGIoEsH7ceBUiL7VZ65Di89zOwMkOc-V5k3AIBQeVgUmEaCiaHhWXKy0yk4VhYOIT5quazCFKXVnRhj4EJEkJaGVXQOpiquhcMmel9l4eBaAyVtsuL7efh2wqTKPyS9fAYMp-E3i7/s1600/baptiste%25CC%2580re.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="281" data-original-width="855" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjacIkKGIoEsH7ceBUiL7VZ65Di89zOwMkOc-V5k3AIBQeVgUmEaCiaHhWXKy0yk4VhYOIT5quazCFKXVnRhj4EJEkJaGVXQOpiquhcMmel9l4eBaAyVtsuL7efh2wqTKPyS9fAYMp-E3i7/s1600/baptiste%25CC%2580re.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><a href="http://www.louvre.fr/oeuvre-notices/bassin-dit-baptistere-de-saint-louis" target="_blank">Bassin dit « baptistère de Saint Louis »</a>, vers 1320-1340, laiton martelé, décor incrusté d’or, d’argent et de pâte noire, Musée du Louvre (© Hughes Dubois)</td></tr>
</tbody></table>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFogbKeGjD2ToyS7BYG3DzvbxyRNxhKauQAQ5jCmbH4ReWhYcZovboBtBhZonQJmt7KmwPqsUFtUy8oQqJzbIc5ZIfUW4mAROXmwFmTtcBlIV6uvKS4ZxnhFb6rPOdGANt86NkTTXazBTL/s1600/aiguie%25CC%2580re.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" data-original-height="428" data-original-width="855" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFogbKeGjD2ToyS7BYG3DzvbxyRNxhKauQAQ5jCmbH4ReWhYcZovboBtBhZonQJmt7KmwPqsUFtUy8oQqJzbIc5ZIfUW4mAROXmwFmTtcBlIV6uvKS4ZxnhFb6rPOdGANt86NkTTXazBTL/s1600/aiguie%25CC%2580re.jpg" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><a href="http://www.louvre.fr/oeuvre-notices/aiguiere-decor-d-oiseaux-affrontes-inscription-coufique" target="_blank">Aiguière à décor d'oiseaux affrontés ; inscription coufique</a> (provient du trésor de l'abbaye de Saint-Denis), Cristal de roche (fin Xe), Musée du Louvre (© Peter Willi)</td></tr>
</tbody></table>
<br /></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
</div>
<div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">
<br /></div>
<!--EndFragment-->Les nuits et les jours de France Culturehttp://www.blogger.com/profile/12419757408220944624noreply@blogger.com0